Le 61e Régiment d'Infanterie de Ligne
1789-1815
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Avertissement et remerciements : L'idée de cet historique nous a été suggérée par M. Vincent Bouché que nous saluons ici. Il aura pour base l'Historique du Régiment, publié par le Capitaine Espérandieu, en 1897; nous le complèterons au fur et à mesure de nos lectures et de nos découvertes.
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/ Introduction : les Régiments qui ont porté le numéro 61 avant le 2e amalgame
Différents Corps de troupe de l'infanterie française ont successivement porté le numéro 61.
- Le Régiment de Vermandois
Le Régiment de Vermandois, ainsi nommé en l'honneur du Comte de Vermandois, fils de Louis XIV et de Mademoiselle de la Vallière, est créé par Colbert, le 24 décembre 1669, pour servir à bord des vaisseaux. Le Capitaine Louis de Josseaud, du Régiment d'Auvergne, a pour mission de l'organiser à Toulon avec douze Compagnies tirées des vieux Corps et huit Compagnies de nouvelle levée. Comme le Comte de Vermandois, alors âgé de trois ans, est aussi Amiral de France, c'est-à-dire chef nominal de la Marine française, le Régiment de Vermandois doit à cette particularité d'être connu pendant quelque temps sous le nom de l'Admiral. Le Comte de Gacé en est le premier Colonel (Charles de Guyon de Matignon, Comte de Gacé, nommé Colonel de Vermandois, le 24 décembre 1669; il est tué à la bataille de Senef).
Le Capitaine Louis de Josseaud ne reste au Régiment de l'Amiral que jusqu'au mois de mars 1670. Il reprend, à cette date, le commandement de sa Compagnie.
- Expédition des Canaries
Une expédition conduite par Duquesne, et sur laquelle on n'a que peu de détails, est dirigée, en 1670, contre les pirates de la Côte occidentale d'Afrique. Le Régiment de l'Amiral, qui en fait partie, assiste au bombardement de Salé et débarque aux îles Canaries.
Au mois de mars 1661, le Régiment de l'Amiral passe au service de l'armée de terre et prend définitivement le nom de Vermandois. On le met en garnison à Amiens.
- Guerre de Hollande, 1672-1769.
Louis XIV n'aime pas la Hollande, autant parce qu'elle est calviniste et républicaine, que parce qu'elle accapare le commerce maritime. Il lui reproche aussi sa fierté. En 1672, la France et l'Angleterre font une alliance et se mettent en mesure d'envahir les Pays-Bas. Le Régiment de Vermandois quitte sa garnison et se rend à Charleroi, au mois d'avril, pour entrer dans la composition d'une armée dite de Flandre. La Belgique dépenda de l'Espagne, avec qui le Roi de France a fait la paix en 1668. En traversant les états belges, Louis XIV court le risque de rallumer des hostilités qui ne sont que mal éteintes. Il les évite momentanément en suivant le cours de la Meuse et passant par les Evêchés de Cologne et de Munster, qui sont favorables à la France.
- Prise d'Orsoy. Le 24 mai, l'armée française est èonduite au siège d'Orsoy. La place, bien défendue, résiste courageusement et ne capitule qu'après avoir repoussé qustre assauts. Louis XIV s'empare ensuite de Rheinberg, dont le Gouverneur a fui honteusement, et franchit le Rhin, d'abord au point où le fleuve se divise en plusieurs bras dont le principal est le Wahal, ensuite aux environs de Tolhuys. Vaincus presque sans combat, les Hollandais demandent la paix. Louis XIV y met de telles conditions qu'aucune entente n'est possible. Une révolution éclate à la Haye, et le parti de la guerre, après avoir massacré le premier magistrat du pays, Jean de Witt, prend pour chef Guillaume de Nassau, Prince d'Orange. En Hollande, certaines terres sont au dessous du niveau de la mer. Le Prince d'Orange ordonne de crever les digues qui retiennent les eaux et fait ouvrir les écluses d'Amsterdam. Les Français sont obligés de reculer devant l'inondation.
- Campagne de 1673, Prise d'Unna. - En même temps qu'il arrête ainsi Louis XIV, le Prince d'Orange fomente contre lui une coalition à laquelle participent l'Empereur d'Allemagne, le Roi d'Espagne et l'Electeur de Brandebourg. Ce dernier Prince ayant dévoilé ses intentions un peu trop prématurément, le Régiment de Vermandois destiné, sous les ordres du Maréchal de Turenne, à marcher contre lui, passe le Rhin à Wesel, le 4 février 1673, et arrive le 6 devant Unna. Cette place capitule après un siège de deux jours et l'Electeur de Brandebourg se réfugie derrière le Weser, où l'on ne songe pas à le poursuivre. L'armée du Maréchal doit s'établir en quartiers d'hiver dans le comté de la Marck. Mais l'Electeur de Brandebourg étant revenu sur ses pas, elle l'attaque de nouveau et le repousse jusqu'aux limites extrêmes de la Westphalie. "Cette expédition, faite par Turenne, avec la moitié moins de monde que l'Electeur de Brandebourg, fut regardée, avec raison, comme une des plus hardies et des plus belles manoeuvres qui se fut faite à la guerre" (De Quincy; Hist. milit. du règne de Louis XIV, t. 1, p. 348).
- Prise de Maëstricht. - Jusqu'au mois de juin, le Régiment de Vermandois se repose près de Kempen. Puis il quitte cette ville, à la suite de Louis XIV, et participe à l'investissement de Maëstricht. On l'emploie à une fausse attaque, du côté de Wyck, sous les ordres du frère du Roi. La place capitule au bout de treize jours.
- Premières opérations contre Montecuculli. - Dès le mois d'août, l'Empereur d'Allemagne déclare la guerre à la France et fait secourir les Hollandais par une armée que commande le célèbre Général de Montecuculli. Turenne, qui lui est opposé, et a sous ses ordres le Régiment de Vermandois, passe le Rhin à Seligenstadt et s'empare du pont d'Aschaffenbourg. Monteéuculli l'évite à la faveur des monts de Franconie et marche sur Bonn en dévastant sur sa route les états de l'Evêque de Wurzbourg, resté fidèle à Louis XIV. Turenne, ne pouvant le poursuivre faute de vivres, repasse le Rhin à Philipsbourg et campe dans la vallée de Neustadt. Divers combats gagnés par l'Amiral Ruyter sur les flottes combinées de France et d'Angleterre, encouragent les Hollandais, qui prennent l'offensive. Le Roi d'Espagne déclare la Guerre à Louis XIV, l'Angleterre entame des négociations qui aboutissent à un traité de paix. La France reste ainsi à peu près seule pour faire face à une plus forte coalition.
- Défense de Bonn. - La ville de Bonn est la résidence de l'Evêque de Cologne, allié de Louis XIV. Turenne en fait renforcer la garnison par deux Régiments, dont celui de Vermandois. L'investissement de cette place commence le 25 octobre, à l'arrivée de Montecuculli, et se continue plus étroitement par l'entrée en ligne du Prince d'Orange et des Espagnols. Jusqu'au l2 novembre, les Français résistent à leurs ennemis, et les soldats de Vermandois font des prodiges de valeur. La garnison ne capitule qu'après avoir épuisé tous ses moyens de défense. Elle sort de la place avec les honneurs de la guerre et se retire librement à Nuytz. Un peu moins de 1.500 hommes ont tenu pendant dix-neuf jours contre 35.000 alliés.
- Campagne de 1674. A l'instigation de la Suède, des négociations sont ouvertes à Cologne pour terminer les hostilités. Un attentat commis le 14 février 1674 sur la personne du Prince de Furstemberg, allié de la France, force Louis XIV à rappeler ses ambassadeurs.
- Bataille de Senef. - Le Régiment de Vermandois entre dans la composition d'une armée qui passe ensuite sous les ordres du Prince de Condé pour combattre le Prince d'Orange dans les Pays-Bas. Le projet des alliés est d'envahir la France par Charleroi. Le ll août, Condé atteint son adversaire et lui livre la sanglante bataille de Senef. "Les ennemis occupaient le village du Fay, qui avait une bonne église et un château entouré d'une forte haie. Il y avait un marais d'un côté et un bois de l'autre, dans lequel le prince d'Orange mit plusieurs bataillons, soutenus par toute la cavalerie allemande qui était venue à son secours. Le duc de Luxembourg fut chargé de les attaquer du côté du bois, pendant que le prince de Condé les fit attaquer de l'autre par les Gardes françaises et suisses, soutenues d'autres régiments (parmi lesquels celui de Vermandois). Ce fut en cet endroit qu'il y eut un combat sanglant que la nuit ne put finir. Il continua deux heures au clair de lune et dura cinq heures sans qu'on pût dire que l'un des partis eût avantage sur l'autre. L'obscurité qui survint le fit cesser; chacun resta de son côté dans le poste où il se trouva.
II y avait deux heures qu'on se reposait dans les deux camps et que les soldats, accablés de lassitude et pour la plupart couverts de blessures et de sang, tâchaient de reprendre des forces pour recommencer à combattre dès que le jour paraîtrait, lorsque tout à coup les deux armées firent, comme
de concert, une décharge si subite et tellement de suite, qu'elle ressemblait plutôt à une salve qu'à une décharge de troupes qui combattent.
On était si près les uns des autres, que quantité de soldats des deux armées en furent tués ou blessés. Et comme tous les périls paraissent plus affreux dans l'horreur de la nuit, l'épouvante fut si grande, que les deux armées se retirèrent avec précipitation, en même temps. Mais chacun s'apercevant qu'il n'était pas poursuivi, on s'arrêta tout court, et le prince de Condé, s'étant remis à la tête de son armée, la fit retourner sur le champ de bataille où il passa le reste de la nuit. Le prince d'Orange l'abandonna, ce qui fut une des preuves que le prince de Condé remporta une victoire que le prince d'Orange s'efforça de s'attribuer mal à propos" (De Quincy, Hist. milit., t. 1, p. 384).
Dans cette journée, le Colonel de Gacé est mortellement frappé en donnant l'exemple d'une bravoure à toute épreuve. Son frère, le Comte de Gacé, le remplace au mois de novembre à la tête du Régiment (Charles-Auguste de Goyon de Matignon, Comte de Gacé, Lieutenant général en 1689 et Maréchal en 1708).
La bataille de Senef accentue la mésintelligence qui s'est mise depuis quelque temps parmi les alliés. Le Prince de Condé en profite pour faire lever le siège d'Audenarde (23 septembre).
- Campagne de 1675, Combat de Mulhouse. - Le Prince d'Orange ayant pris ses quartiers d'hiver, le 1er Bataillon du Régiment de Vermandois fait partie d'un renfort de 14.000 hommes qui est envoyé à l'armée d'Alsace. Après avoir franchi le Rhin et porté la guerre au coeur même de l'Allemagne, Turenne a dû se replier, par le col de Saverne, devant une armée double de la sienne. Au milieu de décembre 1674, et dès qu'il a reçu le renfort qu'on lui destine, le valeureux Maréchal reprend l'offensive. Il longe toute la chaîne des Vosges, au lieu de la traverser, et malgré les neiges qui obstruent les routes, arrive en vingt-deux jours sous les murs de Belfort. Les coalisés, se croyant débarrassés de leur redoutable adversaire, prennent leurs quartiers d'hiver dans les villages d'Alsace. Turenne les surprend dans leurs cantonnements et les bat à Mulhouse, où son infanterie n'intervient que pour faire des prisonniers.
- Bataille de Turkheim. - Le 5 janvier 1675, l'armée française se trouve en présence des Impériaux rangés en bataille autour de Colmar et de Turkheim, entre l'Ill et les deux rivières de la Fecht et de Colmar. L'attaque commence vers le soir et est menée avec une extrême vigueur, surtout à la sortie du vallon de Turkheim. Les Impériaux sont entièrement battus et rejetés sous les murs de Schlestadt. Ils repassent le Rhin cinq jours après. L'Alsace est délivrée, et cette campagne aussi brillante que rapide, porte la gloire de Turenne à son apogée.
Le 1er Bataillon de Vermandois prend ses quartiers d'hiver en Lorraine. Le 2e Bataillon, resté à l'armée de Flandre, est réparti entre Dreux, Verneuil, Charleroi et Audenarde. Au mois de mai 1675, l'armée de Flandre se réunit dans les environs de Tournai.
- Prises de Dinant, de Huy et de Limbourg. - Le 1er Bataillon de Vermandois, rassemblé à Philippeville, est conduit au siège de Dinant par le Maréchal de Créqui. La ville est attaquée le 22 et enlevée le 24. Le château, mieux situé et plus solidement défendu, ne capitule que le 29. Le 2e Bataillon participe de son côté au siège de Huy, puis à celui de Limbourg sous les ordres du Prince de Condé. Cette dernière place est enlevée de vive force dans la nuit du 20 au 21 juin. Après la prise de Dinant, le Maréchal de Créqui retourne sur la Moselle, vers Melling. Lorsque Turenne est tué à Salzbach (22 juillet), le Roi fait renforcer l'armée de Moselle par un détachement tiré de Flandre. Le 2e Bataillon de Vermandois est désigné pour en faire partie.
- Bataille du pont de Konz. - Les Ducs de Lorraine et de Lunebourg, après avoir franchi le Rhin à Coblentz, mettent le siège devant Trêves. Le Maréchal de Créqui marche à leur rencontre et se fait battre le 11 août, au pont de Konz (cette rencontre a été improprement appelée bataille de Consar brück. Il n'y a aucune localité de ce nom autour de Trêves). L'honneur des armes n'est sauvé que par l'héroïsme des soldats de la Couronne et de Vermandois qui se font tuer plutôt que de se rendre. Le Comte de Gacé est blessé et fait prisonnier. Les débris de l'armée de Créqui parviennent, à la faveur des bois, à gagner Thionville et Metz. Le Maréchal se jette dans Trêves avec une escorte de cinq cavaliers.
- Campagne de 1676, prise de Condé et de Bouchain - Le Régiment de Vermandois se reconstitue en Normandie et se rassemble à Philippeville et au Quesnoy dans le courant de janvier 1676. Au mois d'avril, vingt Compagnies (un Bataillon) tirées du Quesnoy sont employées à l'armée de Flandre. Elles participent aux sièges de Condé et de Bouchain, qui se terminent par une capitulation. Dans la soirée du 10 mai, sous les murs de Bouchain, la Brigade d'Aubijoux (Douglas; Orléans et Vermandois) échoue en donnant l'assaut du corps de place. Le lendemain, elle recommence son attaque sous les ordres de Monsieur, frère du Roi, et parvient à franchir le fossé, ce qui amène la reddition de la ville.
- Prise d'Aire - Le Bataillon de Vermandois qui tient la campagne se rend, avec l'armée du Roi, au camp d'Heurtebize. On l'en détache au mois de juillet pour l'envoyer au siège d'Aire. Le 22, le fort Saint-François est emporté l'épée à 1a main par les soldats de Vermandois; le 23, la tranchée est ouverte et le 31, la place capitule après avoir subi plusieurs assauts.
- Levée du Siège de Maëstricht - La garnison française de Maëstricht a été investie, le 7 juillet, par le Prince d'Orange et les Espagnols. Le Comte de Schomberg, qui leur est opposé, marche contre eux, avec l'appui de quelques Bataillons, dont celui de Vermandois, et les met en déroute après un violent combat. 11 se retirent vers Diepenbeek en abandonnant tous leurs canons. L'armée de secours entre dans Maëstricht le 27 août à 9 heures du matin, aux applaudissements de la garnison qui déjà manquait de vivres.
- Combat de Noiremont - La levée du siège de Maëstricht, due à l'audace des Français, cause en Hollande une véritable stupeur. Les Espagnols et les Hollandais se replient sur Wavre et Louvain, serrés de près par le Maréchal de Schomberg, qui les atteint et leur livre un sanglant combat d'arrière-garde dans le voisinage de Noiremont. Mais il eut été dangereux, pour les Français, de poursuivre plus longtemps leurs ennemis dans leur mouvement de retraite. Le Maréchal de Schomberg recule du côté de Gotève et, finalement, rentre à Maëstricht, d'où le Bataillon de Vermandois est dirigé sur Douai.
Le 11 novembre, les différents Corps prennent leurs quartiers d'hiver. Le Régiment de Vermandois est envoyé pour se refaire à Bourges, La Flèche et Saumur.
- Campagne de 1677, Prise de Fribourg - Pendant l'année 1677, le Régiment de Vermandois sert à l'armée d'Alsace, sous les ordres du Maréchal de Créqui. Il opère d'abord sur la Nied allemande, puis sur la Seille et participe aux opérations qui ont pour but d'empêcher le Duc de Lorraine de faire sa jonction avec un Corps d'Impériaux, qui a passé le Rhin pour envahir l'Alsace. Il assiste au combat de Kockersberg, livré le 7 septembre et au siège de Fribourg, qui se termine, le 16 octobre, par la capitulation de cette ville. On lui fait prendre ses quartiers d'hiver dans les places du Nord (17 Compagnies à Guise).
- Campagne de 1678. Le Parlement d'Angleterre se prononce contre la France et fournit à la Hollande un secours de 30.000 hommes. Louis XIV veut épouvanter ses ennemis par la rapiàité de ses conquêtes.
- Prise de Gand - Le Duc de Villahermosa, qui commande les Espagnols dans les Pays-Bas, est surpris par l'arrivée soudaine des Français. Les efforts qu'il fait pour porter secours à quelques villes assiégées dégarnissent la place de Gand, devant laquelle le Maréchal d'Huinières arrive le 3 mars. Le Régiment de Vermandois est sous ses ordres. La tranchée est ouverte, dans la nuit du 5 au 6, sous les yeux mêmes de Louis XIV. Le 12, la ville capitule après un bombardement de deux jours. Cette opération, qui ne coûte aux Français qu'une cinquantaine d'hommes mis hors de combat, est d'autant plus brillante, que la place de Gand est une des plus importantes des Pays-Bas.
- Prise d'Ypres - Pendant que le Maréchal d'Humières reste à Gand, Louis XIV fait procéder au siège d'Ypres. Le Régiment de Vermandois y est employé du côté de la citadelle. Des pluies abondantes rendent le terrain si mauvais, que les troupes ont de l'eau jusqu'au genou. Dans la nuit du 19 au 20 mars, les assiégés font une sortie qui est repoussée. Le 24, le chemin couvert est emporté à la suite d'un combat très meurtrier. Et enfin, le 25, la place capitule après un bombardement de quatre jours. Les succès de l'armée de Flandre, complétés par les victoires navales de Duquesne, conduisent les Hollandais à faire des propositions de paix qui sont accueillies. Par le traité de Nimègue, les Etats de Hollande se retirent de la coalition, le 10 août.
- Bataille de l'abbaye de Saint-Denis - Le 14, l'armée française, se rendant au siège de Mons, est attaquée, près de l'abbaye de Saint-Denis, par l'armée du Prince d'Orange. Le combat est opiniâtre et la victoire disputée. Plus de 4.000 hommes sont tués de chaque côté. Le Maréchal de Luxembourg, qui commande les Français, outré de ce qu'il considère comme une trahison, reprend la campagne contre les Hollandais, mais un ordre de Louis XIV interrompt les hostilités.
- Campagne de 1679. Le traité de Nimègue est accepté le 17 septembre 1678 par l'Espagne. Le 5 février 1679, l'Empire et les princes allemands y adhèrent aussi A l'exception de l'Electeur de Brandebourg.
- Prise de Minden - Pour forcer ce dernier Prince: à déposer les armes, le Maréchal de Créqui se porte sur le Weser et s'empare de Minden (30 juin). Le Régiment de Vermandois se distingue dans cette expédition, qui termine la guerre.
- Annexion de Strasbourg - La paix de Nimègue laisse à Louis XIV ses conquêtes de Flandre et la Franche Comté dont il s'est emparé sur les Espagnols. Les chambres de réunion, instituées pour rechercher les dépendances des pays qui ont été cédés, donnent à la France Strasbourg, restée ville libre au milieu de l'Alsace devenue terre françlise (1681).
- Siège de Luxembourg (1684)
Le 26 octobre 1683, le Roi d'Espagne reprend les armes sur l'instigation du Prince d'Orange, qui le fait soutenir secrètement. Le Régiment de Vermandois, avec le Maréchal de Créqui, est conduit au siège de Luxembourg, où il arrive le 29 avril 1684. La tranchée est ouverte dans la nuit du 8 au 9 mai et le 19 on commence à charger les mines. Une redoute que les ennemis tiennent encore s'éboule par devant et est abandonnée. Les assiégés font une vigoureuse sortie qui est repoussée par les Régiments de Bourbonnais, d'Humières, de la Couronne et de Vermandois. "M. le comte de Gacé, du régiment de Vermandois, fit paraitre une grande valeur et eut 20 grenadiers de tués ou blessés" (De Quincy, Hist. mil., t. II, p. 66). Enfin, le 28, l'assaut est donné au corps de place. La lutte terrible qui en résulte a été considérée par un historien du temps comme l'action la plus mémorable du règne de Louis XIV.
Les Espagnols conservent encore pendant neuf jours les remparts confiés à leur garde et sortent de la ville en emmenant tous leurs bagages. De leur propre aveu, ils ont tiré sur leurs ennemis 50.000 coups de canon et 7.500 bombes. Le Régiment de Vermandois compte une vingtaine de morts et de très nombreux blessés, parmi lesquels huit Officiers, dont le Colonel et les Capitaines de la Touche, de Savigny et de la Faitière. Après la prise de Luxembourg, l'Espagne finit par consentir à une trève de vingt ans, qui est signée à Ratisbonne le l5 août. Le Régiment de Vermandois est ramené en France.
- Période de paix - Dans le courant des années 1685 et 1686, 1e Régiment de Vermandois, réduit à un seul Bataillon, est employé au creusement du canal de dérivation qui doit conduire à Versailles les eaux de l'Eure. Il a beaucoup à souffrir de la maladie. A la fin de 1687, la baïonnette à douille est mise en service et le nombre des fusils de chaque Compagnie est porté de 4 à 6. L'armement du Bataillon se compose de 390 mousquets, 132 fusils et 150 piques. Les Officiers et les Sous-officiers sont armés du fusil.
- Guerre de la Ligue d'Augsbourg (1683-1697)
- Causes de la guerre - La révocation de l'Edit de Nantes (1685) attire à Louis XIV l'inimitié des états protestants. Son ambition et aussi des conquêtes qu'il a faites en pleine paix, le rendent dangereux pour les états catholiques. Une ligue se forme contre lui A Augsbourg, en 1686, entre l'Empereur Léopold, la Hollande et la Suède.
- Campagnes de 1688 et de 1689, prise de Philipsbourg - Louis XIV, dont la puissance est alors à son apogée, fait envahir l'Allemagne, en 1688, et mettre le siège devant Philipsbourg. Le Régiment de Vermandois, sous les ordres du marquis d'Uxelles, participe à cette opération. "Le marquis se servit si bien des troupes qu'il commandait qu'il emporta le fort du Rhin au bout de deux jours, l'épée à la main. Les ennemis, après une faible résistance, se sauvèrent dans des bateaux du cOté de la ville, parce que leur pont était rompu" (De Quincy, Hist. milit., t. II, p. 124). Le corps de place capitule le 30 octobre, après dix-neuf jours de tranchée ouverte.
- Prises de Mannheim et de Frankenthal - Vermandois est encore employé aux sièges de Mannheim et de Frankenthal. Puis, on le met en garnison dans les places d'Alsace où il reste pendant toute l'année 1689, tandis que les armées du Roi combattent en Flandre et en Allemagne, et que se déroulent les événements politiques qui conduisent le Prince d'Orange sur le trône d'Angleterre en remplacement de Jacques II.
- Campagne de 1690, Bataille de Fleurus - En 1690, les troupes du Roi, conduites par le Maréchal de Luxembourg, envahissent la Belgique. Le Régiment de Vermandois, rappelé d'Alsace, assiste à la bataille de Fleurus (1er juillet) contre le Prince de Waldeck et 40.000 hommes des troupes d'Angleterre, d'Espagne, de Brandebourg et de Hollande. L'action commencée de bonne heure, ne se termine qu'à la nuit. La Brigade de Navarre (Vermandois) a à combattre une ligne d'infanterie renforcée de huit ou dix Escadrons et de nombreuses pièces d'artillerie. Cette ligne est de plus abritée derrière des haies. Elle compte dans ses rangs un Régiment Suédois au service de la Hollande, qui n'a pas encore été battu, dit-on. L'infanterie française se porte en avant avec une impétuosité devant laquelle rien ne résiste. "On vit dans cet instant une confusion terrible de combattants mêlés les uns avec les autres, et le combat fut très sanglant. Il devait l'être davantage, mais la nation française plus portée à combattre pour la gloire que pour le carnage, donna la viè à des bataillons entiers" (De Quincy, Hist. milit., t. II, p. 258). La bataille de Fleurus coûte au Régiment de sérieuses pertes. Son Colonel, le Marquis de Soyecourt, qui a remplacé le Colonel de Gacé, nommé Lieutenant général, est tué à la tête de sa troupe (De Seiglière de Belleferrière, Marquis de Soyecourt, a été nommé Colonel de Vermandois le 29 mars 1689). Le Lieutenant-colonel de la Ferrière, quatre Capitaines et neuf Lieutenants sont blessés.
- Quartiers d'hiver - L'armée du Maréchal de Luxembourg manoeuvre pendant quelque temps contre le Prince de Waldeck et prend ses quartiers d'hiver entre Roulers et Dixmude. Le Régiment de Vermandois se rend à Courtrai (17 octobre).
- Campagne de 1691, siège de Mons - Pendant que les Princes alliés se concertent à La Haye, Louis XIV recommence la lutte et fait investir la place de Mons. Le Régiment de Vermandois, sous les ordres du Marquis de joyeuse, entre dans les lignes, depuis la digue de la Trouille jusqu'à Nimy. Le 21 mars, la tranchée est ouverte sous la direction du Roi lui-même, que seconde le Maréchal de Vauban. "Le soir du 29, la tranchée fut montée, à l'attaque des gardes, par M. le duc de Vendôme, lieutenant-général, avec un bataillon de Vermandois et un de Toulouse. On continua pendant la nuit à embrasser l'ouvrage à corne et à se bien établir dans les logements. Au bord et au long du fossé, un sergent du régiment de Vermandois, qui avait monté la garde cette nuit-là, passa de bonne volonté le fossé de l'ouvrage à corne pour le sonder. Il eut de l'eau jusqu'au menton ; il observa la contre-garde et les ouvrages les plus avancés, et trouva le terrain fort bon. Quelques-uns ayant eu de la peine à le croire, il y retourna et rapporta une palissade de cet ouvrage, que notre canon avait rompue. M. le prince de Conti voulut lui donner cent pistoles ; il les refusa en disant qu'il était gentilhomme et qu'il ne s'exposait que pour la gloire. Sa Majesté l'ayant su, lui promit d'avoir soin de lui et lui donna une lieutenance de grenadiers" (De Quincy, Hist. mil., t. II, p. 355). Dans la nuit du 6 au 7 avril, la garde de tranchée est relevée par deux Bataillons des Vaisseaux et un de Vermandois. Le Lieutenant-colonel de la Ferrière et trois soldats du Régiment sont blessés. Le 9, la garnison capitule sous les yeux mêmes du Roi d'Angleterre, Guillaume III (le Prince d'Orange), qui s'éloigne avec son armée. Le Régiment de Vermandois rejoint l'armée de Moselle et termine la campagne, avec le Maréchal de Boufflers, contre l'Electeur de Brandebourg. Il prend ses quartiers d'hiver à Courtrai.
- Campagne de 1692. En 1691, Louis XIV a fait de grands armements de mer, qui ne produisent rien de bien considérable, parce que les flottes combinées d'Angleterre et de Hollande s'appliquent à éviter les combats que Tourville cherche à leur livrer. Louvois est mort, et son fils, le Marquis de Barbézieux, l'a bien remplacé à la tête de l'armée, mais n'a pas hérité de son talent. Le 21 mai 1692, l'armée de Flandre, solidement constituée sous les ordres du Maréchal de Luxembourg, est passée en revue par le Roi dans la plaine des Estines, près de Namur. Le Régiment de Vermandois se déplace autour de cette dernière ville pour en couvrir le siège, qui a été considéré comme le chef-d'oeuvre de Vauban. Guillaume III tient la campagne avec une armée de 100.000 hommes. Après la capitulation de Namur (30 juin), le Roi retourne à Versailles et l'armée de Flandre est réduite. Le Maréchal de Luxembourg ne manoeuvre plus, dès ce moment, que pour éviter son adversaire.
- Bataille de Steinkerque - Au commencement du mois d'août, le Maréchal est cependant conduit à livrer bataille dans des conditions toutes particulières. L'armée française est alors campée entre Steinkerque et Enghien, en face de l'armée de Guillaume III, dont elle n'est séparée que par un terrain boisé et coupé de nombreux défilés. "Le maréchal de Luxembourg se servait pour avoir des nou:velles des ennemis d'un musicien de l'Electeur de Bavière qui l'avertissait de leurs mouvements. Il fut reconnu et arrêté dans ce temps-là. Le prince d'Orange voulant se servir de cette occasion, lui fit écrire une lettre à M. de Luxembourg, par laquelle il lui marquait qu'il ne devait point être surpris s'il voyait un gros corps de troupe qui devait marcher le 3 ; que ce n'était qu'un détachement de l'armée ennemie, destiné uniquement à couvrir un grand fourrage. Cette lettre fut rendue à M. de Luxembourg par la même voie dont ce musicien se servait ordinairement,et comme jusque-là il avait toujours accusé juste, on ne balança pas à le croire" (De Quincy. Hist. milit., t. II, p. 527). Le 3 avril, en effet, les reconnaissances françaises signalent, de très grand matin, l'ennemi à la sortie des défilés. Le Maréchal du Luxembourg croit au fourrage annoncé et ne prend aucune disposition. Il ne se rend un compte exact de la situation que lorsque la bataille est engagée, mais la promptitude de sa détermination le préserve d'un désastre. Ses troupes courent aux armes, arrêtent les alliés qui se croient déjà sûrs de la victoire et finalement les repoussent du champ de bataille. Après la journee de Steinkerque, Guillaume III et le maréchal de Luxembourg, dont les armées ont eu fort à souffrir, ne restent que huit jours en présence et rentrent dans leurs quartiers. Le Régiment de Vermandois est envoyé à Autrage, près d'Ath.
- Campagne de 1693. L'armée de Flandre, commandée par le Maréchal de Luxembourg, fait une tentative infructueuse contre la place de Liège, et se met ensuite dans une excellente position entre Tirlemont et Jodoigne (15 juin).
- Bataille de Neerwinden - L'armée de Guillaume III est solidement établie à l'est de la Petite Gette, entre les villages de Lixen et de Neerwinden. Le Maréchal de Luxembourg feint de vouloir attaquer Huy, au confluent de la Méhaigne et de la Meuse, et attire de ce côté une partie des forces de son adversaire. Puis, il tourne brusquement au nord, et, après une marche forcée de sept lieues, se retrouve, le 28 juillet, en face de Guillaume III. Le lendemain, de très bonne heure, une sanglante bataille commence. Vermandois (deux Bataillons) tient la tête de la seconde ligne d'infanterie. Tous les efforts du Maréchal de Luxembourg se portent contre le village de Neerwinden, qui est enlevé, perdu, repris et reperdu (ce sont ces attaques successives qui arrachent à Guillaume III ce cri d'admiration et de colère : "Oh ! l'insolente nation !"). "M. de Luxembourg fit àlors avancer la brigade des gardes et celle de Vermandois, commandée par M. de Charost, et fit tout de nouveau, par ces brigades, rattaquer le village qu'elles emportèrent de vigueur et s'y maintinrent, malgré deux attaques formidables que leur firent les ennemis" (Archives historiques, registre n°1206, pièce n°214 - Relation attribuée à M. d'Artagnan). Les soldats de Vermandois, qui n'ont plus de cartouches, se battent à la baïonnette et restent inébranlables sous les furieux assauts qui leur sont livrés (ce combat à la baïonnette est le premier dont l'histoire a gardé le souvenir). Guillaumé III, désespéré, abandonne le champ de bataille où 18.000 des siens ont trouvé la mort, et se retire autour de Diest et de Tirlemont. Le Maréchal de Luxembourg ne le poursuit pas "afin de ne pas faire tuer bien des gens pour un profit qui aurait été médiocre". On ne sait exactement quelles furent les pertes subies par le Régiment de Vermandois; mais les Gardes, auprès desquelles il combattit, et dont il partagea le courage, laissèrent sur le terrain les trois quarts de leur effectif.
- Prise de Charleroi - Le siège de Charleroi est résolu après la bataille de Neerwinden. La place est investie le 10 septembre et capitule après vingt-sept jours de tranchée. Dans la nuit du 25 au 26, le Duc de Charost, qui a été nommé Colonel de Vermandois en 1690, en remplacement du Marquis de Soyecourt, est blessé à la tête en repoussant une sortie (Armand de Bethune, Marquis de Charost, appartient à la famille du Cardinal de Richelieu). A la fin du mois d'octobre, les troupes de Flandre sont envoyées dans leurs quartiers entre la Sambre et la Meuse. Le Régiment de Vermandois passe l'hiver à Fier-le-Grand.
- Campagne de 1694. Les défaites subies sur d'autres points de la frontière obligent Louis XIV à réduire l'armée de Flandre. Pendant la campagne de 1694, le Maréchal de Luxembourg manoeuvre surtout, comme en 1692, pour éviter son adversaire. Guillaume III, campé autour de Tirlemont, se porte, le 23 juillet, entre la Mehaigne et la Grande Gette. Le Maréchal de Luxembourg se repose à Vignamont.
- Marche de Vignemont au pont d'Espierres - Le 18 août, les ressources du pays étant épuisées, le Roi d'Angleterre se dirige tout à coup vers l'Escaut, dont les passages ne sont pas gardés. le 21, les ennemis vont de Nivelles à Soignies. Le Maréchal de Luxembourg, qui a déjà lancé sa cavalerie en avant et lui a donné rendez-vous au pont d'Espierres, fait partir le Prince de Conti avec les Grenadiers de tous les Corps et le dirige, à marche forcée, sur Tournai. Le Régiment de Vermandois, donnant un bel exemple d'entraînement, suit les Grenadiers, avec son Colonel et ses drapeaux, et arrive sur l'Escaut en même temps qu'eux, après une étape de vingt-quatre heures parcourue par une pluie incessante. Le 27, pendant que Guillaume III franchit l'Escaut à Audenarde, le Maréchal de Luxembourg se retranche solidement entre Menin et Courtrai. Guillaume III déconcerté de se trouver en face de l'armée française, qu'il croyait avoir laissée derrière lui, repasse le fleuve sans combattre et se retire sur la Dyle. Les troupes peu de temps après se dirigent vers leurs quartiers d'hiver.
- Campagne de 1695 - Lorsque s'ouvre la campagne de 1695, la misère intérieure est extrême. La rentrée des impôts ne s'effectue qu'au moyen de colonnes de Dragons. Louis XIV, pour la première fois, se sent humilié dans son orgueil et demande à faire la paix.
- Prise de Dixmude - L'armée de Flandre, sous les ordres du Maréchal de Villeroy, fait le siège de Dixmude, dont le gouverneur capitule à la fin de juillet (le Général danois. qui commande cette place, se rend avec 250 Officiers et 5.000 hommes après avoir perdu seulement 4 tués et 16 blessés. Guillaume III lui fait trancher la tête). Vermandois est en première ligne, au centre de l'armée, avec les Régiments de Bourbonnais et de la Marche.
- Bombardement de Bruxelles - Comme représaille du bombardement, par les Anglais, de plusieurs villes des côtes de la Manche, Louis XIV fait mettre le siège devant Bruxelles, qui reçoit, en une seule nuit, jusqu'à 3.000 bombes et 1.200 boulets rouges. Guillaume III accourt précipitamment et l'armée française se retire. Le Maréchal de Boufflers, assiégé dans Namur, se défend courageusement. Le Maréchal de Villeroy se porte à son secours, mais il arrive trop tard. Le Maréchal de Boufflers, entouré de décombres, et ne sachant plus où loger ses soldats, a dû se rendre, le 1er octobre, après avoir perdu 430 Officiers et 7.500 hommes (seuls 4800 hommes sortent de Namur). Les quartiers d'hiver de l'armée de Flandre sont distribués vers la fin du mois. Le Marquis de Charost, nommé Lieutenant général, est remplacé par le Marquis de Tourouvre à la tête du tégiment de Vermandois (Le Colonel Antoine de la Vove, Marquis de Tourouvre, nommé Brigadier le 2 avril 1703, meurt le 1er janvier 1706).
- Campagnes de 1696 et de 1697. La campagne de 1696 ne donne lieu à aucune opération importante. Pendant que des négociations pour la paix sont conduites à Ryswick, les armées de Flandre, lassées de la guerre, ne se livrent que des escarmouches sans portée.
- Prise d'Ath - Le Maréchal de Catinat, qui a reçu le commandement d'un corps spécial de 40,000 hommes, fait de très grands préparatifs, au cours de l'hiver, pour assiéger la place d'Ath, défendue par le Comte de Roeux. La tranchée est ouverte le 23 mai 1697 et les travaux sont poussés activement. Le 1er juin, la garde de tranchée est prise par M. de
Clérambault avec les deux Bataillons de Vermandois et un Bataillon de Bugey. "Le fossé de la demi-lune fut comblé sur les 5 heures du soir. Un détachement de grenadiers de Vermandois (lre compagnie) passa le pont et monta sur la pointe de la demi-lune dont il chassa ce qui était derrière. Les ennemis se retirèrent dans un corps de garde de briques, crénelé et fossoyé dans ladite demi-lune. L'on travailla diligemment à se loger sous un feu médiocre. Les tranchées et les batteries incommodèrent beaucoup celui des ennemis. M. le Maréchal de Catinat et M. de Vauban visitèrent ce travail à deux heures du matin. La compagnie des grenadiers de Vermandois étant toujours logée, les ennemis firent commencer de la vouloir déposter. Tout le rempart fut garni, et le feu dura une heure et demie, nonobstant celui des bombes, du canon et de la mousqueterie.
Il y a apparence que la bonne contenance de nos grenadiers étonna les gens ordonnés pour les attaquer" (Arch . hist., Flandre, registre n°1410, pièce n°24 - Lettre de M. de Mauroy). Le Capitaine de Savigny, des Grenadiers, est blessé d'un coup de mousquet au travers du corps. Dix à douze Grenadiers sont tués et vingt-six sont blessés (ibid., pièce n°32). Mais la prise de la demi-lune entraîne celle du corps de garde, et le 6, la place capitule.
- Traités de Ryswick - La prise d'Ath marque la fin de la guerre de la ligue d'Augsbourg. Sur les instances du Roi de Suède, la paix est signée, à Ryswick, le 20 septembre avec la Hollande, le lendemain avec l'Espagne et le 30 octobre avec le Roi d'Angleterre et l'Empereur d'Allemagne. Louis XIV, qui a recueilli le Roi détrôné Jacques II et l'a soutenu dans ses revendications, reconnaît Guillaume III comme Roi d'Angleterre. Le Duc de Lorraine est rétabli dans ses Etats. La France conserve Strasbourg, mais elle abandonne toutes ses autres conquêtes et paie aux alliés une contribution de guerre de 49 millions. De pareilles conditions indignent tellement le peuple, que les ambassadeurs qui les ont acceptées n'osent plus se montrer dans Paris. La Cour leur a fait commettre une faute dont ils ont à supporter tout le poids.
- Camp de Compiègne - Après la paix de Ryswick, le Régiment de Vermandois est réduit à 8 Compagnies (un Bataillon). Au mois de septembre 1698, un camp d'instruction est établi à Coudun, près de Compiègne, pour l'instruction militaire du Duc de Bourgogne, petit-fils de Louis XIV. Quelques troupes de choix y sont envoyées, et le Régiment de Vermandois est de ce nombre. Le camp de Compiègne est resté célèbre, autant par la présence de Mme de Maintenon, que par les fêtes somptueuses que Louis XIV y donna. Comme il était alors de règle de ne mettre aucune troupe dans Paris, la proximité d'un spectacle militaire fut une nouveauté dont les Parisiens ne manquèrent pas de profiter. Une comédie du Théâtre-Français : Les Curieux de Compiègne, ajouta, du reste, à la popularité du camp par les couplets gaulois qui la terminaient.
- Guerre de la succesion d'Espagne (1701-1713).
- Causes de la Guerre - Le Eoi d'Espagne, Charles II meurt sans postérité, le ler novembre 1700, en laissant un testament par lequel il lègue son royaume au Duc d'Anjou, petit-fils de Louis XIV, que les Espagnols reconnaissent pour Roi sous le nom de Philippe V. Pour recueillir cette succession, le Roi de France est conduit à une guerre qui le met en présence d'une nouvelle coalition.
- Campagne de 1701 - Au mois de juillet 1701, le Régiment de Vermandois (deux Bataillons), fait partie de l'Armée de Flandre et sert scus les ordres de M. d'Artagnan. Il est employé à la garde et au perfectionnement des ouvrages d'Aerschot. A la fin du mois de novembre, on l'envoie pour se refaire à Saint-Trond.
- Campagne de 1702 - Lorsque s'ouvre la campagne de 1702, le Régiment de Vermandois est destiné tout d'abord à la garde des places fortes de la Flandre ; mais on ne tarde pas à l'envoyer à l'armée de Catinat, sur les bords du Rhin. Il y arrive au mois de juin et sert en première ligne, à Eckelsheim, sous les ordres du marquis d'Uxelles (Brigade de Bligny). Les opérations jusques Là n'ont guère été que préventives; le 3 juillet, Louis XIV prend les devants contre ses ennemis et déclare la guerre à l'Empereur d'Allemagne. L'Electeur de Bavière, allié de la France, s'étant rendu maitre de la place d'Ulm, Louis XIV le fait secourir par le Marquis de Villars.
- Bataille de Friedlingen - A la suite de ce grand Capitaine, le Régiment de Vermandois passe le Rhin à Huningue et participe, le 4 octobre, à la bataille de Friedlingen, livrée contre le Prince Louis de Bade. L'infanterie du Prince de Bade est postée sur plusieurs lignes, à la lisière d'un bois dominant la plaine. "Le marquis de Villars ordonna à M. Desbordes d'y marcher avec les brigades de Champagne, de Bourbonnais (Aunis, Bourbonnais et Vermandois), de la Reine et de Poitou. Les troupes eurent beaucoup de peine à monter la hauteur, à cause des vignes dans lesquelles elles furent obligées de passer et parce qu'on les mena un peu trop vite. Elles arrivèrent cependant en haut, et après une petite halte pour leur faire prendre haleine et pour les mettre en ordre, elles marchèrent droit à l'infanterie des ennemis qu'elles attaquèrent avec tant de vigueur, qu'après un combat très opiniâtré, et dans lequel il périt beaucoup de monde de part et d'autre, elles les chassèrent du bois.
Les ennemis à qui il arrivait de nouvelles troupes, et même six escadrons que leur envoya M. de Bade, revinrent à la charge jusqu'à trois fois; mais ils furent enfin obligés d'abandonner ce poste et d'y laisser cinq pièces de canon" (De Quincy, Hist. milit., t. III, p. 602). La mort du lieutenant général Desbordes amène un certain désarroi dont les ennemis profitent pour reprendre leurs positions; mais leur cavalerie se fait battre et les entraîne dans sa déroute. Le champ de bataille reste aux Français avec 900 prisonniers, 35 drapeaux et 500 chariots chargés de munitions et de vivres. Villars manoeuvre pendant quelque temps contre son adversaire. Puis il repasse le Rhin, dont il fa1t garder les ponts, et prend ses quartiers d'hiver autour de Saverne.
- Campagne de 1703, siège de Kehl - Le Régiment de Vermandois, cantonné à Saverne, reprend la campagne avec le Maréchal de Villars et participe au siège de Kehl (Brigade de Mailly). A l'assaut du corps de place, qui est donné le 6 mars, les Grenadiers de Vermandois, conduits par le Colonel des Arennes (Pierre Paul Guérin des Arennes, Capitaine au Corps en 1671, nommé Lieutenant-colonel en 1694 et Brigadier en 1705), se distinguent par leur bravoure. Le Maréchal de Villars essaie, sans y parvenir, de s'emparer des lignes de Stolofen. Il se rend ensuite en Bavière par les défilés de la Forêt Noire.
- 1re Bataille d'Hochstaedt - Après quelques engagements sans portée, les armées de Villars et de l'Electeur de Bavière se trouvent en présence, dans le voisinage d'Hochstaedt, d'un corps de 20.000 hommes que conduit le Comte de Stirum, détaché de l'armée du Prince de Bade. La bataiile, prématurément engagée par la cavalerie est d'abord défavorable aux Français. Mais elle est rétablie par l'infanterie et se termine, vers le soir, par une brillante victoire. Le Comte de Stirum laisse sur le champ de bataille 4.000 morts et 5.000 blessés. Il lui est fait 4.500 prisonniers. La bataille d'Hochstaedt, qui a été amenée par l'entrée à Augsbourg de l'armée du prince de Bade, est suivie de la reprise de cette ville. Le Maréchal de Villars, délivré pour quelque temps de ses ennemis, prend ensuite ses quartiers d'hiver à Neubourg.
- Campagne de 1704 - L'Electeur de Bavière s'est plaint, en différentes circonstances, de ce que le Maréchal de Villars n'a pas le caractère suffisamment souple. On lui donne cette satisfaction, dont il ne tardera pas à se repentir, de le remplacer par le Maréchal de Marcin (Villars est alors envoyé dans les Cévennes, pour combattre la révolte des Camisards). A la suite de divers échecs (combat de Donauwerth), la position des Français en Bavière est devenue des plus critiques. Louis XIV les fait secourir par une armée que conduit le Maréchal de Tallard.
- 2me Bataille d'Hochstaedt - Dans les premiers jours du mois d'août, l'armée française est arrêtée près d'Hochstaedt, en face du Prince Eugène, qui commande les Impériaux, presque sur le même terrain où Villars a été vainqueur l'année précédente. La bataille, engagée mal à propos, est perdue par l'incapacité des deux Maréchaux de Tallard et de Marcin. Les soldats font des prodiges de valeur, mais s'épuisent en vains efforts. Près de 900 Officiers et de 30.000 hommes sont mis hors de combat. Le Maréchal de Tallard, qui a la vue courte, veut rallier les Escadrons français et se jette au milieu d'un Corps de Hessois qui le fait prisonnier. Le Maréchal de Marcin oublie, dans sa retraite, 30 Bataillons et 12 Rscadrons de vieilles troupes qui sont obligés de se rendre. Des Régiments entiers que la fortune a trahis brisent leurs armes (13 aoOt). Le Régiment de Vermandois, réduit de moitié, est ramené en France, avec les débris de l'armée, et repasse le Rhin à Strasbourg. L'Alsace est envahie par les armées du Prince Eugène et du Prince de Bade.
- Défense de Landau - La garnison de Landau étant très menacée, quelques troupes de l'armée de Bavière sont envoyées à son secours. Le Régiment de Vermandois est de ce nombre. La défense de Landau, par M. de Laubanie, est restée célèbre. Ce serait l'amoindrir que de la vanter. Et la part que le Régiment de Vermandois prit à cette défense est une preuve de l'estime en laquelle on le tenait. La garnison de Landau se composait de 12 Bataillons des Régiments de Toulouse, Angoumois, Beauferme, Hessy, Suisse, Ponthieu, Agenais, Savigny, Castelet et Vermandois. Le Régiment de Vermandois était le plus ancien Corps de cette garnison. Le 21 septembre, le Capitaine de Saint ville, des Grenadiers, fait une sortie qui bouleverse complètement les travaux du siège. Le l7 octobre, à la tombée de la nuit, 400 impériaux menacent la place d'armes saillante, située derrière la lunette de la porte de France. Les Grenadiers de Vermandois se lancent contre eux à la baïonnette et en tuent près de 300 dans une mêlée furieuse. Dans la nuit du 24 au 25, l'ennemi parvient à faire sauter cette place d'armes. Il est attaqué, encore une fois, par les Grenadiers du Capitaine de Saintville et mis en fuite après un violent combat. Le 30, une explosion de mine tue un Lieutenant et 14 Grenadiers du Régiment de Vermandois, ce qui permet aux assiégeants de faire le logement près de la contregarde de gauche. Le 20 novembre, le magasin à poudre de cette contregarde fait explosion et enterre une centaine d'hommes sans ébranler le courage des survivants. Le Lieutenant-colonel des Arennes n'est retiré des décombres que grièvement blessé. Enfin, le 24 novembre, lorsque la place n'est déjà plus qu'un monceau de ruines, la garnison de Landau obtient les honneurs de la guerre et se rend. Le Régiment de Vermandois se retire dans les places de Moselle (et non pas à Strasbourg, ainsi que le Général Susane l'a dit par erreur).
- Campagne de 1705 - En 1705, le Maréchal de Villars est rappelé des Cévennes pour réparer les fautes commises par les Maréchaux de Tallard et de Marcin. Par ses manoeuvres habiles, il enlève près de Deux-Ponts les quartiers de ses ennemis et brave jusque dans Sierck l'armée anglaise du Duc de Marlborough. Il couvre Thionville, Sarrelouis, la frontière de la France, et sans livrer aucune bataille décisive oblige son adversaire à se retirer dans les Pays-Bas.
- Prise du château de Woerth - Le Régiment de Vermandois, reconstitué pendant l'hiver, suit le Maréchal de Villars dont il partage la gloire. Avec un détachement de 300 hommes, son Lieutenant-colonel, M. de Nocey (Jean-Baptiste de Nocey, Capitaine au Corps en 1673, est nommé Major en 1702, Lieutenant-colonel en 1705 et Brigadier en 1719), s'empare du château de Woerth et le démolit.
- Délivrance de l'Alsace - Le Maréchal de Villars, débarrassé du Duc de Marlborough, force les lignes de Wissembourg. Puis il se soutient sur tous les points et, avec l'aide du Comte du Bourg, fait repasser le Rhin aux troupes de l'Empire. L'Alsace est délivrée; mais pendant que la fortune sourit ainsi au vieux Maréchal, les revers se multiplient sur les autres frontières (Ramillies). Le 1er janvier 1706, le Régiment de Vermandois perd son Colonel, le Marquis de Tourouvre, que Louis XIV avait fait Brigadier en 1703. Il est remplacé par son frère le Chevalier de Tourouvre.
- Campagne de 1706 - A la reprise des opérations, le Buc de Bade, établi à Bischwiller, ne possède plus en Alsace que les lignes de Haguenau et de Lauterbourg. Le Maréchal de Villars le met en péril et l'oblige à reculer sans combat jusqu'à Drusenheim, ce qui dégage Fort-Louis et permet de ravitailler la place (3 mai). Il s'empare ensuite de Drusenheim, où il n'est resté qu'une garnison de 2.500 hommes, puis se rend à Spire, après avoir fait un court séjour au Camp de Langenkandel. Il termine la campagne autour de Fort-Louis (16 novembre). Le Régiment de Vermandois, qui a suivi Villars, sans qu'il soit possible de connaître exactement quel a été son rôle, est placé en garnison à Lauterbourg.
- Campagne de 1707 - Les frontières envahies ne permettent pas à Louis XIV de donner à l'armée du Rhin toute la consistance dont elle a besoin. Mais sous l'habile direction de son chef, elle supplée par son courage à la faiblesse de ses effectifs.
- Prise des lignes de Stolofen - L'armée de la Princesse de Bade (le Prince de Bade est mort) passe l'hiver dans les lignes de Stolofen (dites aussi de Biehl), dont la réputation est considérable. "Elles filaient dans un si grand point de perfection, qu'on les regardait comme imprenables, ce qui avait donné la confiance au prince de Bade de faire bâtir sa belle maison de Rastadt, qui n'en est qu'à trois lieues, et à laquelle il avait employé neuf millions" (De Quincy, Hist. milit., t. V, p. 290). Le Maréchal de Villars, secondé par le Comte de Broglie, forme le projet audacieux de s'en rendre maître et il y réussit si bien, autant par la ruse que par la force, qu'elles sont évacuées le 23 mai, sans que l'Armée du Rhin ait à déplorer la perte d'un seul homme. Le Maréchal de Villars trouve dans les lignes de Stolofen quarante mille sacs de farine et autant de sacs d'avoine.
- Fin de la campagne - La fin de la campagne se passe tout entière à lever des contributions dans la Souabe et le Palatinat, pendant que l'armée impériale se reforme au camp de Kretzingen, sous les ordres du Marquis de Bareith. Le Maréchal de Villars prend ses quartiers d'hiver dans les places d'Alsace.
- Campagne de 1708 - En 1708, le Maréchal de Villars est envoyé dans le Dauphiné en remplacement du Maréchal de la Feuillade. L'Electeur de Bavière prend le commandement de l'Armée du Rhin, ayant sous lui le Maréchal de Berwick. Le Régiment de Vermandois fait partie d'un détachement qui garde les lignes de Wissembourg.
- Campagne de 1709 - Louis XIV, courbant son orgueil devant l'implacabilité du sort, fait à ses ennemis des propositions de paix. Mais il refuse de souscrire aux préliminaires d'un traité qui a pour base la renonciation de Philippe V au trône d'Espagne et la guerre reprend sur toutes les frontières. L'hiver de 1708 à 1709 est d'une extrême rigueur. La misère publique est à son comble : "Quand des brigades marchent, écrit Villars, il faut que les brigades qui ne marchent pas jeunent. On s'accoutume à tout. Je crois cependant, ajoute-t-il tristement, que l'habitude de ne pas manger n'est pas bien facile à prendre". Louis XIV lui ayant confié la défense de la frontière du Nord, le Maréchal de Berwick le remplace à l'Armée des Alpes. Le Régiment de Vermandois quitte l'Armée du Rhin pour se rendre à Briançon. Il participe pendant toute la campagne aux fameuses navettes qui ont immortalisé le nom de Berwick ("Toute cette guerre, écrit Berwick à Louis XIV, en parlant des opérations qu'il dirige, consiste à tâcher de ne point ignorer les mouvements des ennemis, à faire ses navettes à propos, et à prendre des situations à couper toujours au court pendant que l'ennemi est obligé de faire un circuit. C'est, Sire, ce que je crois avoir trouvé en mettant mon centre à Briançon" - Archives historiques, registre n°2170, pièce n°307). Le centre de ses cantonnements est dans la vallée de Monestier, où il forme la Brigade Destouches avec les Régiments de Cambresis et de Cotentin. Le Comte de Thaun, qüi commande l'armée du Duc de Savoie, fait une feinte sur Briançon et se porte ensuite rapidement contre Chambéry. Le Maréchal de Berwick le devance dans la Tarentaise et lui fait rebrousser chemin (24 septembre). La saison étant trop avancée pour entreprendre de nouvelles opérations, les troupes des deux partis prennent leurs quartiers d'hiver. Dans le courant de juillet, le Marquis de Saint-Paul, a remplacé le Colonel de Tourouvre à la tête du Régiment de Vermandois (Francois-Lazare de Thomassin, Marquis de Saint-Paul, est nommé Brigadier le ler février 1719 et reste à la tête du Régiment jusqu'en 1733).
- Campagne de 1709 - Le Maréchal de Berwick doit quitter le Dauphiné pour se rendre à la Cour et, de là, à l'Armée de Flandre. M. de Medavi, qui le remplace momentanément, reste sur la défensive en attendant son retour. Le Régiment de Vermandois est établi au château de Vars, dans la vallée de Queyras, avec les Régiments de Ponthieu, de Bassigny et de Gatinais. L'armée du Duc de Savoie se concentre entre Pignerol et Coni (mois de juin). La misère publique est toujours aussi grande que par le passé. Les soldats français ne reçoivent que du pain et il leur est dû jusqu'à dix-neuf prêts. Après une tentative infructueuse contre le château de Vars, les alliés forment le projet d'envahir la Provence par le col de Tende. Ils en sont empêchés par les dispositions nouvelles que le Maréchal de Berwick fait prendre à son armée, et à la suite desquelles le Régiment de Vermandois est placé à Saint-Paul, près de Barcelonnette. Le Duc de Savoie et ses alliés se concertent alors pour pénétrer en Savoie et dans le Briançonnais par le mont Genèvre. Le Régiment de Vermandois retourne au château de Vars et se rend ensuite au pont de Servières. Les projets du Duc de Savoie sont encore déjoués (mois de septembre). Les alliés, devant l'insuccès de toutes leurs tentatives, se retirent alors dans leurs camps, à proximité des troupes françaises. Le régiment de Vermandois reste au pont de Servières. Au commencement de novembre, lorsque la neige a suffisamment obstrué tous les cols, 36 Bataillons sont tirés de l'Armée des Alpes pour secourir celle des Pyrénées. Le Régiment de Vermandois arrive à Perpignan vers la fin du mois et sert en première ligne, sous les ordres du Maréchal de camp de Belport. L'hiver se passe en campements et décampements.
- Campagne de 1711 - Au printemps de 1711, le Régiment de Vermandois retourne à l'Armée des Alpes. On le place, le 1er juin, dans la vallée de Barcelonnette.
- Défense de la Savoie - Dans les premiers jours de juillet, le Maréchal de Berwick est informé que tous les efforts de l'ennemi paraissent dirigés contre la Savoie par les cols du Mont Cenis et du Petit Saint-Bernard. Le gros de l'armée française est alors établi dans l'espace compris depuis Valloire jusqu'à Chambéry. Le Régiment de Vermandois garde Chambéry, avec le Régiment de Blaisois et passe sous le commandement du Maréchal de camp de Saubeuf. Dans la nuit du 9 au 10, le Duc de Savoie et le Comte de Thaun arrivent à Moutiers. Le régiment de Vermandois quitte Chambéry pour se poster à Azguebelle. Les alliés ayant réussi à s'emparer d'Annecy, le Maréchal de Berwick s'établit autour de Montmélian et fait garder par sa cavalerie tous les points de passage du Rhône, depuis le fort l'Ecluse jusqu'à Pont de Beauvoisin. Le Régiment de Vermandois est replacé à Chambéry. Le 19, à 6 heures du matin, le col de Fully est enlevé et l'armée du Duc de Savoie entre en force dans la vallée d'Aillon. Le Maréchal de Berwick ordonne alors un mouvement général de retraite pour couvrir le fort Barraux et Grenoble sans rien perdre de ses communications avec la Maurienne et Briançon. Le Régiment de Vermandois prend position à Apremont. Le 23, le mouvement de retraite est continué jusqu'aux Echelles, pendant que la cavalerie s'établit derrière le Guiers pour défendre les défilés d'Aiguebelette et d'Yenne. Tout le pays est couvert depuis Grenoble jusqu'à Saint-Genis. Le Régiment de Vermandois garde le fort Barraux. Jusqu'au mois de septembre, le Maréchal de Berwick et le Duc de Savoie ne se livrent que des escarmouches. Le 7, les alliés prennent le parti de retourner dans le Piémont pour y passer l'hiver. Le Maréchal de Berwick se met à leur poursuite dans l'espérance de les devancer du côté d'Exilles.
- Attaque de la redoute des Quatre-Dents - Le Régiment de Vermandois, conduit par le Marquis de Broglie, a pour mission d'occuper le col du Mont-Cenis. Le 13 au matin, le Maréchal de Berwick est avisé que les alliés arrivent à ce col. Il en prévient le Marquis de Broglie, dont le camp est aux Testines, et celui-ci, craignant d'être coupé, se replie d'autant plus volontiers que ses troupes sont très éprouvées par le froid et le manque de vivres. Il essaie, sans y parvenir, de s'emparer de la redoute des Quatre-Dents, qui lui permettrait de communiquer plus librement avec les postes de la vallée Etroite, et se retranche ensuite dans Modane pour y attendre les événements. Le Capitaine de Laco, le Lieutenant de Saint-Georges, 2 Sergents et 34 soldats du Régiment de Vermandois sont tués dans cette affaire. On compte, parmi les blessés, le Capitaine Jolicoeur et les Lieutenants de la Grasse et du Roule (Archives historiques, registre n° 2325, pièce n° 244). Le 17, le Marquis de Broglie franchit le col de la Roue et arrive à Bardonnèche où il continue sa route jusqu'à la Saulze d'Oulx. Il y est rejoint, le 25, par la majeure partie de l'armée, qui s'établit sur les deux versants de la montagne du Bourget, depuis le Chison en Pragelas jusqu'à Oulx. Les ennemis, de leur côté, prennent position entre Exilles, Suse et Fenestrelle. Le Duc de Savoie, dangereusement malade, remet son commandement au Général de Rehbinder, qui renonce à tenir plus longtemps la campagne, en raison des rigueurs de la saison. Le Maréchal de Berwick, de son côté, réunit son armée à Cézanne et fait la répartition de ses quartiers d'hiver. Le Régiment de Vermandois, faisant partie d'une Division aux ordres du Maréchal de camp de Barville, est placé à Saint-Jean de Maurienne.
- Campagne de 1712 - L'hiver de 1711 à 1712 se passe en négociations pour la paix. Mais les Impériaux, bien que sur 1e point d'être abandonnés par l'Angleterre, affichent encore de telles prétentions, que le congrès d'Utrecht n'aboutit pas. La guerre reprend au printemps sur toutes les frontières. Le Maréchal de Berwick, arrivé à Chambéry le 15 juin, observe pendant quelque temps le Duc de Savoie. Puis il se porte dans les vallées d'Oulx et de Pragelas et ferme ainsi à son adversaire les chemins qui conduisent dans le Dauphiné. Enfin, sur la nouvelle de la brillante victoire que le Maréchal de Villars a remportée à Denain (juillet), il pénètre plus avant dans le Piémont où il lève des contributions de guerre. Mais toutes ces opérations s'accomplissent sans le concours du Régiment de Vermandois, qui reste dans la Maurienne, à Saint-Martin d'Arc.
- Campagne de 1713 - Le traité d'Utrecht, signé le l1 avril 1713, termine la guerre entre Louis XIV et tous ses ennemis, sauf les Impériaux.
- Prise de Landau - Le Régiment de Vermandois, qui a passé l'hiver à Saint-Jean de Maurienne, quitte les Alpes au commencement du mois de mai pour être employé au siège de Landau sous les ordres du Maréchal de Bezons. Il arrive devant cette place le 14 juin et participe à l'ouverture de la tranchée dans la nuit du 24 au 25. Le Prince de Wurtemberg, Gouverneur de Landau, se défend d'une façon désespérée. Les assiégeants sont obligés de repousser de continuelles sorties qui leur font perdre beaucoup de monde. Enfin, après une première suspension d'armes n'ayant pas abouti, la garnison est faite prisonnière et conduite sous escorte à Haguenau (20 août). Le Régiment de Vermandois, qui a brillamment contribué à toutes les opérations du siège, est mis en garnison dans la place ae Landau, autant pour la garder que pour la remettre en état. Le reste du Corps de siège accompagne le Maréchal de Villars dans son expédition contre le Prince Eugène.
- Traité de Rastadt - Les négociations pour la paix entamées à Rastadt entre le Maréchal de Villars et le Prince Eugène, aboutissent à un traité qui est signé le 6 mars 1714. La France ne perd rien de ses conquêtes sur le continent, mais elle cède à l'Angleterre quelques-unes de ses colonies (Acadie, Terre-Neuve). Le Royaume d'Espagne laissé à Philippe V, est amoindri par de nombreux abandons de territoire faits aux souverains qui ont participé à la coalition. La France perd surtout par l'agrandissement des autres puissances. Elle assiste à la formation du Royaume de Prusse et à la prise de possession, par l'Angleterre, du rocher de Gibraltar qui constitue encore, à son profit, la clef de la Méditerranée.
- Période de paix
Après le traité de Rastadt, le Régiment de Vermandois, réduit à un seul Bataillon, tient garnison dans les places du Royaume. Louis XIV meurt en 1715 en laissant le trône à son petit-fils, proclamé Roi sous le nom de Louis XV. Une guerre, vite apaisée, éclate en 1719 entre la France et l'Espagne. Le Régiment de Vermandois n'y prend aucune part. En 1733, le Colonel de Saint-Paul est remplacé par le Comte de Lesparre qui passe aux Gardes françaises, le 10 mars 1734, et a lui-même pour successeur le Duc de Rohan-Chabot (Louis-Antoine de Gramont, Comte de Lesparre, tué à la bataille de Fontenoy).
- Guerre de la Succession de Pologne, 1734-1738
- Causes de la guerre - Stanislas Leczinski, Roi détrôné de Pologne, est devenu le beau-père de Louis XV. En 1733, à la mort du Roi qui l'a remplacé, il cherche, sans y parvenir, à reprendre sa couronne. Il est soutenu, dans ses revendications, par les cours de France, d'Espagne et de Sardaigne et combattu par le Roi de Prusse, la Tsarine et l'Empereur d'Autriche. La guerre est déclarée le 3 mars 1734, à la suite d'un coup de main que Louis XV fait tenter contre la place de Kehl.
- Campagne de 1734 - Les Impériaux, ayant à leur tête le Prince Eugène, se rassemblent de très bonne heure le long du Rhin, plus particulièrement dans leurs lignes d'Ettlingen. L'armée française commandée par le Maréchal de Berwick, se réunit en Alsace dans les premiers jours du mois d'avril. Le Régiment de Vermandois (un Bataillon), destiné à opérer sous les ordres du Maréchal Belle-Isle, quitte les Evêchés où il tient garnison, et se rend à Sierck.
- Prise de Trêves - Le 8 avril, le Corps dont il fait partie se met en route à la pointe du jour, passe la Sarre au pont de Conz et s'empare de Trêves,
- Prise de Traerbach - Le Chevalier de Belle-Isle, frère du Maréchal, prend aussitôt les devants à la tête de 14 Compagnies de Grenadiers, dont celle de Vermandois, et arrive le 9, sous les murs de Traerbach. Il n'a plus avec lui que 35 hommes, presque tous de la Couronne et de Vermandois ; le reste n'a pu le suivre à cause du mauvais temps. Il s'avance jusqu'à la première barrière où l'accueillent les coups de feu d'un poste de quelques hommes placé au-dessus de la porte de Traben. Un combat s'engage ; la première barrière, puis la seconde sont abattues à coups de hache et un pétard est attaché à la porte, qui vole en éclats. Le poste prend la fuite et la ville est prise. Ce coup d'audace n'a cependant pas été sans occasionner des pertes. Elles se réduisent fort heureusement à deux ou trois tués et à une dizaine de blessés, parmi lesquels le Lieutenant de Chazelle, des Grenadiers de Vermandois.
- Prise du château de Traerbach - Toute la garnison de Traerbach s'est réfugiée dans le château qui domine la ville. Le Maréchal de Belle-Isle en fait le siège et l'oblige à capituler dans la matinée du 2 mai. Berwick, ayant réussi à s'emparer des lignes d'Ettlingen, détache le comte d'Asfeldt pour faire le siège de Philipsbourg et continue à manoeuvrer contre le Prince Eugène, dont le camp est établi près de Heilbronn. Il appelle à lui l'infanterie du Maréchal de Belle-Isle, qui le rejoint le 28 mai au camp de Kirloch.
- Prise de Philipsbourg - Dans la nuit du 1er au 2 juin, la tranchée est ouverte devant Philipsbourg et le 2, toutes les troupes du camp de Kirloch entrent dans les lignes d'investissement. Le Régiment de Vermandois passe sous les ordres du Prince d'Issenghen. Il est employé à l'attaque de gauche, du côté d'Oberhausen. Le 12, le Maréchal de Berwick a la tête emportée par un boulet. Le 29, un ouvrage à corne est enlevé à la suite d'un combat qui coûte la vie à 12 Officiers et à près d'une centaine d'hommes. Le Prince Eugène, établi au camp de Brushall, se porte au secours de la place assiégée et menace la ligne de contrevallation en s'établissant autour de Weisenthal, depuis le Rhin jusqu'à Neudorf. L'infanterie française se poste sur ses retranchements dans l'attente d'une attaque qui n'a pas lieu. Le 14 juillet, à 10 heures du soir, huit Compagnies de Grenadiers, dont celle de Vermandois, donnent l'assaut à un ouvrage couronné que défend une garnison de 360 hommes. Une lutte fort vive se produit dans l'obscurité. Les Grenadiers tombent sur leurs adversaires, la baïonnette en avant, et les serrent de tellement près que la fuite même leur est impossible. Toute la garnison est massacrée ou faite prisonnière. L'inaction du prince Eugène et la perspective d'un nouvel assaut amènent une capitulation, qui est signée le 18 juillet. Les défenseurs de la place se retirent à Mayence par la rive gauche du Rhin.
- Dernières opérations de la Campagne - Après la prise de Philipsbourg, le Comte d'Asfeldt, promu Maréchal, se rend à Spire avec la majeure partie de l'armée. Le Régiment de Vermandois reste à la Petite Hollande, où il entre dans la composition d'une forte arrière-garde confiée au Maréchal de Noailles. En n'attaquant pas le Comte d'Asfeldt, le Prince Eugène mécontenté le Roi de Prusse, qui le quitte brusquement, vers la fin de juillet, pour retourner dans ses états. L'armée des Impériaux lève alors son camp de Brushall pour se rapprocher de Mayence. Mais le Comte d'Asfeldt, peu soucieux d'engager une bataille, remonte la rive gauche du Rhin jusqu'à Fort-Louis et s'établit ensuite en Souabe, avec toute son armée, depuis Kupenheim jusqu'à Rastadt. Le Prince Eugène ayant dû, faute de vivres, s'arrêter sur les bords du Necker, la campagne de 1734 est virtuellement terminée. Les mouvements des deux armées, jusqu'à la reprise des quartiers d'hiver, ne sont inspirés que du désir de se procurer des subsistances. Le 20 octobre, le Régiment de Vermandois est envoyé à Strasbourg où il reste jusqu'au 7 novembre. A cette dernière date, un détachement dont il fait partie se rend à Worms pour y passer le restant de l'hiver.
- Campagne de 1735 - Lorsque s'ouvre la campagne de 1735, les Impériaux tiennent la rive droite du Rhin, depuis Wesel jusqu'au lac de Constance. L'armée française est repartie dans la haute Alsace, la basse Alsace et les évêchés de Spire et de Worms, depuis Huningue jusqu'à Neustadt. De part et d'autre, on se fortifie. Le 14 avril, les Impériaux sortent de leurs quartiers et se répandent dans le pays de Durlach et les terres de l'Electeur palatin, où ils sont rejoints par une colonne de troupes russes. Le Maréchal de Coigny, désigné pour commander l'Armée du Rhin, arrive à Strasbourg le 20 avril. Louis XV ayant formé le projet de rester sur la défensive, le Régiment de Vermandois ne quitte Worms que le 27 août, pour entrer dans la composition d'une armée destinée à couvrir le Rhin sous les ordres du Maréchal de camp de Chabannes. On le place d'abord à Altirp, puis à Germersheim et finalement à Spire et à Wintsingen, où il est encore au mois de novembre, lorsque les hostilités sont interrompues à la suite d'un armistice convenu entre la France et l'Autriche. Il ne prend ainsi aucune part directe aux opérations de la campagne.
- Traité de Vienne - Le traité de Vienne (18 novembre 1738) termine la guerre. Stanislas Leczinski renonce au trône de Pologne. On lui donne en échange la Lorraine, qui devra faire retour, à sa mort, à la couronne de France. Le Duc de Lorraine reçoit comme dédommagement le Grand-duché de Toscane. L'Autriche perd en Italie une grande partie de ses possessions et ne se retire de la lutte que très affaiblie.
- Période de paix - Le Régiment de Vermandois quitte Wintzingen à la fin de 1735 et se rend à Neustadt. On le met ensuite en garnison à Belle Isle, après un court séjour dans le Duché de Lorraine (1737). Le Marquis de Clermont-Gallerande prend le commandement du Régiment, le 24 février 1738, en remplacement du Duc de Rohan-Chabot, qui passe au Régiment de Béarn.
- Guerre de la Succession d'Autriche, 1741-1748
- Causes de la Guerre - A la mort de l'Empereur Charles VI, sa fille Marie-Thérèse monte sur le trône d'Autriche et des compétitions, les unes prévues, les autres nouvelles, se produisent de toutes parts pour lui disputer sa couronne. A la candidature qu'elle soutient de son mari, François de Lorraine, au trône d'Allemagne, la France oppose celle de l'Electeur de Bavière. La guerre est déclarée en 1741.
- Campagne de 1741, opérations en Westphalie - Dès le commencement des hostilités, Louis XV, indépendamment de l'appui direct qu'il prête à l'Electeur de Bavière, envoie une armée en Westphalie autant pour parer à toute éventualité du côté de l'Angleterre et de la Hollande, que pour peser sur le vote des Electeurs de Trèves et de Mayence, dans l'élection impériale qui doit avoir lieu. Le Régiment de Vermandois (un Bataillon) qui fait partie de cette armée, se rassemble à Sedan dans le courant du mois d'août et se rend ensuite à Kalkum, sur les terres de l'Electeur de Cologne allié de la France. Le but de l'expédition parait rempli, lorsque l'Electeur de Hanovre, rompant avec ses engagements, prend l'offensive (l'Electeur de Hanovre, alors Georges II, était en même temps Roi d'Angleterre). Le Maréchal de Maillebois, placé à la tête de l'Armée de Westphalie, se porte alors en avant et s'établit depuis Aix-la-Chapelle jusqu'à Paderborn. Le Régiment de Vermandois est placé à Paderborn où il passe l'hiver.
- Campagne de 1742 - Dans le courant de janvier, les troupes que Louis XV a mises au service de l'Electeur de Bavière, proclamé Empereur sous le nom de Charles VII, sont bloquées dans Prague par le Prince Charles de Lorraine. La Cour ayant décidé, en 1742, que l'Armée de Westphalie se porterait à leur secours, le Régiment de Vermandois, alors à Neuss, lève son camp le 11 août sous la conduite du Comte Maurice de Saxe. Il arrive le 15 septembre à Amberg, où se réunissent également, sous le nom d'Armée de Bavière, toutes les troupes françaises qui tiennent la campagne au Nord de la Bohême et sur les bords du Danube.
- Opérations en Bavière - Après une tentative contre Pilsen, où il espère devancer le Prince Charles, le Maréchal de Maillebois, chef provisoire de l'armée, rétrograde sur Premenhoff. II y est attaqué le 2 octobre et recule encore jusqu'à Nabburg. Malgré le cercle étroit formé autour de lui, le Maréchal de Broglie, désigné depuis le 1er mai pour commander l'Armée de Bavière, réussit à sortir de Prague à la faveur d'un déguisement. Il rejoint le Maréchal de Maillebois à Dingelfing, le 21 novembre, et le remplace, dès ce moment, dans la conduite des opérations. Le Maréchal de Maillebois a fait passer le Danube à son armée pour obéir aux ordres de la cour, qui lui ont prescrit d'envahir la haute Autriche. Le Maréchal de Broglie cède aux sollicitations dont il est l'objet de la part de l'Electeur, et se rapproche de Braunau, où se trouve une garnison de 6.000 Bavarois que menace le Prince Charles.
- Prise de Deggendorf - Le 3 décembre, pendant que l'Armée de Bavière porte son camp à Fontenhausen, le Comte de Saxe, avec un détachement dont le Régiment de Vermandois fait partie, attaque la ville de Deggendorf et s'en empare après un violent combat.
- Levée du siège de Braunau - Le 12, toute l'armée arrive sous les murs de Braunau. Le Prince Charles, dont les efforts contre la place n'ont pas abouti, lève le siège et se rend à Passau. L'Electeur de Bavière et son Général, M. de Seckendorf, auraient souhaité de poursuivre les Autrichiens. Mais l'armée française a éprouvé de telles fatigues, que le Maréchal de Broglie la fait cantonner. Le Régiment de Vermandois se rend à Amberg.
- Campagne de 1743 - Pendant tout l'hiver, les postes français du Danube sont constamment attaqués par les Autrichiens. Les privations et la maladie font chaque jour de nouvelles victimes. Au 30 avril 1743, l'effectif du Régiment de Vermandois n'est plus que de 335 hommes. Sur ces entrefaites, M. de Seckendorf se fait battre à Sisabach, ce qui amène le Prince Charles sur les bords de l'Isar. Le Maréchal de Broglie prend alors le parti de se rapprocher de Ratisbonne.
- Combat de Dingelfing - Dingelfing, qui jusque là a été le quartier général de l'armée française, est évacuée le 15 mai. On n'y laisse qu'une garnison de 3.000 hommes sous les ordres de M. du Châtelet. Le 17, le Prince Charles fait attaquer cette garnison. Les Grenadiers dont elle se compose surtout, et parmi lesquels figurent ceux de Vermandois se défendent courageusement. Ils n'en sont pas moins obligés de se replier sur Deggendorf, et d'abandonner la ville qui est incendiée.
- Défense de Deggendorf - A la nouvelle de l'arrivée du Prince Charles, la garnison de Deggendorf se retire à son tour. Il ne reste pour défendre la place que le Régiment de Champagne et les Grenadiers. Attaquée le 26, cette petite troupe fait des prodiges de valeur. Puis elle se fait jour les armes à la main et rejoint le Maréchal de Broglie à Platting. Le 6 juin, toute l'armée française est rassemblée autour de Ratisbonne. Le Régiment de Vermandois, placé à Worth depuis le mois de mai, arrive sur le Pfatter pendant la nuit, après avoir fait une marche de onze lieues dans des conditions tout particulièrement fatigantes.
- Retraite de l'armée - Le 9, le Maréchal de Broglie continue sa retraite devant toutes les forces autrichiennes et, par Ingolstadt où il laisse une garnison dont font partie quelques Compagnies de Vermandois, se rapproche du Rhin, avec l'intention de conduire son armée contre les Angla1s qui menacent le haut Palatinat. Le 8 juillet, son camp est établi à Wimpfen, sur le Neckar. A la suite d'une lettre fort irritée que l'Electeur de Bavière a écrite à Louis XV, le Maréchal de Broglie se rend à la Cour pour se justifier. Le commandement de son armée est donné au Comte de Saxe. Le Duc de Noailles, qui manoeuvrait sur le Mayn, ayant été obligé de se replier (bataille de Dettingen), le Comte de Saxe repasse le Rhin, le 13 juillet, pour établir son camp sous les murs de Spire. Le 25, il ramène ses troupes dans la Haute-Alsace pour la défendre contre le Prince Charles. Le Régiment de Vermandois, réduit à quelques hommes, arrive à Schlestadt, le 1er août et contribue à former la garnison de cette place. Au 15 octobre, on l'envoie à Sarrelouis pour s'y reconstituer pendant l'hiver.
- Défense d'Ingolstadt - L'Electeur de Bavière, abandonné par les Français, doit convenir d'une neutralité avec le Prince Charles. Le 26 août, la garnison d'Ingolstadt est attaquée par le Baron de Bernklau. Le 30, les assiégés font une sortie. Mais la perspective de ne pas être secouru conduit le Gouverneur, M. de Graville, à demander une capitulation conditionnelle, qui lui est accordée. Les Compagnies de Vermandois, ramenées dans le pays messin, arrivent à Sarrelouis vers la fin d'octobre.
- Campagne de 1744 - Au mois de février 1744, les alliés de Louis XV se sont retirés pour la plupart de la coalition formée contre l'Autriche. Plus de 100.000 Anglais, Autrichiens, Hanovriens et Hollandais tiennent le pays depuis la mer jusqu'à la Meuse. La France est à la veille d'une invasion. Le Régiment de Vermandois, désigné pour servir à l'Armée dite de Moselle, quitte ses quartiers d'hiver, le 15 mars, pour se rendre à Sedan et à Donchery. On l'emploie plus spécialement à la garde des Evêchés, sous le commandement du Maréchal de Belle-Isle. Jusqu'au mois de juillet, pendant qu'une campagne très active est menée sur d'autres points, le Régiment de Vermandois reste sur les bords de la Meuse. A la suite de l'invasion de l'Alsace par le Prince Charles, le Maréchal de Coigny, qui commande l'Armée du Rhin, craint d'être coupé de ses communications avec la Lorraine, et fait renforcer la garnison de Phalsbourg. Le Régiment de Vermandois arrive sous Phalsbourg, à Lixheim, dans la soirée du 30 juillet. Le lendemain, à la pointe du jour, 15.000 Autrichiens, conduits par M. de Nadasty, s'emparent de Saverne. La position du Maréchal de Coigny devient de plus en plus critique, lorsqu'un heureux événement le tire d'embarras. Le Roi de Prusse, qui a déposé les armes après avoir conquis et s'être fait attribuer la Silésie, reprend les hostilités et envahit la Bohême. Le Prince Charles, obligé de faire face à ce nouveau danger, se retire brusquement derrière la Zorn et se prépare à repasser le Rhin.
- Combats de Saverne et de Suffelnheim - Le Duc d'Harcourt, à la tête des troupes campées sous Phalsbourg, profite de la retraite du Prince Charles pour reprendre Saverne sur M. de Nadasty. Il laisse dans la place une garnison de 800 hommes et retourne à Phalsbourg. Le Prince Charles, campé sur le sommet du Kockersberg, détache alors l'aile droite de son armée au secours de son lieutenant. La garnison de Saverne résiste et donne le temps au Duc d'Harcourt de revenir sur ses pas. Mais le combat qui s'engage autour de la ville se termine néanmoins par la retraite des Francais, malgré tout le courage que déploie dans cette circonstance le Régiment de Vermandois (13 août). Après un engagement d'arrière-garde livré à Suffelnheim contre un détachement dont font partie les Grenadiers de Vermandois, les Autrichiens repassent le Rhin pour se diriger vers la Bohême (23 août). L'armée française exténuée, s'arrête à Fort-Louis.
- Poursuite des Autrichiens - Le siège de Fribourg ayant été décidé, le Régiment de Vermandois s'achemine, le 28 août, vers cette place, pendant que ses Grenadiers passent sous les ordres du Chevalier de Belle-Isle et se mettent à la poursuite des Autrichiens avec la cavalerie et les Grenadiers des autres Corps. Le Chevalier de Belle-Isle ne s'arrête qu'à Kanstadt, sur le Neckar, après avoir fait de nombreux prisonniers. Il remonte ensuite le cours de cette rivière et s'empare de Villingen et du Comté de Nellemburg. Puis il atteint le Rhin et entre sans combat dans les villes forestières de Waldshut, Lauffenbourg et Seckingen. Rheinfeld, qui a été mise en état de défense, est emportée de vive force. Enfin, le 23 septembre, les Grenadiers de Vermandois retournent à leur Corps.
- Prise de Fribourg - La tranchée devant Fribourg est ouverte dans la nuit du 30 septembre au 1er octobre. Louis XV, rétabli d'une dangereuse maladie qu'il a faite à Metz, arrive au camp le 10 octobre et prend la direction du siège. Le 17, les Autrichiens font une sortie qui est repoussée. Le 2 novembre, vers 10 heures du soir, les Grenadiers de Vermandois participent à l'assaut du corps de place. Insuffisamment soutenus, ils sont accablés par le nombre et leur tentative ne réussit pas. Le 8, le Gouverneur de la ville fait demander une suspension d'armes. Elle lui est accordée et, le 24, la garnison de Fribourg se rend prisonnière. Le Régiment de Vermandois, qui a contribué au siège de Fribourg d'une manière très active, a perdu par le feu et les maladies, la moitié de son effectif. On lui fait prendre ses quartiers d'hiver à Neustadt, entre Spire et Landau.
- Campagne de 1745 - Le Roi de Prusse, battu par le Prince Charles, ayant dû évacuer la Bohême, les cantonnements français de la Westphalie se trouvent menacés. Le Régiment de Vermandois, destiné à servir sous les ordres du Maréchal de Maillebois dont l'armée se rassemble entre le Mayn et le Neckar, quitte Neustadt dans les premiers jours de janvier pour se rendre à Heidelberg. Sur ces entrefaites, l'Empereur Charles VII meurt à Munich. Louis XV ne pèse en rien sur le choix de son successeur et se préoccupe surtout de terminer la guerre. Dès le 10 février, malgré les neiges qui encombrent les chemins, les alliés passent le Rhin, près de Cologne et de Bonn, et se portent sur la Lahn. Le Maréchal de Maillebois se rapproche du Mayn. Le Régiment de Vermandois est établi à Oppenheim, où il reste pour couvrir Worms et garder la route du fleuve. Le 13 mars, l'armée française franchit le Mayn pour obéir aux ordres de la cour et marche contre le Duc d'Arenberg, dont l'armée est établie sur la rive droite de la Lahn, depuis Wetzlar jusqu'au Rhin. Le Régiment de Vermandois campe à Burstadt, avec le Maréchal de camp de Contades, après avoir repoussé quelques détachements ennemis, qui repassent le Lahn à Limburg. Jusqu'au 6 avril le Maréchal de Maillebois ne fait que peu de mouvements. Mais à cette date, et sur la nouvelle que le Duc d'Arenberg a dû se retirer faute de vivres, il étend ses cantonnements pour se rapprocher du Rhin. Vermandois, alors à Camberg, se rend à Nassau, sur le Lahn. Le 15, le Maréchal de Maillebois est appelé au commandement de l'Armée d'Italie. M. de la Fare, qui le remplace provisoirement en attendant l'arrivée du Maréchal de Conti, rétrograde vers le Mayn, afin de pourvoir plus commodément à la subsistance de ses troupes. Le Régiment de Vermandois, placé en seconde ligne, se partage entre Hasselbach et Haingen. La défaite de l'armée de Bavière à Pfalfenhofen a pour conséquence de ramener les Autrichiens sur le bas Neckar, à la suite d'une armée française que commande M. de Ségur. Le Maréchal de Conti manoeuvre pour garder la ligne du Mayn et le Régiment de Vermandois est dans ce but placé d'abord à Babenhaussen puis à Stockstadt. Mais le 29 juin, sur la nouvelle que les Autrichiens et l'armée du Duc d'Arenberg ont opéré leur jonction dans la plaine de Wachterbach, le Maréchal lève son camp pour se rapprocher de Francfort. A partir de ce moment il recule sans cesse en raison de son infériorité numérique, qui ne lui permet pas d'accepter le combat. Les forces françaises, groupées en un seul faisceau sous le commandement du Maréchal de Conti, repassent le Rhin pour se disperser ensuite le long du fleuve, depuis Oggersheim jusqu'à Lauterbourg. Le Régiment de Vermandois, établi au camp de Mutterstadt après la prise d'Oggersheim par quelques coureurs autrichiens, contribue jusqu'à la fin d'octobre au service général de la garde du Rhin. Au commencement de novembre, les alliés prennent leurs quartiers d'hiver. Le Maréchal de Conti, de son côté, groupe la majeure partie de son armée entre la Queich et la Lauter et se rend ensu1te à la Cour. Les Compagnies de Vermandois sont placées à Landau.
- Campagne de 1746 - En janvier 1746, les troupes de François de Lorraine (proclamé Empereur d'Allemagne) se rendent en Italie et dans les Pays-Bas Autrichiens. Les cercles se réclament de leur neutralité et le Roi de France, qui n'a aucune raison pour s'attirer de nouveaux ennemis, se sert de son armée du Rhin pour renforcer celle de Flandre.
- Prise de Mons - Dans l'ordre de bataille constitué à la date du 1er mai, le Régiment de Vermandois est en réserve, à Maubeuge, sous les ordres du Comte d'Estrées. Il manoeuvre pendant quelque temps pour masquer Mons, dont le Prince de Conti doit faire le siège, puis il contribue à l'investissement de cette ville, du côté de la porte de Nimy. La tranchée est ouverte dans la nuit du 24 au 25 juin et le 10 juillet la place capitule après un bombardement de douze jours.
- Prise de Saint-Ghislain - Comme mesure préparatoire au siège de Charleroi, M. de la Fare quitte Mons, le 11 juillet, avec un détachement de six Bataillons, dont fait partie le Régiment de Vermandois et se présente, le 13, devant Saint-Ghislain. La place est investie le même jour et capitule le 25.
- Prise de Charleroi - M. de la Fare ne laisse qu'une faible garnison à Saint-Ghislain et rejoint le Prince de Conti sous les murs de Charleroi, dont la garnison se rend, le 2 août, après cinq jours seulement de tranchée ouverte. A cette date, l'Armée de Flandre, commandée par le Maréchal de Saxe, est dans la plaine de Gembloux, en face de celle du Prince Charles (Anglais, Hollandais, Hessois et Hanovriens), dont les camps sont établis entre la Gette et la Mehaigne. Le Maréchal de Conti, avec les troupes de siège, vient se placer, le 4 août, au camp de Corroy, à côté du Maréchal de Saxe, ce qui donne à la ligne française un développement de près de cinq lieues. Jusqu'à la fin du mois, les deux armées qui sont en présence s'observent et manoeuvrent. Par ses dispositions habiles, le Maréchal de Saxe triomphe sans combat de son adversaire et l'oblige à repasser la Meuse, le 30 aoüt. Le Régiment de Vermandois couvre ensuite, pendant quelque temps, les opérations du siège de Namur, puis se rend dans les Evêchés pour y tenir garnison. La prise de Namur (ler octobre) termine la conquête des Pays-Bas autrichiens. Le Maréchal de Saxe se retourne alors contre le Prince Charles, retranché derrière le Jar, et l'attaque dans son camp, près de Raucoux (11 octobre). Le Régiment de Vermandois, rappelé des Evêchés pour participer à la bataille, n'arrive qu'après la victoire. On le dirige, le 15 octobre, sur Charleville où il prend ses quartiers d'hiver.
- Campagne de 1747 - En 1747, lorsque recommencent les hostilités, le Régiment de Vermandois (deux Bataillons) fait partie d'un Corps de réserve établi autour de Namur sous les ordres du Comte de Clermont. Après que le Maréchal de Saxe s'est emparé, en moins de trente jours, de toute la Flandre hollandaise, ce Corps se rend derrière la Dyle. Le Régiment de Vermandois est placé à Wavre, le 2 juin. Le Maréchal de Saxe, pour tromper ses adversaires qui du reste ne s'accordent pas sur la conduite de leurs opérations, envoie le Comte de Clermont vers Maestricht. Puis il le rappelle à lui lorsque l'attention des alliés a été suffisamment attirée du côté de cette place et, le ler octobre, toute l'armée française campée sur les hauteurs d'Herderen que les Anglais ont dû évacuer, est en mesure de livrer une bataille décisive.
- Bataille de Lawfeld - Cette bataille commence le 2 octobre, à 10 heures du matin. L'infanterie française borde les plateaux d'Herderen et s'étend jusqu'au village de Riemst. L'armée des alliés tient depuis le Grand-Spauwen jusqu'à Vybre et a son centre au village de Lawfeld occupé par les Anglais. Les Brigades de Monaco, de Ségur (Vermandois) et de La Fère reçoivent la périlleuse mission de s'emparer du village de Lawfeld, dont les défenseurs, déjà postés derrière des retranchements, sont bien vite renforcés par de nouvelles troupes. Une fusillade terrible s'engage. Le Régiment de Vermandois, qui tient la gauche de la ligne, est pris de flanc par l'artillerie et crib1é de projectiles. Les retranchements sont enlevés, avec un courage qui tient de l'héroïsme, mais ils ne tardent pas à être perdus, puis repris et reperdus. Le Maréchal de Saxe fait soutenir les assaillants par les Brigades de Beltens et de Monnin et les lance pour la troisième fois sur les ouvrages de Lawfeld. Ils sont écrasés par le nombre et obligés de reculer. Le Maréchal fait alors avancer une batterie de gros canons et sous la protection de cette artillerie, avec le concours de deux autres Brigades, le Comte de Clermont se reporte en avant pour la quatrième fois. C'est en vain que les alliés se font tuer sur place plutôt que de reculer; le village est reconquis pour ne plus être abandonné. Les défenseurs de Lawfeld, soutenus par leur cavalerie qui ne peut triompher de celle des Français, se retirent en désordre vers Maaseyck et Maëstricht. Ils entraînent dans leur déroute les Hollandais et les Impériaux et repassent la Meuse pendant la nuit. L'attaque de Lawfeld "qui restera une des plus belles actions de l'infanterie", coûte au Régiment de Vermandois 92 tués et 119 blessés parmi lesquels le Lieutenant-colonel Broqurio, les Capitaines de la Gessardière, d'Erne, du Perron, d'Hauterive, de Lalanne, de Titelouze, du Chatel, de Saint-Lanne et d'Aumale, le Lieutenant de Combettes et le Sous-lieutenant de Barbant. Le 3 juillet, le Régiment de Vermandois passe sous les ordres du Comte d'Estrées. On l'emploie à garder les bords de la Meuse, entre le Moulin de Pierre et Marsenhoven, pendant que le reste de l'armée continue à tenir la campagne (Siège de Berg-op-Zoom). Le 21 octobre, l'armée de Flandre est envoyée dans ses quartiers d'hiver. Le Régiment de Vermandois se rend à Anvers et à Sandlwiet, où il arrive à la fin du mois.
- Campagne de 1748 - Le 1er janvier 1748, un Congrès se réunit à Aix-la-Chapelle pour mettre un terme aux hostilités. Mais aucune suspension d'armes n'ayant été convenue, Louis XV se met en mesure de reprendre la campagne et fait, dans ce but, ravitailler Berg-op-Zoom par de nombreux convois de vivres et de munitions. En escortant l'un d'eux, le Régiment de Vermandois est attaqué par des forces supérieures. "Il se comporte si bien, dit le Général Susane, que le convoi arrive le lendemain presque intact" (Hist. de l'Infant., t. IV, p. 300).
- Siège de Maestricht - Pour peser de quelque poids sur les déterminations du Congrès, Louis XV fait mettre le siège devant Maestricht, sous la protection d'un Corps de dix-huit Bataillons que commande M. de Contades. Le Régiment de Vermandois, fait partie de ce Corps. Il campe le 2 avril sur la Dyle, le 7 sur la Dender et entre ensuite dans les lignes d'investissement, mais il ne contribue que d'une façon très effacée aux attaques dirigées contre la place. Un de ses Officiers, le Capitaine de Saint-Simon, est cependant blessé, dans la nuit du 24 au 25 avril, au cours d'une sortie. Le 3 mai, un armistice est conclu en attendant que soit signée la paix définitive. Le 10, la garnison de Maestricht se retire, après avoir obtenu une capitulation honorable, et le 14, l'armée de siège commence à se séparer. Le Régiment de Vermandois, placé sous les ordres de M. de Sennecterre, dont la Division couvre le pays depuis Diest jusqu'à Malines, séjourne à Rillaer jusqu'à la fin du mois d'août. On l'envoie ensuite à Bruxelles où il prend ses quartiers d'hiver.
- Traité d'Aix-la-Chapelle - Les puissances intéressées conviennent à Aix-la-Chapelle d'un traité qui termine la guerre (14 octobre 1748). Parce qu'il a subi quelques défaites en Italie et sur mer, Louis XV ne réclame rien pour lui-même. Il traite "en roi et non en marchand", ce qui lui vaudra, quelques années plus tard, de s'humilier jusqu'à désavouer Dupleix et de perdre ainsi l'empire des Indes.
- Période de paix - Le 15 novembre 1748, le Régiment de Vermandois est réduit à un seul Bataillon. Il occupe alors le 44e rang et a pour Colonel le Marquis de Rougé, qui a remplacé, en 1713, le Chevalier de Tessé promu Brigadier. Au mois de janvier 1749, le Régiment quitte Bruxelles pour aller tenir garnison dans le royaume. Le 1er février, le Colonel de Rougé est remplacé par le Marquis de Timbrune. Le 17 mars, le Régiment de Vermandois est, encore une fois, porté à deux Bataillons par l'incorporation du Régiment de Vexin (ce Régiment, créé le 21 septembre 1684, a combattu en 1689 à Sfaffarde, en 1719 à Malplaquet, en 1733 à Guastalla et en 1747 à Lawfeld). En 1753, le Régiment est au camp de Sarrelouis, qu'il paraît avoir quitté de bonne heure, mais sans qu'il soit possible de connaître exactement pour quelle destination nouvelle.
- Expédition de Minorque
- Causes de la guerre - Depuis la Révolution de 1688, qui a renversé du trône Jacques II, le rôle politique de l'Angleterre vis-à-vis de la France a toujours été de lui disputer l'empire des mers et de s'opposer au développement de son commerce. Toutes les guerres du 18e siècle se rattachent, par quelque côté, à cette rivalité implacable, qui empiètera sur le 19e siècle et provoquera la chute de Napoléon ler. En 1756, sans aucune déclaration de guerre, plus de 300 vaisseaux français sont capturés par les Anglais dans toutes les parties du monde. L'expédition de Minorque est une réponse à cette félonie (l'Angleterre s'était emparée de Minorque, en 1708, sur l'Espagne alliée de la France. Le traité d'Utrecht lui en avait assuré la possession). Dans les premiers jours d'avril 1756, une armée de 25 Bataillons se réunit à Toulon, sous les ordres du Duc de Richelieu. Le Régiment de Vermandois, qui en fait partie et dont le Dépôt est alors à Montpellier, forme la Brigade de Linière, avec les deux Bataillons du Régiment de Rochefort. La flotte de transport appareille le 10 avril et jette l'ancre, le 18, devant Ciudadela, sur la côte occidentale de l'île de Minorque, après avoir essuyé une tempête qui l'a mise en péril (trois Compagnies et demie de Vermandois, montées sur une barque que l'on considéra comme perdue, retournèrent à Toulon avec beaucoup de peine et ne rejoignirent le Régiment que le 25 avril). Le débarquement est ordonné le même jour et s'opère sans aucune difficulté. Le Duc de Richelieu trouve la ville abandonnée par la garnison qui en avait la garde. Le 23, le Corps expéditionnaire, précédé de ses Grenadiers, arrive devant Port-Mahon, dont il s'empare également sans coup férir. Le Gouverneur anglais, Blakney, a pris le parti de s'enfermer dans le fort Saint-Philippe et d'y attendre ses ennemis.
- Prise du fort Saint-Philippe - Le fort Saint-Philippe, dont il ne reste plus aucune trace de nos jours, s'élevait entre le chenal de Mahon et l'anse Saint-Etienne. Bâti sur des rochers à pic et gardé de trois côtés par la mer, il se composait d'une double enceinte et n'était accessible que d'un seul côté, vers le nord-ouest, où les Anglais avaient accumulé tous les moyens de défense. Le siège de cette place, différé faute de canons, commence le 9 mai, à la suite d'un coup de main heureux, tenté par les Grenadiers de Briqueville et de Vermandois, contre un faubourg que les Anglais avaient conservé parce qu'il barrait les débouchés de la ville. Les travaux sont poussés activement, mais sans cesse contrariés par la nature même du sol et le feu continuel des assiègés. Au cours de leur exécution, on reçoit la nouvelle d'une brillante victoire, gagnée par l'Amiral la Galissonnière sur l'Amiral Byng, qui conduisait à lord Blakney un renfort de 4.000 soldats. Elle dissipe momentanément toutes les craintes, que l'on pouvait avoir de l'apparition inopinée d'une flotte britannique (20 mai). Jusqu'au 27 juin, la canonnade est excessivement violente. Le tir des bombes remplace celui des boulets, et fait de part et d'autre beaucoup de ravages. Le Duc de Richelieu, pressé d'en finir, se préoccupe de donner l'assaut aux ouvrages de la première enceinte et forme dans ce but trois colonnes, qui doivent se porter en avant, le 27, à 10 heures du soir. A l'heure dite, la 1re compagnie des Grenadiers de Vermandois, placée en tête de la colonne de gauche, sort de la tranchée sous le commandement de M. de Monti et se précipite contre une des redoutes. Les mines sautent sous les pas des assaillants dont les premiers rangs sont balayés par le canon et la fusillade, mais les Grenadiers n'en parviennent pas moins au pied des remparts contre lesquels ils dressent des échelles. Elles sont trop courtes. La redoute est bâtie sur des rochers qu'elle domine de plusieurs mètres. Alors les Grenadiers grimpent sur les épaules les uns des autres, se cramponnent aux aspérités des rochers, plantent des baïonnettes dans les interstices des pierres, se coulent par les embrasures et finalement tombent sur les Anglais qui sont sabrés sur leurs pièces. A la colonne du centre, la 2e Compagnie des Grenadiers de Vermandois, qui précède les deux Bataillons du Régiment, se signale par les mêmes prodiges de valeur. Les hommes dont elle se compose débouchent dans le chemin couvert d'un ouvrage et enclouent 12 canons dont ils brisent les affûts. Vers 5 heures du matin, une suspension d'armes, qui se prolonge jusque dans l'après-midi, est convenue pour ramasser les morts et les blessés. La majeure partie de la première enceinte est alors occupée par les Français. Les hostilités ne sont pas reprises. Le Gouverneur Blakney, vieillard de 84 ans, fait arborer le drapeau blanc et obtient de se retirer avec les honneurs de la guerre. La capitulation est signée le lendemain et le 7 juillet, 4.099 personnes dont 132 Officiers et 3167 soldats, sortent du fort Saint-Philippe pour être transportées à Gibraltar. L'assaut du 27 juin coûte au Régiment de Vermandois 30 soldats tués et 87 blessés. Le Capitaine de Kéjean et le Lieutenant de Charmont sont au nombre des morts ; le Capitaine Eveillon et le Lieutenant de Saint-Andéol comptent parmi les blessés. Vermandois est de tous les Régiments celui qui a le plus souffert. Cette particularité témoigne de son rôle glorieux dans une campagne qui est la seule, pendant toute la guerre de Sept ans, à jeter quelque éclat sur les armes de Louis XV.
- Occupation de Minorque - Après la prise du fort Saint-Philippe, le Duc de Richelieu rentre en France en emmenant avec lui la majeure partie de son armée. Le Régiment de Vermandois reste dans l'île dont il occupe successivement toutes les places. Par ordonnance du 10 décembre 1762, on le destine "au service de la marine et des colonies et à la garde des ports du royaume". Le Régiment prend le numéro 45, par suite de la création des Grenadiers de France.
Le 3 juin 1763, à la suite d'un article du traité de Paris stipulant que l'île de Minorque "sera restituée trois mois après l'échange des ratifications, ou plutôt si faire se peut", sept navires anglais chargés de troupes font leur entrée dans la rade de Port-Mahon. La remise de l'ile a lieu le 4, et le lendemain, la garnison française appareille pour Toulon. "Voilà comment, sans lutte et sous le coup d'un honteux traité, nous avons quitté l'île où nous étions descendus si allègrement par une belle journée d'avril 1756 ; où nos soldats s'étaient signalés par un des plus brillants faits d'armes de notre histoire militaire, et où nous ne laissions, de nous mêmes, que le souvenir de dévouements restés inutiles" (Guitton, La France à Minorque. Paris, 1894, in-8, page 110).
- Période de Paix - A sa rentrée de Minorque, le Régiment de Vermandois est envoyé à Bordeaux. Son Colonel, le Marquis de Timbrune, est remplacé par le Comte de Malartic (César-Jean-Baptiste, Marquis de Timbrune, né en 1749, nommé Brigadier le 20 février 1761 et Maréchal de camp le 5 juin 1768). Au mois de décembre, un détachement de Vermandois est placé en garnison à Marmande. En jsnvier 1764, ce détachement est supprimé et au mois d'avril, le Régiment quitte Bordeaux pour s'établir à Rochefort avec un détachement à Bergerac. En avril 1765, Vermandois se rend à Brest. Un ordre de départ, qui lui parvient dans cette viile au mois d'octobre 1767, le dirige sur la Guadeloupe.
- Occupation des Antilles - On ne sait que fort peu de chose de l'occupation des Antilles par le Régiment de Vermandois. En 1767 on le place à la Basse-Terre (Guadeloupe). Il fournit plusieurs détachements dont le plus important est à la Pointe-à-Pitre. Au mois de juin 1769, à la suite d'un soulèvement provoqué à Saint-Domingue par le rétablissement des milices, six Compagnies passent à Port-au-Prince. Le Colonel de Malartic, resté à la Guadeloupe, est nommé Gouverneur de cette île. Le 28 octobre 1769, le Régiment de Vermandois rentre en France. Il débarque à Brest, où il ne reste que peu de jours, et se rend ensuite à Morlaix (24 décembre).
- Garnisons dans le Royaume - En 1770, le Régiment de Vermandois est rendu au service de terre (il est alors créé quatre Régiments spéciaux pour la garde des colonies d'Amérique). On l'envoie Metz, le 18 octobre. En 1771, la suppression des Grenadiers de France le fait remonter au 44e rang. On le trouve ensuite, le 16 octobre 1772, à Gravelines; le 6 mai 1773, à La Rochelle ; le 15 mars 1774, à l'ile de Ré; le 15 juin (1er Bataillon) et le 15 juillet (2e Bataillon) 1775, à La Rochelle. Il descend d'abord au 51e rang, puis au 62e, par le dédoublement des Régiments à quatre Bataillons et continue tous les ans à changer de garnison. On le rencontre le 15 mai 1776, à Perpignan; le 14 octobre 1776, à Béziers; le 28 septembre 1777, à Montpellier et le 17 avril 1778, à Marseille. En 1778, toute l'infanterie est armée du fusil à silex modèle 1777, qui sera conservé, sans aucun changement, jusqu'en 1822. Le 27 juin, le ler Bataillon de Vermandois est envoyé à Toulon. Le 22 septembre, tout le Régiment passe en Corse, dont il occupe les garnisons. On l'emploie à différentes occupations et plus particulièrement à des travaux de route. Le 3 mars 1780, le Comte de Malartic, Colonel de Vermandois, est nommé Maréchal de camp et remplacé par le Vicomte de Bernis (Anne-Joseph-Hippolyte de Maurès, Comte de Malartic, naquit à Montauban, en 1730. Il fut promu Brigadier en 1769, Maréchal de camp en 1780, Lieutenant-général en 1792 et mourut en 1800). A son retour en France, le 10 mai 1784, le Régiment se rend d'abord A Montpellier (29 mai), puis à Béziers (13 juillet). Il reste dans cette dernière ville jusqu'au ler avril 1788 et contribue, à partir de cette date, à former la garnison de Perpignan. Le 9 mars 1788, il a reçu pour Colonel le Vicomte de Thézan en remplacement du Vicomte de Bernis, nommé Maréchal de camp (Pons Simon de Pierre, Vicomte et plus tard Marquis de Bernis, naquit à Nimes en 1747. Entré dans l'armée de très bonne heure, après avoir été page de Louis XV, il n'émigra pas et mourut à Lunel, en 1816). Une ordonnance de la même époque, appliquée quelques mois plus tard, organise l'infanterie par Brigades de deux Régiments, qui sont groupées elles-mêmes en Divisions de force variable. Le Régiment de Vermandois forme la 34e Brigade, avec le Régiment de Touraine.
- Vermandois devant l'émeute - La 34e Brigade est tout entière à Perpignan au moment de la Révolution (14 juillet 1789). Le 3 décembre, le Régiment de Vermandois monte au 61e rang, par suite de la suppression du Régiment de Bourbon. L'année suivante, le 10 mai, une violente émeute éclate dans la ville. Le Régiment de Vermandois, commandé pour la réprimer, se distingue par son courage et son sang froid et mérite les félicitations de l'Assemblée Nationale. Quelques jours plus tard, le Vicomte de Mirabeau, Colonel du régiment de Touraine, arrivé de Paris pour mettre un terme à une sédition que sa maladresse a provoquée, ne se croit plus en sûreté parmi ses propres soldats et confie la garde de sa personne et de ses drapeaux à 200 hommes de Vermandois. "Mais ceux-ci, en apprenant la nature du service que l'on attend d'eux, cèdent à l'indignation que leur inspire un acte aussi humiliant pour Touraine et rentrent dans leur caserne,. (Susane, Hist. de l'Inf., t. IV, p. 301. La sédition, qui du reste n'eut rien de sanglant, se termina le 12 juin, par la démission du Colonel de Mirabeau). Le 5 décembre, Vermandois, seul à Perpignan, se retrouve en face de l'émeute. Il s'emploie à l'apaiser comme il l'a fait déjà. Cette répression constitue le dernier acte de l'histoire du Régiment. Le 1er janvier 1791, à la suite d'une mesure générale prise pour démocratiser l'armée, Vermandois perd le nom qu'il a porté pendant 121 ans sans aucune défaillance et devient 61e d'infanterie.
- 61e Régiment d'Infanterie, ex-Vermandois
Le 61e de Ligne (ex-Vermandois) quitte Perpignan, le 1er juin 1791, pour se rendre à Béziers. Il y reste jusqu'au 10 février 1792 et retourne à Perpignan. Vers cette époque où tout ce qui se rattache à l'ancien régime est, par cela même, considéré comme suspect, de nombreux Officiers de Vermandois passent à l'étranger. Le Vicomte de Thézan (Jean-François Béranger, vicomte de Thézan, émigré) est remplacé, le 5 février, par 1e Colonel de Bazelaire (Jean-Joseph-Christophe de Bazelaire, émigré), qui lui-même, le 23 mars suivant, a pour successeur le Colonel de Chartogne.
Au mois de novembre 1791, le Major Servan commandant du fort Saint-Jean, A Marseille, est nommé Lieutenant-olonel du Régiment. Un Décret du 7 mars 1792 le place à la tête du 104e d'infanterie (Joseph Servan de Gerbey, né A Romans en 1741, Maréchal de camp le 8 mai 1792 et Ministre de la guerre le lendemain, est destitué le 12 juin pour avoir proposé de former sous Paris un camp de 20.000 fédérés destiné à protéger la capitale. Ministre de la Guerre pour la seconde fois le 10 août 1792, il devient le 6 octobre suivant, Commandant en chef de l'Armée des Pyrénées-Occidentales. Arrêté comme Girondin, il est délivré A la chute de Robespierre. Il meurt à Paris avec le grade d'Inspecteur en chef aux Revues, le 10 mai 1808).
Dans les premiers jours d'avril, le 1er Bataillon, renforcé par les meilleurs soldats du 2e, est envoyé au camp de Cessieu, dans les Alpes.
Le 2e Bataillon, fort affaibli par les prélèvements dont il a été l'objet, revient à Béziers au mois de janvier 1793. La guerre contre l'Espsgne le ramène à Perpignan, le 28 avril suivant.
- Campagne des Alpes (1er Bataillon)
- Causes de la Guerre - La campagne des Alpes ne se justifie que par le désir qu'a la Convention de s'employer à l'affranchissement des peuples. Le prétexte invoqué pour déclarer la guerre au Roi de Sardaigne est l'ordre qu'il a donné, en violation des traités, de relever les fortifications de Montmélian.
Au mois de septembre 1792, le 1er Bataillon du 61e fait partie de la Division de Tournoux, sous les ordres du Maréchal de camp Camillo Rossi. Il est établi à Saint-Pons et à Thuiles et dépend de l'Armée des Alpes, que le Général de Montesquiou, son commandant, a répartie sur toute la frontière.
- Conquêle de la Savoie - Le 21, un ordre de la Convention prescrit de prendre l'offensive. Quatre cents Chasseurs, deux cents Dragons et douze Compagnies de Grenadiers, dont celles du 61e, se réunissent devant Chapareillan où les Sardes ont construit des retranchements qui sont gardés par une forte garnison. L'attaque devait se faire pendant la nuit du 21 au 22, mais elle est retardée par la pluie et l'obscurité et ne commence qu'à 7 heures du matin. Les Sardes ne résistent que faiblement et abandonnent leurs ouvrages. Apremont, Notre-Dame de Myans, Bellegarde tombent successivement au pouvoir des Français. Leurs adversaires, pris de panique, se dispersent dans toutes les directions et le 24, le Général de Montesquiou entre solennellement à Chambéry. Le Duché de Savoie est conquis par la République et forme le département du Mont-Blanc. Sur les conseils de Clavières, la Convention, dans sa fougue, décide de faire le siège de Genève, sans se préoccuper des diffiçultés de l'entreprise, ni réfléchir aux conséquences qu'elle peut avoir. Le Bataillon du 61e, resté à Chambéry, doit faire partie de l'expédition ; mais elle n'a pas lieu, sur les instances du Général de Montesquiou et les troupes de Savoie sont alors réduites. Le 1er Bataillon du 61e, désigné pour renforcer la Division du Var, arrive à l'Escarène le 21 novembre. Le Général d'Anselme s'empare de Nice à la tête de cette Division et place des garnisons dans les localités voisines. Puis un retour offensif des Piémontais lui fait perdre Sospel, Berre et Luceram. Lorsque le Bataillon du 61e arrive à l'Escarène, Sospel a déjà été reconquis. Berre et Luceram, qui tiennent encore, sont évacués sans combat, pendant la nuit du 21 au 22 novembre et la Division du Var recouvre ainsi toutes ses positions. Le Général d'Anselme ayant formé le projet de garder solidement Sospel y concentre tout d'abord une Brigade de 3.000 hommes. Il en retire ensuite la majeure partie, pour obvier aux difficultés de ravitaillement qu'occasionne l'amoncellement des neiges et ne laisse sur ce point que deux Bataillons, dont celui du 61e.
- Combat de Sospel - Le 3 décembre, ces deux Bataillons sont rappelés, à leur tour, pour être placés à I'Escarène. Ils sont attaqués, en s'y rendant par un détachement de sept ou huit cents Piémontais, qui est mis en fuite. Le 16, la Division du Var prend le nom d'Armée d'Italie. Vers la même époque, le Général d'Anselme est remplacé par le Général Biron. Dans le courant·de janvier 1793, les Piémontais profitent de l'évacuation de Sospel pour s'en emparer de nouveau. La garnison de I'Escarène est en outre menacée, ce qui décide ie Général Biron à reprendre l'offensive. Le 14 février, le Colonel Dagobert, du 51e, attaque les Piémontais et rentre dans Sospel. Enfin, dans la nuit du 27 au 28, l'Armée d'Italie se met en mouvement dans trois directions pour repousser de nombreux détachements qui se sont répandus dans la vallée du Var et le long de la Vésubie, depuis Roquebillière jusqu'à Loda.
- Combat du Pont de Loda - Le Bataillon du 61e faisant partie de l'attaque de droite, commandée par le Général Brunet, gagne le col de la Porte et descend jusqu'à la chapelle Saint-Arnoux, près de Loda, pendant que deux Compagnies du 91e gravissent les hauteurs de Saint-Colomban et poursuivent l'ennemi jusqu'à Gaudissard. Le 1er mars, le Général Brunet fait occuper le col de Raboun et détache quatre Compagnies du 61e vers la gauche, pour tourner la position de Loda, que les Piémontais tiennent solidement. Ces quatre Compagnies traversent la Vésubie et prennent pied dans le hameau de Figaret, après un combat assez vif. Vers midi, le Général Brunet reçoit la nouvelle de la prise de Lantosque par les deux Compagnies du 91e et le poste du col de Raboun. ll poursuit aussitôt sa marche en avant, arrive au pont de Loda en même temps que les Piémontais et les refoule jusque sur les hauteurs de Simalonga, après s'être emparé de tous leurs bagages. Puis toute sa troupe se dirige sur Lantosque où elle s'établit. Pendant la nuit, le Major sarde Balegno parvient à rallier cinq à six mille hommes sur le plateau de Flaut et autour des villages de Belvédère, Roquebillière et la Bollène, dans le but de couvrir les débouchés des cols de Raus et de Saint-Véran.
- Combat de Belvédère - Le 2 au matin, le Général Brunet marche contre lui. Le Colonel Dagobert, qui forme l'avant-garde avec le 51e, longe la rive droite de la Vésubie, traverse la rivière à hauteur du Vallon de la Planchette et gravit les pentes de Flaut, dont il poursuit les défenseurs jusqu'au mont Pela, tandis que le 1er Bataillon de l'Hérault pénètre dans la Bollène (la route de Lantosque à Belvédère suivait alors la rive droite de la Vésubie ; il n'y avait aucun chemin sur la rive gauche. On se rendait de la Bollène à Belvédère en passant par le plateau de Flaut). Le Bataillon du 61e, tenant la tête du corps principal, suit les traces de Dagobert, puis se dirige sur Belvédère en contournant le plateau de Flaut et remontant la Gordolasque. Il est arrêté par la violence des eaux et contraint de revenir sur la rive droite de la Vésubie. Tout le corps principal repasse alors la rivière en amont de son confluent avec le torrent puis, par un sentier étroit et difficile, débouche peu à peu sur le plateau de la Chapeile Saint-Julien. Sa situation est en ce moment très périlleuse; aucune communication ne lui est permise, ni avec le plateau de Flaut, solidement occupé, il est vrai, par un détachement du 1er Bataillon de l'Hérault, ni avec le Général Dagobert, qui a descendu dans la Gordalasque et menace Belvédère par l'est, sans parvenir à déloger l'ennemi des chapelles Sainte-Anne et Saint-Roch. Le Général Brunet prend aussitôt la résolution d'enlever le village à la baïonnette et forme dans ce but trois petites colonnes d'assaut. Le 61e, placé au centre, se précipite en avant à la voix du Colonel de Chartogne et gravit, sous le feu du canon, les terrasses d'oliviers qui le séparent de l'ennemi. Toutes les troupes du Général Brunet pénètrent simultanément dans Belvédère où elles font de nombreux prisonniers. Mais elles sont épuisées de fatigue par trois journées de marche et de combat. Aussi ne s'engagent-elles que faiblement dans le ravin de Graus, du reste encombré par les neiges, ce qui permet aux Piémontais d'effectuer leur retraite par le col de Raus. Le Colonel de Chartogne est signalé au Ministre de la guerre "pour sa belle conduite à l'attaque de Belvédère, à la tête du 1er bataillon de son régiment". Après le combat du 2 mars, les vallées du Var et de la Vésubie sont rapidement dégagées. L'armée d'Italie se porte contre la position de Saorge, tandis que le Bataillon du 61e, destiné à servir en Corse, est provisoirement établi à l'Escarène.
- Campagne de Corse (1er Bataillon)
La garnison de Corse ne se compose, au mois de mars 1793, que de cinq Bataillons continentaux, considérablement réduits par les privations et la maladie. Elle est notoirement insuffisante pour s'opposer aux agissements de Paoli, que la Convention, plus généreuse que prudente, a nommé Généralissime de l'île. On décide de la renforcer par des troupes de l'Armée d'Italie, mais celle-ci est elle-même fort appauvrie et ne peut détacher que le 1er Bataillon du 61e (un Bataillon de l'Aveyron est envoyé plus tard à Calvi). Le 6 avril, ce Bataillon arrive à Saint-Florent et se rend le même jour à Bastia. Les hésitations que l'on apporte à combattre Paoli sont funestes aux Français. Ils ne possèdent bientôt plus dans l'ile que le Cap Corse et les places de Calvi, de Saint-Florent et de Bastia. Un représentant du peuple, Lacombe Saint-Michel, prend la direction de la défense.
- Combat de Fornali - Le 18 septembre, les Anglais sollicités par Paoli viennent à son secours. Une centaine d'entre eux débarquent près de la tour de Fornali et se joignent aux Corses qui menacent Saint-Florent (la France et l'Angleterre sont en guerre depuis le 1er février 1793). Un détachement du 61e les disperse. Paoli essaie, sans y parvenir, de s'emparer de la route de Saint-Florent à Bastia. Puis il se rend à Corte, où il proclame l'indépendance de l'ile (22 septembre). Jusqu'à la fin du mois, les Corses et les Anglais se rassemblent sous les murs de Saint-Florent. Ils sont continuellement repoussés dans leurs tentatives. "Le 61e, écrit Lacombe Saint-Michel au Comité de Salut Public, a soutenu avec intrépidité le feu de l'ennemi supérieur en nombre. Dans toutes les sorties, il a chargé les ennemis avec tant de vigueur, qu'il les a mis chaque fois en déroute" (Archives historiques, carton Corse, lettre de Lacombe datée du 3 octobre 1793). Le 1er octobre, les Corses, pour appuyer une attaque par mer des Anglais, couronnent les hauteurs voisines de Fornali. Deux Compagnies du 61e se portent contre eux et s'emparent de leurs pièces. Du côté de la marine de Farinole, un autre coup de main, tenté par les Anglais, est repoussé le même jour par un poste de quelques hommes des 26e et 61e.
- Soumission du Cap Corse - L'expédition anglaise n'aboutit pas à la prise de Saint-Florent, mais elle a pour résultat de soulever le Cap Corse. Un échec que subit la garnison de Bastia contre un parti rebelle établi à Biguglia ajoute encore à la situation précaire des Français. Le 15 novembre, Lacombe Saint-Michel fait converger trois colonnes sur la commune de Farinole; il assiège un couvent retranché, contre les défenseurs duquel les soldats du 61e se battent "comme des lions", et finalement s'empare de ce couvent et du village. Ce coup de vigueur est suivi d'une telle poursuite, que tout 1e Cap Corse est soumis en moins de dix jours, sans que Paoli, dont le camp est à Murato, ose intervenir pour s'y opposer.
- Combats autour de Saint-Florent - Cette situation se maintient jusqu'au mois de février 1794. Le 5; une escadre britannique communique avec les montagnards du Nebbio et débarque des canons et des soldats sur la plage de Saleccia. La tour de Fornali et le camp qui l'avoisine résistent courageusement, pendant neuf jours, aux attaques des anglo-corses, qui ont réussi à s'emparer de la tour Mortella. Mais le 17, à 9 heures du soir, le cri de "sauve qui peut", poussé par un traitre, affole les Français et provoque leur retraite. Les Grenadiers du 61e ne partagent pas cette terreur panique. Groupés autour du Général Gentili, avec les Grenadiers du 52e et quelques marins, ils contiennent pendant plus d'une heure les efforts d'un ennemi vingt fois supérieur en nombre et ne se retirent que lorsque toute résistance est devenue impossible. Un Grenadier du 61e, aperçoit parmi les Anglais un soldat du 52e qui a déserté le matin et donné à l'ennemi le mot de ralliement. Il se précipite sur lui et lui fend la tête d'un coup de sabre en lui criant : "Lâche ! tu ne trahiras plus personne". Dans son laconisme, le rapport officiel s'exprime ainsi : "Les grenadiers du 61e se sont parfaitement battus; aussi, ont-ils presque tous succombé" (Archives historiques, Corse. Rapport daté du 19 février). Quelques jours auparavant, Lacombe Saint-Michel écrivait au Comité de Salut public : "Le 61e, ci-devant Vermandois, montre un courage et un patriotisme au-dessus de tout éloge. Aujourd'hui, en venant de Saint-Florent, j'ai trouvé des soldats de ce corps sortant moribonds de l'hôpital de Bastia et pleurant de crainte de ne pas se trouver à la bataille" (Archives historiques, Corse. Lettre du 9 février 1794).
- Retraite sur Bastia - La démoralisation des défenseurs de Fornali ayant gagné ceux de Saint-Florent, Lacombe Saint-Michel ordonne la retraite sur Bastia. Le 25 février, toutes les hauteurs voisines de cette ville sont garnies de Paolistes, qui travaillent à des batteries dont les Anglais doivent fournir les canons. Lacombe Saint-Michel reprend l'offensive et se débarrasse, en moins de trois quarts d'heure, du cercle de ses ennemis. Les Paolistes retournent à Saint-Florent dans un désordre inexprimable. La garnison de Bastia, trop faible pour les poursuivre, se contente d'établir quelques retranchements sur le monte Maggiore.
- Défense de Bastia - Pendant plus d'un mois, l'escadre britannique, contrariée par le mauvais temps, ne fait que des apparitions devant Bastia. Mais le 2 avril, vingt vaisseaux bloquent le port et, le 7, des retranchements anglais sont établis à la chapelle Saint-Roch, au-dessus de Toga. Le cercle des assiégeants se resserre peu à peu et le feu des batteries devient de plus en plus violent sans que la garnison et les habitants se départissent de leur fermeté. Les assiégés supportent un bombardement qui dure 40 jours et auquel ils ne peuvent répondre faute de poudre. Toutes les attaques dirigées contre leurs retranchements sont repoussées, notamment les 13 et 18 avril. Le manque de vivre finit seul par amener la capitulation. Elle est signée le 22 mai. La garnison obtient les honneurs de la guerre et 443 hommes du 61e, pour la plupart malades ou blessés, sont conduits à Toulon par le Chef de Brigade Aicher, qui a remplacé au mois d'avril le Colonel de Chartogne.
- Défense de Calvi - Après la prise de Bastia, les Anglo-paolistes dirigent leurs efforts contre Calvi, dont la garnison a recueilli quelques hommes du 61e. La ville subit un bombardement de 34 jours, qui la réduit en cendres. Elle ne capitule, le 10 août, que lorsque le nombre de ses défenseurs ne suffit plus pour garder les brèches. Les quelques soldats qui restent sont rapatriés. Ils arrivent à Toulon le 2 septembre.
- Campagne des Pyrénées-Orientales (2e Bataillon).
- Causes de la guerre - La mort de Louis XVI (21 janvier 1793) amène une rupture définitive entre la République et la plupart des monarchies. Le 17 avril, une armée espagnole, conduite par le Général Ricardos, pénètre dans le Roussillon par Saint-Laurent de Cerda dont la trahison lui a ouvert les portes, et menace Perpignan. L'armée française des Pyrénées-Orientales, commandée par le Général de Flers, se compose de 8.000 hommes seulement, dont 5.000 se trouvent dans les places. Les approvisionnements font partout défaut. Le Général de Flers dispose son armée dans le Rear, avec une avant-garde entre le mas Conte et le mas Deu, et attend dans cette position l'arrivée de son adversaire.
- Combat du mas Deu - Le 20 mai, de très grand matin, le Général Ricardos se porte en avant sur trois colonnes. Le 2e Bataillon du 6le, chargé de contribuer à la défense du mas Deu, combat vaillamment jusque vers midi ; mais il est accablé par le nombre et contraint à se replier sur Perpignan. Le Général Dagobert cherche vainement à rétablir le combat en donnant l'exemple du courage. L'avant-garde est entièrement battue et dans sa fuite trop précipitée elle entraîne le reste de l'armée du Général de Flers. Le Général Ricardos, qui a perdu beaucoup de monde, ne poursuit heureusement pas sa victoire. Il se retire vers le Boulou, pendant que l'armée française, un peu revenue de sa surprise, campe au mas de Ros. Jusqu'au mois de juillet, le 2e Bataillon du 61e reste au camp de Ros (dit aussi de l'Union), sous les ordres du Général Puget Barbentane (1re Division). Le 15, il contribue à repousser une attaque des Espagnols, qui se sont attardés à s'emparer de Thuir et de la rive droite de la Tet jusqu'à Ille.
- Bataille de Perpignan - Le Général Ricardos, disposant de 28.000 combattants et de 100 pièces d'artillerie de tout calibre, forme le projet singulier de faire le siège du camp de l'Union. Le 17 juillet, à 3 heures du matin, les Espagnols font feu de leur artillerie, mais leurs projectiles, tirés de trop loin ne portent pas. De Flers, sans s'émouvoir, recommande de ne pas répondre, et attend tranquillement au mas de Ros la fin de ce bombardement. Vers neuf heures, un coup de canon tiré sans ordre est pris pour un signal. Aussitôt le combat devient général sur toute la ligne et se termine, moins de trois heures après, par la retraite des Espagnols. Le Général Poinçot, qui se lance imprudemment à leur poursuite, est arrêté devant le village de Canohes et entouré par des forces supérieures. Le 2e Bataillon du 61e contribue à le dégager. La lutte, de ce côté, ne prend fin qu'à sept heures du soir, après une mêlée furieuse de cavaliers et de fantassins. L'armée espagnole achève paisiblement sa retraite et les Français retournent à leur camp. La bataille de Perpignan n'a rien de décisif, mais elle donne du courage aux jeunes troupes du Général de Flers, qui ont vu reculer pour la première fois leurs ennemis depuis le commencement des hostilités. Après la bataille de Perpignan, l'Armée des Pyrénées-Orientales continue à rester sur la défensive. Deux Compagnies du 61e sont employées, l'une à Montalba, l'autre à Mosset pour garder les passages de la Tet. Le Général de Flers, destitué, est remplacé le 7 août, par le Général Puget-Barbentane.
- Combat de Mosset - Le 16 août, 1,800 Espagnols partis de Prades s'emparent du village de Mosset. Trois cents hommes de différents corps, qui en constituent la garnison, sont trahis par un Officier nommé Chalvasson et faits prisonniers pour la plupart (Chalvasson n'appartenait pas au 61e). Une quarantaine de soldats de la Compagnie du 61e réussissent cependant à se faire jour les armes à la main. Ils se joignent à la garnison de Montalba et se replient avec elle sur Corneilla.
- Défense du camp de Corneilla - Le 29 août, le camp de Corneilla est attaqué par des forces supérieures. Les deux Compagnies du 61e, qui en ont la garde, font bonne contenance et se retirent sur Salces. Elles sont citées avec éloge par le Général Ramel. Les Espagnols continuent à s'avancer, grâce à leur nombre, et le 8 septembre, 12.000 d'entre eux prennent position à Peyrestortes où ils travaillent à se retrancher. Le 12, le Général Puget-Barbentane se démet de son commandement en faveur du Général Dagobert.
- Combat du Vernet - Le 17, à 4 heures du matin, six mille Espagnols du camp de Peyrestortes se portent sur le village du Vernet dont ils s'emparent. Ils mettent alors quelques pièces en batterie et lancent des boulets sur Perpignan, où ils occasionnent plus de bruit que de dommage. Le Général d'Aoust et le Représentant du peuple Cassanyes, qui se trouvent dans la ville, prennent cependant le parti de marcher à leur rencontre. Ils se rendent au camp de l'Union, y choisissent 2.000 hommes des meilleures troupes, parmi lesquelles le Bataillon du 61e, et les portent sur deux colonnes contre le village du Vernet, qui est repris malgré tous les efforts de la cavalerie espagnole. A neuf heures du matin, l'ennemi, battu sur tous les points, regagne son camp de Peyrestortes.
- Bataille de Peyrestortes - Pour ne pas laisser se refroidir l'enthousiasme des soldats, le Représentant du peuple Cassanyes forme le projet d'attaquer immédiatement le camp de Peyrestortes. De nouvelles troupes sont tirées du camp de l'Union, et la garnison de Salces, conduite par le médecin Goguet, est avisée de prêter son concours. Une seconde bataille commence dans l'après-midi et se poursuit jusqu'à dix heures du soir, avec un acharnement sans exemple. Enfin, les troupes françaises s'élancent à la baïonnette et pénètrent dans le camp par trois directions opposées. Les Espagnols, vaincus bien que deux fois supérieurs en nombre et solidement retranchés, prennent la fuite de tous les côtés en abandonnant 2.300 morts ou blessés, 1.200 prisonniers, 46 pièces d'artillerie, 7 drapeaux et tout le matériel de leur camp. Lea Compagnies du 61e établies au camp de l'Union et la garnison de Salces prennent une part glorieuse à la journée de Peyrestortes. Elles comptent aussi beaucoup de morts. De ce nombre est le Chef de Bataillon Trogues, dont la poitrine a été traversée par un coup de feu au pied des retranchements ennemis. Le 18, les troupes du camp de l'Union se retirent du champ de bataille. Il ne reste à Peyrestortes que le médecin Goguet, avec la garnison dont il a le commandement, c'est-à-dire, 120 hommes du 61e et quelques renforts venus de l'intérieur.
- Bataille de Truillas - Le Général Ricardos ne dispose plus que de 16.000 hommes retranchés autour de Ponteilla. Le Général d'Aoust, Goguet et Cassanyes, forment le projet de l'attaquer dans la nuit du 18 au 19 ; mais le 18, le Général Dagobert, qui se trouve dans la Cerdagne, arrive à Perpignan et donne de nouveaux ordres. Les journées du 19 et du 20 et la matinée du 21 se passent dans l'inaction. Enfin, dans la soirée du 21, l'attaque est décidée. Elle doit être faite le lendemain matin, à droite par Goguet, qui a pour mission de gagner le chemin de Céret ; à gauche par d'Aoust, destiné à couper la grande route du Boulou et au centre par Dagobert, dont le rôle consiste à se porter directement sur le camp. Le bataillon du 61e fait partie de la colonne du centre. A la voix de Dagobert, il s'avance sur l'armée ennemie, s'empare d'une première redoute et pénètre dans le camp. Malheureusement, les deux colonnes extrêmes n'arrivent pas, ce qui permet au Général Ricardos de concentrer tous ses efforts contre la colonne du centre. Il se produit alors un revirement subit. Les troupes qui ont combattu, le 17, avec un courage extraordinaire, jettent leurs armes pour la plupart et se rendent prisonnières. Dagobert n'a bientôt plus autour de lui qu'une poignée d'hommes, de tous les Régiments, qui l'escortent jusques sur les hauteurs de Sainte-Colombe où il rencontre Cassanyes. Il cède d'abord à un découragement profond. Puis, il retrouve toute son énergie et repousse à coups de canon six Bataillons espagnols qui le serrent de trop près. Mais le nombre finit par triompher de son courage et la bataille est perdue sans retour. Alors il fait sauter ses caissons, précipite ses bagages dans les ravins et s'enfonce dans les Aspres où les Espagnols déconcertés ne songent pas à le poursuivre.
- Retraite des Espagnols - La bataille de Truillas coûte aux Français près de 3.000 tués, blessés ou prisonniers. Elle est, pour eux, la contre-partie de la bataille de Peyrestortes. Le Général Ricardos, quoique victorieux, n'ose pas néanmoins, reprendre l'offensive. Quelques détachements ayant paru sur ses derrières, il craint même d'être coupé de ses communications et lève son camp de Ponteilla, le 30, pour se replier sur le Boulou. Le Général Dagobert ayant retourné en Cerdagne est remplacé par d'Aoust. Le 1er octobre, l'Armée des Pyrénées-Orientales est conduite sur les hauteurs du mas de la Paille et du Pla del Rey, où se forme un camp dénommé de la République. Les débris du 61e, ressemblés au Pla del Rey, sont employés jusqu'au 26 novembre à de continuelles escarmouches contre les Espagnols.
- Combats autour du camp de la République - Le 26, le Général Ricardos, qui a reçu un renfort de 6.000 Portugais, fait attaquer le camp de la République. Une de ses colonnes s'avance à couvert et pénètre dans un poste appelé la batterie basse ; mais 30 hommes du 61e, commandés par le Lieutenant Rochon et le Sergent Clairville, se précipitent sur les premiers assaillants et les refoulent à coups de baïonnette. Les Espagnols retournent dans leur camp. Le 6 décembre, le Général Ricardos arrive à s'établir sur les sommets des Albères. Le 14, il subit un échec en faisant attaquer Bagnols de Marende. Ces alternatives de succès et de revers finissent par décider d'Aoust à rétrograder sur le camp de l'Union. Pour masquer son mouvement, il se porte, le 19, sur le camp portugais de Villalongue, avec 2.000 hommes parmi lesquels ceux du 61e. Malgré le feu de trois Bataillons ennemis, il s'empare successivement de toutes les redoutes, en fait enlever les canons et le matériel et rentre au camp de la République. Le 21, il est attaqué à son tour par le Général Ricardos. Après une très vive fusillade, les postes français cèdent sous le nombre. Mais les troupes du Pla del Rey viennent à leur secours et les Espagnols sont repoussés. D'Aoust en profite pour accélèrer sa retraite. Le 24, le Bataillon du 61e est rétabli au camp de l'Union. Le Général Ricardos, de son côté, occupe les camps du Pla del Rey et du Boulou ; puis, sous leur protection, se retire derrière le Tech où il fait reposer son armée. Au commencement de 1794, un nouveau Général en chef, Dugommier, se prépare à reprendre l'offensive. Son armée a été augmentée, mais elle se compose surtout de jeunes troupes (Volontaires) qui n'ont aucune connaissance de leur métier, et chez lesquelles "l'espérance d'un fusil à baïonnette est un sujet d'émulation". Le 2e Bataillon du 61e, renforcé par de récentes levées, est affecté à la Division du centre commandée par le Général Pérignon.
- Reprise de l'offensive - Le 26 mars l'armée française se porte en avant. Le Bataillon du 61e prend position entre les hauteurs du Réar et le plateau de Bruilla, un peu en arrière du moulin de la Seille, où il se fortifie. A partir du 29 mars et jusqu'au 6 avril, ont lieu des escarmouches de tous les instants. Les Espagnols, qu'elles finissent par lasser, se replient sur le Boulou.
- Bataille de Montesquiou - En attendant une flottille qui n'arrive pas, et dont il a besoin pour faire le siège de Collioure, Dugommier prend sur lui de déloger ses adversaires. Il trompe le Comte de la Union, qui a remplacé le Général Ricardos, et l'attire vers le revers méridional des Aspres, en envoyant à Oms la Division de droite (Augereau) de l'Armée des Pyrénées-Orientales. Puis le 29 avril, avant le jour, toute la Division Pérignon se porte contre le camp du Boulou. Le Bataillon du 61e faisant partie de l'attaque principale (Brigade Chabert), se déploie devant Villalongue. Au point du jour, les baïonnettes françaises apparaissent de tous les côtés aux yeux des Espagnols surpris. Le combat s'anime, mais Pérignon redoute de faire tuer trop de monde dans une attaque générale. Une imprudence du Représentant Milhaud (plus tard Général) l'oblise à en donner le signal vers une heure. Alors les Grenadiers en colonne, les troupes légères en désordre, mais dans un bel élan, se ruent sur les retranchements de Montesquiou où ils pénètrent. Il n'est pas deux heures et la prise de Montesquiou peut être complétée par celle des Trompettes, ce qui assurerait la possession de tout le camp du Boulou. Pérignon préfère s'établir solidement sur les positions qu'il a conquises et se contente de laisser tirailler ceux de ses Corps qui ont le moins souffert. Le ler mai, le Général Dugommier, qui la veille a groupé ses forces, fait occuper le Pertus, sur la route d'Espagne, et recommence le combat. La retraite des Espagnols, d'abord conduite méthodiquement, ne tarde pas à dégénérer en une déroute indescriptible. Ce désastre coûte au Général de la Union, 1500 tués, autant de prisonniers, 800 chevaux, ses propres équipages et les bagages de 20,000 hommes. Les Français ne perdent qu'une centaine d'hommes mis hors de combat. "Cette prise de Montesquiou, a dit le capitaine Fervel, eut une longue célébrité, et fit, jusqu'à la fin de leur carrière, l'orgueil de tous ceux qui eurent le bonheur d'y prendre part" (Campagne de la Révolution dans les Pyrénées-Orientales, t. 1, p. 232).
- Poursuite des Espagnols - Le Général Dugommier, dont les mouvements sont dictés par le Comité de Salut Public, ne poursuit les Espagnols que très faiblement. La Division Pérignon s'arrête à Maureillas et détache la Brigade Chabert (61e) pour fermer le col de Banyuls. Conduite par des guides qui ne connaissent qu'imparfaitement le pays, cette Brigade s'égare dans les rochers des Albères et n'arrive au col que le 5 au soir, après une marche de 42 heures. Les Espagnols ont eu le temps de passer et de se réfugier sous le canon de Figuières.
- Prise de Bellegarde - Après la retraite des Espagnols, le Général Dugommier fait assiéger Bellegarde et les petites places de la côte. Le Bataillon du 61e concourt à l'investissement de Bellegarde en s'établissant au col de Portell. La ville, courageusement défendue, résiste longtemps. La Union, tente un suprême effort pour en secourir la garnison et fait dans ce but envahir la montagne Noire. Mais il est battu et sa rage impuissante lui inspire, contre ses propres troupes, des châtiments qui les terrifient. Le gouverneur de Bellegarde, entièrement aux abois, capitule le 18 septembre. La guerre est portée désormais sur le territoire de l'Espagne et cette délivrance du sol français est célébrée, dans toute l'armée, par une fête nationale des victoires.
- Guerre à mort - La capitulation de Collioures est signée le 26 mai. Le Général de la Union refuse d'en ratifier les conditions, ce qui met le comble à l'exaspération de l'Armée des Pyrénées. Le 10 aoOt 1794, la Convention rend un Décret de guerre à mort contre I'Espagne.
- Attaque des lignes de Flguières - Pour repousser, à son tour l'invasion, de la Union fait couvrir la place de Figuières par un Corps de 46,000 hommes réparti dans 97 ouvrages qui se développent, depuis les sources du Manol jusqu'à la côte, sur un front de 25 kilomètres. La force de l'armée française n'est que de 36.000 combattants formés en dix Brigades. Le 17 novembre, Dugommier attaque son adversaire. La Division Augereau remporte un brillant succès sur la gauche des Espagnols, et s'établit à Roca-Blanca. Mais, vers le soir, le Général Dugommier a la poitrine broyée par un obus. Le Général Pérignon, qui le remplace, tire du camp de la Estrada les Brigades Chabert (61e) et Guillot, qui n'ont pas encore combattu de la journée et les met sous les ordres du Général Augereau.
- Prise de la redoute de Nova Sierra del Roure - Le 20, la bataille recommence. Les soldats de la Division Augereau se portent intrépidement contre la redoute de Nova Sierra del Roure, dont les parapets taillés dans le roc sont gardés par 4.000 défenseurs et 25 pièces de gros calibre. Accueillis par une formidable décharge, les rangs de la Division sont rompus. Alors, Officiers et soldats se ruent pêle-mêle et à la baïonnette dans les fossés, s'accrochent aux escarpes, brisent les palissades et comme en 1756 à Port-Mahon, les premiers arrivés tendent la main aux autres "pour les présenter dans la salle du bal". En moins de quatre heures, près de 100 redoutes patiemment construites pendant six mois tombent au pouvoir des Français. Les soldats de la Brigade Chabert, poussent l'audace jusqu'à faire tirer sur Figuières avec des canons qu'ils sont allés chercher sous les murailles de la forteresse. Le désastre subi par les Espagnols est inexprimable. La Union, accouru en toute hâte au secours de Nova Sierra del Roure, est tué près du pont des Moulins, tandis que les fuyards de son armée s'écrasent aux portes de Figuières. Il n'est fait aucun prisonnier ; mais près de dix mille ennemis périssent en combattant ou sont massacrés sans pitié.
- Prise de Flgulères - Le 21, la Brigade Chabert campe au pont du bas Ricardell. Le 23, Pérignon fait sommer le Gouverneur de Figuières, Andreas de Torrès, de lui livrer la place et le prévient qu'en cas de refus toute sa garnison sera massacrée. Dans la matinée du 28, après quelques tergiversations lamentables, de Torrès se rend à discrétion avec 9.017 soldats et livre 171 bouches à feu, 200 milliers de poudre et des approvisionnements inouïs, parmi lesquels 10.000 quintaux de farine. Les Espagnols qui plus tard, à Girone et à Sarragosse, donneront l'exemple d'un courage indomptable, cèdent lâchement devant une poignée de Français, qui n'ont pour artillerie que celle dont ils s'emparent, et se battent à la baïonnette, afin d'économiser leur poudre. Au lendemain de la bataille de Figuières, les Représentants qui se trouvent à l'Armée des Pyrénées-Orientales veulent récompenser les soldats qui se sont plus particulièrement distingués. Les Chefs de Corps, à qui des propositions sont demandées, répondent que "la défaite des esclaves était la seule récompmse ambitionnée par leurs soldats".
- Prise de Roses - Pendant que Pérignon s'attarde dans l' Ampurdan, dont les campagnes sont dévastées autant par des gens sans aveu que par les troupes elles-mêmes, la Brigade Chabert est envoyée au secours de la Division Sauret qui a mis le siège devant Roses. Le 7 décembre, cette Brigade, placée du côté des marais de Castillon, repousse une sortie des Espagnols. Le siège régulièrement conduit, malgré le mauvais temps qui ne cesse de contrarier les travaux et une épidémie qui en est la conséquence, aboutit, le 3 février, à une capitulation.
- Négociations pour la paix - La prise de Roses termine, sur la frontière des Pyrénées-Orientales, l'immortelle campagne de 1794 dont un orateur anglais a pu dire qu'elle était sans exemple dans les annales du monde. La paix est convenue en principe ; mais l'artificieux favori qui dirige le Cabinet du Roi d'Espagne crée des incidents, dont le seul résultat est de prolonger la lutte pendant cinq mois et d attirer à son pays de nouvelles défaites.
- Combat de Bascara - La rupture, au mois de mai, des négociations entamées à Figuières occasionne les combats de Sistella et de Bascara. Le 2e Bataillon du 61e, placé au camp d'Alfar (Brigade Point), participe à celui de Bascara (6 mai).
- Traité de Bâle - Le traité de Bâle, signé le 22 juillet, met un terme aux hostilités. Mais à cette date, le 61e Régiment d'infanterie, issu de Vermandois, n'existe déjà plus.
- Fin du Régiment - Pour donner de la cohésion à la masse d'hommes qu'elle a mis sur pied, la Convention a décrété, le 21 février 1793, sur la proposition du Comité de Salut Public, de former des Demi-brigades de Bataille composées "d'un bataillon des ci-devant régiments de ligne et de deux bataillons de volontaires" (article 1er du Décret). Le 61e Régiment d'infanterie (ex-Vermandois) perd son numéro à la suite de ce Décret, pour contribuer à la formation des 121e et 122e Demi-brigades de Bataille.
Sur le papier, la 121e Demi-brigade est constituée, le 23 septembre 1793, par le 1er Bataillon du 61e, le 1er Bataillon de l'Union (Volontaires des Bouches-du-Rhône) et le 7e Bataillon du Var. En réalité, cette Demi-brigade ne prend corps que postérieurement au 5 juin 1794, date du retour sur le continent des troupes de la garnison de Bastia. A la réorganisation de 1796 (18 nivôse an IV) elle entre dans la composition de la 39e Demi-brigade de seconde formation.
La 122e Demi-brigade, dans laquelle sont compris les 3e et 4e Bataillons de la Haute-Marne selon l'Historique régimentaire (de la Haute-Garonne selon B. Coppens), n'est organisée que le 19 juin 1795, lorsque le ralentissement des opérations de l'Armée des Pyrénées-Orientales permet d'en retirer, sans danger, le 2e Bataillon du 61e. A la réorganisation de 1796 (18 nivôse an IV) elle entre dans la composition de la 57e Demi-brigade de seconde formation.
Les 121e et 122e Demi-brigades de Bataille passent à l'Armée d'Italie. Leur histoire n'est plus celle du 61e.
- 61e Demi-brigade de première formation
La 61e Demi-brigade de Bataille est formée le 10 mai 1794 selon l'Historique régimentaire, des éléments suivants :
- 1er bataillon du 31e Régiment d'infanterie (ci-devant Aunis)
B. Coppens indique : Aunis (31e), créé en 1621 (l'Historique donne la date de 1610, sous un autre nom. 32e Régiment en 1789; 31e Régiment en 1791. Son Colonel est alors le Colonel Puget de Barbentane, dont il a été question plus haut. Lors du 1er amalgame en 1794, son 1er Bataillon entre dans la composition de la 61e Demi-brigade de première formation ; son 2e Bataillon n'est pas amalgamé (il entrera en 1796, lors du second amalgame, dans la formation de la 76e Demi-brigade de seconde formation). Aunis fait les Campagnes de 1792 et 1793 à l'Armée de l'Ouest; 1794 à l'Armée des Côtes de Cherbourg. Ce Régiment donne les plus grandes preuves de valeur à l'affaire de Savenay, le 2 Nivôse an II (22 décembre 1793).
- ler Bataillon de Volontaires du Morbihan.
Ce Bataillon est créé le 1er octobre 1791. L'Historique régimentaire indique qu'il est embarqué le 9 juillet 1792 pour Saint-Domingue. On le ramène à Brest le ll novembre 1793. Il est selon cet Historique, amalgamé le 25 mars 1794 avec le 16e Bataillon de Paris.
- 8e Bataillon de Volontaires de la Manche.
Créé le 14 juin 1793, il reçoit le 7 mars 1794, 700 réquisitionnaires de Seine-Inférieure et de Seine-et-Marne.
Le 1er Bataillon du 31e a son Dépôt à Caen et se trouve à Cherbourg avec le ler Bataillon du Morbihan. Le 8e Bataillon de la Manche est à Mayenne. Peu de temps après son organisation, le 3e Bataillon de la 61e contribue, par un détachement de 20 hommes commandé par un Officier, à la formation de la 2e Légion des Francs, dite Légion rouge. Le 9 juin 1794, le commandant Camus, du 8e Bataillon de la Manche, est nommé Chef de Brigade et placé à la tête de la 61e (Louis Camus, né à Châlons, soldat au Régiment de l'Aunis en 1778, Sous-lieutenant en 1791, Commandant le 7 novembre 1798 et Chef surnuméraire de la 76e Demi-brigade en 1796, rentre dans aes foyers le 26 décembre de la même année. Il reprend du service en juillet 1797, devient Général en 1801, et meurt à Vitepsk en 1813).
La 61e Demi-brigade de bataille est employée à l'Armée des Côtes de Cherbourg sous les ordres du Général Vial. Elle participe à la guerre de Vendée.
La constitution des Demi-brigades de bataille n'a pu avoir lieu partout. Plusieurs numéros sont restés vacants. De plus, le feu, la maladie et la désertion ont réduit considérablement les effectits des Demi-brigades existantes. Pour obvier à tous ces inconvénients, le Comité de Salut Public décide, le 1er novembre 1795, de réorganiser l'armée et de former cent Demi-brigades de ligne destinées à servir sur le continent. Deux Arrêtés du Directoire des 8 et 9 janvier 1796, règlent les détails de cette mesure, qui est appliquée dès le mois de février. En conséquence, la 61e Demi-brigade de Bataille disparaît. Elle est incorporée dans la 76e qui conserve provisoirement son numéro. Le 30 mars 1796, un nouvel arrêté du Directoire fait connaître que les numéros des Demi-brigades conservées seront tirés au sort. Mais par suite d'une exception due au hasard, la 76e Demi-brigade de Bataille conserve son numéro et devient 76e Demi-brigade de ligne.
/ Formation de la 61e Demi-brigade de ligne.
La 61e Demi-brigade de deuxième formation a été formée en 1796 (Arrêté du 18 Nivôse an 4) des unités suivantes :
- 24e Demi-brigade de première formation.
La 24e Demi-brigade de première formation est formée des unités suivantes :
- 2e Bataillon du 12e Régiment d’infanterie (ci-devant Auxerrois)
Auxerrois (12e) a été formé en 1776 du dédoublement de La Marine. 12e Régiment en 1789. 36e Régiment en 1791. Au mois de septembre 1792, selon l'Historique régimentaire, ce Bataillon a réçu 100 recrues de Paris et 50 hommes du Régiment suisse de Reynach. Le 1er Bataillon d'Auxerrois a été incorporé lors du premier amalgmame dans la 23e Demi-brigade de 1ère formation. Le 2e dans la 24e. Auxerrois a fait les campagnes de 1792, 93 et 94 à l'Armée du Nord. Le 1er Bataillon de ce Régiment a fait partie de la garnison du Quesnoy.
- 3e Bataillon de la Somme
Créé à Amiens le 2 septembre 1791. Au mois de juin 1793, ce Bataillon reçoit 600 réquisitionnaires des districts de Chartres, Beauvais et Saint-Venant.
- 10e Bataillon des Réserves
Créé à Soissons, le 13 septembre 1792 avec quatre Compagnies des Volontaires de Saône-et-Loire et quatre compagnies des Volontaires du Pas-de-Calais, de la Nièvre, de l'Yonne et du Calvados; son Chef est Sissone.
L'Historique du 61e ajoute également les 2e et 4e Bataillons de la réquisition du District d'Amiens, formés le 15 juin 1793. Ils ne sont pas donnés par B. Coppens.
La 24e Demi-brigade de Bataille, d'abord établie au camp de Groningue, est transférée à Munster vers le 15 décembre 1793. La 24e combat brillamment à l'Armée de Sambre-et-Meuse sous les ordres de Jourdan, dans la Division de Marceau.
A la réorganisation de 1796 (18 nivôse an IV), la 24e de Bataille entre dans la composition de la 61e Demi-brigade de seconde formation. Le 13 février 1796, la 24e Demi-brigade quitte la Division Marceau, et arrive à celle de Championnet le 19, pour former, le 24 février, la 61e de Ligne (Pajol (Cte de) : « Pajol, Général en chef », Firmin Didot, Paris, 1874, t. 1, p. 275).
- 138e demi-brigade de première formation
La 138e Demi-brigade de première formation (1794) a été formée des unités suivantes :
- 2e Bataillon du 74e Régiment d’infanterie (ci-devant Beaujolais)
Beaujolais a été créé en 1674. 76e Régiment en 1789; 74e Régiment en 1791. Au mois de mars 1792, le 2e Bataillon reçoit 450 recrues du Nord. Beaujolais fait les campagnes de 1792 et 1793 à l'Armée du Nord. Au mois d'août 1793, cinquante hommes du 72e de ligne (Vexin), et 50 du 5e Bataillon de la Somme sont versés dans le 2e Bataillon de Beaujolais. Beaujolais fait la campagne de 1794 à l'Armée de l'Ouest.
En vue d'une reprise prochaine des hostilités, Kleber fait, le 28 août 1794, une nouvelle répartition de ses forces; il les partage en quatre Divisions; le 2e Bataillon du 74e de Ligne est à la Division Friant (Pajol (Cte de) : « Pajol, Général en chef », Firmin Didot, Paris, 1874, t. 1, p. 91).
Lors du premier amalgame, Le Corps de Bernadotte est composé le 13 octobre 1794 de trois Brigades; le 2e Bataillon du 74e de Ligne est à la Brigade Barjonet, entre Beer et Heugen (Pajol (Cte de) : « Pajol, Général en chef », Firmin Didot, Paris, 1874, t. 1, p. 125).
Le 1er Bataillon du 74e de Ligne n'est pas amalgamé (il entrera dans la composition de la 70e Demi-brigade de Ligne lors du second amalgame); le 2e entre dans la composition de la 138e Demi-brigade de première formation.
- 5e Bataillon des Vosges
Formé à Epinal le 20 novembre 1791. Au mois de juin 1793, ce Bataillon reçoit 500 réquisitionnaires de l'Eure-et-Loir et des Ardennes.
En vue d'une reprise prochaine des hostilités, Kleber fait, le 28 août 1794, une nouvelle répartition de ses forces; il les partage en quatre Divisions; le 5e Bataillon des Vosges est à la Division Friant (Pajol (Cte de) : « Pajol, Général en chef », Firmin Didot, Paris, 1874, t. 1, p. 91).
Le Corps de Bernadotte est composé le 13 octobre 1794 de trois Brigades; le 5e Bataillon des Vosges est à la Brigade Barjonet, entre Beer et Heugen (Pajol (Cte de) : « Pajol, Général en chef », Firmin Didot, Paris, 1874, t. 1, p. 125).
- 2e Bataillon de la Vienne
Créé le 5 septembre 1792; son chef est Jourdan.
Le Corps de Bernadotte est composé le 13 octobre 1794 de trois Brigades; le 2e Bataillon de la Vienne est à la Brigade Barjonet, entre Beer et Heugen (Pajol (Cte de) : « Pajol, Général en chef », Firmin Didot, Paris, 1874, t. 1, p. 125).
La 138e est au camp de Metternich. Elle combat brillamment à l'Armée de Sambre-et-Meuse sous les ordres de Jourdan; elle est à la Division Championnet.
La 138e Demi-brigades (récemment organisée avec le 2e Bataillon du 74e de Ligne, le 2e Bataillon de la Vienne et le 5e des Vosges), fait partie de la Division Chapsal; elle quitte, le 8 novembre 1794 au matin, ses cantonnements de la rive gauche de la Meuse, entre les Divisions Duhesme et Montaigu; elle traverse Maëstricht et vient à Welten; le 9, elle se rend à Aldenhoven et, le 10, à Bedburg et sur l'Erft, d'où elle doit plus tard se porter sur la rive gauche du Rhin.
La 138e demi-brigade passe à Zons, Rheinfeld et Dormagen (Pajol (Cte de) : « Pajol, Général en chef », Firmin Didot, Paris, 1874, t. 1, p. 139).
A la réorganisation de 1796 (18 Nivôse an IV - 8 janvier 1796), la 138e Demi-brigade Bataille entre dans la composition de la 61e Demi-brigade de seconde formation. L'Historique régimentaire indique que "Le 24 février 1796, à l'armée de Sambre-et-Meuse, la 138e demi-brigade de bataille est incorporée dans la 24e. Celle-ci conserve provisoirement son numéro et prend ensuite le numéro 61, à la suite d'un tirage au sort opéré, le 5 mai, chez le général Ernouf, chef de l'Etat-Major de l'armée de Sambre-et-Meuse".
Le Chef de Brigade Posser (Posser (François), né en 1743, à Albestroff (Meurthe), soldat en 1763, Sous-lieutenant en 1791, Chef de Brigade en 1793, est placé à la suite de la 61e. Il commande successivement les places d Arlon, de Liége et de Venloo, puis rentre au Dépôt du Corps et prend sa retratte le 22 octobre 1799), de la 24e, prend en théorie le commandement de la 61e de seconde formation. Mais il est absent lorsque la Demi-brigade est constituée, et le Chef de Brigade Barjonnet (Barjonnet (Claude-Louis), né en 1768, à Vittel (Vosges), Garde national en 1789, Capitaine en 1790, Lieutenant-colonel en second du 5e Bataillon des Vosges en 1791, Chef de Brigade en 1794, commandant de la 61e en février 1796, se retire du service le 10 mars 1797), de la 138e, le remplace, d'abord à titre provisoire puis définitivement. Le Chef de Brigade Posser n'a donc commandé que sur le papier la 61e de seconde formation.
/ Campagne de 1796 à l'Armée de Sambre-et-Meuse
Le 31 décembre 1795, un armistice a été conclu entre la France et l'Autriche, mais les deux pays ont un égal désir d'y mettre un terme. Dès le 21 mai 1796, cet armistice est dénoncé par l'Archiduc Charles et le 31, les hostilités recommencent.
A l'ouverture de la campagne, la 61e Demi-brigade fait partie de la 6e Division que commande le Général Championnet.
L'Armée de Sambre-et-Meuse est partagée en trois Corps échelonnés sur les bords de la Nahe et de la Wupper et le long du Rhin, entre ces deux rivières. La Division Championnet, placée au centre, est entre Diebach et Coblentz.
- Offensive sur le Lahn.
Le 31 mai à minuit Jourdan prend l'offensive. La Division Championnet s'empare de Nieder-Diébach, tandis que Kléber, avec l'aile gauche de l'Armée de Sambre-et-Meuse, se porte sur Weilburg, où il arrive le 6 à la suile de quelques combats heureux.
Jusqu'au 15, les Autrichiens, commandés par le Général Wartensleben, restent postés sur la rive gauche de la Lahn depuis Runkel jusqu'à Nassau. La Division Championnet passe sous les ordres de Kléber, entre Dietz et Nassau sur la rive droite de ce même cours d'eau.
- Retraite sur le Rhin.
Le 15, l'Archiduc Charles arrive au secours de Wartensleben et entreprend de se porter par Wetzlar sur les communications de Kléber. Jourdan craint un échec pour l'aile gauche de son armée et la rappelle aussitôt sur le Rhin. La Division Championnet retourne à Coblentz.
- Reprise de l'offensive.
La retraite de l'armée de Sambre-et- Meuse est arrêtée le 22, par une dépêche du Directoire prescrivant de se reporter en avant et d'envahir la Franconie. Le moment est du reste propice pour reprendre l'offensive. Le Général Moreau menaçant le haut Danube avec une armée dite de Rhin et Moselle, l'Archiduc Charles doit se retirer de lui-même pour faire face à ce nouveau danger.
Le 2 juillet, la Division Championnet franchit donc le Rhin à Neuwied, et par Dierdorf et Freylingen, où elle rejoint l'aile gauche de l'armée, arrive le 7 devant Runkel.
Le combat de Wilnsdorf, livré le 4 par l'avant-garde de Kléber, a déjà eu pour effet de forcer le Général Wartensleben à se replier derrière la Lahn.
- Passage de la Lahn.
Le 9 juillet à la pointe du jour, la Division Championnet traverse Limbourg et marche sur Camberg où elle culbute une arrière-garde. Le lendemain, tandis que Kléber gagne la bataille de Friedberg qui lui ouvre la route de Francfort, Championnet campe sous les murs de la petite forteresse de Koenigstein.
- Prise de Francfort.
Le 14, les Autrichiens profitent d'une suspension d'armes de deux jours pour se reporter sur Aschaffenbourg en abandonnant Francfort. La 61e Demi-brigade se rend à Bergen.
- Marche sur Wurtzbourg.
Le 17, la marche en avant continue. Le Général Wartensleben se retire dans la direction de Nuremberg.
Championnet remonte la rive droite du Mayn, passe le 26 à Wurtzbourg dont le Général Klein s'est emparé depuis la veille et se dirige sur Wipfeld où il arrive le 27. A cette date, toute l'armée de Sambre-et-Meuse (5 Divisions) est répartie le long du Mayn, depuis Kinsingen jusqu'à Schweinfurt.
- Marche sur Bamberg.
Le 30, les nouvelles de l'armée de Moreau font connaître qu'elle est sur le point de déboucher dans la vallée du Danube. Jourdan continue son offensive (combat d'Eltman) et la Division Championnet se rend à Zell, qu'elle trouve évacué.
Le Général Wartensleben recule sans cesse, d'abord sur la Wiesenz et l'Aisch, puis sur la Pegnitz et, finalement, derrière la Naab.
L'Armée de Sambre-et-Meuse s'empare successivement de tous les points abandonnés et ne livre aucune bataille décisive.
- Combats de Forschwind et de Poppberg.
La 61e Demi- brigade, par le combat de Forschwind, contribue le 7 août à refouler les Autrichiens derrière l'Aisch. Elle prend ensuite une part prépondérante à un sérieux engagement livré le 17 près de Poppberg. Dans cette affaire, qui coûte aux Autrichiens 1200 hommes mis hors de combat, les pertes de la Demi-brigade sont d'environ 50 tués et 150 blessés.
Le 20 août, la Division Championnet est A Schwandorf et se répand sur la rive droite de la Naab.
Jourdan, dans son offensive rapide, a compté sur l'appui de Moreau. Mais le commandant de l'Armée de Rhin-et-Moselle, en arrivant A Donauwerth, s'achemine sur Augsbourg, tandis que l'Archiduc Charles, qui lui est opposé, se porte au contraire à marches forcées contre l'Armée de Sambre-et-Meuse.
Comme conséquence, une des Divisions de cette armée, celle de Bernadotte, est battue A Teining, et Jourdan, craignant d'être coupé de ses communications, fait reprendre la route du Rhin sous la protection de la Division Championnet.
- Retraite sur le Rhin.
La 61e Demi-brigade, constamment inquiétée par les Autrichiens, passe le 24 août à Haag, le 25 à Holstein, le 26 à Grafenberg et prend position le 27 à Pretsfeld, sur la Wiesenz, où toute l'Armée de Sambre-et-Meuse se concentre entre Forchheim et Ebermanstadt.
Le même jour, une avant-garde que conduit le Général Hotze, arrive à Hochstadt. La Division Championnet franchit la Rednitz près de Bamberg, se porte contre cette avant-garde et la bat A Burgebrach.
L'Armée de Sambre-et-Meuse continue sa retraite par Zell et Schweinfürt.
- Bataille de Wurtzbourg.
Jourdan et ses Généraux ne parviennent pas à s'entendre sur la conduite des opérations. Il en résulte une perte de temps, que l'Archiduc Charles met à profit pour rejoindre son avant-garde. Le 3 septembre, en arrivant devant Wurtzbourg où elle compte passer le Mayn pour se diriger sur Francfort, l'Armée de Sambre-et-Meuse trouve sa route barrée par toutes les forces autrichiennes. Elle essaie de se faire jour et livre, dans ce but, une bataille sanglante. La 61e Demi-brigade se distingue par son courage et couvre le terrain de ses morts. Mais le nombre l'emporte; Jourdan est battu et rejeté sur Arnstein.
La retraite, à partir de ce moment, s'accroît de difficultés nouvelles. Elle s'effectue, le plus souvent, par des marches de nuit au milieu de populations hostiles. Les troupes ont surtout beaucoup à souffrir du manque de vivres.
L'Archiduc Charles se dirige sur Francfort dans le but d'y devancer son adversaire. Jourdan, de son côté, précipite son retour vers le Rhin. La Division Championnet passe par Hamelburg, Bruckenau, Schluchtern, Birstein, Butzbach et Wetzlar où elle atteint la Lahn. Le 9, toute l'Armée de Sambre-et-Meuse s'établit entre Runkel et Giessen, où elle est renforcée d'une Division tirée de l'Armée du Nord.
Le combat de Giessen, livré le 16, rejette sur la rive gauche une colonne ennemie qui a réussi à franchir la Lahn. Mais le passage de ce cours d'eau est forcé le même jour vers Nassau et Jourdan, se voyant en danger, rétrograde sur Neuwied. Le Général Marceau qui forme l'arrière-garde est blessé mortellement, le 19, en essayant de s'opposer à la poursuite des Autrichiens (Combat d'Altenkirchen).
L'offensive de l'Archiduc Charles a eu surtout pour but d'empêcher la jonction des deux armées qui ont envahi l'Autriche. La retraite de l'Armée de Sambre-et-Meuse derrière le Rhin lui permet de se retourner contre Moreau.
Avant la bataille de Wurtzbourg, Jourdan écrit au Directoire pour être relevé de ses fonctions. Le 23 septembre, le Général Beurnonville le remplace. Le nouveau commandant de l'Armée de Sambre-et-Meuse reste sur la défensive et fait garder le Rhin depuis Cologne jusqu'à Mayence.
La Division Championnet quitta, le 28 septembre 1796, son camp de Porz, traversz le Rhin à Deutz, le 29, et vient cantonner dans les villages voisins de Cologne. Le 30, elle s'établit, la 61e Demi-brigade à Poppelsdorf et Plittersdorf (Pajol (Cte de) : « Pajol, Général en chef », Firmin Didot, Paris, 1874, t. 1, p. 370).
Composition des 4 Divisions sous les ordres de Kléber le 30 septembre 1796 :
Division HARDY (Quartier général, Bingen) :
Brigade Lorge :
31e division de gendarmerie. Freiweinheim et le long de la Selz, Westerhaüser-hof.
3 Bataillons de la 2e Demi-brigade de ligne, 2768 hommes. Camps de Jugenheim et d'Engelstadt.
3 Bataillons de la 55e Demi-brigade. 2465 hommes. Camp d'Ockenheim et en arrière de la Selz.
3 Bataillons de la 108e Demi-brigade, 3081 hommes. Camp de Kempten et sur les bords du Rhin jusqu'à Gaulsheim.
10 Compagnies auxiliaires des 16e, 37e, 43e, 49e, 61e, 73e, 78e, 92e, 99e et 105e Demi-brigades d'infanterie, 1084 hommes. Sur les bords du Rhin, entre Bingen et Bacharach; relevées par les troupes de Poncet ...
Division CHAMPIONNET :
Brigade Legrand :
3 Bataillons de la 61e Demi-brigade d'infanterie, 2,028 hommes (Pajol (Cte de) : « Pajol, Général en chef », Firmin Didot, Paris, 1874, t. 1, p. 371).
Après un court séjour à Poppelsdorf, près de Cologne, le Général Championnet porte, le 1er octobre 1796, la 61e Demi-brigade à Breisig et Sinzig (Pajol (Cte de) : « Pajol, Général en chef », Firmin Didot, Paris, 1874, t. 1, p. 374); la 61e Demi-brigade remonte le fleuve pour s'établir à Sinzig à proximité du pont de Neuwied, conservé par Bernadotte à la suite d'un violent combat.
- Opérations dans le Hunsruck.
Le 2 octobre, le Général Kléber, qui commande l'aile droite (Divisions Championnet, Poncet, Hardy et Bernadotte), apprend que de forts détachements autrichiens sortent de Mannheim et de Mayence et menacent le Hunsruck. Il appelle sur la Nahe la majeure partie de ses troupes et ne laisse au pont de Neuwied que la 61e Demi-brigade.
Le 3 octobre, Championnet porta la 61e Demi-brigade dans les ouvrages de la tête de pont de Neuwied (Pajol (Cte de) : « Pajol, Général en chef », Firmin Didot, Paris, 1874, t. 1, p. 374).
Le 6, cette Demi-brigade est relevée par les soins de Beurnonville et dirigée vers la Nahe où l'ont déjà précédée les autres Corps de la Division Championnet. Elle campe le même jour à Rubenach, Metternich et Gulz (Pajol (Cte de) : « Pajol, Général en chef », Firmin Didot, Paris, 1874, t. 1, p. 376).
Le 7 octobre, la Division Championnet, dès que ses postes importants sont relevés, se met en marche. La 61e Demi-brigade vient à Altenburg et Marienberg (Pajol (Cte de) : « Pajol, Général en chef », Firmin Didot, Paris, 1874, t. 1, p. 378).
Le lendemain 8, le mouvement de Championnet vers la droite continue; la 61e Demi-brigade vient à Simmern (Pajol (Cte de) : « Pajol, Général en chef », Firmin Didot, Paris, 1874, t. 1, p. 379).
Le 9 octobre 1796, la 61e est à Rheinbellen.
Un échec subi par un Régiment de la Division Bernadotte permet aux Autrichiens de s'établir à Bingen. La Division Championnet se rapproche alors de ce point le 10 octobre 1796, et la 61e Demi-brigade se déploie depuis Weiler jusqu'à Munster (Pajol (Cte de) : « Pajol, Général en chef », Firmin Didot, Paris, 1874, t. 1, p. 380).
Jusqu'au 14, les Autrichiens sont repoussés dans de continuelles démonstrations. Le Général Kray, établi en face de Neuwied, cherche à passer le Rhin. Ses préparatifs donnent l'éveil au Général Kléber, qui fait rebrousser chemin à la Division Championnet pour la rapprocher de Coblentz.
La 61e Demi-brigade campe, le 15, à Daxweiler et, le 16, est répartie dans les quatre postes d'Oberwesel, Saint-Goarr Boppard et Rense.
La division Championnet, destinée à se rapprocher de Coblenz, est relevée dans ses positions de Weiler par des troupes de la Division Daurier (ancienne Poncet), et se trouve établie, le 17, dans des cantonnements le long de la rive gauche du Rhin, de Saint-Goar à Bingen : la 61e Demi-brigade à Daxweiler, Nieder-Heimbach; Nieder-Diebach et Manubach (Pajol (Cte de) : « Pajol, Général en chef », Firmin Didot, Paris, 1874, t. 1, p. 384).
Le 18 ctobre 1796, les troupes de la Division Championnet continuent à se rassembler du côté de Coblenz : la 61e Demi-brigade s'installe à Oberwesel, Saint-Goar, Boppart et Rhens, fournissant tous les postes du Rhin (Pajol (Cte de) : « Pajol, Général en chef », Firmin Didot, Paris, 1874, t. 1, p. 387).
- Combats de Rense et de Boppard.
Le 20, dans la soirée, les Autrichiens prennent l'offensive sur tous les points. A Rense, les troupes qu'ils essaient de jeter sur la rive gauche du fleuve sont reçues à la baïonnette et massacrées entièrement. Mais le poste de Boppard, composé de 235 hommes, sous les ordres d'un Chef de Bataillon, est surpris et fait prisonnier par la faute d'une sentinelle.
A trois heures du matin, les Autrichiens retournent sur la rive droite du Rhin. Leurs pertes, dans les divers combats qu'ils ont dû livrer, s'élèvent à 3,500 hommes. Il leur est fait 600 prisonniers.
La 61e Demi-brigade remplace par de nouvelles troupes le poste qu'elle fournissait à Boppart et qui a été pris en entier (Pajol (Cte de) : « Pajol, Général en chef », Firmin Didot, Paris, 1874, t. 1, p. 389).
Dans le courant de la journée du 22 octobre, la 61e Demi-brigade reste à Rhens, Boppart, Saint-Goar et Oberwesel (Pajol (Cte de) : « Pajol, Général en chef », Firmin Didot, Paris, 1874, t. 1, p. 392).
La 61e Demi-brigade est remplacée, le 23, par la 37e de la Division Bernadotte. Elle est ramenée entre la Moselle et la Nette, à Poellich (Polch)et dans les villages voisins (Ruber, Lonnig, Cobern) où elle se remet de ses fatigues (Pajol (Cte de) : « Pajol, Général en chef », Firmin Didot, Paris, 1874, t. 1, p. 393).
Le 3 novembre, le Général Kray fait proposer un armistice qui est accepté et soumis à l'approbation du Directoire. D'un commun accord, et sans attendre une réponse, les deux armées se reposent dans leurs camps.
Le 19 novembre 1796, à la division Championnet, deux Bataillons de la 61e Demi-brigade, campés à Metternich, quittent cette position et vont occuper le camp de Mülheim (Pajol (Cte de) : « Pajol, Général en chef », Firmin Didot, Paris, 1874, t. 1, p. 401).
Le 9 décembre 1796, à la Division Championnet, un Bataillon de la 61e Demi-brigade occupe Sebastian, Kalten et Urmitz, fournissant une Compagnie de garde au camp de Mülheim; un autre Bataillon de la même Demi-brigade se rend à Bassenheim et Kärlich; le 3e Bataillon, à Ochtendung et Polch (Pajol (Cte de) : « Pajol, Général en chef », Firmin Didot, Paris, 1874, t. 1, p. 408).
Jusqu'au 21 décembre, il ne se passe aucun événement important à l'Armée de Sambre-et-Meuse. Il n'y a que quelques changements partiels dans les cantonnements des Divisions. Voici la situation du Chef d'état-major général pour les Divisions du centre, aux ordres de Kléber :
Division CHAMPIONNET.
Brigade BASTOUL :
3 Bataillons de la 61e Demi-brigade de ligne, 1,062 Sebastian, Kalten, Urmitz, Bassenheim , Saftig , Kärlich, Ochtendung, Polch, Dreckenach.
Brigade LEGRAND :
3 Bataillons de la 92e Demi- brigade de Ligne, 2,135 Lehmen, Kuttig, Pillig, Munstermaifeld, Metternich, Hatzenport, Gappenach, Nauheim.
Brigade DAMAS :
3 Bataillons de la 78e Demi-brigade de ligne, 2,480 Cochem, Ebernach, Ellenz, Poltersdorf, Alflen.
Artillerie, 271 Bords du Rhin et Kaisersesch.
Sapeurs, 123 Polch.
Cavalerie :
12e Régiment de Dragons, 464 Ardenau.
12e Régiment de Chasseurs, 432 Virneburg et Mayen.
6,967
Cette division garde la rive gauche du Rhin, de Coblenz à l'embouchure de la Nette, ainsi que l'espace compris entre la rive gauche de la Moselle et la Nette.
Ces cantonnements sont, à proprement parler, des quartiers d'hiver pour les troupes aux ordres de Kléber; car, l'ennemi restant tranquille, l'Armée de Sambre-et-Meuse n'entreprend plus rien. La rigueur exceptionnelle de la saison s'oppose d'ailleurs à des opérations militaires. Le Rhin est entièrement gelé à Bacharach, et les Autrichiens ne cherchent même pas à profiter de la glace pour passer sur la rive gauche (Pajol (Cte de) : « Pajol, Général en chef », Firmin Didot, Paris, 1874, t. 1, p. 409).
Vers la fin de décembre, la 61e est désignée pour faire partie d'un renfort de 30.000 hommes, destiné à l'Armée d'Italie.
/ Campagne de 1797 à l'Armée d'Italie
Le 9 Ventôse an 5 (27 février 1797), le Général en chef Bonaparte fait écrire, depuis Bologne, au Général divisionnaire Bernadotte : "Le général Bernadotte est prévenu que le général en chef le destine à commander une division active de l'armée, qui sera composée des
31e demi-brigade de bataille ...
61e idem ...
Comme ces différentes troupes se réunissent à Vérone, il voudra bien s'y rendre de suite pour en prendre le commandement, en informant s'il a un adjudant général, un commissaire des guerres, et quels sont les généraux de brigade qui marchent sous ses ordres ..." (Correspondance de Napoléon, t.2, lettre 1530).
La 61e Demi-brigade arrive à Padoue par Chambéry, Turin, Milan et Vérone, au commencement de mars 1797. On l'emploie, sous les ordres de Bernadotte, dans la 4e Division de l'Armée d'Italie.
A la suite de la bataille de Rivoli et de la capitulation de Mantoue, les débris des forces autrichiennes se replient derrière le Tagliamento. L'Archiduc Charles, appelé des bords du Rhin, en reçoit le commandement. Bonaparte reprend l'offensive contre ses ennemis après avoir signé avec le Pape, le traité de Tolentino.
La Division Bernadotte quitte Padoue le 12 mars pour se rapprocher du Tagliamento. Elle campe le 13 à Trévise, le 14 à Conegliano et le 15 à Sacile.
- Combat de Valvasone.
Le 16, vers midi, les premières troupes de la Division Bernadotte, parties de Sacile à 3 heures du matin, arrivent à Valvasone où elles doivent franchir le Tagliamento. Elles se placent immédiatement à la droite de la Division Guyeux, qui combat depuis près d'une heure pour forcer le passage du cours d'eau. Dans chaque Division, les Grenadiers se forment en bataille. Les Demi-brigades les suivent à cent cinquante pas, par Bataillons en colonne serrée.
Un reu après midi, le Général Duphot se jette dans le Tagliamento à la tête de la 27e Légère et aborde sur la rive opposée. Son exemple est suivi par tous les Grenadiers. Ceux de la 61e refoulent les Autrichiens jusque dans Godroipo et leur font quelques prisonniers.
- Combat de Gradisca.
Le 19, la Division Bernadotte attaque Gradisca que défend une garnison croate. La place capitule après un sanglant combat livré sous ses murs. Près de 3.000 hommes sont faits prisonniers. Les Grenadiers de la 61e ont une vingtaine d'hommes mis hors de combat.
Bernadotte écrit, le 19 mars 1797 (29 Ventôse an 5), depuis Gradisca, au Général en chef : "Conformément à vos ordres, mon général, j'ai fait avancer ma division entre Mariane et Gradisca. J'ai, après l'avoir mise en bataille, ordonné au général Friant de se porter avec la 30e demi-brigade à la porte du Salvador : la 88e devait former la réserve ; à l'adjudant général Mireur, de se porter à la porte Nova avec douze compagnies de grenadiers ; au général Murat, avec la 15e demi-brigade et un escadron de hussards, à la porte de Laqua : ce général devait passer la rivière de l'Izonzo avec un corps de troupes, et couper la retraite à la garnison de Gradisca ; le restant de ma division en bataille dans la plaine, composée de la 55e et 61e commandée par le général Muilley, le 1er régiment de hussards et le 14e de dragons sous les ordres de l'adjudant-général Sarrasin, devaient protéger les attaques de Gradisca, en livrant bataille aux troupes que le prince Charles aurait pu envoyer de Goritzia.
Les ordres ainsi donnés, les généraux d'attaque ont avancé à la tête de leurs colonnes avec cette bravoure qu'on caractérise quelquefois de fureur.
Quatre mille hommes formant la garnison de Gradisca étaient rangés sur les remparts de la ville ; leur fusillade et le feu de leurs canons vomissaient à chaque instant la mort sur nos soldats, sans que leur intrépidité en fût ralentie : leur audace, au contraire, accrue par les obstacles, les faisait roidir contre les difficultés. Enhardis par les généraux qui les dirigeaient, ils demandaient à grands cris des échelles pour escalader le rempart, et des haches pour briser les portes ; j'ai donné des ordres pour que ces objets parussent au plus vite : j'allais donner le signal, lorsque des principes d'humanité m'ont retenu ; j'ai fait sommer M. d'Augustinetz, colonel du régiment de Splenitz, commandant la forteresse, de se rendre sur-le-champ, sous peine d'être passé lui et sa troupe au fil de l'épée.
Vous trouverez ci-joint, mon général, copie de la sommation : en réponse, le colonel a demandé à sortir avec les honneurs de la guerre, sous condition que la garnison se retirerait en Autriche.
La disposition de mes troupes était telle, que je ne pouvais pas y accéder. J'ai donc exigé que les ennemis fussent prisonniers de guerre, en conservant aux officiers la faculté de se retirer, sur leur parole de ne pas servir contre la république et ses alliés jusqu'à leur échange. Je n'ai donné qu'un quart heure, mes réponses ont été acceptées ; deux bataillons de Splenitz et deux d'un autre régiment ont sorti, à deux heures du soir, par la porte de Goritzia à Palma, et ont déposé ensuite les armes. Je les ai dirigés sur Palma.
Si j'avais à vous recommander, mon général, toutes les personnes qui se sont distinguées, j'aurais beaucoup à faire. Sans juger mes collaborateurs, il est impossible de passer sous silence la bravoure audacieuse du général Murat, de l'adjudant-général Mireur, et du général Priant ; il a fallu leurs talents, leur bravoure pour décider l'ennemi ; ils se portaient partout, consolaient les blessés, soutenaient le courage des soldats à attendre la mort avec sang-froid. L'ennemi a tenté vainement de venir de Goritzia pour dégager la garnison, en descendant la rive gauche de l'Izonzo. Le brave Murat, à qui j'avais envoyé un bataillon de la 55e, l'a forcé de se retirer précipitamment. Je vous recommande, mon général, le citoyen Julien, commandant de mon artillerie : son activité, son zèle m'ont rendu de grands services ; il a créé des moyens, il a fait honneur à son arme. Je vous prie aussi de ne pas oublier que le chef de brigade du génie Campredon ne m'a pas quitté pendant presque toute l'action. Je recommande a votre sollicitude paternelle le citoyen Maurice et les deux frères Conroux, jeunes gens qui ont continué à se distinguer, et qui appartiennent à un brave et respectable militaire. Je finis, mon général, quoique j'aie bien des choses à vous dire, en rendant justice au jeune Lemarrois, votre aide-de-camp : il s'est fait remarquer par son mépris pour le danger, et, quoique d'un âge fort tendre, il a montré beaucoup de calme et de sang-froid ; l'aide-de-camp du général Murat a chargé ce matin avec le 1er régiment de hussards : ce brave régiment a fait une vingtaine de prisonniers.
J'ai eu beaucoup d'hommes tués et blessés, entre autres beaucoup d'officiers ; quelques soldats se sont malheureusement noyés en passant l'Izonzo, mais seulement cinq à six. Nous avons pris huit drapeaux et sept pièces de canon.
Le citoyen Binon, aide-de-camp du général Friant, a eu un cheval tué sous lui : cet officier et le citoyen Denis, officier de correspondance de ce même général, se sont distingués par leur bravoure. Plusieurs soldats ont été blessés de coups de pierre en voulant essayer d'escalader le rempart" (Panckoucke : « Correspondance inédite officielle et confidentielle de Napoléon », t. 2 Italie ; The Bonaparte letters and despatches, Londres, 1846, t.2, p. 268).
- Marche sur Vienne.
L'Archiduc Charles se retire derrière l'Isonzo et prend ensuite le parti de couvrir la capitale de l'Autriche. Bonaparte se met à sa poursuite, et la Division Bernadotte, suivant le mouvement général, arrive le 20 à Gorizia, sur la rive droite de l'Isonzo, le 21 à Champasso, le 22 à Cernizo et le 23 à Vipaco.
Le Commandant Conroux, dont la brillante conduite au combat de Gradisca a été signalée à Bonaparte, est placé à la tête de la Demi-brigade, en remplacement du Chef de Brigade Barjonnet.
Le 24, le 2e Bataillon est détaché à Idria.
Les deux autres Bataillons quittent Vipaco le 31 mars et arrivent le 11 avril à Saint-Michels, où ils restent en position jusqu'au 20, pendant que Bonaparte, vainqueur à Neumark, accorde à ses ennemis l'armistice de Léoben.
L'Armée d'Italie est alors ramenée sur ses pas. La 61e Demi-brigade séjourne pendant quelques jours à Laybach et se rend de là à Trieste, où elle retrouve son 2e Bataillon. Le 24 mai on l'établit à Udine.
Le 14 juin 1797 (26 Prairial an 5), le Général Bonaparte écrit, depuis Mombello, au Général Berthier : "... Vous ordonnerez que l'on forme les brigades de la manière suivante :
3e DIVISION. Bernadotte.
La 30e de ligne et la 55e, 5e brigade : Friant.
La 61e de ligne et la 88e, 6e brigade Mireur ..." (Correspondance de Napoléon, t.3, lettre 1919 ; Correspondance générale de Napoléon, t.1, lettre 1674).
Le même 14 juin 1797 (26 Prairial an 5), le Général Bonaparte écrit encore, depuis Mombello, au Général Berthier : "Vous voudrez bien ordonner et prendre les mesures pour l'organisation prompte du personnel de l'artillerie de l'armée, ainsi qu'il suit :
Il y a dans ce moment-ci 76 compagnies d'artillerie de demi-brigade, desquelles vous ne devez former seulement que 30 compagnies d'artillerie de brigade, chaque demi-brigade de ligne devant avoir sa compagnie de canonniers ...
… 61e demi-brigade. — Celle de la 61e, capitaine Linière, avec le 4e bataillon de l'Aude, capitaine Garigan ..." (Correspondance de Napoléon, t.3, lettre 1921 ; Correspondance générale de Napoléon, t.1, lettre 1677).
Le 21 Fructidor an 5 (7 septembre 1797), le Général Bonaparte écrit, depuis le Quartier général à Passariano, au Général de Brigade Friant : "Vous voudrez bien, Citoyen Général, donner l'ordre au général Fiorella de se rendre, avec la 61e demi-brigade et un escadron du 25e régiment de chasseurs, en cantonnement dans les villages depuis Felletis, Palmada, Campolongo, Castions, Morsano.
Il ne mettra dans ce dernier poste que 25 ou 30 hommes avec un commandant.
Il aura soin,
1° De garder en force le pont que nous avons près de Campolongo, sur l'Isonzo, et de maintenir toujours ses communications avec Monfalcone, où est un bataillon de la 15e d'infanterie légère ;
2° De placer des postes de cavalerie et d'infanterie entre tous les postes autrichiens près de Palmanova ;
3° D'empêcher la sortie d'aucuns blés ni foins des pays vénitiens.
4° Il aura soin également d'envoyer des petits postes dans tous les villages vénitiens, et qui se trouvent mêlés avec les autrichiens du côté de Gradisca.
Tout le pays de Monfalcone, ainsi que les troupes qui s'y trouvent, seront sous les ordres du général Fiorella.
Les trois compagnies de grenadiers de la 61e rejoindront leur demi-brigade.
Il se concertera avec le général Guillaume pour favoriser autant que possible l'approvisionnement de sa place, et pour fournir, tous les jours, le nombre de travailleurs dont il aura besoin pour les fortifications de Palmanova.
Dès l'instant que les troupes seront établies, il signifiera au chef d'escadron autrichien qui est à Ontagnano, qu'il ne peut pas souffrir qu'il y ait des vedettes autrichiennes sur le chemin de Palma à Codroipo, le chemin devant être libre.
Il aura soin de choisir, pour cantonner ses troupes, de manière que le soldat soit commodément" (Correspondance de Napoléon, t.3, lettre 2155 ; Correspondance générale de Napoléon, t.1, lettre 1976).
Le 9 octobre 1797 (18 Vendémiaire an 6), le Général en chef Bonaparte écrit depuis le Quartier général de Passariano au Général Berthier : "... Ordre au général Fiorella de se rendre à Udine avec la 61e demi-brigade, pour rejoindre sa division ...
Si le général Kilmaine le juge à propos, il pourra ne garder à Udine qu'une seule brigade, et l'autre aux villages au nord d'Udine, en remontant la Torre. La 30e demi-brigade et la 55e forment la brigade du général Friant ; la 61e et la 88e, celle du général Fiorella ..." (Correspondance de Napoléon, t.3, lettre 2289 ; Correspondance générale de Napoléon, t.1, lettre 2144).
Le traité de Campo-Formio termine la guerre (17 octobre).
Le 9 novembre 1797 (19 brumaire an 6), par ordre du Général en chef Bonaparte, une lettre est expédiée depuis le Quartier général de Milan, au Général Vignolle : "... Le général Bernadotte partira d'Udine, le 1er frimaire, avec la 61e, la 30e et la 88e et leurs dépôts, pour se rendre à Trévise ...
Lorsque tous ces mouvements seront effectués, l'armée se trouvera donc placée de la manière suivante :
... 3e division, Bernadotte, à Trévise 30e de bataille, 61e idem, 88e idem, Prendra toute l'artillerie du général Baraguey d'Hilliers qui est à Trévise; elle sera toute attelée de chevaux ..." (Correspondance de Napoléon, t.3, lettre 2332 ; La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 1, p.46).
L'Etat des Demi-brigades, établi le même jour, précise que la 61e, destinée pour l'expédition d'Angleterre, comprend 1600 hommes (Correspondance de Napoléon, t. 3, lettre 2335).
Le même jour, le Général en chef Bonaparte écrit depuis son Quartier général de Milan, au Général Vignolle : "Vous préviendrez les 18e, 25e, 32e et 75e de bataille qu'elles sont destinées à être les premières pour partir pour l'armée d'Angleterre.
Vous donnerez le même ordre aux 30e, 61e et 88e de bataille ...
... Vous donnerez l'ordre aux généraux ... Bernadotte ... de se tenir prêts à partir, comme devant faire partie de l'armée d'Angleterre ..." (Correspondance de Napoléon, t.3, lettre 2334; correspondance générale, t.1, lettre 2202).
Le 11 janvier 1798 (22 nivôse an 6), le Général Bonaparte adresse depuis Paris ses instructions au Général Berthier : "... Le Directoire exécutif vous autorise à faire revenir les 30e, 61e, et 88e demi-brigades de ligne, qui déjà doivent être en marche pour rentrer en France ..." (Correspondance inédite et confidentielle de Napoléon, t.4, Venise; Oeuvres complètes de Napoléon, Stuttgart et Tubingue, 1822, t.2, p. 235; Correspondance de Napoléon, t.3, lettre 2404).
L'ARRÊTÉ DU DIRECTOIRE EXÉCUTIF en date de Paris, le 12 janvier 1798 (23 Nivôse an 6), fixe l'état des troupes qui doivent faire partie de l'Armée d'Angleterre : "Considérant qu'il est instant de réunir sur les côtes toutes les forces qui doivent être employées à l'armée d'Angleterre,
ARRÊTE ce qui suit :
ARTICLE PREMIER
Les divers corps de troupe ci-après désignés seront mis en mouvement pour se rendre sans délai sur les côtes qui bordent la Manche, ou autres lieux de rassemblement désignés par le ministre de la guerre, savoir :
INFANTERIE DE LIGNE
Les ... 61e ... demi-brigades ..." (La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 1. P. 95).
- Affaires de Rome.
Au commencement de 1798, 1e Général Duphot est massacré à Rome. Pour tirer vengeance de ce crime, le Général Berthier reçoit la mission de renverser le gouvernement pontifical et de le remplacer par une République.
L'expédition, à laquelle participe la 61e Demi-brigade, n'est contrariée par aucun obstacle. Mais de sa propre initiative le Général Berthier signe une convention avec le Pape et le Directoire mécontent lui retire son commandement pour le donner à Masséna. Cette nouvelle, connue à Rome le 23 février est défavorablement accueillie. Toute l'armée se prononce pour le Général Berthier dont elle demande le maintien. L'autorité de Masséna est méconnue.
La population romaine en profite pour se soulever. Elle est écrasée, le 25, au pont de Transtevere, ainsi que les paysans qui viennent à son secours.
La résistance contre Masséna ne faisant que s'accentuer, le Directoire le remplace par le Général Gouvion Saint-Cyr. Le calme est alors rétabli.
/ Expédition d'Egypte, 1798-1801
- Causes de la guerre.
La renommée de Bonaparte l'a placé au premier rang des Généraux de la République. Il s'offre à conquérir l'Egypte pour en faire le point de départ d'une expédition contre l'Inde anglaise. Le Directoire accueille d'abord ses propositions avec une certaine réserve. Puis il est séduit par la grandeur du projet et lui donne son approbation.
Le 5 mars 1798 (15 Ventôse an 6), depuis Paris, le Général Bonaparte remet au Directoire exécutif une note dans laquelle il écrit : "Pour s'emparer de Malte et de l'Egypte, il faudrait de 20 à 26,000 mille hommes d'infanterie, et de 2 à 3,000 hommes de cavalerie sans chevaux.
L'on pourrait prendre et embarquer ces troupes de la manière suivante, en Italie et en France :
... A Cività-Vecchia, la 21e d'infanterie légère, 2,000 ; la 61e, de ligne, 1,600 ; la 88e, id., 1,600 ; le 20e de dragons, de 400 ; et le 7e de hussards de 400 ; en tout 6,000 hommes, commandés par les généraux Belliard, Friant et Mireur (note : pour la cavalerie). ...
Il faudrait que ces troupes fussent embarquées dans ces différents ports et prêtes à partir au commencement de floréal, pour se rendre dans le golfe d'Ajaccio, et réunies et prêtes à partir de ce golfe avant la fin de floréal ..." (Correspondance inédite officielle et confidentielle de Napoléon, t.5, Egypte ; Panckoucke : « Oeuvres de Napoléon Bonaparte », 1821-1822, t. 2, p. 114 ; Oeuvres complètes de Napoléon, Stuttgart et Tubingue, 1822, t.2, p. 249 ; Correspondance de Napoléon, t.4, lettre 2426 ; Correspondance générale de Napoléon, t.2, lettre 2322 ; La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 1. P. 197-198).
Le même le 15 Ventôse an 6 (5 mars 1798), à Paris, le Directoire exécutif arrête : "ART. Ier. Le général Masséna mettra l'embargo et frétera au compte de la république les bâtiments les plus gros qu'il pourra trouver dans le port de Cività-Vecchia et ports voisins ; il prendra même, s'il est nécessaire, des bâtiments neutres.
2. Il fera embarquer sur lesdits bâtiments les généraux Friant, Mireur et Belliard ; un chef de brigade d'artillerie, deux officiers de génie qu'il nommera, un commissaire des guerres, un chef de chaque administration, une ambulance proportionnée au nombre des troupes ; la 21e d'infanterie légère, la 61e de ligne, la 88e idem, leurs dépôts, leurs compagnies de canonniers, cent cartouches par homme, de l'eau pour un mois, et des vivres pour deux.
3. Il fera embarquer le 20e de dragons et le 7e de hussards, avec leurs selles, leurs dépôts, en armant chaque cavalier d'un fusil. Dès l'instant que le convoi sera parti, il fera donner les chevaux de ces deux corps aux autres corps de cavalerie de l'armée …" (Correspondance inédite officielle et confidentielle de Napoléon, t.5, Egypte ; Correspondance de Napoléon, t.4, lettre 2432 ; La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 1. p. 205).
Le 14 mars 1798 (24 ventôse an 6), Masséna écrit depuis Rome à Berthier : "... Je viens de recevoir un arrêté du Directoire qui m'ordonne de faire partir, pour une mission secrète et de la plus haute importance, les généraux Friant, Mireur et Belliard, avec les 61e, 88e de bataille, 21e d'infanterie légère, 20e de dragons et 7e de hussards. Vous connaissez la force des troupes sous mes ordres ; lorsque ces corps seront partis, je serai loin d'avoir des forces suffisantes pour garder le territoire de la République romaine …" (La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 1. p. 320).
Un rapport adressé, le 20 mars, au Directoire par le Ministre de la Guerre, détaille, ainsi qu'il suit, l’effectif (hommes présents sous les armes) des troupes destinées à l'expédition : à l'Embarquement de Civita-Vecchia, 61e Demi-brigade, 2000 hommes (La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 1. P. 197).
L'expédition d'Egypte ayant été décidée, la Brigade Mireur, dont la 61e Demi-brigade fait partie devient, sans aucun changement, une des Divisions de l'Armée d'Orient. Le général Desaix en prend le commandement, le 1er avril, et la conduit à Civita-Vecchia où elle doit s'embarquer.
Le 20 Germinal an 6 (9 avril 1798), Bonaparte écrit depuis Paris au Général Brune : "Je vous prie ... de faire rendre à Civita-Vecchia ceux (les hommes) des vingt-unième d'infanterie légère, soixante-unième, quatre-vingt-huitième de ligne ; septième régiment de hussards, vingtième idem de dragons.
Ces hommes s'embarqueront à la suite des divisions, qui s'embarquent à Gênes et à Civita-Vecchia, et quand même ces divisions seraient parties, leurs dépôts resteront à Gênes et à Civita-Vecchia, de manière que lorsqu'il y aura 100 hommes réunis, on pourra les faire partir pour rejoindre au lieu où se rend ledit embarquement ..." (Correspondance inédite officielle et confidentielle de Napoléon, t.5, Egypte ; Panchoucke : « Oeuvres de Napoléon Bonaparte », 1821-1822, t. 2, p. 158 ; Oeuvres complètes de Napoléon, Stuttgart et Tubingue, 1822, t.2, p. 290 ; Correspondance de Napoléon, t.4, lettre 2485 ; Correspondance générale de Napoléon, t.2, lettre 2375; La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 1. p. 313).
Le Tableau des Corps de troupes rassemblés à Toulon, Marseille, Gênes et Cività-Vecchia, daté du 14 avril 1798 (25 Germinal an 6), et certifié conforme par le Ministre de la Guerre, Schérer, indique que la 61e Demi-brigade fait partie de la Division Friant, Brigade Desaix; elle comprend 1737 hommes arrivés à leur destination (Correspondance de Napoléon, t.4, lettre 2508 ; La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 1. p. 355).
"Expédition de Civita-Vecchia.
ORDRE GÉNÉRAL
Rome, le 5 floréal an VI (24 avril 1798).
Les troupes formant la division de l'expédition de Civita-Vecchia sont organisées comme suit :
État-major général. Le général de division Desaix, commandant en chef ...
Généraux de brigade. Corps. Commissaires des guerres.
... Friant, 61e demi-brigade de bataille ; 88e demi-brigade de bataille, Colbert.
… Suit l'état de répartition des bâtiments de transport.
Les bâtiments sont répartis en cinq divisions, qui reçoivent les troupes ci-après indiquées :
... 2e division : 61e demi-brigade de bataille, sur les bâtiments de 11 à 17 ; 88e demi-brigade de bataille, sur les bâtiments de 18 à 23. (Effectif de la 61e, 1.675 hommes ; de la 88e, 1.372 hommes ; par bâtiment, de 170 à 320 hommes.)
… L'adjudant général, DONZELOT" (La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 1. p. 44).
Le 6 mai, Gouvion-Saint-Cyr écrit, de Rome, au Général Brune : "… Le général Desaix a toujours ordre de se tenir prêt à partir quarante-huit heures après l'arrivée du premier courrier qu'il pourra recevoir. Il compte encore que l'expédition se fera ; il m'a donc engagé à ne point éloigner aucunes troupes de l'embarquement. J'ai été obligé de le faire, en envoyant la 61e demi-brigade remplacer la 15e dans les environs de Spoletto …" (La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 1. p. 448).
Le 21 Floréal an 6 (10 mai 1798), le Général Desaix écrit, depuis Civita-Vecchia, au Général Gouvion-Saint-Cyr "pour l'inviter à rapprocher de Civita-Vecchia la 61e demi-brigade, récemment envoyée à Spoletto" (La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 1. p. 450).
On voit, par une lettre de Donzelot à Belliard, du 23 Floréal (12 mai), qu'à cette date, la 61e a reçu l'ordre de venir à Ronciglione, Viterbe, Metrala et Bieda, pour être plus près de Civita-Vecchia (La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 1. p. 450).
Le 16 mai, Desaix est informé par Bonaparte du début de la concentration des escadres ; aussitôt, depuis Civita-Vecchia, il donne des ordres pour que toutes les troupes de sa Division soient concentrées, le surlendemain, dans le port et embarquées sur-le-champ. Ces ordres, envoyés, au nom du Général Desaix, par l'Adjudant général Donzelot, Chef de l'Etat-major (Civita-Vecchia, 27 Floréal - 16 mai), prescrivent : "... 3° A la 61e de Ligne, d'être rendue le 29 floréal à Civita-Vecchia" (La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 1. p. 471).
Le 19 mai 1798, quatre Divisions s'embarquent à Toulon et font voile vers l'Orient.
EXTRAITS DU JOURNAL DU GÉNÉRAL BELLIARD : "1er prairial : Depuis dix jours, nous sommes arrivés à Civita-vecchia, attendant l'ordre d'embarquer qui doit venir de Toulon. Le vent est ouest et nous fait espérer que l'escadre pourra sortir du port de Toulon et que nous ne tarderons pas à la joindre. Le général serait cependant fâché de recevoir l'aviso du général Bonaparte, parce que la 61e demi-brigade, qui doit faire partie de l'expédition, ne peut arriver à Civita-Vecchia que dans trois jours" (La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 1. p. 501).
EXTRAITS DU JOURNAL DU GÉNÉRAL BELLIARD : "4 prairial : La 61e demi-brigade est arrivée. L'aviso peut paraître. Nous sommes prêts à appareiller …" (La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 1. p. 501).
Le 6 Prairial an 6 (25 mai 1798), l'Adjudant-général Donzelot écrit, depuis Civita-Vecchia, au Général Belliard : "L'ordre de départ est arrivé. La 21e d'infanterie légère s'embarquera aujourd'hui à 1 heure après midi. Je vous invite, Citoyen Général, à ordonner que de suite on embarque le reste des équipages pour se tenir prêt à monter à bord à l'heure désignée. Les chefs de brigade embarqueront leurs chevaux sur le n° 53, qui doit se placer à la porte de Livourne, ainsi que le n° 52, destiné à recevoir les chevaux des généraux et officiers d'état-major.
Dans la matinée, il sera fait une distribution de viande fraiche pour quatre jours.
On donne des ordres pour que, ce matin, tous les chevaux et équipages soient définitivement embarqués.
Salut et fraternité.
Donzelot.
P.-S. - La 21e s'embarquera à l'emplacement actuel de ses bâtiments.
Un ordre semblable, adressé au général Friant, prescrivait que les 61e et 88e de ligne s'embarqueraient à 2 heures de l'après-midi, par le quai du Fort" (La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 1. p. 502).
La Division Desaix (formée des 61e et 88e de Ligne, de la 21e Légère, du 7e Hussards, du 20e Dragons et d'une Compagnte d'artillerie), quitte Civita-Vecchia, le 26 mai.
L'État par aperçu des fonds nécessaires pour un mois de solde à l'armée de terre, établi par le payeur Estève, à bord du vaisseau l'Orient, le 6 juin 1798 (18 prairial an VI) indique que la 61e Demi-brigade est forte de 1530 Hommes, Officiers non compris (La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 1. p. 508).
La Division Desaix arrive le 6 juin en vue de l'ile de Gozze, près de Malte, où elle s'arrête pour attendre le reste du convoi.
- Prise de Malte.
Le 9, vers 4 heures du soir, tout le Corps expéditionnaire jette l'ancre devant Malte. La capitale, la Valette, réputée imprenable, est enlevée en moins d'une heure.
Le 27 Prairial an 6 (15 juin 1798), Bonaparte écrit, depuis son Quartier général, à Malte, au Général Berthier : "Vous voudrez bien, Citoyen Général, ordonner au général Desaix de remplacer dans la 61e demi-brigade les officiers de cette demi-brigade qui sont allés en députation à Paris, et qui doivent être considérés comme destitués" (Correspondance de Napoléon, t.4, lettre 2666 ; Correspondance générale de Napoléon, t.2, lettre 2530).
Le 29 Prairial an 6 (17 juin 1798), Bonaparte écrit, depuis son Quartier général, à Malte, au Général Berthier : "Vous voudrez bien, Citoyen Général, donner l'ordre pour que les citoyens Perrier, capitaine, Baumard, capitaine, Berger, lieutenant de la 61e demi-brigade de bataille, soient destitués, arrêtés et conduits au fort Lamalgue jusqu'à ce que le Gouvernement ait donné de nouveaux ordres. Ils sont les chefs de l'insurrection qui a eu lieu à Rome.
Vous vous informerez des bâtiments sur lesquels ils sont embarqués, afin que demain, lorsque nous serons en pleine mer, on fasse signal de les faire venir à bord de l'Orient, où on les arrêtera ..." (Correspondance de Napoléon, t.4, lettre 2678 ; Correspondance générale de Napoléon, t.2, lettre 2541 ; La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 1. p. 647).
Le même 29 Prairial an 6 (17 juin 1798), Bonaparte écrit, depuis son Quartier général, à Malte, au Directoire : "Du moment que le convoi de Cività-Vecchia nous a joints, j'ai été instruit que les ordres que vous aviez donnés pour arrêter les instigateurs des troubles de Rome n'avoient pas été exécutés, et que tous les officiers avaient donné leur parole d'honneur de ne pas souffrir leur arrestation ; ce qui avait obligé le général Saint-Cyr à se relâcher de l'exécution de vos ordres. J'ai sur-le-champ fait arrêter quatre officiers du 7e de hussards, et quatre de la 61e, qui sont désignés par les chefs comme les principaux meneurs. Je les ai destitués et renvoyés en France comme indignes de servir dans les troupes de la République. N'ayant pas le temps de faire faire leur procès, j'ordonne qu'on les tienne au fort Lamalgue, jusqu'à ce qu'on ait reçu vos ordres" (Pièces diverses et correspondances relatives aux armées d’orient ; Panckoucke : « Oeuvres de Napoléon Bonaparte », 1821-1822, t. 2, p. 246 ; Oeuvres complètes de Napoléon, Stuttgart et Tubingue, 1822, t.2, p. 375 ; Correspondance de Napoléon, t.4, lettre 2681 ; Correspondance générale de Napoléon, t.2, lettre 2548 ; La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 1. p. 647).
Huit jours suffisent à Bonaparte pour régler toutes les dispositions que nécessite l'occupation de l'île. Le 19 juin, l'armée d'Orient reprend la mer et se dirige vers l'Egypte.
Le 23 juin 1798 (5 messidor an 6), depuis le Quartier général, à bord de l'Orient, Berthier adresse aux troupes un Ordre Général : "Le général en chef a déterminé le commandement des brigades, dans les divisions, ainsi qu'il suit :
... DIVISION DESAIX.
... Le général Friant commande la 61e et la 88e de ligne ..." (Correspondance de Napoléon, t.4, lettre 2706; La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 2. p. 15).
Par ailleurs, les troupes laissées à Malte ayant été, en grande partie, prélevées sur les garnisons des bâtiments de l'escadre, Bonaparte décide de reconstituer cet élément de défense et prescrit à cet effet les dispositions suivantes (Ordre de Berthier en date du 23 juin 1798 – 5 messidor an 6) : "... VAISSEAUX. - ... Timoléon, 100 hommes de la 61e ..." (La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 2. p. 13).
Kleber écrit à Bonaparte, le 10 Messidor, pour le prier de lui donner le Général de Brigade Friant et la 61e Demi-brigade d'infanterie de ligne, motivant sa demande sur la confiance réciproque qui existe entre ces troupes et lui (Voir le registre de correspondance de Kleber - La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 2. p. 20).
- Débarquement devant Alexandrie.
Le débarquement sous Alexandrie commence le 1er juillet. Bonaparte s'empare de la ville à la suite d'un violent combat livré, sans le concours de la Division Desaix, contre les mameluks (on désignait ainsi une milice turque qui s'était rendue toute puissante sous la suzeraineté nominale du Sultan. Les Beys Ibrahim et Mourad en avaient le commandement).
Le 3, cette Division est désignée pour former l'avant garde de l'armée dans la direction du Caire. Desaix met quatre jours pour franchir les 60 kilomètres qui le séparent de Damanhour. Ses troupes ont beaucoup à souffrir de la chaleur et du manque d'eau. Quelques hommes sont enlevés par les memeluks. Ils sont assassinés avec des raffinements de cruauté et leurs cadavres mutilés sont exposés sur le bord du chemin.
La Division Desaix, conformément à l'ordre reçu, se met en route le 3 juillet «de grand matin, marchant sur une seule colonne par pelotons, longeant le bord de la mer». Arrivée à Alexandrie, elle fait halte en dehors de l'enceinte, tant pour attendre son artillerie que pour donner aux hommes un peu de repos pendant les heures les plus chaudes. Le Général Belliard note dans son Journal : "... A El-Beydah, dans les temps de sécheresse, on peut trouver de l'eau pendant un jour pour 1.000 à 1.200 hommes et le lendemain autant, les citernes se remplissant lorsqu'on donne à l'eau le temps de se renouveler.
La division y a passé la journée.
A 6 heures du soir, le général Desaix me donna l'ordre de partir avec la 21e demi-brigade et un détachement de dragons pour le village d'El-Akrich. La 61e se mit en intermédiaire à Kafr-Selim et les autres troupes de la division restèrent à la première position. Le général avait ainsi divisé son monde à cause de la disette d'eau. Les ressources sur lesquelles il comptait pour El-Akrich furent nulles ; car, après avoir établi mon bivouac, je fus obligé d'envoyer des hommes de corvée avec un fort détachement, chercher de l'eau à EI-Kerioun, à une bonne lieue de là. La 61e éprouva le même sort et eut recours à un village assez grand qu'elle avait à sa droite. Kafr-Selim et El Akrich sont deux mauvais villages dont les maisons sont construites en terre …" (La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 2. p. 107-108).
Le 16 Messidor an 6 à dix heures du soir (4 juillet 1798), Desaix écrit, depuis Beda, à Bonaparte : "… J'ai été obligé ce soir de faire occuper les villages d'El-Arych par les dragons et la 22e légère ; Cafer, par la 61e de bataille, et je suis resté avec la 88e à Beda, afin de pouvoir procurer un peu d'eau qui manquait totalement ici pour un aussi grand nombre d'hommes. Cette raison m'a déterminé à ne pas laisser de troupes entre Marmont et moi, parce que je n'y ai pas trouvé une goutte d'eau. Je ne pouvais y laisser des troupes harassées …" (Correspondance inédite officielle et confidentielle de Napoléon, t.5, Egypte).
Conformément à l'ordre de Bonaparte, la Division Reynier part d'Alexandrie dans la nuit du 4 au 5 juillet et atteint El-Beydah, après une route fort pénible. La Division Desaix continue alors sa marche en avant. Le Journal de Belliard raconte : "La division Reynier étant arrivée à El-Beydah, le général Desaix en partit avec sa troupe, prit à El-Akrich la 61e, et vint à El-Kerloun. Il me donna l'ordre de lui céder la place et de me porter en avant avec la 21e, l'artillerie et la cavalerie. A la nuit, j'arrivai à Berket-Gitas et je pris position en avant du village, formant le bataillon carré, ayant au milieu l'artillerie, les équipages et une partie de la cavalerie. Le reste fut mis sur un des flancs du village, protégé par des carabiniers. A 11 heures du soir, le reste de la division nous joignit et s'établit près de nous tant bien que mal" (La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 2. p. 113).
Le 17 Messidor an 6 (5 juillet 1798), Desaix ecrit, depuis le camp de Beda, au Général Bonaparte : "… Comme je vous l'ai mandé cette nuit, la 21e légère et les dragons du 20e régiment, ont pris position à El-Arych, la 61e à Cafer, et la 88e avec les hussards restant au camp de Beda. J'ai pris cette mesure pour avoir de l'eau ; mais d'après le rapport qu'on m'a fait, elle y manque déjà. Dans ce moment-ci, les troupes n'ont pas l'espérance d'en avoir un verre ..." (Correspondance inédite officielle et confidentielle de Napoléon, t.5, Egypte).
Ordre du jour des deux Divisions d'avant-garde (Damanhour, 20 messidor an 6 - 8 juillet 1798).
"Le général défend expressément de tirer des coups de fusil dans le camp ; les munitions ne doivent être employées qu'à l'ennemi. Il recommande aux chefs et officiers d'y veiller et de punir sévèrement tout soldat qui contreviendrait au présent ordre.
Il sera distribué aux deux divisions de l'avant-garde la quantité de pintes d'eau-de-vie ci-après :
Division Desaix. – 21e légère, 21 pintes ; 61e de ligne, 18 ; 88e de ligne, 17 ...
Ne pouvant faire une plus grande distribution d'eau-de-vie, elle sera coupée avec de l'eau pour boire.
Les troupes formant les deux divisions ... recevront également aujourd'hui une demi-ration composée de biscuit ou légumes.
Ces distributions se feront de suite à Damanhour, au magasin des subsistances.
Dans la journée, toutes les troupes recevront la viande fraîche pour un jour. La distribution se fera au camp.
Signé : Donzelot" (La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 2. p. 116).
- Combat de Ramanieh.
Le 9 juillet, Bonaparte rejoint son avant-garde à Damanhour. Le lendemain, toute l'armée se remet en route. La Division Desaix est à l'arrière-garde.
A quelque distance de Ramanieh, un Corps de 600 mameluks charge sur les dernières troupes. Les Demi-brigades de Desaix, qui marchent en colonne par peloton, se forment en ligne vers la droite et vers la gauche et reçoivent à bout portant les intrépides cavaliers qui les assaillent. Une quarantaine d'entre eux sont tués. Le reste se retire précipitamment. La Division Desaix ne perd que quatre hommes, parmi lesquels le Sous-lieutenant Parmentier, de la 61e Demi-brigade.
Dans son Rapport au Ministre de la guerre, daté du Caire, le 6 Thermidor (24 juillet), Berthier écrit, au sujet des combats du 22 Messidor (10 juillet) : "La division du général Desaix, en partant de Damanhour, eut connaissance d'un corps d'environ 600 Mameluks qui l'attaquèrent à moitié chemin d'El-Rahmanieh. Il dispose sa division de manière que l’ennemi trouvait un feu meurtrier partout où il se présentait. Le général en chef, qui avait précédé la division Desaix à El-Rahmanieh avec les autres divisions, marcha au-devanl de lui et l'ennemi se retira. Le citoyen Parmentier, lieutenant à la 61e demi-brigade, a été tué, ainsi que quelques grenadiers et un guide à cheval. L'ennemi a perdu environ 40 hommes" (La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 2. p. 143).
- Bataille de Chebreiss.
Après deux jours passés à Ramanieh pour y attendre des approvisionments qui remontent le Nil, Bonaparte se transporte à Miniet-Salamé. Le 13, avant le jour, les cinq Divisions de l'armée lèvent leur camp pour marcher vers le Caire. La Division Desaix longe le fleuve.
Vers huit heures du matin, à hauteur de Chebreiss, Bonaparte est arrêté par un corps de 3500 Mameluks, 2,000 Janissaires, 12,000 servants armés et de nombreux Arabes de Bahrieh, que commande Mourad-bey. Ses Divisions formées en carré se portent en avant. Les Arabes et les Mameluks font des prodiges de valeur mais s'épuisent en vains efforts dans des charges furieuses. Les faces des carrés restent inébranlables. La Division Desaix s'empare de Chebreiss et Mourad-bey se retire d'un combat qui lui coûte un millier d'hommes.
L'Armée d'Egypte continue à se rapprocher du Caire. Les départs se font toujours au milieu de la nuit, pour éviter la chaleur qui est suffocante.
Mourad-bey est parvenu à réunir sur la rive gauche du Nil, à Embabeh, 6,000 Mameluks et autant d'Arabes de grande tente, qui forment la gauche de sa ligne, dans la direction des Pyramides de Giseh. Vingt mille hommes à pied, tant janissaires qu'Arabes des milices du Caire, occupent un camp retranché en avant d'Embabeh. Trois cents vaisseaux légers couvrent le Nil. Enfin plus de 15,000 fellahs sont en réserve derrière les mameluks (le mot Fellah est le terme générique sous lequel sont désignés les paysans égyptiens).
- Bataille des Pyramides.
Dès le 19 juillet, à 5 heures du soir, les Divisions d’avant-garde quittent El-Qatah pour venir camper auprès d’El-Rahâwi ; elles se remettent en marche le lendemain matin pour Omm-Dinar et El-Qorataïn. Bonaparte, arrivé le 19 à Oum-el-Dinar, se porte, le 21, contre Mourad-bey.
"A 9 heures du matin, écrit Belliard, on aperçut le général en chef, et ce fut le signal du départ, car, lorsqu'il arrive, rarement on reste tranquille. Effectivement, il fallut décamper pour aller à Omm-Dinar, à une demi-lieue de là, en longeant la chaussée qui va passer à l'ouest du village.
Dans la matinée, le bataillon passa le Nil et joignit la division". Il s’agit ici du Bataillon de la 61e, qui avait été envoyé dans le Delta pour chercher des vivres. On voit dans le Journal de Belliard que ce Bataillon avait, le 19 juillet, remonté la rive droite du Nil jusqu'à hauteur de la Division, "conduisant la quête forcée qu'ils avaient faite" (La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 2. p. 168).
Vers une heure de l'après-midi, la Division Desaix, qui forme l'avant-garde, s'arrête en vue des ennemis, en avant des villages d'Ebrerah et de Boutis. La température est excessive. Les hommes sont accablés de lassitude. Toutes les Divisions se reposent un instant.
Le spectacle qui se présente aux yeux de l'armée française est de ceux qui frappent l'imagination. Les Pyramides dont les sommets se dressent à l'horizon, le Caire avec ses 400 minarets, les champs de Memphis constituent le décor merveilleux dans lequel se meut, tournoyante et rapide, la brillante cavalerie des Mameluks. Bonaparte adresse à ses soldats la brève et célèbre proclamation que l'on connaît. Puis il forme ses Divisions en carré, comme à Chebreiss, et donne le signal de l'attaque.
La Division Desaix doit percer le centre de la ligne ennemie et manoeuvrer à distance des canons d'Embabeh pour rejeter ses adversaires dans le Nil. Elle se met à peine en mouvement, que déjà les Mameluks l'environnent. Les cavaliers incomparables de Mourad-bey cherchent à renverser les murailles de feu que les Demi-brigades leur opposent. Le champ de bataille se couvre de leurs morts. Vers six heures du soir, la lutte est terminée. Les ennemis sont en pleine déroute.
Après dix-neuf heures de marche ou de combat sous un ciel brûlant, les troupes de Desaix ont encore l'énergie de poursuivre les Mameluks jusqu'à Giseh. Elles y trouvent d'abondantes ressources et de confortables installations, qui les remettent bientôt de leurs fatigues (depuis Damanhour jusqu'à Giseh, les troupes de l'Armée d'Egypte n'ont vécu que de légumes sans pain).
A la bataille des Pyramides, les Français ne comptent guère que 70 hommes mis hors de combat. Les pertes de Mourad-bey sont de 10,000 tués, noyés ou blessés. Cette bataille peut être considérée comme le triomphe de la tactique et de la discipline sur la folle bravoure des Orientaux.
Le Capitaine du Génie Garbé raconte dans son rapport (sans indication de destinataire ni signature) : "Le 3 thermidor, à la pointe du jour, la division quitta la position d'El-Qorataïn, et, contiuant de faire l'avant-garde, elle marchait suivie de toute l'armée vers Gizeh, à peu près parallèlement au cours du Nil. A une demi-lieue de là, on commença à apercevoir un détachement nombreux de cavalerie, qui paraissait être l'avant-garde des Mameluks. Ce corps ne chercha point à s'engager avec nous ; il était toujours occupé à nous observer et à nous éviter. En allant toujours de la même manière pendant plus de cinq heures, on arriva au village de Bechtil, d'où l'on aperçut facilement le camp de l'armée ennemie à un quart de lieue de là, en avant du village d'Embabeh. On apercevait également leur flotille, qui était sur le fleuve.
La division s'arrêta au village de Bechtil, pour observer l'ennemi et attendre des ordres du quartier général, qui était en arrière. Il y avait une heure que l’on était dans cette position lorsqu'on s'aperçut d'un mouvement général dans le camp de Mourad-Bey. On vit bientôt que ce mouvement avait pour but de se former et de marcher sur nous. Les soldats étaient répandus autour des citernes et dans le village. On rappela et on se forma précipitamment. Voici quelles étaient les dispositions de notre division. Elle formait un carré dont le côté, qui faisait face au camp ennemi, était composé de la 61e demi-brigade sur six hommes de hauteur ; le côté opposé et qui regardait le village était formé par la 88e demi-brigade sur 6 hommes également ; les deux autres étaient formés par la 21e d'infanterie légère sur 3 hommes seulement. La cavalerie, peu nombreuse, était dans le centre, ainsi que tous les équipages. L'artillerie était sur les angles du carré. On avait jeté dans le village les canonniers, les dragons à pied et les sapeurs formés de cette manière. Nous avions le côté de la 88e et un de la 21e regardant le village, dont ils étaient éloignés d'environ 30 toises ; le côté de la 61e était vis-à-vis une digue, qui en était éloignée de 10 à 12 toises ; l'autre côté faisait face à la division Reynier, distante d'à peu près 40 à 50 toises.
A peine était-on formé, qu'on vit les Mameluks arriver sur nous, avec l'air des hommes qui viennent engager un combat. Ils pensaient, en effet, nous rompre du premier abord. Leur charge avait paru se diriger sur le centre de l'armée. Mais, quand ils furent à moitié chemin, ils tournèrent tout à coup sur leur gauche et vinrent sur la division du général Desaix. Il se divisèrent en deux parties ; l'une vint passer entre les deux divisions Desaix et Reynier ; il en resta plus de trente étendus dans l'intervalle de ces divisions, et plusieurs blessés furent enlevés aussitôt. L'autre partie vint se jeter sur la digue, qui était près de notre carré ; mais, ayant été accueillis par un feu bien nourri de mousqueterie et d'artillerie, ils se rejetèrent sur le village qu'ils tentèrent inutilement d'enlever. Il s'engagea aussitôt dans ce village une fusillade terrible. Ceux qui le défendaient s'y battirent avec la plus grande bravoure. Ils revinrent bientôt après occuper une petite mosquée, qui était sur la droite du carré. On s'attendait à une seconde charge ; mais quand ils virent le village d'Embabeh enlevé par nos troupes, et les Mameluks qui le défendaient prendre la fuite, ils se réunirent à eux et prirent le chemin des Pyramides.
Le peu de temps qu'on avait eu pour se mettre en bataille n'avait point permis d'occuper la digue qui était en avant de notre position. II eût été avantageux d'y placer l'artillerie et une partie de la division" (La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 2. p. 185).
Le même Garbé écrit à Caffarelli, depuis le camp d'Abou-Seïfeni, le 13 Thermidor (31 juillet) : "On forma le carré avec tant de précipitation qu'on ne put se porter sur la petite hauteur qui était en avant et qu'il eût été si avantageux d'occuper, surtout pour l'artillerie. Cependant la cavalerie des Mameluks accourait à toute bride sans trop observer de tenue militaire, mais paraissant bien décidée de (sic) venir enfoncer nos rangs. La troupe se trouva bien rangée et prête à recevoir l'ennemi. Il se divisa bientôt en trois colonnes ; une se dirigeait sur notre droite, près du village, la seconde sur notre gauche et la troisième sur la gauche du général Reynier. Quand il fut à bonne portée de fusil, un feu roulant de mousqueterie et d'artillerie arrêta sa fougue. Cependant un détachement passa entre la division Desaix et la division Reynier et laissa une vingtaine de morts sur le champ de bataille. Un d'eux passa même entre une pièce d'artillerie légère et son avant-train …" (La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 2. p. 185).
- Bataille navale d'Aboukir.
Le 25 juillet, une partie de l'Armée d'Egypte est placée au Caire. La Division Desaix reste en avant de Giseh, dans le camp retranché de Torrah.
L'expédition d'Egypte est restée secrète jusqu'au départ de l'Armée d'Orient. Les journaux ont même répandu le bruit que les préparatifs faits à Toulon étaient dirigés contre l'Angleterre. La flotte britannique, commandée par l'Amiral Nelson, avait croisé vers le détroit de Gibraltar dans l'espérance d'une bataille navale, tandis que la flotte française et les 300 bâtiments qu'elle convoyait s'acheminaient, non sans inquiétude, vers Alexandrie.
Après le débarquement du Corps expéditionnaire, tous les navires se sont réfugiés dans la rade d'Aboukir. Chaque Demi-brigade de la Division de Desaix a laissé quelques troupes pour la garde des vaisseaux de haut-bord. Deux Compagnies de la 61e (150 hommes) se trouvent sur le Timoléon.
Le 14 Thermidor an 6 (1er août 1798), Bonaparte écrit, depuis son Quartier général, au Caire, au Général Berthier : "Vous voudrez bien donner l'ordre à l'adjudant général Bribes et au 3e bataillon de la 61e demi-brigade, hormis la compagnie de grenadiers, de partir le 16 au soir, en s'embarquant sur le Nil, escortés par une chaloupe canonnière, à Koum Cheryk.
Il déclarera aux habitants que je suis très-mécontent de leur conduite ; que je sais qu'avant notre victoire ils ont tiré sur nos chaloupes. Il les désarmera entièrement et leur déclarera qu'à la moindre plainte que j'aurai contre eux je ferai brûler leur village. De là il se rendra à Châbour, où il s'informera également de la conduite que l'on a tenue. Enfin il se rendra à El-Rahmânyeh, où il prendra le commandement de la province de Bahyreh.
Vous lui ferez passer les instructions pour l'organisation générale de la province.
Il sera chargé de nommer le divan, l'aga, la compagnie de 60 Turcs.
L'intendant copte et l'agent français ont ordre de s'y rendre.
La ville de Damanhour s'est fort mal conduite contre un détachement de nos troupes commandé par le général Dumuy : il faut qu'il en tire une vengeance exemplaire.
A cet effet, il attendra à El-Rahmânyeh l'arrivée du général Dumuy, qui doit y venir avec 500 hommes et deux pièces de canon ; et, dès l'instant qu'il sera arrivé, il remettra l'ordre, que vous lui donnerez, au général Dumuy de se rendre au Caire, en laissant les troupes qu'il aura amenées à la disposition de l'adjudant général Bribes ; et, avec ces troupes réunies, il ira prendre position à Damanhour.
Il désarmera la ville, fera couper la tête à cinq des principaux habitants : un qui se sera le plus mal comporté parmi les hommes de loi, et les quatre autres parmi ceux qui ont le plus d'influence sur la populace.
Après quoi, il prendra vingt-cinq otages, qu'il enverra par le Nil au Caire. Après cette opération, il restera deux ou trois jours à Damanhour ; après quoi, il se rendra à El-Rahmânyeh, où mon intention est de fixer la capitale de la province de Bahyreh.
Il nommera pour Damanhour un aga, qu'il autorisera à avoir 40 hommes armés pour maintenir la tranquillité de la ville et la mettre à l'abri des Arabes.
Il fera construire à El-Rahmânyeh deux fours. Dès l'instant qu'il aura organisé la province, il fera en sorte de trouver des chevaux pour monter 50 hommes de cavalerie à pied, que le général Menou sera chargé de lui donner.
Avec cette colonne mobile, il maintiendra dans la province la plus grande tranquillité et assurera toute la navigation du Nil.
Si le général qui commande à Rosette, ou le commandant de la province de Gharbyeh, ou celui d'Alexandrie, se trouvaient avoir besoin de secours, il ne manquerait pas de leur en fournir. Vous préviendrez, en conséquence, les commandants de ces trois provinces de se mettre en correspondance avec les Arabes bédouins ; et il fera tout ce qu'il pourra pour nous mettre en paix avec eux.
Il aura soin d'ordonner le nettoiement du canal d'Alexandrie, qui commence à El-Rahmânyeh, afin que le Nil y pénètre …" (Correspondance de Napoléon, t.4, lettre 2915 ; Correspondance générale de Napoléon, t.2, lettre 2708 ; La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 2. p. 324 ; La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 2. p. 344).
Le même 1er août, vers 5 heures du soir, l'escadre britannique entame l'action. Un assez grand nombre de matelots sont à terre et n'ont pas le temps de se rembarquer. Les braves de la 61e font le service des batteries et répondent à l'épouvantable canonnade des Anglais.
Le 2 août 1798 (15 thermidor an VI), le Général en chef écrit au Général Berthier : "Le magasin central d'habillement (note : sous la direction de l'agent en chef Thorin, du capitaine d'habillement Bernoyer et du garde-magasin principal Grandjean) a de quoi confectionner :
1° dix mille habits et 20000 pantalons : vous ordonnerez qu'il en soit fait la distribution suivante :
... 61e [de ligne] 800 (habits) 1600 (pantalons) ...
2° Les habits seront confectionnés par les corps. L'ordonnateur en chef (note : Sucy) fera un règlement pour tout ce qui doit leur être donné par habit et pour la façon.
3° Il ne sera rien confectionné du magasin brigade" (Correspondance générale de Napoléon, t.2, lettre 2723 ; La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 2. p. 335).
Le 2, à la pointe du jour, après une nuit passée tout entière au combat, l'avantage est à peu près égal. On se bat à portée de pistolet et tout ce qui existe de moyens de destruction est employé de part et d'autre. Vers le soir, après vingt-quatre heures d'héroïques efforts, le Timoléon, serré de près par deux navires anglais, a perdu toute sa mâture. Alors, le Capitaine Trulet, qui le commande, le jette à la côte. Les morts et les blessés sont mis à terre pendant la nuit et le 3, à la pointe du jour, le navire est incendié.
La bataille navale d'Aboukir coûte une quarantaine de tués à la 61e Demi-brigade. Le Capitaine Cas, les Lieutenants Tricotel et Emmanuel, le Sous-lieutenant Gaulet, le Sergent Evrard et les Caporaux Baissade, Chaboud et Coudert, sont de ce nombre.
Le 20 Thermidor an 6 (7 août 1798), Bonaparte écrit, depuis son Quartier général, au Caire, au Général Berthier : "Vous donnerez l'ordre à la 21e légère de partir cette nuit pour venir tenir garnison au Caire. Le général Desaix la fera remplacer au camp retranché d'Abou-Seyfeny par un bataillon de la 61e ..." (Correspondance de Napoléon, t.4, lettre 2997 ; Correspondance générale de Napoléon, t.2, lettre 2795 ; La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 2. p. 344). L'autre Bataillon de la 61e Demi-brigade reste en réserve à Gizeh, avec la 88e.
Le 12 août, Desaix prescrit au Général Friant (qui commande le camp d'Abou-Seïfeni), d'envoyer au secours de Rampon le 1er Bataillon de la 61e Demi-brigade, avec 2 pièces de 5 (La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 2. p. 471).
Le même 25 Thermidor an 6 (12 août 1798), Donzelot, pour le Général Desaix, écrit, depuis Le Caire, au Général Bonaparte : "Le général Rampon a donné de ses nouvelles, du camp de Thébain, en avant de Torra. Les Arabes sont toujours en vue de lui ; ils le laissent tranquille, et il ne s'est rien passé de nouveau dans la journée d'hier, date de sa lettre. Il a reçu aujourd'hui le 1er bataillon de la 61e, avec deux pièces de canon, des vivres et des munitions. Il doit se porter en avant, longeant le Nil, et agir selon les circonstances sans se compromettre ..." (Correspondance inédite officielle et confidentielle de Napoléon, t.5, Egypte).
Le 16 août 1798 (29 thermidor an 6), depuis le Quartier général, au Caire, Bonaparte écrit au Général Berthier : "... Vous ferez réunir, dans la journée de demain, au reste de la division du général Desaix, du côté de Gyzeh, les deux premiers bataillons de la 21e d'infanterie légère, les troupes que le général Desaix aurait placées au Vieux-Caire et toute l'artillerie attachée à sa division.
Cette division, ainsi composée de deux bataillons de la 21e légère, deux bataillons de la 61e de ligne, deux bataillons de la 88e idem, et de son artillerie, prendra, dans la matinée du 1er fructidor, du pain pour le 2 et le 3, et s'embarquera à Gyzeh sur les djermes que lui fournira le contre-amiral Perrée …
… le général Desaix partira dans la journée du 1er avec cette flottille et sa division, pour prendre possession de la province de Beny-Soueyf" (Correspondance de Napoléon, t.4, lettre 3027 ; Correspondance générale de Napoléon, t.2, lettre 2840; La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 2. p. 475).
Le 2 Fructidor au 6 (19 août 1798), Bonaparte écrit, depuis son Quartier général, au Caire, au Général Berthier : "Vous donnerez l'ordre au général Desaix de prendre, en passant devant le général Rampon, ses deux pièces d'artillerie et le bataillon de la 61e …"(Correspondance de Napoléon, t.4, lettre 3047 ; Correspondance générale de Napoléon, t.2, lettre 2866).
- Poursuite des Mameluks.
Des deux beys qui se partagent le pouvoir, l'un, Ibrahim, a trouvé un appui auprès du Pacha d'Acre ; l'autre, Mourad, s'est réfugié dans la Haute-Egypte. Tandis que Bonaparte organise le pays et projette de poursuivre le premier, Desaix est envoyé contre le second.
Le 5 Fructidor an 6 (22 août 1798), Bonaparte écrit, depuis son Quartier général, au Caire, au Général Desaix : "Le général Rampon, Citoyen Général, étant parti pour se rendre à Atfyeh, il peut être dangereux de le laisser trop longtemps seul ; je désire que vous partiez de suite avec les 1,500 hommes que vous pourrez embarquer, sous l'escorte de deux bâtiments armés. Vous mouillerez visà-vis Atfyeh ; vous vous occuperez là à ramasser les bateaux pour embarquer le bataillon de la 61e.
Si l'ennemi a fait quelque mouvement contre le général Rampon, vous débarquerez et prendrez le commandement du tout ; s'il n'y a rien de nouveau et que Mourad-Bey soit toujours au delà de Minyeh, vous vous avancerez pour prendre position à Beny-Soueyf.
Je désire cependant que, dans tous les cas, vous restiez vingt-quatre heures à Atfyeh, afin de pouvoir être bien instruit des mouvements de l'ennemi sur cette rive …" (Correspondance de Napoléon, t.4, lettre 3071 ; Correspondance générale de Napoléon, t.2, lettre 2898 ; La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 3. p. 194).
L'Ordre du jour, établi au Quartier général, au Caire, le 22 août 1798 (5 fructidor an 6) fixe les emplacements de l'armée : "DIVISION DESAIX, à GYZEH ... 61e de ligne, le 3e bataillon détaché à El-Rahmânyeh ..." (Correspondance de Napoléon, t.4, lettre 3086).
L'Ordre du jour de la Division Desaix du 6 fructidor (23 août), prescrit que les troupes s'embarqueront le 7, à la pointe du jour : "… La 21e s'embarquera au Vieux-Caire ; les 61e et 88e, vis-à-vis le camp de Gezireh ; les munitions s'embarqueront à Gizeh. La pièce de 8 et l'obusier, qui sont au camp de Gezireh, rentreront au parc de l'armée … ". Les gros bagages et les chevaux doivent être laissés aux Dépôts des Corps, les chameaux remis à l'administration des transports. Les troupes doivent emporter les marmites, bidons, pelles, haches et autres effets de campement (La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 3. p. 194).
La 61e Demi-brigade laissant un de ses Bataillons pour la garde des communications avec le Caire, quitte Giseh, le 25 août, avec tous les autres Corps de la Division dont elle fait partie.
Situation de la Division Desaix au moment de son départ :
… 61e de Ligne : 1er Bataillon 488 présents ; 2e Bataillon 427 présents ; Grenadiers du 3e Bataillon 72 présents, total 987 présents. 98 hommes aux hôpitaux, 84 détachés (La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 3. p. 193-194).
"8 fructidor (25 août). - A la pointe du jour, le général mis à la voile avec ses quatre bataillons, le chebec le Cerf, l'aviso l'Etoile, la demi-galère la Coquette. La demi-galère l'Amoureuse est restée pour escorter le bataillon de la 61e, pour lequel on n'avait pu se procurer des djermes. Le soir, on est parvenu à en réunir. Le 2e bataillon s'est embarqué dans la nuit, et, le 9 (26 août), le convoi, avec la demi-galère l'Amoureuse, mit à la voile pour se diriger à la hauteur d'Atlieh, où l'expédition devait se réunir et y prendre le 1er bataillon de la 61e, avec les deux pièces de 5, qui étaient à la disposition du général Rampon. Le 12, dans la matinée, toutes les troupes de l'expédition ont été réunies à ce point, où le bataillon et l'artillerie furent embarqués. 50 hommes malades de la 21e légère et 8 de la 88e ont été envoyés à l'hôpital du Caire par l'aviso le Pluvier. Le 13, toute la flottille mit à la voile. Le 14, au matin, elle est arrivée à Beni-Souef, où les 6 bataillons ont débarqué et pris position en avant de la ville, appuyant la droite et la gauche au Nil, le camp étant protégé par les bâtiments de guerre. Le même jour, dans la nuit, un détachement de 15 hommes est parti en djerme pour porter des dépêches au général Bonaparte et au général Berthier" (Historique de la division Desaix, rapport du 7 au 14 fructidor - 24 au 31 août, In La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 3. p. 194).
"Le 25 août, Desaix avec cinq mille hommes, dont six cents de cavalerie, trois cents d'artillerie ou de sapeurs, et quatre mille trois cents d'infanterie, une escadrille de huit bâtiments, demi-galères, avisos ou demi-chebecs, montés par des marins français, partit du Caire. C'était à la fois une opération militaire importante, et un voyage scientifique d'un grand intérêt. Pour la première fois depuis la chute de l'empire romain, une nation civilisée et cultivant les sciences et les arts allait visiter, mesurer, fouiller ces superbes ruines qui occupent depuis tant de siècles la curiosité du monde savant. Personne n'était plus propre à diriger une pareille opération que Desaix ; personne ne le désirait avec plus d'ardeur. Jeune, la guerre était sa passion ; insatiable de gloire, il connaissait toute celle qui était attachée à la conquête de ce berceau des arts et des sciences. Au seul nom de Thèbes, de Coptos, de Philæ, son cœur palpitait d'impatience. Les généraux Friant et Belliard, l'adjudant-commandant Donzelot, le colonel d'artillerie la Tournerie, étaient sous ses ordres. Le 21e léger, les 61e et 88e de ligne, excellents régiments qui s'étaient embarqués à Cività-Vecchia, étaient les plus nombreux de l'armée. Ils occupaient le même camp, au sud de Gizeh, depuis deux mois, et Desaix les avait employés à se préparer à cette campagne. La cavalerie était montée sur des chevaux arabes, aussi bons que ceux des Mamelucks, provenant des remontes et des prises, mais elle n'était pas nombreuse. Les remontes se faisaient avec difficulté, le pays était encore mal soumis. Des savants et des artistes désiraient suivre Desaix, ce qui aurait eu le double inconvénient d'exposer aux périls de la guerre des hommes précieux, et de porter du retard dans les opérations militaires. Denon seul eut la permission de suivre, comme volontaire, le quartier général de la division" (Campagne d'Égypte et de Syrie, Général Bertrand ; cité par Kermoysan « Napoléon, Recueil par ordre chronologique de ses lettres, proclamations, bulletins », Paris, 1853, t.1, p. 253).
L'Ordre du jour de l'Armée, rédigé par Berthier au Caire, le 27 août 1798 (10 fructidor an VI) indique que : "… Le général ordonne que tous les détachements d'infanterie qui étaient restés à bord des vaisseaux de l'escadre, et qui sont à Alexandrie, à Aboukir et à Rosette, se mettent en marche sur-le-champ pour se rendre au Caire, hormis les gens appartenant à la 69e, à la 4e d'infanterie légère, au 3e bataillon de la 85e qui est à Rosette, au 3e bataillon de la 61e qui rejoindra à El-Rahmânieh et au 3e bataillon de la 13e qui rejoindra à Damiette ..." (La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 2. p. 568-569).
Desaix remonte le Nil sur des bateaux plats, ou djermes et arrive, le 13 septembre, à Montfalout, à l'entrée du canal Joseph.
"Le 27 (13 septembre), le général Desaix, ayant appris qu'il y avait des ennemis à Siout, où l'on présumait qu'étaient aussi leurs bâtiments de guerre, partit après midi avec les deux demi-galères et seize djermes, chargées des deux 1ers bataillons des 61e et 88e demi-brigades, pour se rendre devant cette ville. Le chebec et l'aviso l'Étoile, avec le restant du convoi, mirent à la voile deux heures après pour suivre le général, excepté un détachement de la 21e légère et la chaloupe canonnière la Cisalpine, qui restèrent à Darout-el-Cherif, pour attendre le détachement de ce corps qui avait été laissé pour la garde des barques prises aux Mameluks dans le canal Joseph" (Historique de la division Desaix - In La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 3. p. 202).
Le lendemain, les 61e et 88e Demi-brigades se portent contre un détachement de Mameluks qui leur est signalé du côté de Siout. Elles n'arrivent pas à l'atteindre et le poursuivent, sans plus de succès, jusqu'à Beni-Adin.
Le 21 septembre 1798 (5e jour complémentaire), Bonaparte prescrit que le magasin central d'habillement distribuera aux troupes, en sus des quantités allouées le 2 août, les matières nécessaires pour confectionner 10100 habits, 21300 capotes, 8900 pantalons pour l'infanterie, l'artillerie et le génie ; 2400 gilets et 2400 pantalons d'écurie pour les troupes à cheval. Ces quantités sont ainsi réparties : 61e Demi-brigade de ligne, 600 habits, 1400 capotes et 600 pantalons (La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 3. p. 34-35).
Le 2 Vendémiaire (23 septembre), à 5 heures du matin, Donzelot écrit à Berthier que l'Officier de correspondance est arrivé "cette nuit" avec le biscuit annoncé et des dépêches. En même temps sont arrivés le Chef de Brigade Morand, 80 hommes venant des Dépôts, et "le quartier-maître de la 61e, avec la solde de tous les corps, ce qui nous fait grand bien". Le départ de ce nouveau convoi a été prescrit par un Ordre de Bonaparte à Berthier (1er jour complémentaire - 17 septembre). Tous les hommes de la Division Desaix, présents au Dépôt, doivent partir le lendemain à midi avec 30.000 rations de biscuit. L'Officier conduisant le détachement doit passer à Gizeh pour prendre les ordres de Bonaparte (La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 3. p. 204).
Le même 23 septembre (2 vendémiaire an 7), l'Adjudant général Donzelot écrit, depuis Darout-el-Cherif, au Général Friant : "La division, mon cher Général, partira au coup de canon. Elle devra marcher dans l'ordre suivant dans le canal Joseph :
La 21e légère,
La 61e de ligne,
L'artillerie,
Les vivres,
L'ambulance,
La 88e.
Un officier ferme et intelligent de ce corps devra faire l'arrière-garde.
Néanmoins toutes les djermes marcheront en ordre et en file sans se dépasser, pour qu'il n'y ait pas de confusion dans le canal, ce qu'il faut recommander expressément.
Le général Desaix marchera après la 21e ; sa djerme sera distinguée par un pavillon tricolore ...
On sera souvent dans le besoin de tirer la corde pour faire marcher les djermes. Les officiers qui y commandent devront commander des hommes de corvée à cet effet, et les faire relever lorsqu'ils les croiront fatigués ...
Jusqu'à nouvel ordre, l'on ne marchera pas la nuit. On partira à la pointe du jour, l'on voguera toute la journée et on s'arrêtera après le soleil couché.
Salut et amitié.
DONZELOT" (La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 3. p. 206-207).
- Retour dans le Fayoûm.
Pendant que Desaix s'avance dans la Haute Egypte, tout le pays se soulève derrière lui sur les instigations de Mourad-bey. Il revient alors dans le Fayoûm, après une difficile navigation sur le canal Joseph, et débarque, le 4 octobre, à Menakieh (le pays est alors inondé par la crue annuelle du Nil). Puis il reprend sa route vers le Caire, à proximité des Mameluks dont il ne se débarrasse qu'à coups de canon.
- Bataille de Sediman.
A la tête de 5.000 cavaliers, 8.000 fantassins arabes, 10.000 fellahs et 4 pièces d'artillerie, Mourad-bey prend position sur les hauteurs qui avoisinent Sediman. Desaix ne laisse sur sa flottille que quatre Compagnies destinées à la garder et marche, le 7 au matin, contre son adversaire, ayec 2.000 fantassins et 500 cavaliers. Sa troupe forme un carré dont les angles sont flanqués par des pelotons de 200 hommes chacun. L'un de ces pelotons, placé sur la gauche, est aux ordres du Capitaine Geoffroy, de la 61e.
"Vers 8 heures du matin, l'ennemi s'approche, entoure la division et la charge avec la plus grande impétuosité sur toutes ses faces. Mais de tous les côtés, il est vivement repoussé par le feu de l'artillerie et de la mousqueterie ...
Furieux de la résistance qu'ils éprouvent, les plus braves parmi les mameluks, se jettent en désespérés dans les rangs, où ils expirent après avoir vainement employé A leur défense les armes dont ils sont couverts ... Mourad-bey divise sa cavalerie, qui n'avait encore agi que par masse, et fait entourer la division. Il couronne quelques monticules de sable, sur l'un desquels il démasque une batterie placée avec avantage, et qui fait un feu meurtrier.
Le général Desaix, devant un ennemi six fois plus fort que lui, et dans une position où une retraite difficile sur ses barques le forçait à abandonner ses blessés, juge qu'il faut ou vaincre ou se battre jusqu'au dernier homme" (Mémoires du maréchal Berthier, Paris 1827, in-8, p. 109).
Un boulet, qui arrive dans un peloton de gauche, blesse mortellement cinq soldats. D'autres atteignent le grand carré. Alors un cri s'élève : "Général, marchons aux pièces !" - "Mais nos blessés !" dit Desaix, qui comprend le péril auquel cette marche les expose. - "Le salut de l'armée avant tout", lui répond le Général Friant. Et la Division, au pas de charge, se porte contre la batterie, qui est enlevée à la baïonnette. Malheureusement les craintes de Desaix se justifient. Quelques Mameluks s'acharnent sur les blessés et les décapitent. Ils disparaissent ensuite dans le désert, tandis que Mourad-bey, vaincu, se réfugie de son côté, derrière le lac de Ghazah, dans le Fayoûm.
La bataille de Sediman est une des plus meurtrières de l'expédition d'Egypte. Les Mameluks laissent sur le terrain une très grande quantité de morts et de blessés, mais la victoire est chèrement acquise par les Français dont les pertes sont de 340 hommes. Le Chef de Brigade Conroux, le Capitaine Geoffroy et le Lieutenant Galette, de la 61e, comptent parmi les blessés. "Généraux, officiers et soldats, tous se sont couverts de gloire" (Ibid., p. 111).
Le Rapport du Général Desaix au Général en Chef Bonaparte, sur la bataille de Sediman le 7 octobre 1798, daté d'Ellahoun, le 18 Vendémiaire an 7 (9 octobre 1798), raconte : "... je suis venu à Behneseh. J'espérais y retrouver les Mameluks : on me l'annonçait, mais ils n'y étaient plus venus depuis longtemps. Enfin, j'ai rencontré leurs premiers avant-postes près d'El·Qiah, vis-à-vis Fechn; c'était le 12. Il y avait 150 hommes et autant d'Arabes. 400 hommes d'infanterie, marchant le long du canal, les ont éloignés et permis à la division de suivre sa route.
Le lendemain, au jour, nous n'avons rien découvert. Le canal dans cette partie passe près du désert ; au bout d'une heure de chemin, nous avons vu paraître un corps de 600 Mameluks qui, placé sur la rive, nous attendait pour nous fusiller. Il était impossible de débarquer vis-à-vis d’eux ; les inondations ne le permettaient pas. Nous prîmes le parti de rétrograder d'une demi-lieue, de faire débarquer tout le monde et de marcher aux ennemis ; ils se sont présentés au moment du débarquement, mais des compagnies de carabiniers de la 21e légère les ont bientôt assez éloignés pour ne plus leur permettre de nous gêner. La division s'est formée, deux pièces de canon s'y sont jointes et nous nous sommes mis en marche dans le désert en côtoyant l'inondation. Nous avons bientôt vu les ennemis se retirer quand nous avons marché à eux. Nos pelotons avancés ont fait feu pendant plus de quatre heures. Personne n'a été blessé ; les ennemis ont laissé plusieurs chevaux. Nous avons su qu'ils étaient commandés par Mohammed Elfi Bey. Après avoir marché trois heures, nous avons attendu nos barques, qui suivaient, gardées par 200 hommes et montées par 200 malades ou éclopés ...
Le 16, au matin, nous sommes partis de très bonne heure ; j'étais prévenu que Mourad-Bey avait fait des retranchements à Sédiman, qu'il y avait rassemblé toutes ses ressources, tous les Arabes, et que, fort de 4 ou 5.000 chevaux, il tenterait un vigoureux effort, cherchant à m'éloigner peu à peu de l'inondation pour attaquer le village de Sédiman par le côté qui touche le désert. Le pays est formé de monticules irréguliers ; au bout de deux heures, j'ai vu tous les ennemis qui, quittant le pied des montagnes, venaient rapidement à nous au son de leur musique barbare. A peine les petits pelotons étaient repliés sur les carrés et les pièces en batterie, que les ennemis se sont précipités sur nous de toutes parts. Nos intrépides troupes les ont vus venir du plus grand sang-froid. "Tirez donc", disais-je aux grenadiers de la 61e. - "Qu'à vingt pas, mon Général", me répondirent-ils. Sur le front, le canon à mitraille les éloigna ; ils se jetèrent sur les petits carrés placés aux angles, l'un devant, l'autre derrière ; à celui de droite, le citoyen Valette, capitaine, qui le commandait, cria à ses chasseurs de la 21e : "Feu à dix pas et croisez baïonnette !" Cela est exécuté. L'ennemi, qui n'est pas arrêté par ce feu trop court, arrive au carré ; Il ne peut y entrer ; le feu qui le couvre l’arrête ; il jette sur nos soldats fusils, pistolets, sabres, poignards, masses d'armes; plusieurs en sont assommés et tombent; il pénètre alors parmi ces braves; douze tombent morts avec autant de Mameluks, et trente sont blessés. Notre mitraille et le feu de la division délivrent bientôt les autres ; ils rentrent dans la division après avoir dépouillé leurs riches ennemis. On ne peut assez admirer la valeur de ces trop braves soldats ne voulant se battre qu'à la baïonnette. Le rapport du chef de brigade Robin que je vous envoie vous fera connaître les actions particulières de cette troupe.
A l'instant, les autres corps des ennemis venaient au carré de gauche, commandé par les citoyens Sacrost, capitaine de la 21e, et Geoffroy, de la 61e, mais le feu qui en est sorti de bonne heure les a bientôt repoussés. Ils ont aussi tenté de venir au côté de la division qui était derrière nous : c'était la 88e qui le formait et son feu les a aussi bientôt fait éloigner. Une grande quantité de balles qu'ils nous ont envoyées de toutes parts nous ont blessé beaucoup de monde. Le citoyen Conroux, chef de la 61e, a reçu une forte contusion à l'épaule droite.
Il fallait pouvoir transporter les blessés avant de marcher à l'ennemi. Malgré notre diligence, Mourad-Bey eut le temps de rassembler quatre pièces de canon et d'en former une batterie très près derrière un monticule ; déjà elles faisaient de grands ravages, deux files et deux chevaux d'artillerie étaient emportés; mais, battant la charge et courant dessus, nous les avons eu bientôt prises. Un coup de canon à mitraille n'a pas arrêté notre intrépide bataillon carré, non plus qu'une charge vigoureuse, repoussée par la 88e, derrière nous et au milieu de notre course. L'ennemi, étonné de notre vigueur, s'est enfui à toutes jambes et dans le plus grand désordre; nous l'avons poursuivi assez longtemps. Nos audacieux tirailleurs lui ont blessé beaucoup de monde; le citoyen Rapp, mon aide de camp, à leur tâte, a pris les quatre pièces. Embarrassés de nos blessés et mourant tous de soif, ayant toujours marché dans le désert, nous nous sommes arrêtés sur le bord de l'inondation du Fayoum. Dans toute cette partie, on ne peut approcher aucun village; j'étais sans subsistances; après avoir attendu plusieurs heures, j'ai donc conduit mes blessés à Sédiman, pour les y faire panser et placer sur les barques.
Dans le combat, nous avons eu 30 hommes tués et 30 blessés, non compris 50 blessures plus légères. Un officier, le citoyen Humbert, capitaine de la 21e, est mort de ses blessures; c'était un officier bien recommandable par sa valeur. 4 autres officiers sont blessés; il y a eu une infinité de contusions. Je ne vous peindrai jamais la valeur de nos troupes; j'ai eu bien de la peine à obtenir qu'elles tireraient de loin et beaucoup. Les ennemis ont perdu bien du monde, 400 hommes environ.
La division est absolument sans habits, sans souliers, ayant marché constamment dans les sables les plus fatigants …" (La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 3. p. 208-216).
Dans une lettre adressée du Quartier-général du Caire au Directoire exécutif, et datée du 17 octobre 1798 (26 vendémiaire an 7 de la République), Bonaparte écrit : "... Bataille de Sediman (Sédymân).
Le 16 (vendémiaire), à la pointe du jour, la division du général Desaix se mit en marche, et se trouva bientôt en présence de l'armée de Mourâd bey, forte de cinq à six mille chevaux, la plus grande partie Arabes, et un corps d'infanterie qui gardait les retranchemens de Sédymân, où il avoit quatre pièces de canon.
Le général Desaix forma sa division toute composée d'infanterie en bataillon carré qu'il fit éclairer par deux petits carrés de deux cents hommes chacun.
Les Mamloùks, après avoir longtemps hésité, se décidèrent, et chargèrent, avec d'horribles cris et la plus grande valeur, le petit peloton de droite que commandait le capitaine de la 21e, Vallet. Dans le même temps, ils chargèrent la queue du carré de la division, où étoit la 88e, bonne et intrépide demi-brigade.
Les ennemis sont reçus partout avec le même sang-froid. Les chasseurs de la 21e ne tirèrent qu'à dix pas, et croisèrent leurs baïonnettes. Les braves de cette intrépide cavalerie vinrent mourir dans le rang, après avoir jeté masses et haches d'armes, fusils, pistolets, à la tête de nos gens. Quelques-uns, ayant eu leurs chevaux tués, se glissèrent le ventre Contre terre pour passer sous les baïonnettes, et couper les jambes de nos soldats ; tout fut inutile. Ils dûrent fuir ; nos troupes s'avancèrent sur Sédymân, malgré quatre pièces de canon, dont le feu étoit d'autant plus dangereux que notre ordre étoit profond; mais le pas de charge fut comme l'éclair, et les retranchemens, les canons et les bagages nous restèrent.
Mourâd bey a eu trois beys de tués, deux blessés, et quatre cents hommes d'élite sur le champ de bataille ; notre perte se monte à trente-six hommes de tués, et quatre-vingt-dix blessés.
Ici, comme à la bataille des Pyramides, les soldats ont fait un butin considérable. Pas un Mamloùk sur lequel on n'ait trouvé quatre ou cinq cents louis.
Le citoyen Conroux, chef de la 61e, a été blessé ; les citoyens Rapp, aide-camp du général Desaix, Vallette et Sacro, capitaines de la 21e, Geoffroy, de la 61e, Geromme, sergent de la 88e, se sont particulièrement distingués ...
J'ai avancé les différens officiers et soldats qui se sont distingués. Je vous en enverrai l'état par la première occasion ..." (Pièces diverses et correspondances relatives aux armées d'orient; Panchoucke : « Oeuvres de Napoléon Bonaparte », 1821-1822, t. 2, p. 390 ; Oeuvres complètes de Napoléon, Stuttgart et Tubingue, 1822, t.3, p. 11 ; Kermoysan « Napoléon, Recueil par ordre chronologique de ses lettres, proclamations, bulletins », Paris, 1853, t.1, p. 254 ; Correspondance de Napoléon, t.5, lettre 3488 ; Correspondance générale de Napoléon, t.2, lettre 3476).
Ce Rapport ne parle guère de la 61e. Aussi, le Chef de Brigade Conroux écrit, depuis Ellahoun, le 5 Brumaire an 7 (26 octobre 1798), au Général en Chef Bonaparte : "Lorsque vous fîtes choix de la 61e demi-brigade, pour faire partie de l'armée destinée à la conquête de l'Égypte, ce corps crut que vous l'honoriez de votre estime ; il a vu avec peine qu'il s'était trompé, à la lecture de votre rapport de la bataille de Sédiman. En attribuant tout le succès de cette journée aux 21e et 88e demi-brigades, c'est enlever à la 61e la portion de gloire qu'elle s'est justement acqnise et que personne ne peut lui disputer. Le général Desaix lui a rendu cette justice dans son rapport" (La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 3. p. 221). Conroux donne à la suite de sa lettre les noms des Officiers qui se sont particulièrement distingués : SAINNEVILLE, Capitaine. Il commandait le 2e Bataillon ; il a montré beaucoup de bravoure et de sang-froid. QUEVAL, Lieutenant de Grenadiers. Il a, par sa bonne contenance, empêché l'ennemi de charger sa Compagnie, qui se trouvait à un des angles du carré. CARRÉ, Lieutenant. Il s'est parfaitement conduit pendant la durée de l'action ; c'est un Officier d"un mérite distingué.
Ce même 7 octobre (16 Vendémiaire), Marmont écrit à Bonaparte et annonce que l'Adjudant général Bribes vient d'être forcé, par une maladie grave, de se rendre à Rosette. Il l'a remplacé, dans le commandement d'El-Rahmànieh, par le Chef de Bataillon Marchand-Duchaume de la 61e (La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 3. p. 126-127).
Et, encore le 7 octobre 1798 (16 vendémiaire an 7), Bonaparte prescrit que le 3e Bataillon de la 61e, qui est à El-Rahmànieh, permutera avec le 1er de la 69e qui est à Alexandrie (La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 3. p. 308).
Le 8 octobre, la Division se rembarque et se rend à El Lahoum. Ses blessés sont évacués sur le Caire où les ont déjà précédés 400 hommes atteints d'ophthalmie contractée sur les bords du Nil.
Situation de la Division Desaix établie à Ellahoun, le 18 vendémiaire an 7 (9 octobre 1798) et signée de l’Adjudant général Donzelot : 61e (1er et 2e Bataillons) : 916 hommes ; 80 hommes aux hôpitaux, 1 mort, 84 au dépôt ou détachés (La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 3. p. 219).
Le 12 octobre 1798 (21 vendémiaire an 7), le Général Bonaparte écrit depuis son Quartier général au Caire, au Général Berthier, chef de l'Etat-major général de l'Armée d'Orient : "Je suis peu satisfait de l'inexécution des différents ordres que j'ai donnés, relatifs au départ de Rosette et d'Alexandrie des différents détachements d'infanterie et de cavalerie des corps de l'armée. Voyez, je vous prie, de donner vos ordres de manière à ce qu'ils soient exécutés ponctuellement. Mon intention est qu'il ne reste à Rosette que le 2e bataillon de la 69e [de ligne] 100 hommes du 14e dragons; et à Alexandrie que les 3e bataillons de la 61e, 69e, et 85e [de ligne] et 50 hommes du 14e dragons; cela sans comprendre l'artillerie" (Correspondance générale, t.2, lettre 3429; La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 3. p. 308).
Le 27 Vendémiaire an 7 (18 octobre 1798), Bonaparte écrit, depuis son Quartier général, au Caire, au Général Desaix : "… Si vous jugez à propos, envoyez la 88e ou la 61e au Caire, où elle se reposera. Je suppose que les Mameluks se sont tellement éloignés que vous n'avez plus rien à craindre d'eux …" (Correspondance de Napoléon, t.5, lettre 3495 ; Correspondance générale de Napoléon, t.2, lettre 3480 ; La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 3. p. 226).
Le 19 octobre 1798 (28 Vendémiaire an 7), le Général Manscourt écrit, depuis Alexandrie, au Général Bonaparte, au sujet de la situation de la place : "… Ces probabilités de rupture entre la Porte et nous, pouvant faire croire qu'elle va réunir dans peu des forces plus ou moins considérables avec celles des Anglais pour faire une tentative sur cette place, j'ai écrit au général Marmont de me renvoyer au plus tôt le détachement de cette garnison qu'il a sous ses ordres, n'ayant pour le moment à ma disposition que 500 hommes, dont 350 sont en garde.
Ce dénuement extrême provient de ce que j'ai envoyé quatre compagnies du 1er bataillon de la 69e à El-Rahmânieh, d'où j'attends les quatre compagnies du 3e bataillon de la 61e pour faire partir ensuite le reste du 1er bataillon de la 69e, ce qui diminuera nos forces encore davantage jusqu'à ce que le reste du bataillon de la 61e soit venu prendre sa place …" (La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 3. p. 314-315).
Manscourt informe en même temps Marmont de l'apparition des frégates turques. Il le fait en termes assez alarmés pour que Marmont juge prudent de lui renvoyer immédiatement les quatre dernières compagnies du 3e bataillon de la 61e restées à El-Rahmànieh. Lui-même se tient prêt à marcher sur Alexandrie avec le reste de ses troupes, au cas où les mouvements de l'ennemi feraient craindre une tentative sérieuse de débarquement.
Le 21 octobre 1798 (30 vendémiaire an 7), Marmont écrit, depuis le camp de Leloha, à Bonaparte : "Le général Manscourt me fait part de toutes ses inquiétudes ; elles me paraissent fondées, car il lui est impossible de défendre une place aussi mauvaise et aussi étendue qu'Alexandrie avec une garnison aussi faible que la sienne, attendu même que les quatre compagnies de la 61e n'y sont pas encore arrivées ...
L'étendue du terrain qu'occupent mes troupes me force à les rassembler sur-le-champ ; car, si Alexandrie était attaquée vivement leur éloignement m'empêcherait d'arriver à temps, er, comme je sens de quelle importance il est de mettre parfaitement à l'abri une ville qui contient beaucoup de richesses, je vais marcher à son secours avec ma colonne mobile …
… Je laisse à El-Rahmânieh la légion maltaise : elle suffit, et de reste, pour défendre ce poste ; les eaux l'entourent, et on ne peut y arriver que par deux digues ; mais, pour plus grande sûreté et jusqu'à ce que l'artillerie en soit totalement évacuée, j'y laisserai encore les quatre premières compagnies du 1er bataillon de la 69e, qui y sont maintenant ; elles viendront ensuite me joindre, à moins que vous ne leur donniez des ordres contraires.
J'aurai donc avec moi :
la 4e 700 hommes
1er bataillon de la 69e 450
détachement de la 25e 200
TOTAL 1350 hommes.
Avec ces 1350 hommes et la garnison, je crois Alexandrie en sûreté ; mais ces 1350 hommes, pour l'instant, se réduiront à 1100, à cause des 250 de la 69e qui resteront momentanément à El-Rahmànieh.
L'arrivée de ce secours fera merveille, en ce qu'il relèvera le moral qui me parait un peu abaissé …
Je pense donc prendre le bon parti et que vous le sanctionnerez de votre approbation …" (La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 3. p. 314-315).
- Première Insurrection du Caire.
Le 21 octobre 1798, justement, une insurrection que rien ne faisait prévoir, ensanglante les rues du Caire. La 61e, comme toutes les Demi-brigades de la Division de Desaix, a un petit Dépôt dans cette ville. Il contribue à rétablir l'ordre après un combat de trois jours.
Le 24 octobre 1798 (3 brumaire an 7), Bonaparte écrit depuis le Quartier général, au Caire, au Général Desaix : "... Les trois dépôts de votre division vont vous envoyer tous les habits et pantalons qu'ils ont de faits. Ils ont reçu de quoi confectionner : La 61e 800 habits, 1,600 pantalons …" (Correspondance de Napoléon, t.5, lettre 3529 ; Correspondance générale de Napoléon, t.2, lettre 3535).
Le 8 Brumaire an 7 (29 octobre 1798), Bonaparte écrit, depuis son Quartier général, au Caire, au Général Berthier, Chef de l'Etat-major général de l'Armée d'Orient : "… Vous ferez reconnaître le citoyen Queval lieutenant de grenadier de la 61e comme capitaine" (Correspondance générale de Napoléon, t.2, lettre 3582).
Le même 8 Brumaire an 7 (29 octobre 1798), Bonaparte écrit, depuis le Quartier général du Caire, au Général Berthier, Chef d'Etat-major général de l'armée : "Le citoyen Geoffroy, capitaine à la 61e a été cité par erreur dans le rapport sur l'affaire de Sediman. Vous trouverez ci-joint sa promotion que le général Desaix me renvoie. Je vous prie de l'annuler et de nommer à sa place le citoyen Sauneville, capitaine des grenadiers de la même demi-brigade" (Brotonne (L. de) : « Dernières Lettres inédites de Napoléon 1er, collationnées sur les textes et publiées » ; Paris, 1903, t. 1, lettre 64 avec la date du 2 Brumaire an 7 (20 octobre 1798 : le 2 Brumaire an 7 correspond au 23 octobre 1798); Correspondance générale de Napoléon, t.2, lettre 3583, qui mentionne un Sainneville - Note : les promotions des personnels de la 61e Demi-brigade de ligne ne sont établies qu'à la suite de la réclamation du Chef de Brigade Conroux auprès de Bonaparte).
Le 4 novembre 1798 (14 Brumaire an 7), Bonaparte écrit, depuis son Quartier général, au Caire, au Général Berthier, Chef de l'État-major général de l'Armée d'Orient : "La garnison d'Alexandrie, citoyen général, sera composée de 3e bataillon de la 61e, 75e, 85e demi-brigades [toutes de ligne] ..." (Correspondance générale de Napoléon, t.2, lettre 3612).
Le 5 novembre 1798 (15 Brumaire an 7), Bonaparte écrit, depuis son Quartier-général, au Caire, au Général Menou à Rosette : "… Je vous ai envoyé le général de brigade Murat avec un fort bataillon de la 75e et trois bonnes et belles compagnies de grenadiers de la 19e. Il est nécessaire que vous profitiez du retour des djermes pour envoyer ici les détachements qui se trouvent à Alexandrie et à Rosette ; vous en avez, entre autres, un très-fort de la 32e et de la 25e.
Voyez, je vous prie, de donner les ordres les plus positifs pour que tous les détachements rejoignent enfin : rien n'est plus préjudiciable au service et à la comptabilité que le morcellement où se trouve aujourd'hui l'armée.
Mon intention est que le fond de la garnison d'Alexandrie soit formé des 3es bataillons des 61e, 75e et 85e ...
Vous enverrez ces deux colonnes partout où vous le jugerez utile" (Correspondance de Napoléon, t.5, lettre 3576 ; Correspondance générale de Napoléon, t.2, lettre 3623 ; La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 3. p. 331).
- Combat de Medinet-el-Fayoûm.
Desaix organise le Fayoûm et mérite des habitants le surnom de Sultan Juste. Puis il repart, le 6 novembre, avec sa Division, pour lever des impositions sur quelques villages rebelles. Mourad-bey en profite pour faire attaquer Medinet-el-Fayoûm où il n'est resté, pour la garde des malades, qu'une garnison de 350 hommes dont 120 de la 61e. Le 8, à 11 heures du matin, près de 10,000 Mameluks, arabes ou fellahs se portent contre cette garnison. Les postes sont refoulés et se replient sur l'hôpital. Mais un retour offensif, exécuté à la baïonnette, rétablit le combat en faveur des Français. Les assaillants pris de terreur, et poursuivis de rue en rue, s'embarrassent dans leur fuite. On en tue près de trois cents.
Desaix revient immédiatement sur ses pas à la nouvelle du combat de Medinet-el-Fayoûm. Son heureuse issue le rassure et lui permet de retourner dans les provinces de Beni-Souef et de Minieh, où les partisans de Mourad sont nombreux.
"Le général Desaix ... voyant que l'on n'amenait plus de chevaux, résolut de faire une tournée avec sa division pour forcer les villages à l'obéissance. II laissa 350 hommes dans la ville de Fayoum pour garder nos malades et nos établissements.
Mourad-Bey, qui avait résolu de soulever tout le pays pour nous attaquer, saisit le moment de l'absence de la division pour faire marcher sur la ville. Il fit partir quelques beys et environ 1.000 Mameluks pour s'en approcher. Des beys et kachefs furent envoyés dans les principaux villages, au midi et au couchant de la province, pour commander les paysans et Arabes. Le 17 fut employé à échauffer les esprits par des chants guerriers et de la musique du pays. Le 18, à 8 heures du malin, une cinquantaine d'Arabes parurent ; à 11 heures, on aperçut 3 colonnes qui faisaient leurs mouvements au sud-ouest, pour attaquer la partie de la ville qui est sur la rive gauche du canal qui la traverse. C'est dans cette partie que se trouve la maison d'Ali-Kachef, d'assez bonne défense, où nous avons notre ambulance et le point de rassemblement de la garnison. Le général Robin, atteint de l'ophtalmie, était resté ; le citoyen Eppler, chef de bataillon dans la 21e légère, officier distingué, commandait la place. Indépendamment des 350 bommes, il avait encore pu disposer d'environ 150 ophtalmiques les moins malades. Prévenu de bonne heure de l'approche de l'ennemi, il fit ses dispositions, augmenta ses postes et attendit. A 11 heures 1/2, une grande quantité d'Arabes mirent pied à terre et avancèrent, tambourins battants, ayant des chefs mameluks en tête pour escalader les murs des faubourgs et de la ville. La colonne de gauche et du centre de l'ennemi fit ce mouvement spontané ; celle de droite, formée des Mameluks et de leurs esclaves, fut moins ardente ; quelques braves et les esclaves armés furent envoyés pour imiter ce mouvement. Toutes les issues de la ville n'avaient pu être occupées par nos troupes. On garda les principales, où l'on avait embusqué les postes. Quelques-uns, après une vive résistance et avoir couvert de morts le défilé qu'ils défendaient, furent obligés de se replier. Plusieurs Arabes et quelques Mameluks, de maisons en maisons, parvinrent jusque près de celle d'Ali-Kachef que nous occupons.
Les portes, les croisées et les terrasses étaient entièrement défendues par nos malades ; sur la place et dans la cour, était la réserve des 350 hommes. Une fusillade s'engagea sur les toits ou terrasses. Les assaillants avançaient par diverses rues. On le désirait. Alors la réserve fut divisée en deux colonnes, laissant un piquet sur la place qui est devant la maison. L'une, commandée par le chef Eppler, marcha à droite ; l'autre par le chef de bataillon Sacrost (les deux, de la 21e légère), se dirigea à gauche ; au même instant, la charge fut généralement battue ; tout ce que l'on rencontra sur le passage fut renversé à coups de baïonnette. Une grande quantité d'Arabes pillaient le faubourg. Le citoyen Eppler arrive et fait une boucherie de tous ceux qui ne prirent pas la fuite. Le citoyen Sacrost en fit faire autant des esclaves des Mameluks qui pillaient quelques boutiques. De tous côtés les assaillants furent chassés ou massacrés ; tous se retirèrent au moins à une lieue, les Mameluks même. La victoire fut décidée dans un moment. A 4 heures après midi, ceux-ci, ayant reçu quelques renforts, vinrent encore charger nos postes ; mais ils furent reçus par une fusillade si vive, qu'ils prirent la fuite. Les paysans et la plupart des Arabes s'étaient retirés après la première attaque. On a compté 60 morts dans les rues et deux fois autant dans les environs de la ville. Les habitants portent les morts à plus de 200 ; le nombre des blessés doit être considérable. Les Mameluks ont eu 4 hommes tués et 10 blessés ; on a pris 5 chevaux : l'un vient du 3e régiment de dragons. 15 chevaux ont été tués.
Nous avons perdu 4 braves, nous avons 16 blessés ; de ce nombre est le citoyen Fradin, capitaine dans la 61e.
Comme toujours, les troupes ont attaqué avec la bravoure et l'intrépidité qui les caractérisent dans toutes les actions. Le citoyen Eppler mérite les plus grands éloges, ainsi que le citoyen Sacrost. Dans le compte que le général Desaix rend au général en chef de cette journée glorieuse, il lui fait connaître ceux qui se sont plus particulièrement distingués. Le détachement des 350 était composé des 21e légère, 61e et 88e de ligne et quelques dragons du 3e régiment ..." (Rapport de Donzelot à Berthier, daté du 11 novembre 1798 - 21 brumaire an 7 - In La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 3. p. 344 et suivantes).
Le 8 novembre 1798 (18 Brumaire an 7), le Général Bonaparte écrit, depuis son Quartier général, au Caire, au Général Berthier : "… Le général Menou donnera sur-le-champ les ordres pour faire réunir à Alexandrie tous les détachements des 61e, 75e et 85e demi-brigades ..." (Correspondance de Napoléon, t.5, lettre 3587 ; Correspondance générale de Napoléon, t.2, lettre 3634 ; La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 3. p. 435).
Le 10 novembre 1798 (20 brumaire an 7), le Général Bonaparte écrit depuis son Quartier général au Caire, au Général Berthier : "Plusieurs soldats, marins, sapeurs, infirmiers, charretiers, ouvriers, se sont faits domestiques. La facilité de s'en procurer a porté plusieurs officiers et administrateurs à en augmenter le nombre, et ce, au détriment de l'armée.
En conséquence, le général en chef ordonne :
ARTICLE 1er. Les officiers et administrateurs qui ont amené des domestiques d'Europe ont seuls le droit d'avoir des domestiques européens. Ceux qui n'en ont pas amené ou qui veulent en augmenter le nombre doivent les prendre parmi les naturels du pays.
ART. 2. Tout individu qui, au moment du débarquement, était soldat, marin, sapeur, infirmier, charretier, ouvrier, etc. est tenu, au plus tard cinq jours après la publication du présent ordre, de rejoindre un des corps ci-dessous, savoir :
Ceux qui sont à Alexandrie {la 4e d'infanterie légère ou le 3e bataillon de la 61e ou le 3e bataillon de la 85e ...
ART. 3. Ceux qui auraient des domestiques qui seraient dans le cas de l'article 2 sont tenus de le communiquer à leurs domestiques douze heures après la publication du présent ordre, d'en faire part au commandant de la place, au plus tard quarante-huit heures après la publication du présent ordre
ART. 4. Ceux qui mettraient du retard dans l'exécution du présent ordre seront condamnés à payer à la caisse du corps autant d'écus de six francs qu'ils mettront de jours de retard; et si, dix jours après la publication du présent ordre, ils ne l'avaient point exécuté, le commandant de la place les ferait arrêter.
ART. 5. Le commandant de la place et même les chefs des corps ci-dessus nommés sont autorisés à faire arrêter tous les domestiques qu'ils soupçonneraient être dans le cas de l'article 2.
ART. 6. Il y aura à Alexandrie un bureau composé d'un officier de la 4e d'infanterie légère, de la 61e et de la 85e ...
ART. 7. Tous les domestiques qui seraient arrêtés seront sur-le-champ amenés devant ce bureau, qui prononcera s'ils sont ou non dans le cas de l'article 2.
ART. 8. Le général en chef recommande l'exécution du présent ordre spécialement aux officiers commandant les places et aux officiers supérieurs des corps où lesdits hommes doivent être incorporés.
ART. 9. Le général en chef défend expressément aux corps qui sont à Alexandrie de se recruter parmi les individus qui font partie des équipages.
BONAPARTE" (Correspondance de Napoléon, t.5, lettre 3601). Cette lettre est mise à l'ordre du jour de l'armée le 12 novembre (22 brumaire - La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 3. p. 375).
Le 21 novembre 1798 (1er frimaire an 7), Bonaparte écrit depuis le Quartier général, au Caire, à Daure, Commissaire ordonnateur en chef de l'Armée d'Orient : "Je vous prie, citoyen ordonnateur, d'employer tous les moyens qui sont en votre pouvoir pour pousser la confection des capotes dont l'armée a le plus grand besoin dans un moment où les nuits sont si fraîches.
Je désire que :
... Les 9e, 85e, 61e, 88e de ligne ... soient servies les premières ..." (Correspondance générale de Napoléon, t.2, lettre 3754).
Le 24 novembre au soir, Leturcq fait partir, le soir même pour Rosette, 4 Compagnies du 3e Bataillon de la 61e, qui doivent ensuite être dirigées sur Alexandrie (La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 3. p. 437).
"Rapport du capitaine du génie Garbé sur les marches de la division Desaix depuis l'ouverture de la deuxième campagne jusqu'au 12 prairial, avec quelques détails sur les positions actuelles, ainsi que le plan du fort qu'il a fait construire dans la province de Thèbes.
Le 6 Frimaire, toute la division aux ordres du général Desaix, se trouvant rassemblée à Beneçouef, se mit en marche pour aller combattre le corps de mameloucks qui tenaient la Haute-Egypte sous le commandement de Mourad-Bey. Cette division était composée … de la 61e, de la 88e sous les ordres du général Friant, de 900 hommes de cavalerie, des 14e, 15e, 18e et 20e régimens de dragons, du 22e de chasseurs à cheval, et du 7e de hussards sous les ordres du général Davoust, enfin de huit pièces d'artillerie" (Correspondance inédite officielle et confidentielle de Napoléon, t.6, Egypte).
Les intrigues des Anglais conduisent le Sultan à faire secourir les Mameluks. Une armée turque se réunit en Syrie. Bonaparte se porte contre elle, avec la majeure partie de l'armée, tandis que Desaix reste en Egypte pour pacifier le pays jusqu'aux cataractes du Nil.
- Pacification de la Haute Egypte.
Le 15 décembre 1798, la 61e Demi-brigade d’Infanterie de Ligne, au sein de la Division du Général Desaix, présente la situation suivante :
61e Demi-brigade de ligne (1er et 2e Bataillons et Grenadiers du 3e Bataillon (ce 3e Bataillon, détaché à Alexandrie) : 39 Officiers présents, 11 Officiers absents ; 625 hommes présents sous les armes, 127 hommes aux hôpitaux, 332 hommes détachés au dépôt, etc. Chaque bataillon d’infanterie a un chameau (La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 3. p. 365-366).
La Division de Desaix, renforcée de 1.200 cavaliers et de 300 fantassins que lui a conduits le Général Davout, quitte Beni-Souef le 16 décembre.
Le 16 décembre 1798 (26 Frimaire an 7), Belliard note, dans son Journal : "La division, composée des 21e demi-brigade d'infanterie légère, 61e et 88e demi-brigades de bataille, 1.000 hommes de cavalerie des 7e hussards, 22e chasseurs, 14e, 18e et 20e de dragons, 8 pièces d'artillerie, s'est mise en marche à 3 heures après-midi, avec des vivres pour 8 jours. Elle doit être suivie sur le Nil par les djermes armées l'Italie, la Casabianca, la Brueys, la Thébaïde, qui sont chargées de l'escorte de l'ambulance, des vivres et des munitions. Les demi-galères et 200 hommes de différents corps de cavalerie et d'infanterie sont restés en station à Beni-Souef, pour établir la communication avec Le Caire.
Nous marchons enfin contre les Mameluks et nous voilà à El-Baranqah, où la division restera la nuit … L'avant-garde, qui était partie le matin, avec les sapeurs, pour préparer les chemins, a couché à Bebah, où elle a rencontré quelques Mameluks qui ont fui à son approche … La route est coupée de canaux, qui rendent la marche difficile, surtout pour l'artillerie et la cavalerie" (La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 3, p. 506).
A Alexandrie éclate une épidémie de peste. Le Général Marmont écrit à Bonaparte, le 28 Frimaire (18 décembre 1798) : "... La peste n'a pas cessé et a fait, au contraire, quelques progrès. Nous venons de perdre, de cette maladie, le citoyen Astier, chirurgien en chef de la marine, un commis au bureau de la comptabilité, un Napolitain et deux ou trois matelots. Nous avons encore deux ou trois hommes attaqués. Il parait que le germe ne s'est développé que dans l'hôpital n° 3. Tous ceux qui en ont été attaqués avaient eu des rapports avec cet hôpital; cependant, il est tombé ce matin un soldat de la 61e, gui a des symptômes de peste ..." (La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 4, p. 22).
Le 1er Nivôse (21 décembre 1798), le Général Marmont écrit à Bonaparte : "Nous avons encore eu, mon Général, des accidents de peste assez graves. Un chirurgien, un pharmacien et quatre matelots sont morts. Il est toujours démontré que le germe de la maladie existe dans l'hôpital n° 3.
Nous avons extirpé tous ceux qui paraissaient être dans la ville, et, hier, il n'y a pas eu d'accident. Nous espérons que tout finira là. Les troupes sont en bon air; elles sont bien disséminées, bien fermées et pas un soldat encore n'a été malade de la peste; le soldat de la 61e, dont je vous ai parlé, étant presque guéri, et ne l'ayant probablement pas eue ..." (La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 4, p. 22).
La Division quant à elle remonte la rive gauche du Nil et parcourt en quatorze jours les cent lieues qui la séparent de Girgeh. Dans la Haute-Egypte, à Esneh, vit dans une demi-indépendance un chef de Mameluk, Hassan-bey, qui a un jour, d'un coup de sabre, abattu le bras de Mourad-bey. Les deux adversaires se réconcilient et à la prière même de Mourad, les partisans d'Hassan se joignent à la multitude d'Arabes, et de Nubiens qui ont pris les armes contre les Français.
Le 9 janvier 1799 (20 nivôse an 7), le Général Bonaparte, depuis son Quartier général au Caire, ordonne la création d'un Régiment de Dromadaires (Correspondance de Napoléon, t.5, lettre 3820 ; La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 4, p. 74 ; La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 4, p. 75); la 61e doit fournir 10 hommes, choisis parmi les plus hardis et les plus intrépides, pour former le noyau du Régiment des Dromadaires destiné à enrayer le brigandage des Arabes. "Ces hommes devront avoir moins de vingt-quatre ans, plus de quatre ans de service, au moins cinq pieds quatre pouces, et être d'une bravoure reconnue. Ils seront envoyés sur-le-champ au Caire. Le commandant de la place établira leur caserne sur la place Ezbekyeh", écrit le Général en chef.
Le 15 janvier 1799 (26 Nivôse an 7), Belliard écrit dans son Journal : "… Il est parti, dans la matinée, 400 hommes des 61e et 88e demi-brigades pour El-Menchieh et environs ; ce détachement doit lever les impositions.
J'ai passé la revue de propreté de ma demi-brigade et je l'ai fait manœuvrer ..." (La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 3. p. 520).
Desaix reste à Girgeh jusqu'au 20 janvier. A cette date, et après plusieurs combats livrés par sa cavalerie, il se remet en route, entre le Nil et le canal Joseph.
- Bataille de Samanhoud.
Le 22, à la pointe du jour, la Division est attaquée, en avant de Samanhoud, par 14.000 combattants que commande Mourad-bey.
Les 61e et 88e Demi-brigades, formées en carré sous les ordres de Friant, repoussent par un feu nourri toutes les charges des mameluks. Le village de Samanhoud est enlevé, mais de nouvelles colonnes ennemies recommencent le combat. Il dure peu. Mourad, désespérant du succès, regagne précipitamment le désert.
Les Arabes et les Mameluks laissent sur le terrain près de 500 morts. Les pertes des Français ne sont que de quelques hommes; dont le Sergent Vrignau de la 61e Demi-brigade.
Desaix fait poursuivre ses ennemis pendant quatre heures. Sa Division, exténuée, ne s'arrête qu'à Farchoute ou elle rencontre de nombreux blessés.
Six jour après sa victoire (9 Pluviôse an 7 - 28 janvier 1799), Desaix adresse, depuis Esneh, à Bonaparte le compte-rendu suivant : "Les occasions pour vous écrire, mon Général, sont fort rares. Il s'en présente une, et j'en profite pour vous annoncer que nous avons combattu à Samhoud. Mourad-Bey avait rassemblé, pendant notre séjour de Girgeh, tous les habitants à cinquante lieues à la ronde, 2.000 hommes d'infanterie, bien armés, venus de La Mecque, Hassan-Bey et ses Mameluks ; fier d'une aussi nombreuse armée, il se croyait invincible.
En effet, le jour que je partis de Girgeh, il s'avança de Hou à Farchout, laissant ses équipages au premier lieu. Nous nous rencontrâmes donc à Samhoud ... la division se forma alors en deux carrés d'infanterie, aux ailes avec les canons, la cavalerie en carré au milieu, et marcha sur Samhoud. Deux compagnies de carabiniers, conduites par mon aide de camp Clément, furent chargées d'attaquer le village défendu par les chérifs de La Mecque. Un peloton de hussards, commandé par le citoyen Desvernois, devait les soutenir. Les ennemis étaient sur le bord d'un canal ; ils firent une vigoureuse résistance ; on en vint à l'arme blanche ; un carabinier fut tué, mon aide de camp Rapp fut blessé d'un coup de sabre, sans [l'être] mortellement, et le citoyen Desvernois eut le poignet scié d'un coup de poignard, sans être estropié. Mais, à notre tour, nos carabiniers, à coups de crosses et de baïonnettes, en eurent bientôt expédié une trentaine, et le village fut à nous.
J'ai eu à me louer, dans celle occasion, de mon aide de camp Clément, qui a très bien fait. Nous vimes bientôt arriver de toute part des immenses colonnes d'ennemis, qui s'avançaient pêle-mêle en faisant des hurlements affreux. Notre carré de gauche était composé de la 21e demi-brigade légère, commandée par le général Belliard ; ils passèrent devant lui à une certaine distance sans attaquer, mais se dirigèrent tous sur le carré de droite, commandé par le général Friant et composé des 61e et 88e demi-brigades. A peine furent ils approchés que toute notre artillerie, commandée par le chef de brigade Latournerie, fit un feu épouvantable sur eux ; ils avancèrent malgré cela ; mais, quand la mitraille eut vigoureusement joué et que la mousqueterie eut commencé, ils s'enfuirent à toutes jambes. Alors, nous marchâmes droit à eux, nous dirigeant vers le désert. Nous parvînmes à les approcher ; un gros groupe vis-à-vis de nous, Mourad à la tête, je crus l'occasion favorable, et la cavalerie et le général Davout se précipitèrent sur eux ; les dragons, le fusil en main, pleins d'ardeur, espéraient les joindre ; mais, dans un instant, tout disparut. Au bout d'une lieue de charge, on ne voyait pas quatre Mameluks ensemble ; dispersés dans le désert derrière nous, ils ne présentèrent plus d'ennemi à combattre. Les chasseurs du 22e, du chef de brigade Lasalle, en joignirent cependant quelques-uns.
Nous avons trouvé quelques armes précieuses garnies en or, plusieurs livres de ce métal sur les morts. Sans nous arrêter à les emporter, nous avons marché sur Farchout. Nous n'y avons pris que le temps de rafraichir et, marchant toute la nuit, nous sommes arrivés au point du jour à Hou. En chemin faisant, nous avons massacré quelques soldats de La Mecque restés dans les villages ; ils sont braves et se défendent jusqu'à la mort.
A Hou est un passage à travers la montagne qui conduit à Esneh dans vingt-quatre heures ; par les bords du fleuve, il faut cinq jours. Je craignais que les Mameluks, suivant cette route tandis que je suivrais la seconde, ne revinssent derrière moi, et, gagnant cinq ou six jours de marche, ne se trouvassent encore les maîtres d'une grande partie du pays ; c'est ce qu'ils ont toujours fait dans les guerres précédentes ; mais le désordre dans lequel ils se sont trouvés, la précipitation de notre marche, les ont obligés à suivre le Nil ; ils n'ont pas eu le temps de préparer l'eau indispensable pour cette traversée.
Nous avons toujours marché à grandes journées, espérant rejoindre les débris de nos ennemis ; mais nous n'avons pu en attraper que très peu, parce que, prévenus de notre arrivée, ils traversaient le fleuve, soit sur des barques, soit sur des radeaux faits de dourah ; beaucoup se sont noyés en employant d'aussi frêles machines. La cavalerie les talonne ainsi depuis trois jours ; ici, après une marche forcée, nous les avons manqués de deux heures. Ils y ont brûlé leurs tentes et leurs gros bagages pour aller plus légèrement.
Depuis le combat de Samhoud, l'Elfi-Bey n'a plus reparu ; beaucoup de Mameluks aussi. Nous les suivrons ainsi sans relâche jusqu'à Syène. Je pars ensuite avec la 21e légère. La cavalerie nous précède. Dans quatre jours, Mourad aura quitté l'Égypte. Quand cette troupe sera reposée, je l'enverrai tenir garnison à Keneh, Girgeh, Siout et Minieh ; la cavalerie sera ici et le général Belliard à Esneh. Ainsi disposés, nous attendrons facilement que la faim et la misère aient détruit entièrement nos ennemis. Nos barques ne sont pas arrivées ; quand elles seront près de nous, je vous donnerai plus de détails. Vous faire l'éloge de tous ceux qui le méritent, j'aurais beaucoup à vous dire ..." (La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 3. p. 531-530).
- Campement sur les ruines de Thèbes.
Le 24, Desaix quitte Farchoute et continue à remonter le Nil. Il admire en passant les ruines de Denderah et campe, le 27, au milieu de celles de Thèbes. Les Mameluks font le vide devant lui, non sans l'inquiéter cependant par de continuelles escarmouches.
A Esneh, où il arrive le 29, Desaix laisse le Général Friant et les 61e et 88e Demi-brigades. Le reste de la Division se porte jusqu'à l'ile de Philoë, qu'elle dépasse pour reconnaitre le pays des Barabras.
Le même jour, 29 janvier 1799 (10 Pluviôse an 7), Bonaparte écrit, depuis son Quartier général, au Caire, au Payeur général : "Vous passerez, citoyen, les douze actions de la compagnie d'Egypte qui appartiennent à la république, à la disposition des citoyens : ... Conroux, id. de la 61e ... à titre de gratification extraordinaire ..." (Correspondance inédite officielle et confidentielle de Napoléon, t.6, Egypte ; Panckoucke : « Oeuvres de Napoléon Bonaparte », 1821-1822, t. 2, p. 462 ; Oeuvres complètes de Napoléon, Stuttgart et Tubingue, 1822, t.3, p. 80).
"Notes sur la campagne du général Desaix dans la Haute-Egypte, écrites et transmises par le général Davoust.
… Combat de Samahouf.
… Le général Desaix laisse la brigade du général Belliard à Assonan, redescend avec la cavalerie à Esmeh, où il avait hissé le général Friant ; il se détermine à occuper le pays depuis Girgeh jusqu’à Assouan, par des cantonnemens, pour lever le miri : le chef de brigade Conroux, avec la 61e, descend par la rive droite ..." (Correspondance inédite officielle et confidentielle de Napoléon, t.6, Egypte).
- Combat de Keneh.
Après la bataille de Samanhoud, cinq à six mille combattants, sous les ordres d'Osman-Pacha, passent sur la rive droite du Nil et restent dans les environs de Karnak et de Louqsor.
Dans la soirée du 5 février arrive d'Esneh à Syène un convoi de farine, escorté par 150 hommes des 61e et 88e demi-brigades, sous le commandement du capitaine Binot, aide de camp de Friant. Ce détachement repart, le surlendemain, en descendant la rive droite du Nil (La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 3. p. 542).
De retour à Esneh, Desaix apprend que, pendant son absence, des rassemblements de Mecquains ont été signalés du côté de Keneh. Cette ville étant au débouché de la route venant de Kosseir, il est important d'en éloigner l'ennemi. Aussi, dès le 6 février (18 Pluviôse), Friant fait partir, sous les ordres du Chef de brigade Conroux, une petite colonne (61e Demi-brigade, Grenadiers de la 88e, une pièce de canon), avec ordre d'occuper Keneh. Desaix décide d'appuyer ces premières forces en dirigeant sur le même point tout le reste de la Brigade Friant ; elle ne doit laisser à Esneh qu'un petit détachement de 200 hommes. Friant reçoit en même temps le commandement de la province de Girgeh. D'autres rapports lui signalant qu'Osman-Bey et Hassan sont revenus sur la rive droite du Nil (La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 3. p. 553).
Le Chef de Brigade Conroux, à la tête de sa petite troupe, entre à Keneh sans aucune difficulté. Desaix rebrousse chemin en ne laissant qu'un détachement derrière lui, et arrive, le 9, à Esneh.
Dans son Rapport daté de son Quartier-général à Syoùth, le 20 Thermidor an 7 (7 août 1799), adressé au Général en chef Bonaparte, le Général Desaix, commandant la Haute-Egypte, écrit : "… Pendant mon absence, le général Friant avoir eu avis que les débris des Arabes d'Yamb'o se ralliaient dans les environs de Keneh, sur la route de Qosséyr ; et, dès le 18, il avait formé une colonne mobile, composée de la 61e des grenadiers, de la 88e, et une pièce de canon, sous les ordres du chef de brigade Conroux, qui dans peu arriva à Keneh, petite ville fort importante en raison de son grand commerce avec les habitants des rives de la mer rouge ..." (Pièces diverses et correspondances relatives aux armées d’orient ; Kermoysan « Napoléon, Recueil par ordre chronologique de ses lettres, proclamations, bulletins », Paris, 1853, t.1, p. 258).
L'Adjudant général Donzelot écrit, depuis Esneh, le 21 Pluviôse an 7 (9 février 1799) au Général Firant: "… Vous avez remarqué que votre commandement s'étend d'El-Wafa jusqu'à Girgeh. El-Wafa est un village où nous avons campé venant d'Hou.
L'intention du général Desaix est que vous laissiez la 61e demi-brigade à El-Wafa,
2 bataillons de la 88e à Farchout,
1 bataillon du même corps à Girgeh.
Comme vous avez à votre disposition quatre djermes-canonnières et deux barques, vous en placerez deux à chaque position, qui se trouveront sous les ordres des commandants d'arrondissement. Elles serviront à passer les troupes sur l'une ou l'autre rive selon les circonstances. Si, contre toute vraisemblance, il en arrivait qui exigeassent que vos troupes, soit en totalité, soit en partie, dussent se rassembler sur un point pour agir contre des insurgés ou des Mameluks, il est entendu que le général vous y autorise.
Le commandement de l'arrondissement d'El-Wafa sera donné par conséquent au citoyen Conroux, chef de brigade de la 61e ; celui de Farchout au citoyen Silly, chef de brigade de la 88e ; celui de Girgeh au citoyen Morand, chef de brigade à la suite de ce corps.
Si vous pensez devoir faire quelques changements à cet égard, le général vous donne à ce sujet toute la latitude nécessaire …
En passant près de Keneh vous ferez partir la 61e. Cependant s'il y avait quelques magasins importants à garder, il serait peut-être à propos de l'y laisser jusqu'à l'arrivée du 7e régiment de hussards, qui doit partir après-demain pour y tenir garnison, avec le 18e régiment de dragons ...
Les six djermes qui sont à votre disposition partiront demain dans le jour. Je vous prie de laisser un détachement de 80 hommes de la 88e, pour y tenir garnison. Il en sera pris une trentaine pour être placée sur les djermes-cannonières qui doivent stationner à la hauteur de la cavalerie ...
Vous aurez sous vos ordres deux pièces de 8, commandées par le citoyen Colin. Il prendra ici 10.000 cartouches d'infanterie qui, réunies aux 10.000 emportées par la 61e, vous formeront une réserve de 20.000 …
RÉPARTITION DES TROUPES ET DES BATIMENTS DE GUERRE ENTRE LES ARRONDISSEMENTS
... Arrondissement du général Friant.
61e de ligne, occupant El-Wafa.
88e de ligne, occupant Farchout, Girgeh, etc.
L'Africaine et une djerme non armée de canons à El-Wafa.
La Casabianca et la Lybienne à Farchout.
L'Eléphantine (felouque) et une barque non armée de canons à Girgeh" (La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 3. p. 555).
Dans son rapport daté du Quartier-général du Caire, le 5 Messidor an 7 de la République (23 juin 1799), Bonaparte, Général en chef, écrit au Directoire exécutif : "... Combat de Qénéh.
Le chef de brigade Conroux, avec la 61e, fut attaqué à Qénéh, le 22 pluviôse, par cinq ou six cents Arabes ; il joncha le champ de bataille de morts ..." (Pièces diverses et correspondances relatives aux armées d’orient ; Panckoucke : « Oeuvres de Napoléon Bonaparte », 1821-1822, t. 3, p. 69 ; Oeuvres complètes de Napoléon, Stuttgart et Tubingue, 1822, t.3, p. 196 ; Kermoysan « Napoléon, Recueil par ordre chronologique de ses lettres, proclamations, bulletins », Paris, 1853, t.1, p. 317 ; Correspondance de Napoléon, t.5, lettre 4205 ; Correspondance générale de Napoléon, t.2, lettre 4441).
Après la bataille de Samanhout, les Arabes d'Yambo s'étaient retirés dans les environs de Kéné, ville fort importante par le commerce qu'elle fait avec les habitants des rives de la mer Rouge, et qui est occupée par la 61e Demi-brigade. Le 24 Pluviôse, ces Arabes, qui manquent de vivres, tentent de s'emparer de la ville (Chénier, L.-J.-G. (de) : « Histoire de la vie militaire, politique et administrative du maréchal Davoust, duc d'Auerstaedt, prince d'Eckmühl (d'après les documents officiels) », Paris, 1866, p. 86). A 11 heures du soir, tous les postes de la 61e sont attaqués simultanément par une multitude d'Arabes et de fellahs. Leurs coups de feu donnent l'éveil, et la Demi-brigade, rapidement rassemblée, marche à l'ennemi qu'elle culbute.
Le Chef de Brigade Conroux se multiplie pour encourager ses soldats et reçoit un-coup de pique qui l'étend sans connaissance. Ses Grenadiers le délivrent des Arabes qui l'entourent.
La défense de la 61e provoque la retraite des ennemis ; mais l'obscurité est tellement profonde, qu'il serait dangereux de s'aventurer dans la plaine. Le Commandant Dorsenne, remplaçant le Chef de Brigade, dispose sa troupe pour la poursuite et attend le lever de la lune.
A peine ses mesures sont-elles prises, que les ennemis reviennent en foule en poussant de grands cris. Ils sont reçus par une fusillade très nourrie et chargés à la baïonnette avec une telle impétuosité, que leur déroute est bientôt complète.
Deux ou trois cents d'entre eux se jettent dans un bouquet de palmiers où ils sont exterminés jusqu'au dernier.
Le combat de Keneh, si glorieux pour la 61e, ne lui coûte que quatre blessés. En outre du Chef de Brigade Conroux, le Commandant Dorsenne est de ce nombre. Le Caporal Lainault, blessé également, est signalé à Bonaparte pour sa brillante conduite.
"Rapport du capitaine du génie Garbé sur les marches de la division Desaix depuis l'ouverture de la deuxième campagne jusqu'au 12 prairial, avec quelques détails sur les positions actuelles, ainsi que le plan du fort qu'il a fait construire dans la province de Thèbes.
... Le 20, le général étant encore à Esneh, avait envoyé le général Davoust avec le 15e de dragons et le 22e de chasseurs à cheval pour aller observer le corps que Osman-Bey tenait continuellement sur la rive droite. Le 23 dans la matinée, il rencontra les mameloucks au village de Rédisi, vis-à-vis Edfo : le combat ne tarda pas à s’engager ; mais il ne fut pas très-heureux pour nous. Notre cavalerie laissa vingt-quatre hommes sur le champ de bataille ; il y eut plusieurs blessés ; le chef d'escadron Fontette fut tué : la perte des mameloucks fut très-peu de chose.
Tandis qu'on occupait tous les points qui ont été cités, et que, dans cet état, on attendait que les mameloucks fissent quelques mouvemens, les Mecquains, qui, depuis l'affaire de Samanhout, s'étaient retirés vers le désert de Cosseir, vinrent de nuit attaquer Keneh ; ce poste était gardé par la 61e demi-brigade. Le chef de brigade Conroux, qui y commandait, rassembla toute sa troupe et les rejeta dans le désert, après en avoir tué plus de 200. Cette défaite ne les empêcha pas quelques jours après de se mesurer de nouveau avec nos troupes. Ils rencontrèrent à Dehhen le général Friant, qui allait prendre position à Farshut : ils l'attaquèrent sans succès ..." (Correspondance inédite officielle et confidentielle de Napoléon, t.6, Egypte).
Dessaix écrit à Belliard, le 26 Pluviôse an 7 (14 février 1799) : "J'ai déjà reçu, mon cher Général, depuis que je vous ai quitté, trois fois de vos nouvelles ; c'était tout ce que je pouvais désirer. Vous devez avoir reçu, en ce moment-ci, les provisions que je vous envoie par les barques de guerre ; je ne m'en tiendrai pas à cet envoi. A présent, je fais rassembler ici 200 quintaux de farine, fabriquer autant de biscuit, acheter du beurre, et tout vous parviendra le plus tôt possible …
J'ai envoyé Clément et 200 hommes de la 21e qui étaient restés ici à Edfou pour y lever les contributions, y rassembler si possible des bœufs pour vous les faire passer …
On est en activité partout pour lever de l'argent. J'en attends au premier convoi. J'espère vous envoyer 50.000 francs ; personne n'aura un sol avant vous …
Le pays que vous occupez est véritablement bien pauvre en ressources ; mais j'espère que, les Mameluks forcés par la disette de s'éloigner de nous, il pourra s'organiser et nous donner quelques petits moyens. J'en ai encore plus d'espérance depuis le sanglant combat que le général Davout a livré à Osman-Bey, à Redecieh. Nous avons eu beaucoup de blessés, perdu un brave homme, le chef d'escadron Fontête, mais détruit beaucoup d'ennemis et nettoyé, j'espère, le pays entre vous et Esneh.
C'est un objet bien essentiel pour notre tranquillité. Je vous engage donc à ne pas permettre aux Mameluks de s'y établir et à les persécuter par de bonnes colonnes mobiles. La rive droite est toute de montagnes escarpées, les chemins difficiles ; vous n'y mèneriez jamais de canon ; nos chameaux ont manqué d'y périr.
A l'approche du petit détachement de Binot, Osman-Bey s'était enfui dans les déserts. Clément à Edfou, où il restera huit jours, aura pour objet de ne pas leur permettre de venir au bord du Nil. Il passera sur l'autre rive s'ils en approchent …
Les Mameluks qui sont derrière nous ont abandonné Keneh à l'approche de la 61e que le général Friant y avait envoyée. Ils sont descendus par petites troupes sur la rive droite …
J'ai eu des lettres de Keneh ; il n'y est pas question du tout des soldats de La Mecque. Le bruit que fait répandre Mourad-Bey à ce sujet est sans doute pour avoir de l'influence sur les habitants et donner espérance à ses Mameluks …
Je m'occupe ici à organiser un divan. J'ai de la peine à y réussir ; la crainte des revenants fait qu'on n'ose pas y entrer …
Je compte partir dans 2 ou 3 jours au plus tard, pour aller du côté de Keneh, y ramasser les ressources de ce pays pour vous les adresser ; après cela, peut-être irai-je vous voir …" (La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 3. p. 564-566).
Dans son Rapport daté de son Quartier-général à Syoùth, le 20 Thermidor an 7 (7 août 1799), adressé au Général en chef Bonaparte, le Général Desaix, commandant la Haute-Egypte, écrit : "… Combat de Keneh.
… le 24, à onze heures du soir, tous les postes avancés de la 61e sont attaqués en même temps par huit cents Arabes d'Yamb'o, qui avaient entraîné avec eux beaucoup de paysans ; aussitôt les troupes sont sous les armes, marchent à l'ennemi, et le culbutent partout. Le chef de brigade Conroux, jeune officier plein d'intelligence, d'activité, et doué de beaucoup de talents militaires, se portant d'un point à l'autre de la ligne de bataille, reçut sur la tête un coup de pique qui l'étendit par terre ; ses grenadiers se précipitent à sa défense, et l'emportent sans connaissance ; ils jurent tous de le venger. La vive défense de nos troupes avait forcé les ennemis à se retirer ; il était nuit profonde, et l'on vouloir attendre le lever de la lune pour les poursuivre. Le chef de bataillon Dorsenne, qui commandait la place, veillait avec grand soin à sa défense, en attendant impatiemment le moment de continuer la destruction des ennemis. A peine les mesures sont-elles prises, que l'ennemi revient en foule, en poussant des cris épouvantables. Cette fois, ils n'en furent pas quittes comme la première : ils furent reçus de même par une fusillade extrêmement vive ; mais on ordonna la charge, et ils furent mis dans une déroute complète ; on les poursuivit pendant des heures entières. En fuyant, deux à trois cents de ces fanatiques se jettent dans un enclos de palmiers ; malgré les feux de demi-bataillon que leur fait faire le citoyen Dorsenne, ils s'acharnent à s'y défendre ; ils y sont tous mis à mort.
Le chef de brigade Conroux pense que les Arabes d'Yamb'o ont eu plus de trois cents tués dans cette affaire où beaucoup de paysans ont péri. De son côté, il n'a eu que trois blessés, du nombre desquels se trouve le chef de bataillon Dorsenne, dont il rend le compte le plus avantageux. Toute sa troupe, les grenadiers de la 88e surtout, et les siens, ont donné les preuves de la plus grande bravoure ..." (Pièces diverses et correspondances relatives aux armées d’orient ; Kermoysan « Napoléon, Recueil par ordre chronologique de ses lettres, proclamations, bulletins », Paris, 1853, t.1, p. 258).
Avançant un peu la date de son départ, Desaix quitte Esneh le 15 février, de bonne heure, et descend la rive droite du Nil pour venir s'établir à Kous. Il laisse à Esneh un détachement de 200 hommes des 61e et 88e de ligne, commandé par Binot, Aide de camp de Friant.
Le 16 février 1799 (28 Pluviôse an 7), Bonaparte écrit, depuis son Quartier général, à Katieh, à Estèven Payeur général de l'Armée d'Orient : "Vous passerez, citoyen, les 12 actions de la Compagnie d'Égypte qui appartiennent à la République à la disposition des citoyens : ... Conroux chef de la 61e [de ligne] .... À titre de gratification extraordinaire.
Dix actions existent dans votre caisse. Je donne ordre à l'administration des finances de s'arranger avec la Compagnie pour avoir les 2 autres" (Correspondance générale de Napoléon, t.2, lettre 4248).
- Combat d'Aboumana.
Vaincus par la 6le, les Arabes d'Yambo se retirent dans le désert d'Aboumana. Le chérif Hassan, fanatique des plus exaltés, soulève tous les habitants de la rive droite du fleuve, les exalte et appelle à lui tous les vrais croyants en leur demandant de s'armer contre les infidèles. Une multitude d'Arabes se rend à Abou-Mahna (Chénier, L.-J.-G. (de) : « Histoire de la vie militaire, politique et administrative du maréchal Davoust, duc d'Auerstaedt, prince d'Eckmühl (d'après les documents officiels) », Paris, 1866, p. 86).
La 88e, conduite par Friant, a renforcé la garnison de Keneh. Le 17 février, les deux Demi-brigades se portent contre leurs adversaires.
En arrivant à Aboumana, le Chef de Brigade Conroux forme ses Grenadiers en colonne et les dirige sur les masses ennemies qui occupent les abords du village. A leur approche, les Mameluks et les fellahs prennent la fuite, mais les Arabes résistent courageusement. Le Général Friant les fait alors charger par la 61e et leur coupe la retraite. Plus de 400 sont tués.
Le Chef de Brigade Conroux, encore souffrant de la blessure qu'il a reçue au combat de Keneh, et le Capitaine Petit, sont cités avec éloges dans le rapport du Général Friant.
Sur cette affaire, Donzelot écrit à Berthier, de Kous, le 3 Ventôse - 21 février 1799 : "Un rassemblement de Mameluks, de Mecquains, de paysans dirigé par Salah-Bey, se faisait sur nos derrières, du côté d'Aboumanah, à une journée plus bas que Keneh. Le général Friant, qui était arrivé dans cette ville le 26, se mit en marche avec les 61e, 88e demi-brigades et deux pièces de canon. Le 29, dans la matinée, il rencontra l'ennemi qui était retranché dans le village. Il le fait canonner, surtout dans la partie où se trouvaient les Mameluks. Ensuite, il le fait tourner et enlever de vive force. L'ennemi fit une décharge sur les grenadiers, qui étaient conduits par le chef de brigade Conroux, et prit ensuile la fuite, se sauvant dans le désert. Cependant, 85 hommes qui étaient restés en position dans un angle du village furent passés au fil de la baïonnette par le 1er bataillon de la 61e. On en trouva 17 autres tués par la mitraille.
Pendant que ce bataillon s'emparait d'Aboumanab, le général Friant ordonna au chef de brigade Silly de tourner l'ennemi par le désert. Il les atteignit, en tua un grand nombre et prit le camp des Mecquains, où il se trouva : 40 chameaux, 250 moutons, 11 boeufs et une grande quantité de chèvres.
Les grenadiers, qui, dans la retraite de l'ennemi en sortant du village, l'avaient poursuivi la baïonnette aux reins, l'atteignirent au pied de la montagne, lui tuèrent 153 hommes, lui en blessèrent 60 et prirent 210 moutons, 11 boeufs, 1 chameau.
Aboumanah a été brûlé et les villages environnants qui étaient en révolte, pillés.
Nous avons eu, dans cette affaire, 8 hommes blessés ; l'un est mort de ses blessures ; nous n'avons à regretter que ce brave" (La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 3. p. 562 à 563).
La Relation de la campagne adressée par Desaix à Bonaparte (20 Thermidor an 7 - 7 août 1799) raconte : "Depuis le combat de Keneh on savait que les Arabes d'Yambo s'étaient retirés dans les déserts, à hauteur d'Aboumanah ; que leur chérif Hassan, fanatique des plus exaltés et entreprenant, entretenait les siens de l'espoir de nous détruire sitôt que les renforts seraient arrivés ; qu'en attendant il mettait tout en oeuvre pour soulever contre nous les vrais croyants de la rive droite ; qu'à sa voix tous sont en mouvement et courent aux armes. Déjà, une grande quantité d'Arabes sont arrivés à Aboumanah ; des Mameluks épars et sans asile s'y rendent aussi. L'orage grossit. Les belliqueux habitants de la rive droite ne connaissent pas encore la puissance de nos armes ; le général Friant est chargé de leur donner une preuve de notre supériorité, même sur les envoyés du grand chérif de La Mecque, le premier homme après Mahomet.
Le 29 pluviôse (17 février), le général Friant arrive près d'Aboumanah ; il le trouve plein de gens armés ; les Arabes d'Yambo sont en bataille en avant, et plus de 300 cavaliers de toutes les couleurs flanquent la droite du village. De suite, ce général fait former son corps de bataille ; ses grenadiers sont déjà en colonne d'attaque, commandés par le chef de brigade Conroux. Après avoir reçu plusieurs coups de canon, et à l'approche des grenadiers, la cavalerie et les paysans prennent la fuite ; mais les Arabes d'Yambo tiennent bon. Alors, le général Friant forme deux colonnes pour tourner les villages et leur enlever leur retraite. Ils ne peuvent résister au choc terrible des grenadiers. Ils se jettent dans le village où ils sont assaillis et mis en pièces. Cependant, une autre colonne, commandée par le citoyen Silly, chef de brigade commandant la 88e, poursuivait les fuyards. Nos soldats y mirent tant d'acharnement qu'ils s'enfoncèrent à 5 heures dans les déserts et arrivèrent ainsi sur le camp des Arabes d'Yambo ; fort heureusement, ils y trouvèrent, avec beaucoup d'effets de toute espèce, de l'eau et du pain.
Le général Friant ne voyait point revenir cette colonne ; son inquiétude était extrême et augmentait à chaque instant. Il pensait que, si elle ne se perdait pas dans les immenses plaines de déserts où elle s'était jetée, au moins perdrions-nous beaucoup de soldats que la faim et la soif auraient accablés ; mais, quelle fut sa surprise de voir revenir nos soldats chargés de butin et frais et dispos ! Un Arabe que l'on avait fait prisonnier en entrant dans le désert, avait conduit la colonne au camp de l'ennemi.
Les Arabes d'Yambo ont perdu dans cette journée 400 morts et ont eu beaucoup de blessés. Une grande quantité de paysans furent tués dans les déserts. Nous avons eu quelques blessés. Le général Friant est on ne peut plus satisfait de ses braves troupes. Il loue beaucoup les chefs de brigade Conroux et Silly, ainsi que le citoyen Petit, capitaine, remplissant près de lui les fonctions d'aide de camp. Ce général m'a envoyé une note d'avancement pour plusieurs officiers et sous-officiers qui s'y sont distingués ; je vous la ferai passer, en vous priant de vouloir bien y faire droit" (Pièces diverses et correspondances relatives aux armées d’orient ; Kermoysan « Napoléon, Recueil par ordre chronologique de ses lettres, proclamations, bulletins », Paris, 1853, t.1, p. 258; La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 3. p. 562 à 563).
Dans son Rapport daté de son Quartier-général à Syoùth, le 20 Thermidor an 7 (7 août 1799), adressé au Général en chef Bonaparte, le Général Desaix, commandant la Haute-Egypte, écrit : "… Le 26, le général Davoust revient à Esnèh, et le 27 je pars de cette ville, y laissant une garnison de deux cents hommes du 61e et 88e, sous les ordres du citoyen Binor, aide-de-camp du général Friant, qui avec ces mêmes troupes, avait conduit un fort convoi de subsistances à Syène …" (Pièces diverses et correspondances relatives aux armées d’orient ; Kermoysan « Napoléon, Recueil par ordre chronologique de ses lettres, proclamations, bulletins », Paris, 1853, t.1, p. 258).
Après le combat d'Aboumanah, le Général Friant continue sa route vers Girgeh, où il arrive le 3 Ventôse (21 février). Il y laisse un bataillon de la 88e, sous les ordres du citoyen Morand, Chef de Brigade à la suite de ce Corps, et, deux jours après, il se porte à Farchout, d'où il renvoie les deux Bataillons de la 61e à Keneh (La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 3. p. 562 à 563).
Dans son Rapport daté de son Quartier-général à Syoùth, le 20 Thermidor an 7 (7 août 1799), adressé au Général en chef Bonaparte, le Général Desaix, commandant la Haute-Egypte, écrit : "… Après le combat d'Aboùma'anâh, le général Friant continue sa route vers Djirdjéh, où il arrive le 3 ventôse. Il y laisse un bataillon de la 88e, sous les ordres du citoyen Morand, chef de brigade à la suite de ce corps, et, deux jours après, il se porte à Farchoùrh, d'où il renvoie les deux bataillons de la 61e à Keneh …" (Pièces diverses et correspondances relatives aux armées d’orient ; Kermoysan « Napoléon, Recueil par ordre chronologique de ses lettres, proclamations, bulletins », Paris, 1853, t.1, p. 258).
- Combat de Souamah.
La 61e Demi-brigade participe à la poursuite des Arabes jusqu'à Farchoute.
Le 6 Ventôse an 7 (24 février 1799), l'Adjudant général Donzelot écrit, depuis Kois, au Général Friant : "Je vous ai mandé, mon cher Général, le 30 du mois dernier, de la part du général Desaix, de revenir avec votre brigade à Keneh, et que ce mouvement était ordonné d'après l'avis qu'il avait reçu qu'une colonne de 2.000 Mecquains devait arriver incessamment.
Par une nouvelle disposition, vous n'enverrez que la 61e, qui aura un bataillon à Keneh, où le chef de brigade Duplessis commande les 7e hussards et 18e dragons.
Le 1er bataillon viendra à Kous, où il sera cantonné avec les 14e et 20e dragons. Nous reverrons Conroux et Dorsenne avec grand plaisir.
Vous enverrez le chef de brigade Morand avec un bataillon à Girgeh.
Vous garderez les deux autres à Farchout.
Le général vous engage à faire mettre la plus grande activité à la rentrée du miri et à la levée des chevaux …
Vous savez qu'il nous faut faire des approvisionnements de biscuit. Vous pouvez en faire fabriquer à Girgeh et à Farchout, en veillant à ce qu'il soit d'une bonne qualité.
Quant aux souliers, on en fait fabriquer ici et à Keneh, à raison de 23 parats la paire. Ce sont des souliers du pays.
Faites-en faire aussi de votre côté.
J'oubliais de vous dire de garder votre artillerie et de n'en point envoyer avec la 61e ; elle en trouvera.
Je vais demander à Latournerie s'il peut vous envoyer des ouvriers pour réparer la pièce qui est endommagée, mais je doute qu'il puisse vous en destiner. Toute l'artillerie qui est ici a le plus grand besoin de réparations. Mais vous pourriez trouver des ouvriers dans les corps qui, comme dans le Fayoum, feraient celles que votre artillerie exige. Vous les payeriez.
… On voit, par un passeport, que le chef de brigade Detrès est arrivé à Minieh avec des troupes, commander cette province.
Votre rapport du 3 de ce mois est parvenu au général, qui l'attendait avec impatience et qui l'a reçu avec un plaisir infini. Il vous félicite de votre nouveau succès et vous prie de témoigner encore à vos troupes les éloges que méritent leur sagesse, leur bravoure et leur intrépidité …
On a fait hier soir un rapport au général, qui mérite confirmation. On lui a dit que Soliman-Bey, avec 150 Mameluks, a passé, le 4, à Erment à 10 heures du matin, prenant la route du désert qui conduit sur Hou et pour aller sur Sioutt. Veuillez prendre des renseignements pour savoir si effectivement quelques partis de Mameluks ne descendraient pas de vos côtés …
Les maudites djermes qui apportent nos munitions.ne sont pas encore arrivées d'Esneh ; elles sont cependant parties le 29 du mois dernier. Nous les attendons aujourd'hui. On a envoyé la Victoire à leur rencontre. Je vous enverrai des cartouches et gargousses aussitôt son arrivée. Mais je vous prie d'ordonner à deux de vos djermes, où il y aura bonne garnison, de venir à Keneh pour les prendre.
N'oubliez pas, mon cher Général, l'artillerie à prendre dans plusieurs villages pour en compléter l'armement de nos djermes. Il nous manque des fusils et des sabres pour l'abordage en défense. On peut les remplacer par des piques et par toutes les armes que l'on pourra successivement trouver dans le pays. Quoique les munitions des Mameluks soient mauvaises, on peut cependant s'en servir au moins pour charger, au besoin, les canons de nos djermes.
Ordonnez à votre contre-amiral de faire bastinguer toutes vos djermes. On pourrait employer avec plus d'avantage les branches de palmier ; elles valent mieux que les cannes de dourah ; elles sont dures et elles formeraient un moindre volume ; elles auraient d'ailleurs l'avantage de ne point prendre feu, lorsqu'on tire le canon …" (La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 3. p. 581).
La 61e retourne donc à Keneh.
Le 7 Ventôse an 7 (25 février 1799), le Général Desaix écrit, depuis Kous, au Général Friant : "Je reçois à l'instant, mon cher Général, votre lettre du 4 ventôse, je suis enchanté de vos dispositions. Vous verrez, par les lettres que je vous ai fait écrire hier, que vous avez rempli parfaitement mes intentions.
Envoyez donc vos bataillons de la 61e par la rive gauche, l'un à Keneh, l'autre à Kous ; car deux corps auraient l'avantage d'arrêter les Mecquains s'ils viennent de Kosseir, et me permettraient de disposer de ma cavalerie pour, dans le temps que l'infanterie se referait, courir le pays et le soumettre …" (La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 3. p. 583).
Le 9 Ventôse an 7 (27 février 1799), à 8 h. du matin, l'Adjudant général Donzelot écrit, depuis Kous, au Général Friant : "D'après des avis que le général Desaix vient de recevoir, il parait certain, mon cher Général, que Mourad-Bey avec tous les beys qui étaient avec lui ont été vus près d'Erment. Leur intention est de passer sans doute par la montagne pour descendre sur Hou. Le général vous prie donc de vous réunir promptement sur ce point, afin d'en imposer et d'inquiéter l'ennemi.
Pendant ce temps toute la cavalerie, qui a ordre de se réunir ici avec la 61e, dont un bataillon est arrivé hier à Keneh, marchera sur Erment pour rejeter, s'il est possible, les Mameluks dans le désert …" (La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 3. p. 585).
Le même 9 Ventôse an 7 (27 février 1799), à 1 heure de l'après midi, l'Adjudant-général Donzelot écrit, depuis Kous, au Général Belliard : "… Il s'agit … en ce moment d'occuper Esneh par une garnison et de venir prendre position à Erment.
Vous ne laisserez point pour cette garnison le détachement de 160 hommes des 61e et 88e commandés par Binot, aide de camp. Vous le ferez partir avec vous pour nous rejoindre à la première occasion avec le détachement de 20 dragons du 20e régiment ..." (La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 3. p. 585-586).
Le 10 Ventôse an 7 (28 février 1799), l'Adjudant-général Donzelot écrit, depuis Kous, au Général Belliard : "Je vous ai écrit hier, mon cher Général, pour vous prévenir que Mourad-Bey, avec Hassan et plusieurs autres beys, s'étaient réunis à Erment. Aujourd'hui on annonce qu'ils sont partis, passant par la Gaby et qu'ils arriveront ce matin à Hou …
Si les beys allaient dans l'Ef-Ouah, on laisserait un bataillon à Girgeh, un à Tahtah, un à Siout. La cavalerie et deux bataillons seraient en colonnes mobiles selon le besoin. J'aurai soin de vous tenir au courant des dispositions qui seront faites.
Lorsqu'il y aura garnison à Girgeh, Clément et Binot descendront avec le détachement des 61e et 88e demi-brigades et les 20 dragons du 20e régiment. Je vous invite à tenir ces détachements avec la colonne que vous aurez la plus voisine de cette province ..." (La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 3. p. 587-588).
De nombreux avis qui lui parviennent de toutes parts font connaître à Desaix, resté à Esneh, que les beys Hassan et Mourad sont campés dans le voisinage de Siout. Il forme aussitôt le projet de les attaquer, et se fait rejoindre, dans ce but, par la majeure partie de la 61e.
Le 2 mars, à 8 heures du matin, le Général Belliard part d'Esneh, en y laissant une garnison de 400 hommes de la 21e légère, commandée par le Chef de bataillon Valette. Il emmène le reste de la 21e, les détachements des 61e et 88e Demi-brigades et du 20e Dragons, une pièce de 3 et 30 chameaux chargés de vivres. Plusieurs bâtiments armés et des barques de transport doivent suivre sur le Nil, portant les blessés et les malades, des vivres, du matériel d'artillerie, etc. (La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 3. p. 593).
Le même 2 mars, Desaix passe le Nil et se rend à Farchoute.
Le 3 mars (13 Ventôse), la Division entière atteint Farchout. De Farchout, Donzelot écrit à Belliard, à 9 heures du soir : "Nous sommes arrivés, mon cher Général, dans l'après-midi à Farchout avec toute la cavalerie et la 61e. Nous y avons trouvé le général Friant, avec deux bataillons de la 88e ; demain, nous partirons tous pour Girgeh.
L'on ne peut pas avoir des renseignements certains sur la marche des beys, qui ont descendu. On dit cependant généralement qu'ils sont dans le pays de Siout, et que Mourad doit aller dans l'El-Ouah, et de là en Barbarie. Nous ne saurons ce qu'il peut être qu'à Siout. Les uns ajoutent qu'Osman-Bey est retourné du côté d'Esneh ; d'autres prétendent le contraire.
Dans ma lettre du 10 de ce mois je vous ai transmis les dispositions du général ; voici celles d'aujourd'hui :
Vous laisserez, comme je vous l'ai mandé, une garnison suffisante à Esneh. Le général désire qu'elle soit de 500 hommes, commandés par un officier vigoureux. Avec cette garnison, il pourra envoyer des colonnes mobiles pour lever le miri et contenir le pays … Vous ordonnerez à l'officier commandant cette ville de faire travailler avec la plus grande activité aux réparations défensives de la maison d'Hassan, d'après les plans du capitaine du génie Garbé.
Sans doute, vous êtes en marche pour venir à Keneh. Le général vous recommande de faire aussi couvrir le pays par des colonnes mobiles ; il vous engage à faire mettre la plus grande célérité dans la levée de ce qu'il reste à payer du miri …
Vous ordonnerez aux citoyens Clément et Binot de se rendre à Farchout avec le détachement des 61e et 88e demi-brigade et le dépôt du 20e régiment de dragons. Vous y joindrez un détachement de 100 hommes pour être momentanément à leur disposition …
Incessamment la Thébaïde ne pourra plus naviguer dans l'Égypte supérieure. Elle devra suivre le mouvement de leurs détachements. Le citoyen Guichard devra faire l'impossible pour faire descendre le chebec.
Quant aux mesures que nécessitent les circonstances, le général me charge encore de vous dire qu'il se repose sur vous.
Il importe de faire un fort dans la haute Egypte pour contenir le pays et avoir une communication avec Kosseir ; le point de Keneh parait le plus favorable. Le capitaine Garbé devra donc s'occuper de suite à la construction de ce fort, qui devra commander la ville et le Nil et tenir une garnison au moins de 300 hommes avec tous les établissements nécessaires.
Le chef de brigade Morand commande la province de Girgeh ayant un bataillon à ses ordres. Je vous prie de correspondre avec lui et de lui passer vos dépêches pour le général, en les adressant d'abord à Farchout.
L'intention du général est de laisser un bataillon à Tahtah, un à Siout et de marcher en colonne mobile avec la 61e, de l'artillerie et de la cavalerie. Ces dernières dispositions dépendront au surplus du mouvement et de la force des Mameluks.
Je vous écrirai le plus souvent possible ; au moyen des garnisons, on pourra correspondre plus promptement.
P.-S.- ... Quatre petits bâtiments de guerre français sont partis de Suez avec 80 hommes de débarquement, pour venir prendre Kosseir. Je crains bien que ce que je vous ai mandé sur ces bâtiments soit vrai ; prenez des renseignements à ce sujet" (La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 3. p. 589-590).
Desaix repart le lendemain 4 pour Girgeh. A quelque distance de Souamah, Mourad prend l'offensive. Sa troupe vigoureusement chargée à la baïonnette est dispersée en quelques instants. Un millier d'Arabes et de fellahs trouvent la mort sur le champ de bataille ou se noient en essayant de traverser le Nil. Les Français ne perdent pas un seul homme.
- Héroique défense de la djerme l'Italie.
Pour assurer ses ravitaillements, Desaix fait usage d'une petite flottille, qui navigue sur le Nil, à proximité de sa Division. Pendant le combat de Souamah, la Brigade Friant a à bord de la djerme l'Italie un assez grand nombre de malades et de blessés, ainsi qu'un approvisionnement de cartouches. Cette djerme, que Desaix tient de Bonaparte, est armée de deux pièces d'artillerie. Une Compagnie de la 61e en a la garde.
Le 6 mars, à hauteur de Benout où la retiennent des vents contraires, la flottille est attaquée par les débris de l'armée de Mourad et les partisans d'un chérif nommé Hassan. La lutte est extrêmement vive. Les défenseurs de la djerme l'Italie, ayant à leur tête un homme courageux, Morandi, font des prodiges de valeur pour éloigner leurs ennemis.
Dans son Rapport daté de son Quartier-général à Syoùth, le 20 Thermidor an 7 (7 août 1799), adressé au Général en chef Bonaparte, le Général Desaix, commandant la Haute-Egypte, écrit : "… Le 12, je passai le Nil et me portai sur Farchoùrh, où j’arrivai le 13, laissant un peu derrière moi la djerme armée, l'Italie, et plusieurs barques chargées de munitions et de beaucoup d'objets d’artillerie ; l'Italie portait des blessés, quelques malades, les munitions de la 61e demi-brigade, et quelques hommes armés …
Cependant le chéryf Hhaçan avait reçu un second convoi qui le renforçait de quinze cents hommes ; les débris du premier le rejoignent. A peine sont-ils réunis, qu'il apprend que je laissai des barques en arrière ; qu’un vent du nord extrêmement fort les empêche de descendre, et qu'avec des peines infinies elles n'ont pu venir qu'à la hauteur du village de Benoùthah, dont il n'est qu’à une lieue et demie. De suite, il en prévient 0'tsmân- bey Hhaçan à la Kuira, se met en marche, et arrive sur le Nil. Aussitôt nos barques sont attaquées par une forte fusillade ; l'Italie répond par une canonnade terrible, et cent Arabes d'Yamb'o restent morts. Les ennemis viennent à bout de s'emparer de nos petites barques, mettent à terre les munitions de guerre et les objets d'artillerie dont ils jugent avoir besoin, les remplissent de monde, et courent à l'abordage sur l'Italie. Alors le commandant de cette djerme, le courageux Morandi, redouble ses décharges à mitraille ; mais ayant déjà beaucoup de blessés à son bord, et voyant beaucoup de paysans qui vont l'attaquer de la rive gauche, il croit trouver son salut dans la fuite. Il met à la voile ; il avait peu de monde pour servir ses manœuvres ; le vent était très-fort, sa djerme s'échoue. Alors les ennemis abordent de tous côtés ; l'intrépide Morandi a refusé de se rendre : il n'a plus d'espoir, il met le feu aux poudres de son bâtiment et se jette à la nage ; dans le moment, il est assailli par une grêle de balles et de pierres, et expire dans les tourments. Tous les malheureux Français qui échappèrent aux flammes de l'Italie furent massacrés par les fanatiques et cruels Arabes d'Yamb'o …" (Pièces diverses et correspondances relatives aux armées d’orient, p. 137 ; Kermoysan « Napoléon, Recueil par ordre chronologique de ses lettres, proclamations, bulletins », Paris, 1853, t.1, p. 258).
Ce combat sur le Nil coûte une centaine de morts à la 61e Demi-brigade. Les Caporaux Leclerc et Savignan sont de ce nombre.
- Combats de Coptos et de Benout.
Le 8 mars, dès que la nouvelle du désastre subi par la flottille arrive à Esneh, le Général Belliard se met à la poursuite des Arabes. La colonne qu'il conduit, forte de 800 hommes, se compose de la 21e Légère, d'un détachement des 61e et 88e de Ligne, de 20 Dragons et d'une pièce de 3.
Près de Coptos, cette colonne se heurte à une avant-garde de fanatiques dont la plupart çnt assisté au combat livré sur le Nil. Quelques-uns ont revêtu les habits de leurs victimes. Le Général Belliard les disperse et continue sa route. Il parvient de même à rejeter dans Benout toute l'armée d'Hassan-bey, qui a pris position en avant de la ville. Mais la mosquée, une caserne de Mameluks, de nombreuses maisons particulières et une barque sur le Nil sont remplies de combattants, dont le courage s'exalte. Les maisons sont incendiées avec les défenseurs qu'elles contiennent. Les rues se remplissent de cadavres. La nuit seule met un terme à cette lutte sans merci.
Le 9, à la pointe du jour, le combat recommence. Une petite mosquée remplie de barils de poudre fait explosion et par la brèche ouverte la 21e Légère essaie de donner l'assaut. Elle est repoussée. L'incendie se propage. Les Arabes d'Yambo, complètement nus, le sabre entre les dents et le fusil à la main, cherchent avec leurs pieds à arrêter le progrès des flammes. Aucun spectacle plus terrifiant ne saurait se concevoir. Les chants et les prières, les cris d'agonie se mêlent au crépitement de la fusillade. Encore une fois la nuit survient, sans que la ville soit prise.
Le même 9 mars 1799 (19 Ventôse an 7), Donzelot écrit, depuis Siout, à Berthier, en lui indiquant la répartition des troupes de la Division : "… Le général Belliard occupe Esneh par 1 bataillon et Keneh par 2 … Le général a laissé un détachement à Farchout, commandé par son aide de camp Clément ; le chef de brigade Morand avec 1 bataillon de la 88e à Girgeh ; le chef de brigade Lasalle avec son régiment et 1 bataillon de la 88e à Tahtab. Le chef de brigade Silly restera à Siout avec 1 bataillon … Les deux bataillons de la 61e, la cavalerie et de l'artillerie seront en colonnes mobiles pour donner la chasse aux beys qui courent encore dans le pays …" (La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 3. p. 592).
Le 10 au matin, cependant, les assaillants finissent par triompher des dernières résistances qu'on leur oppose. Mais les quelques maisons épargnées par le feu, sont remplies de blessés qui se défendent encore. On ne s'en garantit qu'en les massacrant.
Le combat de Benout coûte aux Arabes 1.500 tués. Les pertes des Français sont de 180 hommes, dont une quinzaine appartiennent au détachement de la 61e. La flottille de la Division est recouvrée à l'exception de la djerme l'Italie, que l'incendie a complètement détruite.
Sur cette affaire, Belliard adresse à Desaix, depuis Benout, le 10 mars 1799 (20 ventôse an 7) le rapport suivant : "Je me suis rendu à Erment, mon cher Général, conformément à vos intentions. D'après les rapports qu'il existait à Keneh un rassemblement considérable de Mecquains, de paysans et de Mameluks, je me suis mis en marche pour venir le combattre. Le 17, je suis passé sur la rive droite au village d'EI-Kamouleh ; le 18, je suis parti pour Keneh. A Kous, le cheik m'a instruit du funeste événement arrivé à nos barques armées et de transport et m'a prévenu que les Mecquains, retranchés à Benout, nous attendaient avec les Mameluks d'Osman-Bey. A une heure et demie après midi, l'ennemi, au nombre de 3.000 hommes d'infanterie, tant Mecquains que paysans, et de 350 à 400 chevaux, est venu à notre rencontre dans la plaine de Coptos, et nous a présenté la bataille que nous avons acceptée.
Bientôt le combat s'est engagé et est devenu corps à corps avec nos tirailleurs. Les 30 ou 40 Mecquains qui s'étaient avancés sont restés sur le champ de bataille. J'ai marché sur le gros de l'armée avec le carré ; l'ennemi a pris la fuite, disputant tous les villages, ravins ou fossés, et s'est retiré sur Benout, où il avait disposé une partie des canons qu'il avait pris sur les barques. Mais, malgré sa résistance opiniâtre, les carabiniers l'ont chassé ; et ses pièces (ou plutôt les nôtres) sont restées en notre pouvoir. Alors les Mecquains se sont jetés dans plusieurs maisons, dont une de Mameluks, fort grande, avait été mise en état de défense avec du canon. C'est là qu'étaient leurs magasins et les munitions qui se trouvaient sur les barques. Je l'ai fait attaquer ; mais la fusillade a été si vive, et la nuit étant venue, il a fallu y renoncer. On a pris les maisons adjacentes qui ont été livrées aux flammes, après avoir passé au fil de la baïonnette environ 200 Mecquains et paysans qui les défendaient. Le feu n'a pas pu gagner la grande maison, que j'ai fait bloquer pendant la nuit ; les Mameluks, qui ont été spectateurs bénévoles, se sont éloignés vers le désert, où ils ont bivouaqué. Voilà la journée du 18.
Le 19, il a fallu recommencer. Un des braves de La Mecque est sorti à cheval de la maison, et est allé trouver les Mameluks, sûrement pour leur reprocher leur lâcheté et les engager à débloquer la maison ; car, de suite, ils se sont mis en marche et sont venus charger les carabiniers, qui les ont reçus par une fusillade bien nourrie, et les ont forcés à une retraite précipitée.
A 11 heures, les Mecquains échappés la veille, des rassemblements de paysans formés par les Mameluks sont venus au moment où je me disposais à attaquer la maison, et ont fourni une seconde charge. Ils se sont avancés très près du fort, dans lequel quelques-uns sont entrés. J'ai marché dessus, et ils se sont retirés de suite. Alors, j'ai fait attaquer la maison de vive force ; on est parvenu à entrer dans une des cours et j'y ai fait mettre le feu. Les Mecquains sont descendus dans la grande cour tout nus, tenant d'une main le sabre, et de l'autre le fusil, faisant un feu très vif sur nos soldats et sautant, comme des furieux sur le feu qu'ils voulaient éteindre avec leurs pieds. Ils ont poussé des hurlements affreux ; ils chantaient, se battaient en faisant leurs prières au milieu des flammes, avec un courage et un fanatisme dignes d'exemple. La nuit est encore venue trop tôt ; les ennemis échappés aux flammes ont percé une muraille, et, à la faveur des ténèbres, une partie d'entre eux s'est évadée. Beaucoup ont été tués par les troupes qui bloquaient le château ; les autres courent les champs.
Ce matin, on est entré dans la maison, où l'on a trouvé une trentaine d'hommes, qui, quoique blessés ou malades, voulaient encore se défendre. Ils ont été tués, à l'exception de trois, que j'ai fait garder pour avoir des renseignements ; ils sont de Tunis.
Les Mameluks, je ne sais pourquoi, sont encore venus ce matin faire les fanfarons, et s'avançaient ayant l'air de vouloir nous attaquer. Je me suis porté en avant, et ils ont fui, après avoir reçu quelques coups de canon. Je les ai poursuivis à une lieue et demie ; ils ont fait partir leurs chameaux par le désert, où il se sont retirés ; et moi je suis rentré à Benout, où je vais laisser reposer nos pauvres soldats, qui, depuis trois jours, se battent et vivent d'eau et de biscuit. Je ne sais pas comment étaient les Mecquains que Conroux et Friant ont battus et comment ils ont fait pour avoir très peu de blessés : quant à moi, mon Général, je sais que je n'ai point encore trouvé de troupes aussi braves et qui se battent avec autant d'acharnement ; aussi ai-je eu des morts et beaucoup de blessés dont l'état est ci-joint.
Je ne peux trop vous faire l'éloge de la 21e, des détachements des 61e et 88e, des dragons du 20e commandés par le citoyen Escassa des sapeurs, tant de la demi-brigade, que de la compagnie de Garbé et du détachement d'artillerie. Officiers et soldats, tous ont montré la plus grande bravoure et, en particulier, les officiers, sous-officiers et soldats dont la note est ci-jointe et pour lesquels je vous prie de demander de l'avancement au général en chef, ainsi que pour votre aide de camp, celui du général Friant et Majou, que j'ai avec moi, qui tous trois se sont trouvés dans le combat corps à corps, et qui, tous trois, pendant ces trois journées, m'ont parfaitement secondé. Clément a eu son cheval blessé d'un coup de sabre. L'adjudant-major Laprade, qui était avec eux, en a tué trois de sa main ; le dragon Longet et le caporal Toinard en ont fait autant. Les carabiniers se sont particulièrement distingués. Vous connaissez le brave Eppler, mon Général, il est inutile de vous en faire l'éloge ; il honore son corps, et montre sans cesse une bravoure et un zèle infatigables. Les soldats ont fait un butin considérable. On a trouvé dans la maison une partie des effets qui étaient sur les barques et les caisses de munitions que les ennemis avaient vidées, et dont ils se sont servis contre nous avec nos fusils. J'ai repris deux barques, une pièce de 8 en bronze, quatre de 6 en fer, sortant de dessus l'Italie, qui a été brûlée, une de 4 en fer, une de 3 en fonte, une de 2 en fer ; il y avait aussi deux caissons, dont un a été brûlé, l'autre est sur les barques, avec plusieurs roues, tant bonnes que mauvaises ; je vais remonter ma pièce de 5.
Le résultat des trois journées est la mort de 500 à 600 Mecquains ou paysans et de 8 à 10 Mameluks, beaucoup de blessés, l'assaut d'une maison fortifiée, la prise de 9 pièces de canon, six drapeaux dont deux de La Mecque que je conserve. J'ai eu de mon côté 35 morts et 134 blessés, dont 5 officiers.
Le pauvre Bulliaud, capitaine des carabiniers, qui avait toujours été dans le feu, a reçu hier soir une blessure dont il est mort ce matin.
Ces trois journées, mon Général, ont usé une grande partie de mes munitions. Je me trouve à peu près sans cartouches d'infanterie et avec environ cinquante coups de canon à tirer. Si j'ai encore une affaire, tout sera dissipé et je ne saurai plus où puiser. Alors je serai forcé de descendre du côté de Girgeh, et même plus loin, s'il n'y avait pas de troupes et de munitions pour m'alimenter. Avant de me décider à ce mouvement, je remonterai du côté d'Esneh pour protéger l'arrivée de la garnison que j'y ai laissée et l'évacuation des subsistances qui s'y trouvent.
Je vis très difficilement ; tous les villages s'évacuent lorsque je m'approche, je n'y trouve aucune ressource et pas un paysan pour espionner et porter mes dépêches ; je ne sais à quoi attribuer cette désertion générale. Nous ne faisons cependant aucun mal dans les endroits où nous passons. Demain, nous nous porterons à Keneh, où les débris de La Mecque paraissent s'être retirés. Les Mameluks, qui avaient gagné ce matin du côté de Kous, retournent, à ce qu'on me reporte, du côté de Keneh, longeant le désert. Je les verrai demain, s'ils nous y attendent, et, après les avoir battus, je remonterai à Esneh, d'où je descendrai à Girgeh, si je ne reçois pas de vos nouvelles.
C'est un journal plutôt qu'un rapport, mon Général, mais j'ai cru indispensable d'entrer dans tous ces détails ; je les crois nécessaires quand on est si éloigné et que nous communiquons aussi difficilement.
Salut et respect.
BELLIARD" (La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 3. p. 597-600)
Dans son Rapport daté de son Quartier-général à Syoùth, le 20 Thermidor an 7 (7 août 1799), adressé au Général en chef Bonaparte, le Général Desaix, commandant la Haute-Egypte, écrit : "… Combat de Coptos (Qéfth).
Le 18 matin, le général Belliard arrive près de l'ancienne Coptos : à l'instant, il aperçoit déboucher, tambour battant et drapeaux déployés, trois colonnes nombreuses d’infanterie, et plus de trois à quatre cents Mamloùks, dont le nombre venait d'augmenter par l'arrivée de Hhacan-bey Djeddâoùy, qui avait passé le Nil à Edfoù.
Le général fait former son carré (il n'avait qu'une pièce de canon de trois). Une des colonnes ennemies, la plus considérable, composée d'Arabes d'Yamb'o, s'approche : l'audace est peinte dans sa marche. A la vue de nos tirailleurs, le fanatique Hhaçan entre dans une sainte fureur, et ordonne à cent de ses plus braves de se jeter dessus, et de les égorger. Au lieu d'être épouvantés, nos soldats se réunissent et les attendent de pied ferme. Alors s'engage un combat de corps à corps, et dont le succès restait incertain, lorsqu'une quinzaine de dragons du 20e chargent à bride abattue, séparent les combattants, sabrent plusieurs Arabes d'Yamb'o, pendant que nos chasseurs reprennent leurs armes, et taillent en pièces tous les autres. Plus de cinquante Arabes d'Yamb’o restent sur la place ; deux drapeaux de la Mekke sont pris. Le citoyen Laprade, adjudant-major de la 21e, en tue deux de sa main ; le caporal Toinnard et le dragon Olivier en font autant …" (Pièces diverses et correspondances relatives aux armées d’orient ; Kermoysan « Napoléon, Recueil par ordre chronologique de ses lettres, proclamations, bulletins », Paris, 1853, t.1, p. 258).
Le 11, la Brigade Belliard retourne à Keneh.
Le 27 Ventôse an 7 (17 mars 1799), l'Adjudant-général Donzelot écrit, depuis Siout, à Berthier : "… Dispositions de la division :
… 1 bataillon de la 88e à Girgeh, commandé par le chef de brigade Morand ; 1 bataillon de ce corps à Tahtah avec le 22e de chasseurs à cheval aux ordres de Lasalle ;
Le 3e bataillon de cette demi-brigade à Siout avec les 14e et 15e dragons, cantonnement commandé par le chef de brigade Pinon.
Les 2 bataillons de la 61e, le 7e de hussards, les 18e et 20e dragons passent sur la rive droite du Nil, formant une colonne mobile. Après-demain, le général Desaix se mettra en marche avec elle, remontant cette rive habitée par des Arabes très méchants. On se portera sur Keneh, où il y a toujours des rassemblements de Mecquains et de Mameluks ..." (La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 3. p. 609-611).
Desaix quitte Siout le 18 mars pour se rendre à Keneh, en remontant la rive droite du Nil. Il emmène 2 Bataillons de la 61e, le 7e hussards, les 18e et 20e Dragons et 4 pièces ; 1 Bataillon de la 88e, les 14e et 15e Dragons restent en garnison à Siout. Bien que cette région a, tout récemment, servi de refuge aux Mameluks et que les troupes françaises s'y sont à peine montrées, la petite colonne ne rencontre nulle résistance et atteint Keneh le 27 mars (La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 3. p. 612).
"Journal de Belliard : 1er germinal (21 mars). J'ai reçu des lettres de Siout, du 26, de l'adjudant général Donzelot, annonçant que le général Desaix doit passer sur la rive droite avec la cavalerie, la 61e et de l'artillerie, que le 29 il sera à Qaou, le 30 à Akmin et le 1er germinal à hauteur de Girgeh. Je pense qu'il continuera sa route jusqu'à Keneh, d'après ce que j'ai marqué au général sur la position des ennemis. Alors, je me suis décidé à faire partir l'ambulance sous l'escorte d'une barque armée et d'un détachement de 60 hommes ; elle sera protégée par la troupe de Samatha, par la cavalerie et par un détachement que j'ai ordonné d'envoyer au-devant de Girgeh. Par ce moyen elle arrivera, j'espère, sans obstacle à Girgeh, sa destination …" (La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 3. p. 603).
Dans son Journal, Savary note, pour les 26 et 27 mars 1799 : "Le 6, avant le jour, l'on part, et l'on s'arrête à 10 heures sur le Nil. Les paysans fuient sur l'autre rive. Recherches dans le village ; l'on y trouve des effets des malheureux qui étaient sur les barques.
Sur des rapports qu'il y avait des Mameluks dans la montagne, avec les paysans de tous les villages voisins, on laisse à ce village le général Davout, 200 chevaux et un bataillon de la 61e, 2 canons.
Le 7, avant le jour, l'on se met en marche avec 200 chevaux, le bataillon de la 61e et 2 canons pour Keneh ; l'on y arrive de bonne heure ..." (La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 3. p. 616).
- Combat de Bir-el-Bar.
Les Arabes battus sur un point reparaissent sur un autre. La pacification ne fait aucun progrès.
Davout étant arrivé le 29 mars, Desaix se dispose à partir dès le lendemain matin. Comme les bagages doivient rester à Keneh et que des établissements ont été déjà organisés dans cette ville, la garde en est confiée au 1er Bataillon de la 61e, sous les ordres du Commandant Dorsenne. Desaix emmène avec lui le reste des troupes : 21e légère, un Bataillon de la 61e, 7e Hussards, 18e et 20e Dragons, soit 1.500 hommes environ, avec 4 pièces d'artillerie. La colonne se met en marche entre 3 ou 4 heures du matin et se dirige vers Kous en suivant la lisière du désert (La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 3. p. 618).
Desaix le 30 mars, avec les troupes de la Brigade Friant, adopte "les dispositions de colonnes successives, de manière à forcer les ennemis à rester dans les déserts, ou au moins à faire de très grandes marches, pour arriver dans la région cultivée" (Pièces diverses et correspond., p. 141).
Il décide d'occuper les deux débouchés de Bir-el-Bar et d'Hagazi, de façon à ne laisser à Hassan-Bey que la longue et pénible ligne de retraite par Redecieh. A cet effet, il prescrit à Belliard de partir, le 31 mars, à la pointe du jour, avec la 21e légère, le 20e dragons et deux pièces, et d'aller s'établir à Hagazi. Tandis que Belliard se porte ainsi sur Hagazi, Desaix, avec le reste de la colonne (1 Bataillon de la 61e, 18e Dragons, 7e Hussards et 2 pièces), vient occuper Bir-el-Bar. Dans cette journée, il reçoit des renseignements, plus précis que ceux de la veille, sur les mouvements des Mameluks et des Mecquains. Il arrête, en conséquence, de nouvelles dispositions, qu'il notifie à Belliard par la lettre suivante : "De Birambar, par Keneh, 11 germinal (31 mars) : Avez-vous vu les ennemis, mon cher Général ?
Tous les rapports qui me sont venus m'assurent qu'Hassan-Bey Djeddaoui et sa compagnie, suivis de quelques Mecquains, se sont rendus à la Guitta, mais que le chérif et 400 Mecquains, s'étant séparés de ceux ci-dessus et ayant fait un crochet dans le désert, ont décidé leur mouvement et veulent descendre, dit-on, jusqu'au Caire, s'ils le peuvent, où, se confondant dans la foule, ils espèrent trouver le moyen de retourner à La Mecque, ne le pouvant plus par Kosseir, où l'on ne peut se rendre sans des provisions qui leur manquent. Mille rapports m'assurant bien ce dernier mouvement, voici les dispositions que je viens d'arrêter pour en finir : le détachement qui est à Farchout passera de suite le fleuve pour se poster dans les défilés qui sont vis-à-vis ; Morand passera aussi ; Lasalle l'est déjà et le commandant de Siout se trouvera en mesure sur cette rive-ci pour les arrêter en définitive, si, par impossible, ils étaient parvenus à arriver jusque-là en faisant des crochets dans le désert. Quant à moi, je joindrai la moitié de mon monde à la garnison de Keneh et j'en formerai une colonne qui les poursuivra partout et toujours. J'irai à Keneh avec le restant ; mais, pour ce faire, il est essentiel que je sois remplacé ici par un détachement de 3 à 400 hommes d'infanterie et 60 hommes de cavalerie, que vous ferez partir de suite et de manière à être rendu demain, 12, au soir. Vous, Général, vous resterez à Hagazi jusqu'à nouvel avis. Vous sentirez l'importance de ces dispositions qui sont telles que ni les Mecquains ni les Mameluks (dans le cas où ceux d'en bas nous éviteraient avec adresse et remonteraient) ne pourront s'établir et habiter dans ce pays-ci, qui est pour eux un point de grandes ressources et de débouchés importants.
Sans doute, vous restant à Hagazi et tenant bien le désert et la campagne en avant de vous, les Mameluks quitteront la Guitta et prendront un autre parti ; je vous engage à bien épier leurs mouvements et à les suivre autant et le plus possible, disposant dans ce cas de votre détachement ici.
Vous voudrez bien donner l'ordre précis à l'officier qui commandera ce détachement de se bien tenir sur ses gardes et de faire faire tous les jours des reconnaissances d'infanterie et de cavalerie dans le désert, tant qu'il habitera ce village-ci. Il devra correspondre tous les jours, et plutôt deux fois qu'une, avec vous et le commandant de Keneh. Ces deux commandants ordonneront à leurs reconnaissances de se rencontrer le plus souvent possible.
Dans le cas où, au moment où vous recevrez ma lettre, vous auriez la certitude, bien et très bien acquise, que les Mameluks ont quitté la Guitta, où que, n'y ayant pas été, ils ont continué leur route et remontent, alors vous les suivriez et vous vous dispenseriez d'envoyer ici le détachement que je vous mande" (La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 3. p. 622).
La 61e Demi-brigade (toute entière dit l'Historique du Corps) est dans ce but établie à Bir-el-Bar, où se trouve une bonne citerne. Mais les Arabes profitent de ce qu'il n'est resté que 300 hommes à Keneh pour menacer ce poste. La 61e revient sur ses pas et soutient la cavalerie du Général Davout dans un violent combat près de Bir-el-Bar.
"La cavalerie, commandée par le général Davout, flanquait la colonne en se tenant dans le désert. Bientôt, non loin des murs de Thèbes, le 13 germinal an VII, elle aperçoit les mamelouks ; c'était ce même Osman-Bey qui, rétabli de ses blessures, venait de Cosséir pour pénétrer dans le pays cultivé. Le général Desaix était avec ses éclaireurs., qui sont chargés impétueusement. Le chef de brigade Duplessis, commandant le 7e de hussards, emporté par son ardente valeur, et au mépris des ordres qu'il avait reçus d'attendre l'ennemi, fit la faute d'aller à sa rencontre. Le 7e de hussards éprouva le même revers que la cavalerie française avait déjà essuyé au combat de Rédéyé, par l'effet de l'armement et de l'équipement des mamelouks. Le chef de brigade fut tué, vingt-sept hussards perdirent la vie et un grand nombre furent blessés. Le général Davout, pour dégager ce régiment, se jette avec le 18e de dragons, commandé par le brave chef de brigade Bouvaquier, sur les mamelouks près de Birambra, et les charge avec tant de vigueur, qu'ils cèdent en désordre et abandonnent le champ de bataille couvert de leurs morts. Osman-Bey-Hassan y est blessé de nouveau. Les mamelouks, avec plusieurs de leurs blessés, fuient dans le désert et y périssent en partie de soif et de besoin. Le général Desaix laisse le général Belliard à Birambra, et continue sa route sur Kéné. Le général Davout, informé qu'il existait trois pièces de canon dans un village, s'y porte la nuit avec vingt-cinq dragons du 20e régiment ; s'empare de la personne du cheik et se fait remettre les canons. Mais au jour, il est environné de plus de cinq cents Arabes. Il inspire alors une telle crainte au cheik pour son existence, que celui-ci les fait retirer ; Davout ramène les pièces au général Desaix et rend au cheik sa liberté.
Pour mettre un terme aux soulèvements des Arabes et à cette guerre qui fatiguait les troupes par de petits combats continuellement renouvelés, le général Desaix forme une colonne mobile de trois cents chevaux et de quatre cents hommes de la 61e demi-brigade, avec trois pièces de canon. Davout en a le commandement ; il doit avec cette colonne parcourir la haute Égypte, assurer les communications, dissiper les rassemblements, combattre et poursuivre les divers corps de mamelouks qui reparaissaient sans cesse. Le général Davout s'acquitte de cette importante mission avec une grande habileté" (Chénier, L.-J.-G. (de) : « Histoire de la vie militaire, politique et administrative du maréchal Davoust, duc d'Auerstaedt, prince d'Eckmühl (d'après les documents officiels) », Paris, 1866, p. 88).
Dans son Rapport daté de son Quartier-général à Syoùth, le 20 Thermidor an 7 (7 août 1799), adressé au Général en chef Bonaparte, le Général Desaix, commandant la Haute-Egypte, écrit : "… Le 10 germinal j'arrivai à Keneh : je ravitaillai les troupes du général Belliard, et, le 11, nous nous mîmes en marche pour aller combattre les ennemis, qui, depuis deux jours, étaient postés à Qoùss. A notre approche ils rentrèrent dans les déserts, et se séparèrent ... Alors ... avec les deux bataillons de la 61e, le 7e de hussards, et le 18e de dragons, je vins à Byr-âl-harr, autre débouché de la Kuita, et où il y a une bonne citerne. Par ce moyen les ennemis ne pouvoient sortir des déserts sans faire quatre jours de marche extrêmement pénible …
… Combat de Byr-âl-harr.
Le 13, avant la pointe du jour, je me mis en marche, ma cavalerie dans le désert, et à vue de mon infanterie qui longeait avec mon artillerie.
Après une heure de marche environ, un des hussards qui étaient en éclaireurs annonça les Mamloùks. L'adjudant-général Rabasse, qui commandait l'avant-garde, prévient le général Davoust, et s'avance pour mieux reconnaitre l'ennemi et soutenir ses éclaireurs qui déjà, étaient chargés. Bientôt il l'est lui-même ; il soutient le choc avec une bravoure et une intelligence admirables, mais le nombre l’accable ; et, quoique culbuté avec son cheval, il se retire sans perte sur le corps de bataille où je venais d'arriver. De suite j'envoyai chercher mon infanterie et j'ordonnai à la cavalerie de prendre position sur un monticule extrêmement escarpé, où je voulais qu'elle attendît et reçût la charge. Malgré les soins du général Davoust et les miens, nous ne pûmes jamais parvenir à l'y placer. Une grande valeur animait le chef de brigade Duplessis. Il désirait depuis longtemps trouver l'occasion de se signaler ; il ne peut voir arriver de sang-froid les ennemis, et son courage impatient lui fait oublier l'exécution de mes ordres. Il se porte à quinze pas en avant de son régiment, et fait sonner la charge ; il se précipite au milieu des ennemis, et y fait des traits de la plus grande valeur : mais il a son cheval tué, et l'est bientôt lui-même d'un coup de tromblon. Sa mort jette un peu de désordre, et le général Davoust est forcé de faire avancer la ligne des dragons. Ces braves soldats, commandés par le chef d'escadron Bouvaquier, chargent si impétueusement les Mamloùks, qu'ils sont obligés de se retirer en désordre, nous abandonnant le champ de bataille.
L'infanterie et l'artillerie marchent difficilement dans le sable, et elles arrivèrent que tout était fini. Cette affaire nous a coûté plusieurs officiers, entre autres le chef d'escadron Bouvaquier, qui, avant de mourir, s'est couvert de gloire …
Le même jour, je revins à Keneh : je formai une colonne mobile, composée d'un bataillon de la 61e, de trois bouches à feu, et du 7e de hussards, que je mis à la disposition du général Davoust, auquel je donnai l'ordre de détruire jusqu'au dernier des Arabes d'Yamb'o que l'on m'annonçait être toujours dans les environs d'Aboùma'anâh …" (Pièces diverses et correspondances relatives aux armées d’orient ; Kermoysan « Napoléon, Recueil par ordre chronologique de ses lettres, proclamations, bulletins », Paris, 1853, t.1, p. 258).
"Notes sur la campagne du général Desaix dans la Haute-Egypte, écrites et transmises par le général Davoust.
… Combat de Birembar, donné le 13 germinal.
Après deux heures de marche, cent quarante chevaux de ces deux corps découvrent l'ennemi vers les huit heures du matin, fort de près de 400 chevaux : notre cavalerie ne consulte pas le nombre, se précipite sur l'ennemi pour dégager quarante chevaux qui étaient avec le général Desaix, qui a couru les plus grands dangers. Le général Desaix est dégagé ; le 7e de hussards, commandé par le chef de brigade Duplessis suit l'exemple de son chef, et se bat avec beaucoup de bravoure. Obligés de se replier à cause du nombre, quarante chevaux du 18e, commandés par le chef d'escadron Beauvatier, se précipitent sur l'ennemi, qui poursuivait le 7e. Hassan, blessé au bras, et Osman a la main, abandonnent le champ de bataille aux braves dragons du 18e. Hassan retourne avec ses mameloucks à la Kuita, où il ne s'arrête que quelques heures, craignant la visite des Français, et gagne les environs d'Assouan, après avoir laissé la moitié de son monde et de ses chevaux morts de faim et de soif.
Au combat de Birembar, nous avons eu vingt-quatre hommes tués et vingt blessés ; au nombre des premiers est le chef de brigade Duplessis, officier d'un grand mérite, et rempli de dévouement. Le chef d'escadron Beauvatier a été aussi tué après avoir bien payé de sa personne. L'adjudant-général Rabas s'est très-bien conduit là, ainsi que dans toute la campagne de la Haute-Egypte.
Arrivé à Keneh, le général Desaix détache un bataillon de la 61e, le 7e de hussards, pour suivre la partie du rassemblement de Kous, qui s'était portée sur nos derrières ..." (Correspondance inédite officielle et confidentielle de Napoléon, t.6, Egypte).
"Rapport du capitaine du génie Garbé sur les marches de la division Desaix depuis l'ouverture de la deuxième campagne jusqu'au 12 prairial, avec quelques détails sur les positions actuelles, ainsi que le plan du fort qu'il a fait construire dans la province de Thèbes.
... Le 10, à trois heures du matin, le général Desaix se mit en marche avec 800 hommes de la 21e, 400 hommes de la 61e, les escadrons du 7e de hussards, 18e et 20e de dragons. A notre approche, l'ennemi prit la fuite dans le désert.
… La difficulté de savoir parfaitement les mouvemens de l'ennemi, détermina le général Desaix à prendre deux positions qui pussent l'empêcher de revenir des montagnes pour chercher de l'eau et des vivres. Il envoya le général Belliard a Ayazi, et il vint avec la 61e et deux escadrons à Birambar. Ces deux villages touchent le désert et sont au débouché de la Kuita ; un bataillon était resté pour garder le point de Keneh.
… le 13, à la pointe du jour, le général se mit en marche avec ses troupes.
Les hussards, sous les ordres du chef de brigade Duplessis, formaient l'avant-garde : en marchant sur la crête de la montagne, ils se trouvèrent presque en face de l'ennemi, qui était sur l'autre revers. Ils commencent à tirer quelques coups de fusil : bientôt après, L'affaire s'engage. Les mameloucks se réunirent, et vinrent charger notre avant-garde. La première ligne des hussards fut rompue en peu de temps ; les dragons du 18e vinrent se joindre à eux, cela n'empêcha pas qu'on ne perdît plus de 36 hommes, dont sept officiers : le chef de brigade. Duplessis et le chef d'escadron du 18e étaient du nombre. Le même jour, on revint à Keneh ..." (Correspondance inédite officielle et confidentielle de Napoléon, t.6, Egypte).
Le combat de Bir-el-Bar a arrêté le mouvement des Mameluks et les a forcés à se retirer sur la Guitta. Incertain du parti qu'ils prendront, Desaix adresse à Belliard les instructions suivantes pour l'emploi de ses troupes dans les différentes éventualités (de Keneh, 14 Germinal- 3 avril) : "Vous m'aviez annoncé, mon cher Général, que les Mameluks quittaient la Guitta pour descendre à Samatha. J'ai reçu votre rapport le 12 au soir. Le 13, à la pointe du jour, je me suis mis en marche avec mes 200 chevaux, le bataillon de la 61e et 3 pièces de canon. L'infanterie n'ayant pas pu passer par le désert, elle le longeait. La cavalerie y entra et y fut jusqu'à deux lieues ; elle y a trouvé les Mameluks qui descendaient. Ils ont engagé une charge, dans laquelle notre cavalerie a souffert quoique étant restée maître du champ de bataille.
Après le combat, j'ai fait observer les Mameluks et je les ai vus enfoncés dans le désert, en remontant dans la Guitta. Je ne doute pas qu'ils n'aient pris le parti d'y retourner ; ils n'auront pu y arriver que dans un état affreux, mourant de faim et de soif …" (La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 3. p. 632).
- Combat de Beni-Adin.
Tandis qu'il envoie Belliard vers Redecieb, à la poursuite des Mameluks battus à Bir-el-Bar, Desaix est informé que des bandes assez nombreuses de Mecquains ont réussi à gagner par le désert la vallée du Nil au-dessous de Reneh. Joints aux Mameluks qui se sont réfugiés dans ces parages, ils peuvent inquiéter sérieusement les postes français échelonnés le long du fleuve. Ces nouvelles déterminent Desaix à faire descendre, sur la rive droite du Nil, une petite colonne (1er Bataillon de la 61e, 7e hussards et 2 pièces de canon), commandée par le Général Davout, le 4 avril (l'Historique régimentaire donne le 3e Bataillon de la 61e). La colonne ainsi formée a pour mission "de détruire jusqu'au dernier des Arabes d'Yambo" qui tiennent le pays aux environs d'Aboumana.
Le même 4 avril, Desaix écrit à Belliard : "… Il partira ce soir de Keneh un bataillon de la 61e, 2 pièces de canon avec la cavalerie pour aller à Aboumanah, vis-à-vis duquel il y a un débouché du désert. Ce détachement sera à portée de savoir des nouvelles du passage des Mameluks et je me trouverai en mesure de les poursuivre si réellement ils sont descendus …" (La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 3. p. 634-635).
Davout partit de Keneh le 5 avril au matin pour se rendre à Dehechneh. Il doit observer les mouvements des ennemis et s'efforcer de les atteindre (La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 3. 640).
A partir de ce moment, les combats se multiplient. Les Arabes d'Aboumana échappent à Davout, mais se font battre par Morand. Davout, de son côté, rejoint Morand à Girgeh et lui prête son appui pour la reprise de la ville. Puis il se rend à Siout. Il y arrive a peine, qu'il est avisé d'un rassemblement de fanatiques. Il se porte aussitôt à sa rencontre et le met en fuite, le 18, à Beni-Adin. Le Bataillon de la 61e pénètre dans la ville, qui est incendiée.
Dans son Rapport daté de son Quartier-général à Syoùth, le 20 Thermidor an 7 (7 août 1799), adressé au Général en chef Bonaparte, le Général Desaix, commandant la Haute-Egypte, écrit : "… Combat de Bényhâdy.
Le 29, le général Davoust arrive près de Bényhâdy, qui est plein de troupes ; le flanc du village vers le désert est couvert par une grande quantité de cavalerie, Mamloùks, Arabes, et paysans. Ce général forme son infanterie en deux colonnes ; l'une doit enlever le village, pendant que l'autre le tournera : cette dernière était précédée par sa cavalerie, sous les ordres de Pinon, chef de brigade, distingué par ses talents ; mais en passant près d’une maison, ce malheureux officier reçoit un coup. De fusil et tombe mort. Cet événement étonne ; le général Davoust y remédie, et donne ce commandement à l'adjudant- général Rabasse. La cavalerie aperçoit les Mamloùks dans les déserts : une des colonnes d'infanterie s'y porte ; mais 1’avant-garde de Mourâd-bey … lui porte promptement le conseil de retourner. Les Arabes et les paysans à cheval avaient déjà lâché pied. L'infanterie et la cavalerie reviennent ; le village est aussitôt investi : l'infanterie y entre ; et malgré le feu qui sort de toutes les maisons, nos troupes s'en rendent entièrement maîtres ... Nos troupes y ont fait un butin immense : elles y ont trouvé des caisses pleines d’or.
Nous n'avons perdu presque personne dans cette affaire.
… Le citoyen Rousseau, maréchal-des-logis dans la cinquième compagnie du 3e régiment d'artillerie à cheval, qui pointait presque toutes les pièces à la bataille de Sédiman et de Ssâmhhoùd, s'est particulièrement distingué dans le cours de cette campagne : je vous demande pour lui des grenades en or ; je vous ferai la même demande pour le citoyen Lainault, caporal des grenadiers du premier bataillon de la 61e demi-brigade, qui s'est singulièrement signalé dans toutes les affaires, et surtout au combat de Keneh …" (Pièces diverses et correspondances relatives aux armées d’orient ; Kermoysan « Napoléon, Recueil par ordre chronologique de ses lettres, proclamations, bulletins », Paris, 1853, t.1, p. 258).
"Notes sur la campagne du général Desaix dans la Haute-Egypte, écrites et transmises par le général Davoust.
… Combat de Benehadi.
Le pays au-dessous de Syout se révolte ; les habitants de Benehadi, le plus grand et le plus peuplé des villages de l'Egypte, promettent à Mourad de prendre sa défense ; Mourad annonce qu'il va descendre des oasis, distant de quatre journées de Benehadi. Les Arabes d'Yambo, 400 mameloucks, étaient réunis à deux lieues plus bas que Benehadi, prêts à recevoir Mourad : tous les Arabes à cheval du pays, au nombre de près de 1500, étaient du rassemblement ; 500 hommes d'infanterie de la 61e et de la 88e, avec 250 chevaux du 7e de hussards, des 14e et 15e de dragons, partent de Syout avec trois pièces de canon, le 29 germinal, pour aller combattre tous nos ennemis.
Arrivés près de Benehadi, notre avant-garde est attaquée par quelques centaines de cavaliers, suivis d'hommes à pied. Le chef du 15e, Pinon, attaque ces gens-là, les repousse jusqu'au village, dont tous les murs de jardins et de maisons sont crénelés. Une vive fusillade part du village contre la troupe française, Pinon reçoit la mort dans cet instant. Le village est attaqué avec beaucoup d'ordre, défendu avec la plus grande opiniâtreté ; les maisons sont la plupart endommagées. Ce combat, commencé à huit heures du matin, a fini à six heures du soir : à cette heure seulement tout le village a été au pouvoir des Français : 3,000 hommes, presque tous armés de fusils, ont payé de leur vie leur révolte : nous avons eu neuf hommes tués et trente-trois blessés. Ce village s'était toujours maintenu indépendant des mameloucks, et était dans l'usage de donner asile a leurs ennemis. La valeur française a fait dans une journée ce que les mameloucks n'ont pu faire pendant tout le temps qu'ils ont dominé l'Egypte. Mourad, qui a été instruit du sort de ses protecteurs, n'a plus eu l'envie de descendre d'Elouah. Le rassemblement d'Yambo et de mameloucks qui était à quelques lieues de Benehadi, n'a pas encore osé venir se mêler de la querelle : il s'est porté sur Minieh pour y combattre la garnison française, qui était très-faible ..." (Correspondance inédite officielle et confidentielle de Napoléon, t.6, Egypte).
"Rapport du capitaine du génie Garbé sur les marches de la division Desaix depuis l'ouverture de la deuxième campagne jusqu'au 12 prairial, avec quelques détails sur les positions actuelles, ainsi que le plan du fort qu'il a fait construire dans la province de Thèbes.
... Les mameloucks parurent ensuite se réunir de nouveau entre Girgeh et Scyout. Le général Desaix se porta dans la première de ces villes, et laissa le général Belliard pour tenir la Haute-Egypte. On reçut avis à Girgeh que le Village de Benehadi s'était insurgé, et que le général Davoust qui se trouvait à Scyout, avait marché avec la 61e, la 88e et la cavalerie contre ce village …" (Correspondance inédite officielle et confidentielle de Napoléon, t.6, Egypte).
De Girgeh, Desaix adresse à Belliard des instructions complétant celles qu'il lui a précédemment données (30 Germinal - 19 avril) : "… Je vous prie de faire la plus exacte recherche des villages qui ont pris part à l'attaque de nos barques et ont coopéré à l'horrible assassinat de nos malheureux camarades ; punissez-les avec la dernière sévérité. Vous lèverez sur eux une contribution au moins de 10.000 réais du pays, pour indemiser la 61e de la perte de sa musique, plusieurs officiers, de celle de leurs effets qui étaient sur l'Italie, et surtout la famille de l'infortuné Morandi. Lorsque vous serez nanti de cette somme, vous m'en préviendrez, afin que j'en fasse la répartition comme il conviendra …" (La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 3. p. 649-650).
Le 7 Floréal (26 avril), à 4 heures du matin, le Capitaine Bourbel, ancien chevalier de Malte, commandant une colonne mobile, écrti, depuis Mahallet-Abou-Ali (village sur la rive droite du Nil, un peu en amont d'El-Rahmànieh) à Fugière que l'Officier commandant à El-Rahmànieh lui a adressé, la veille au soir, une demande de secours : "… Le commandant Lefebvre avait laissé 60 hommes à Damanhour avec les officiers; tout a été assassiné. Les gens du pays assurent qu'il est arrivé 4.000 Africains d'Alger ou de Tunis, qui sont ceux qui ont tout fait.
Un détachement de la 61e demi-brigade a été obligé de se retirer à El-Rahmànieh qui va être attaqué dans la journée. J'irai rejoindre mon camarade et mon ami.
Nous périrons ou les repousserons. Rosette n'est point en état de nous donner du secours. Nous serons peut-être assez forts. Nous n'avons point de vivres. Pourriez-vous, Général, nous en faire parvenir ? Je crains beaucoup pour le citoyen Lefebvre. Adressez votre réponse à El-Rahmànieh". Fugière transmet copie de cette lettre à Dugua (de Samannoud, 8 Floréal - 27 avril) en ajoutant que son peu de forces ne lui permet pas de marcher au secours d'El-Rahmanieh. Dugua transmet à son tour cette lettre à Bonaparte le 1er mai (La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 5, p. 75).
Desaix part de Girgeh, le 28 avril, avec le 1er Bataillon de la 61e, le 18e dragons et 2 pièces, pour se rendre à El-Menchieh, où il séjourne le lendemain. Comme Belliard vient d'être atteint d'une nouvelle ophtalmie, il envoie Donzelot à Keneh pour le seconder et, au besoin, le suppléer dans les préparatifs de l'expédition de Kosseir (La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 3. p. 653).
- Combat d'Abou-Girgeh.
Davout continue sa route jusqu'à Beni-Souef et brûle encore le village d'Abou-Girgeh, qui a refusé de lui fournir des vivres (30 avril). Bonaparte, récemment retourné de Syrie, le rappelle au Caire.
De son côté, le 30 avril, Desaix, continuant à descendre le Nil, arrrive à Saouaqi, où il séjourne les 1er et 2 mai. Il adresse à Bonaparte un long compte rendu des dernières opérations, dans lequel il expose la situation et les besoins de la Division (Lettre datée de Saouaqi (11 Floréal-30 avril), accompagnée d'une lettre de transmission à Dugua) : "… Le général Davout, arrivé à Siout, s'est réuni à la garnison de cette ville, y laissant ce qu'il fallait pour garder nos établissements, et a marché contre Beni-Adin. Ce village, assez bien retranché, a fait une vive défense ; à la fin, il a été forcé ; les habitants, au nombre de 3.000, ont presque tous péri ; une partie de la caravane de Darfour, qui y était, a été pillée. Le butin de nos soldats est immense ; plusieurs ont des milliers de louis.
Nous avons perdu, dans cette affaire, le citoyen Pinon, chef du 15e de dragons. Il a été atteint d'une balle, à la tête de son régiment. 7 soldats sont morts sur le champ de bataille ; nous avons eu 46 blessés.
… Les marches et combats continuels nous ont bien fatigués.
Quant à notre situation, elle est ainsi :
Le général Belliard occupe la province de Thèbes, depuis Syène jusque vis-à-vis Hou. Il a 1.200 hommes d'infanterie (21e légère) et 150 chevaux du 20e dragons. Il doit faire avec cela la guerre à Hassan-Bey, ne lui laisser aucun moyen de s'établir en Égypte, gouverner cette province, faire construire le fort de Keneh et aller à Kosseir.
La province de Girgeh est occupée par le 3e bataillon de la 88e, commandé par le chef de brigade Morand ; il a 240 hommes d'infanterie et 30 chevaux. Le général Friant commande cette province. Il a avec lui un bataillon de la 61e, 100 chevaux. Nous parcourons le pays entre Girgeh et Siout pour la rentrée des contributions et contenir le pays.
A Siout, un autre bataillon de la 88e et les chasseurs du 22e.
Le 1er bataillon de la 61e, 300 chevaux, des 14e et 15e de dragons, et du 7e de hussards, sont à Minieh, poursuivant les rassemblements.
Nous avons fortifié les maisons de Mameluks, d'Esneh, Girgeh et Siout ; elles sont à l'abri d'un coup de main et séparées des maisons voisines. Nous avons nos malades et blessés : 200 à Girgeh, 100 à Siout, et un peu plus à Keneh ..." (La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 3. p. 654-655).
Le 30 Floréal an 7 (19 mai 1799), le Général Desaix écrit, depuis Siout, au Général Dugua : "Je suis arrivé en cette ville le 26 du courant, mon Général, avec le 2e bataillon de la 61e, le 18e régiment de dragons et 2 pièces de canon ..." (La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 3. 660).
Afin de que les communications avec Le Caire ne soient pas coupées, Desaix décide d’envoyer à Detrès une petite colonne commandée par Friant. Le Journal de Savary en note le départ : "Le 25 (prairial-13 juin), le général Friant part avec Lasalle pour aller joindre Detrès; il emmène de Siout le reste de la cavalerie et les deux compagnies de grenadiers de la 61e ; il prend le détachement de Silly et sa pièce de canon, et va à Minieh" (La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 5, p. 265).
Deux jours après avoir quitté Siout, Friant arrive à Darout-el-Chérif, d'où il écrit à Desaix le 27 (Prairial-15 juin) : "Silly, mon Général, vient de recevoir des nouvelles de Detrès. Le même paquet contenait une lettre pour vous que je me suis permis de décacheter. Vous verrez, par son contenu, que la province de Minieh est assez tranquille. Comme je n'avais emmené les deux compagnies de grenadiers que sur les bruits répandus à El-Qousieh que Detrès avait eu une nouvelle affaire avec les Arabes de Geamma, je les renvoie avec Silly, qui ira coucher ce soir à El-Qousieh, demain à Manfalout ...
Je vais coucher ce soir à Melaoui, où je m'aboucherai avec Detrès, lui aiderai, s'il est nécessaire, à battre encore une fois les Arabes rebelles, et ensuite remonterai vers Siout. Ben-Ouafi doit venir me voir demain à Melaoui; je l'engagerai à ramasser le plus tôt possible les chameaux qu'il nous a promis, afin de les emmener avec moi" (La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 5, p. 267).
Le 27 Prairial an 7 (15 juin 1799), Bonaparte, depuis son Quartier général, au Caire, fait publier l'ordre du jour suivant : "… Le général en chef, dans la revue qu'il a passée, a vu avec le plus grand plaisir les bataillons des 61e et 88e, et le brave 15e de dragons ; ces corps méritent, par leurs fatigues et les constantes victoires qu'ils ont remportées dans la haute Egypte, ces témoignages particuliers de satisfaction …" (Correspondance de Napoléon, t.5, lettre 4174; La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 4, p. 627).
Le même jour, 27 Prairial an 7 (15 juin 1799), Bonaparte, depuis son Quartier général, au Caire, au Général Berthier : "... Vous donnerez l'ordre au général Destaing de partir le 29, pour se rendre à El-Rahmânyeh avec le bataillon de la 61e qui se trouve au Caire et tous les hommes de ce bataillon qui sont au dépôt et qui sont dans le cas de pouvoir marcher. Arrivé à EI-Rahmânyeh, il ramènera au Caire tous les hommes de la légion nautique qui s'y trouveraient. Il sera sous les ordres du général Marmont, qui commande les trois provinces. Il prendra les mesures les plus promptes pour faire rentrer les contributions que doit la province de Bahyreh …" (Correspondance de Napoléon, t.5, lettre 4177 ; Correspondance générale de Napoléon, t.2, lettre 4379; La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 5, p. 196).
Le 29 prairial an 7 (17 juin 1799), Bonaparte écrit, depuis Le Caire, au Général Marmont : "Le général Destaing se rend, citoyen général, dans le Bahireh avec un bataillon de la 61e, un bataillon de la 4e s'y étant précédemment rendu de Menouf ..." (Correspondance inédite officielle et confidentielle de Napoléon, t.6, Egypte ; Panckoucke : « Œuvres de Napoléon Bonaparte », 1821-1822, t. 3, p. 48 ; Œuvres complètes de Napoléon, Stuttgart et Tubingue, 1822, t.3, p. 176 ; Correspondance de Napoléon, t.5, lettre 4182 ; Correspondance générale de Napoléon, t.2, lettre 4393 ; La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 5, p. 197).
On voit par le Journal de Savary que Silly revient à Siout avec les Grenadiers de la 61e, le 30 Prairial (18 juin) (La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 5, p. 265).
Le 21 juin 1799 (3 Messidor an 7), Bonaparte écrit, depuis son Quartier général, au Caire, au Général Berthier, Chef de l'État-major général de l'Armée d'Orient : "Vous ferez réunir, citoyen général, les hommes de la 4e infanterie légère des bataillons qui sont à Alexandrie et El-Rahmânieh, de la 61e et de la 75e [de ligne], et de les tenir prêts à partir demain avec le contre-amiral Ganteaume" (Correspondance générale de Napoléon, t.2, lettre 4416; La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 5, p. 202).
Une lettre de l’Adjoint Donzelot à Berthier, datée de Siout, le 5 Messidor (23 juin), lui décrit la situation de la haute Égypte au moment où se produit le retour offensif de Mourad-bey : "... Depuis ma dernière, mon Général, il ne s'est rien passé d'intéressant dans ce pays; il est assez tranquille. La province de Minieh l'est moins; deux tribus d'Arabes, nommées Geamma et Zaïda, y commettent quelques désordres ; le citoyen Detrès leur a déjà donné deux ou trois bonnes corrections, mais elles reviennent toujours. Elles sont en guerre avec les tribus de Ben-Ouali, Abou-Koraïm et de Taha, nos alliées. Ces dernières doivent nous fournir quatre cents chameaux pour l'expédition que le général Desaix prépare pour chasser Mourad et les six autres beys des oasis, et les jeter dans l'intérieur de l'Afrique. Ces maudits Arabes de Geamma et Zaida sont venus inquiéter ces trois tribus amies au moment où elles rassemblaient ces chameaux, ce qui retarde l'expédition ; mais le général Desaix vient d'envoyer le général Friant, avec environ 350 hommes, pour chasser ces Arabes, conjointement avec le citoyen Detrès ; il ramènera avec lui les chameaux. Alors l'expédition aura lieu si quelque contre temps ne s'y oppose. La division est soldée jusqu'au 1er prairial, excepté les troupes que le général Davout a emmenées au Caire; il leur est dû ventôse, germinal et floréal, à moins qu'elles n'aient touché quelque chose depuis leur départ de la division. Ces troupes sont composées des escadrons des 14e et 15e régiments de dragons, d'un bataillon de la 61e demi-brigade, un de la 88e, et de quelques artilleurs.
Nous venons de recevoir un convoi de 56.000 cartouches d'infanterie, 300 à 400 boulets de différents calibres, des roues de rechange, mais qui demandent déjà des réparations. On a oublié de nous en voyer des affûts de rechange; les nôtres tombent en ruine, tans moyen de les réparer. Nous éprouvons les plus grandes difficultés pour transporter l'artillerie à Kosseir ; on y a déjà conduit 2 pièces de 6 ; mais on est obligé de se servir de nos affûts de campagne ; encore quelques voyages, et les deux affûts des pièces de 8 de la brigade du général Belliard seront hors de service. On croyait pouvoir se servir des avant-trains des Mameluks pour ce transport, mais ils se sont tous brisés.
Nous sommes dans le plus grand embarras pour nos malades ; nous les voyons souffrir sans pouvoir leur procurer aucun soulagement. Depuis longtemps le général Desaix et moi n'avons cessé d'écrire pour demander des médicaments, nous croyions en recevoir par le convoi qui nous est arrivé; on nous en annonçait un grand envoi au commissaire de guerre Senneville, qui n'a malheureusement reçu que l'état. Je pense que ces médicaments ne sont point arrivés par la négligence de ceux qui étaient chargés de les expédier, car je ne puis imaginer que, pour répondre à nos demandes et satisfaire à nos pressants besoins, on se contente de nous envoyer l'état de ce que nous demandons. Cependant, mon Général, il serait difficile de vous dépeindre la malheureuse situation de nos ambulances; les malades y abondent, et tout manque pour les traiter. En place d'émétique, on se sert d'huile qui dégoûte les malades et ne les soulage point. Je vous prie de vouloir bien donner les ordres les plus précis pour qu'il nous soit envoyé des médicaments sans délai, surtout de l'émétique.
La situation de nos ennemis est toujours la mème. Hassan-Bey qui s'était retiré après sa défaite du 27 floréal au-dessus des cataractes dans le pays de Barabra, a soulevé les ·habitants contre lui par ses exactions. Ils lui ont tué 8 Mameluks. Ne sachant où aller, il est descendu à Syène ; mais le général Belliard a envoyé un détachement contre lui, et dans ce moment il doit être expulsé de cette ville. Où ira-t-il ? Je n'en sais rien. Les kachefs et Mameluks désertent toujours, il en arrive à Esneh et Keneh. Mourad et autres beys sont toujours aux oasis avec 400 à 500 Mameluks. Il y en a beaucoup de répandus dans le pays. Il en vient journellement se soumettre. Le général Desaix. a demandé au général en chef ce qu'il devait faire à leur égard.
Quant à notre situation, le général Belliard occupe, avec la 21e demi-brigade légère et le 20e régiment de dragons, de Syène à Keneh, y compris Kosseir où il y a 250 hommes d'infanterie. Un bataillon de la 88e à Girgeh, avec une trentaine de chevaux du 22e de chasseurs sous les ordres du chef de brigade Morand. Un bataillon de cette même demi-brigade à Siout sous les ordres du chef de brigade Silly, avec quelques dragons des 14e, 15e et 18e, quelques hussards du 7e.
Un bataillon de la 61e et le 22e de chasseurs, sous les ordres du général Friant, en colonne mobile, actuellement à la poursuite des Arabes de Geamma dans la province de Minieh. Le 7e de hussards est, en partie, avec cette colonne; mais il doit être laissé en entier à la disposition du chef de brigade Detrès à Minieh. Le général Davout a avec lui un bataillon de la 61e, un de la 88e et les escadrons des 14e et 15e régiments de dragons, une pièce de 8, une de 5 et un obusier. Il est arrivé, avec le dernier convoi de munitions, 50 dragons du 20e, qui ont resté (sic) à Minieh pour y recevoir des chevaux; 14 dragons du 14e ont resté à Beni-Souef pour le même objet, et 101 dudit régiment sont arrivés ici; on les renverra avec des chevaux montés au Caire et avec des chevaux de main s'il est possible.
Je vais encore vous faire part, mon Général, de nos besoins en munitions, surtout en boulets, pour l'approvisionnement des forts de Keneh et Kosseir; nous en faisons fabriquer en marbre, mais vous sentez qu'ils n'ont pas le même effet que ceux de fer. Nous trouvons de la poudre dans ce pays; elle n'est pas de première qualité; mais dans le besoin on se sert de ce qu’on a.
Il vient d'arriver au port de Kosseir dix bâtiments de commerce chargés de café et autres marchandises; ils attendent des grains pour s'en retourner. Le chérif de La Mecque parait toujours dans les meilleures dispositions pour nous.
La lettre de Donzelot se termine par ce post-scriptum, qu'il a dû ajouter de sa main, le lendemain matin :
Au moment où je cachète cette lettre, on instruit le général que Mourad-Bey descend de l'oasis. La misère l'en chasse. Mais le général ne perdra pas un instant pour le poursuivre et ne pas lui donner le temps de respirer" (La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 5, p. 274).
Le 24 juin 1799, Marmont écrit, depuis Alexandrie, à Bonaparte : "Je vous ai fait plusieurs fois, mon général, la peinture vraie de la position où nous nous trouvons ; je vous ai demandé des secours en argent et en troupes : vous me refusez les uns et les autres ; vous diminuez même le nombre de nos troupes, quoiqu'il soit bien reconnu qu'elles sont insuffisantes pour lever les impositions ; le bataillon de la 19e est de trois cents hommes ; la légion nautique, de près de quatre cents, et le détachement de la 25e est d'environ quatre-vingt hommes : total, au moins sept cents hommes ; et vous remplacez ces corps par un bataillon de la 61e de quatre cents hommes, et un bataillon de la 4e, de cent vingt ; c'est-à-dire que votre intention est qu'environ cinq cents hommes gardent le fort de Rosette, la ville de Rosette, chassent les Arabes et les mameluks du Bahiré, lèvent les impositions dans ces deux provinces et protègent les travaux du canal !" (Mémoires de Marmont, tome 2, page 76).
Dès le 25 juin, Desaix part de Siout avec une petite colonne ainsi composée : 250 hommes de la 61e Demi-brigade, quelques hommes de la 88e, 150 cavaliers montés pris dans différents corps et une pièce de 5. Il va coucher à Manfalout. Le lendemain matin, il se porte sur El-Qousieh, où il s'arrête quelques heures et apprend que Mourad-Bey descend très rapidement vers la basse Égypte, en suivant la lisière du désert (La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 5, p. 281).
Le même 7 Messidor an 7 (25 juin 1799), Bonaparte prescrit à Berthier de prélever pour le Régiment des Dromadaires 15 hommes sur chacun des Dépôts des 21e Légère, 61e et 88e de Ligne; ces 45 hommes sont destinés à "compléter l'escadron qui est formé" (La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 5, p. 205).
Le 26 juin 1799 (8 messidor an 7), le Général Bonaparte écrit depuis son Quartier général au Caire au Général Marmont : "... Le général Destaing est arrivé à Rahmanieh ; il a mené avec lui un bataillon de la 61e, le général Lanusse y avait envoyé un bataillon de la 4e. Le chef de la 4e est parti avant-hier avec un autre bataillon. Ainsi, il ne manque pas de forces pour faire payer les contributions et dissiper les rassemblements ..." (Correspondance inédite et confidentielle de Napoléon, t. 5; Panchoucke : « Oeuvres de Napoléon Bonaparte », 1821-1822, t. 3, p. 80 ; Oeuvres complètes de Napoléon, Stuttgart et Tubingue, 1822, t.3, p. 205 ; Correspondance de Napoléon, t.5, lettre 4220; Correspondance générale, t.2, lettre 4470; La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 5, p. 200).
Jusqu'au mois de juillet, le 3e Bataillon de la 61e est au Caire. Le 2e Bataillon tient garnison à Keneh pendant quelque temps et se rend ensuite à Alexandrie. Il ne reste dans la Haute-Egypte, à Siout, que le 1er Bataillon, sous les ordres de Friant.
Le 14 Messidor an 7 (2 juillet 1799), Bonaparte écrit, depuis Le Caire, au Général Desaix : "… Il est indispensable que vous fassiez partir tout de suite pour le Caire tous les escadrons ou hommes montés des 7e de hussards, 3e, 14e et 15e de dragons. Gardez avec vous tous les hommes du 22e de chasseurs et du 20e de dragons. Il me paraît qu'il se trame quelque chose dans le Bahhireh …
On vous envoie tout ce qui reste du 22e de chasseurs et du 20e de dragons. Il part également une centaine d’hommes de votre division qui vont vous rejoindre. Si vous pouvez vous passer du bataillon de la 61e, envoyez-le ici …" (Correspondance inédite officielle et confidentielle de Napoléon, t.6, Egypte ; Panckoucke : « Œuvres de Napoléon Bonaparte », 1821-1822, t. 3, p. 94 ; Œuvres complètes de Napoléon, Stuttgart et Tubingue, 1822, t.3, p. 217 ; Correspondance de Napoléon, t.5, lettre 4243 ; Correspondance générale de Napoléon, t.2, lettre 4505; Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 5, p. 288).
Le 21 Messidor an 7 (9 juillet 1799), Bonaparte écrit, depuis sons Quartier général, au Caire, au Général Desaix : "... Si vous pouvez vous passer d'un bataillon, envoyez-moi celui de la 61e, afin de réunir et de réorganiser cette demi-brigade ; comme les deux bataillons sont déjà en bas, je réunirai tous les trois à Rosette …" (Correspondance de Napoléon, t.5, lettre 4261 ; Correspondance générale de Napoléon, t.2, lettre 4567; La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 5, p. 303).
Le même 9 juillet 1799 (21 Messidor an 7), Bonaparte écrit, depuis son Quartier général, au Caire, au Général Marmont, à Alexandrie : "… je donne des ordres pour qu'on relève le bataillon de la 85e; ainsi je désire que vous l'envoyiez à EI-Rahmânyeh, et celui de la 61e à Rosette; celui de la 75e se rendra incessamment, en droite ligne, à Damiette, lorsqu'il sera relevé" (Correspondance de Napoléon, t.5, lettre 4262 ; Correspondance générale de Napoléon, t.2, lettre 4573; La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 5, p. 303).
Le 11 juillet, le Pacha de Roumélie, Mustapha, arrive dans la rade d'Aboukir avec une armée de 15,000 hommes, transportée par 100 vaisseaux.
Bonaparte se porte contre lui et réunit, le 21, à Ramanieh, tout ce que l'Armée d'Egypte a de troupes disponibles (deux Divisions).
Le 1er Bataillon de la 61e continue à garder la Haute-Egypte. Les deux autres Bataillons font partie de la Division Lanusse (Brigade Destaing).
- Première Bataille d'Aboukir.
Le 4 Thermidor an 7 (22 juillet 1799), Berthier, depuis El-Rahmânieh, ordonne au Commandant du fort d'El-Rahmânieh : "Le commandant du fort d'El-Rahmânieh est prévenu que l'armée se met en mouvement ce soir à 2 heures.
La garnison du fort d'El-Rahmânieh reste composée jusqu'à nouvel ordre des détachements de la 4e légère, des 61e et 75e, qui y sont, de tous les hommes hors d'état de marcher des divisions de l'armée.
Il est expressément ordonné au commandant du fort d'El-Rahmânieh de ne pas laisser partir des détachements, ou escortes de convois, d'El-Rahmânieh pour rejoindre l'armée, qu'ils ne soient d'au moins 150 hommes.
Il lui est ordonné de prévenir tous les corps de troupe, tant de cavalerie que d'infanterie, qui arriveraient à El-Rahmânieh, qu'ils doivent y prendre des vivres pour quatre jours et continuer leur route pour rejoindre l'armée à Berket, route d'Alexandrie, ou au-delà, si elle avait fait un mouvement.
Vous présenterez aux corps de troupe qui arriveraient à El-Rahmànieh l'ordre général ci-inclus :
Ordre aux commandants de troupes de cavalerie ou d'infanterie qui arriveraient à El-Rahmânieh. - Le général en chef ordonne aux commandants de corps de troupe, tant de cavalerie que d'infanterie, qui arriveraient à El Rahmânieh, d'y prendre des vivres pour quatre jours et de continuer leur roule pour rejoindre l'armée. Si cependant quelques corps n'étaient pas au nombre de 150 hommes, ils attendraient l'arrivée des premières troupes qui les porteraient à ce nombre" (La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 5, p. 375).
Le 5 thermidor (23 juillet), Dugua écrit à Bonaparte : "Je reçois à l'instant, Général, votre lettre du 3 du courant ... Je vais passer la revue, que vous me prescrivez, des dépôts des 18e, 32e, 13e et 69e, et je vous enverrai tout ce que je trouverai disponible. Le chef de bataillon Faure est rentré hier à Gizeh de sa tournée dans le nord de cette province et partira avec les canonniers que vous demandez ..." (La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 5, p. 391
Le 24 juillet 1799 (6 Thermidor an 7), Bonaparte fait écrire, depuis son Quartier général, à Alexandrie, au Général Marmont : "Le général en chef ordonne au général Marmont de faire partir aujourd'hui à midi le bataillon de la 61e demi-brigade et un de la 75e, avec des vivres pour cinq jours et 60 cartouches par homme, pour se rendre au puits entre Aboukir et Alexandrie, où ils seront aux ordres du général Destaing …" (Correspondance de Napoléon, t.5, lettre 4308; La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 5, p. 397).
Le même 6 Thermidor an 7 (24 juillet 1799), Bonparte écrit, depuis le camp du puits de la Maison Carrée entre Aboukir et Alexandrie, au Général Berthier, Chef de l'Etat-major général de l'Armée d'Orient : "Vous voudrez bien donner l'ordre au général Marmont de faire partir le bataillon de la 61e [de ligne], qui est à Alexandrie, pour rejoindre l'armée. Il aura pour quatre jours de vivres et 60 cartouches par homme. Il le fera partir de manière qu'il arrive à la pointe du jour" (Correspondance générale de Napoléon, t.2, lettre 4646).
Cet ordre est transmis par Berthier le soir à 19 heures : "En conséquence des ordres du général en chef, vous voudrez bien, Citoyen Général, faire partir le bataillon de la 61e qui est à Alexandrie pour rejoindre l'armée; il partira de manière qu'il arrive avant la pointe du jour. Ce bataillon prendra des vivres pour quatre jours, et 50 cartouches par homme" (La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 5, p. 400). La réponse de Marmont, datée également du 6 Thermidor (24 juillet), porte : "Je reçois dans l'instant votre lettre de ce soir. Les ânes et les chameaux que vous m'annoncez ne sont pas encore arrivés; aussitôt qu'ils seront ici, ils repartiront chargés des munitions que vous demandez. Six chameaux, que j'ai découverts partent cette nuit avec le citoyen Faultrier, chargés de munitions. Six barques et un canot partiront dans trois heures avec le citoyen Jugant et vous porteront le mortier, les bombes et autres munitions, qui doivent vous être envoyés par mer. Le bataillon de la 61e sera en route dans une heure.
J'espère enfin que vos ordres seront exécutés ponctuellement, et que toutes ces munitions vous arriveront promptement" (La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 5, p. 399).
Le même jour, 24, dans l'après-midi, le Quartier général de Bonaparte est transporté près du camp des Romains, à l'est d'Alexandrie.
Berthier écrit également à l'Ordonnateur en chef : "L'intention du général en chef est, Citoyen Ordonnateur, que l'on décharge l'eau-de-vie à la maison qui a été désignée pour l'ambulance et le dépôt général;
Que l'on décharge également 10 des 20 chameaux qui sont venus chargés d'eau, et que l'on mette ces 10 chameaux, ainsi que ceux chargés d'eau-de-vie, à la disposition du commandant d'artillerie.
Je vous préviens que le bataillon de la 61e qui est à Alexandrie doit rejoindre l'armée et prendre pour quatre jours de vivres" (La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 5, p. 400).
Mustapha s'est emparé du fort d'Aboukir et a pris position dans la presqu'île. Un millier de ses soldats occupent un mamelon appelé la montagne du Cheick. Ils sont soutenus, à 200 mètres de distance, par une réserve de l,200 hommes. Le reste de l'armée turque "occupe une position formidable" depuis la mer jusqu'au lac Madieh, que garnissent de nombreuses canonnières. Le village d'Aboukir a été crénelé et barricadé.
Le 25, les troupes déjà réunies se mettent en mouvement, à la pointe du jour; l’avant-garde est commandée par le Général Murat, ayant à ses ordres 400 hommes de cavalerie, et le Général de Brigade Destaing, avec quatre Bataillons : 1 de la 75e (le 3e venu d'Alexandrie), 2 de la 61e (dont un de la garnison d'Alexandrie et un parti du Caire à la fin de juin) et 1 de la 4e Légère (La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 5, p. 406).
La bataille commence vers sept heures du matin. "Avec la rapidité de la pensée", ainsi que le dit Bonaparte dans son rapport, les défenseurs de la montagne du Cheick sont attaqués à la baïonnette par la Brigade Destaing et sabrés par la cavalerie de Murat. "Pas un n'échappe. Si c'eût été une armée européenne, dit Bonaparte, nous eussions fait 3,000 prisonniers; ici ce furent 3,000 morts" (Pièces diverses et Corresp., p. 119).
"Le général Destaing dirigea sa marche en colonne vers la droite de l'ennemi, en longeant la mer, et avec un détachement du 7e de hussards et du 22e de chasseurs à cheval. Il déborda les postes avancés de la droite de l'ennemi, mal retranchés sur quatre mamelons de sable; il enleva ces postes de vive force, et la retraite leur fut coupée par les troupes légères à cheval, qui les sabrèrent" (Notes conservées dans les papiers de Theviotte, in La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 5, p. 409).
Les deux Bataillons de la 61e se portent ensuite contre le village et le tournent. Toute l'armée française entre en ligne et la lutte est extrêmement vive. Enfin, le village est emporté, ainsi qu'une redoute placée au centre de la seconde ligne. Mustapha est fait prisonnier et ses soldats sont mitraillés à bout portant en cherchant, mais en vain, à se rembarquer sur leurs chaloupes.
Le désastre de l'armée turque est absolu. Les Français, de leur côté, perdent neuf cents hommes. La 61e Demi-brigade compte pour sa part, une trentaine de tués et un nombre à peu près double de blessés, parmi lesquels le Capitaine Bodelin, le Sous-lieutenant Duveaux et les Sergents Fouquet et Morin.
- Reprise du fort d'Abouklr.
Le fort d'Aboukir a reçu une garnison de 1.200 hommes et recueilli près de 3.000 fuyards. Bonaparte en fait commencer le siège, le 26 juillet. Les Turcs, privés de vivres, se défendent énergiquement. L'armée française repousse pendant six jours toutes leurs sorties.
Le 9 Thermidor an 7 (27 juillet 1799), Bonaparte écrit, depuis son Quartier général, devant Aboukir, au Général Berthier, Chef de l'Etat-major général de l'Armée d'Orient : "... Vous donnerez l'ordre au général Destaing de partir de suite pour faire la tournée de la province de Bahireh et achever la levée des impositions. Il prendra avec lui un bataillon de la 61e [de ligne] …
Vous lui ferez connaître que mon intention est qu'il laisse toujours en permanence une garnison à Berket" (Correspondance générale de Napoléon, t.2, lettre 4653; La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 5, p. 428).
Le 2 août, lorsque le fort d'Abooukir n'est plus qu'un monceau de ruines, la garnison jette ses armes et se rend. On trouve dans la place 1.800 cadavres et 300 blessés. Il est fait 2.000 prisonniers dont 400 meurent le même jour pour avoir mangé trop avidement.
Le Commandant Boieldieu, de la 61e, se distingue par sa bravoure.
Le 1er août 1799 (14 thermidor an 7), le Général Bonaparte écrit depuis son Quartier général à Alexandrie, au Général Berthier, Chef de l'Etat-major général de l'Armée d'Orient : "... La 69e demi-brigade [de ligne], la 2e d'infanterie légère, les deux bataillons de la 61e [de ligne] tiendront garnison dans l'arrondissement d'Alexandrie. Par là, le général Marmont pourra placer 2 bataillons à Aboukir, un à Rosette, un ou deux dans le Bahireh et 3 ou 4 à Alexandrie.
... Il sera en outre laissé cinq pièces de 3 ou 4, qui seront données à chacun des bataillons de la 69e et de la 61e, pour servir de pièces de bataillon, conformément à l'ordre du jour" (Correspondance générale, t.2, lettre 4662; La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 5, p. 451).
Le 24 Thermidor an 7 (11 août 1799), Bonaparte écrit, depuis son Quartier général, au Caire, au Général Berthier, Chef de l'Etat-major général de l'Armée d'Orient : "Vous donnerez l'ordre au chef de brigade, au bataillon de la 61e [de ligne] et à tous les détachements de ce corps qui se trouvent dans les provinces de la haute et moyenne Égypte de s'embarquer sur le Nil, pour se rendre le plus tôt possible à El-Rahmânieh, où le général Marmont sera chargé de mettre cette demi-brigade à la nouvelle organisation.
Vous donnerez l'ordre au chef de brigade Morand de se rendre de suite au quartier général" (Correspondance générale de Napoléon, t.2, lettre 4691; La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 5, p. 544).
Le même 24 Thermidor an 7 (11 août 1799), Bonaparte écrit, depuis Le Caire, au Général Desaix : "… Je vous ai demandé le bataillon de la 61e, afin de reformer cette demi-brigade et de lui donner quelques jours de repos à Rosette. Dès l'instant que vous serez venu à bout de Mourad-Bey, je ferai relever toutes vos troupes. Je prépare, à cet effet, la 13e et une autre demi-brigade. Je serais d'ailleurs fort aise d'avoir vos troupes s'il arrivait quelque événement, ou sur la lisière de la Syrie, ou sur la côte …" (Correspondance inédite officielle et confidentielle de Napoléon, t.6, Egypte ; Panckoucke : « Œuvres de Napoléon Bonaparte », 1821-1822, t. 3, p. 136 (la lettre est datée du 12 août 1799 – 25 thermidor an 7) ; Œuvres complètes de Napoléon, Stuttgart et Tubingue, 1822, t.3, p. 261 (idem) ; Correspondance de Napoléon, t.5, lettre 4341 ; Correspondance générale de Napoléon, t.2, lettre 4695; La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 5, p. 541).
Le 26 Thermidor an 7 (13 août 1799), Desaix écrit à Bonaparte : "… J'envoie au Caire, mon Général, le chef de brigade Conroux avec tous les hommes de ses 1er et 2e bataillons; cet officier a très bien servi, j'ai à m'en louer; il est actif et intelligent, un peu dégoûté, mais je lui rends bien justice : quand il y est, il fait tout ce qu'on peut faire" (La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 5, p. 502).
De son côté, pendant les trois dernières journées passées au Caire, Bonaparte s'occupe de l'habillement de l'armée. La pratique ayant fait ressortir les inconvénients de la toile, qui a été adoptée l'année précédente, il est décidé que les soldats recevront des effets de drap. Les quantités allouées sont ainsi fixées par un supplément à l'Ordre du jour de l'armée du 28 Thermidor (15 août) :
"BONAPARTE, Général en chef, ORDONNE :
Article Ier. - Il sera accordé aux différents corps de l’armée un nombre d'habillements complets en drap pour l'an VIII, conforme à l'état ci-dessous.
II. - Etant impossible de se procurer la quantité de drap bleu nécessaire, il sera réservé pour l'artillerie et les sapeurs;
Le drap vert, pour la cavalerie;
Le rouge, noir, gris, puce, etc. pour l’infanterie.
III. - L'ordonnateur fera connaître à l'ordre de demain la couleur du drap dont sera habillée chaque demi-brigade : il aura soin que les couleurs nationales se trouvent sur chaque uniforme.
Tableau de ce qui est accordé à chaque corps ...
IV 61e de ligne 2000 ...
V. - Lorsque les draps de cette quantité d'habillements auront été distribués, il sera accordé un supplément aux corps qui n'en auraient pas eu assez : ils enverront, à cet effet, leurs réclamations à l'ordonnateur en chef.
VI. - L'ordonnateur en chef me fera un rapport particulier sur l'habillement de la cavalerie : les hommes de cette arme qui ont été habillés l'année dernière ne le seront pas cette année" (La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 5, p. 562 - Note : Ces couleurs sont fixées seulement par l'ordre du jour du 9 Vendémiaire an 8 (1er octobre 1799) - voir partie uniformes).
Desaix écrit, depuis Siout, le 2 Fructidor an 7 (19 août 1799), à Bonaparte : "… Le bataillon de la 61e partira dans quatre ou cinq jours. Il y a des détachements de ce corps vers Girgeh; je les fais venir; ils rejoindront tous ensemble leur demi-brigade ..." (La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 5, p. 510).
Desaix écrit, depuis Siout, le 4 Fructidor an 7 (21 août 1799), à Bonaparte : "… Je vous enverrai au premier jour les détachements de la 61e; vous les demandez, ils partiront de suite; j'en aurais eu besoin pour l'expédition d'El-Ouah; mais vous les voulez, ils partiront aussitôt. J'attends le général Friant ; alors nous pourrons faire quelque chose" (La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 5, p. 512).
Après la bataille d'Aboukir, Bonaparte reçoit la nouvelle des revers subis en Italie par les troupes françaises. Il quitte furtivement l'Egypte, dans la nuit du 22 au 23 août, et se rend à Paris. Le Général Kléber le remplace.
Desaix écrit le 8 Fructidor an 7 (25 août 1799), à Bonaparte : "... Je vous renvoie toujours le bataillon de la 61e. Il partira demain ou après. Les barques réunies, il voyagera de suite. Vous aimez à être obéi. Je ne balance pas, et vous renvoie malgré le besoin que j'en ai" (La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 5, p. 512).
Le 27 août 1799 (10 Fructidor an 7), Desaix écrit encore à Bonaparte : "… Le général Belliard m'annonce que les Anglais ont paru avec deux frégates à Kosseir; il y a été lui-même avec 200 hommes pour vérifier le fait et secourir ce point, s'il est nécessaire . Je chercherai à organiser toute cette partie et la mettre sur un bon pied; j'organiserai les dromadaires, et nous chasserons vivement Hassan-Bey, les Arabes et presserons tant que nous pourrons pour nous défaire de tous nos ennemis ... Je vous envoie toujours le bataillon de la 61e; il nous serait peut-être nécessaire pour Kosseir; mais vous le désirez; je crains trop de vous désobéir pour le garder. Les barques sont prêtes; il descendra incessamment" (La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 5, p. 512).
Au mois de septembre, les trois Bataillons de la 61e se réunissent au Caire. Cette Demi-brigade a tellement souffert, que sa réorganisation est de toute nécessité.
- Défense au boghaz de Damiette.
Des négociations pour la paix sont entamées avec le Grand Vizir et le commodore Sydney-Smith, représentant de l'Angleterre. Pendant qu'elles se poursuivent, 7.000 Janissaires débarquent, le ler novembre, dans le boghaz de Damiette. Le Général Verdier, gouverneur d'Alexandrie, les attaque avec un millier d'hommes et les force à se rembarquer.
Un Bataillon de la 61e est mis, le 4 novembre, à la disposition du Général Verdier. Le 27, ce Bataillon retourne au Caire. A la même date, le 3e Bataillon se rend à Beni-Souef, où il passe sous les ordres du Général Belliard.
- Convention d'El-Arlsh.
Le 8 janvier 1800 (18 Nivôse an 8), Davout écrit, depuis le camp de Belbia, à l’Adjudant-général Boyer : "Je suis ici, mon camarade, avec le 22e de chasseurs, les 3e et 4e de dragons, la 61e demi-brigade et seize pièces d'artillerie. Dans le cas où la suspension d'armes n'aurait pas lieu et qu'une colonne de Turcs, en évitant Catich-Hallahich, vînt de ces côtés, - soit qu'elle ait l'intention de se porter ici ou sur vous, - je marcherai sur elle.
Je vous invite, mon camarade, à me faire connaître ce qui pourra venir à votre connaissance sur l'armée du grand-vizir, qui, comme vous en êtes sans doute déjà instruit, s'est emparée d'El Ahrish le 9 de ce mois, après un siège de huit jours ; mais son armée, au lieu· d'exécuter la capitulation et de laisser sortir et retirer tranquillement sur Kadish les Français qui défendaient le fort, s'est rejetée sur cette malheureuse garnison, qui a été assassinée, à l'exception d'une centaine d'hommes que l'on a faits prisonniers. Un soldat de cette garnison, voyant cette infâme trahison, a été mettre le feu au magasin à poudre et a donné la mort, par ce généreux dévouement, à plus de deux mille de ces brigands, qui, par leur conduite, ont appris à ceux d'entre nous qui seraient assez lâches pour se rendre dans les combats que nous pourrons avoir avec eux, le sort qui nous est réservé.
Le chef de bataillon Grandpéré a été du nombre des assassinés ; les Turcs ont poussé la cruauté, auparavant de lui couper la tête, jusqu'à lui faire faire plusieurs fois le tour du fort entièrement nu et en le frappant à chaque pas ; quelques autres officiers des plus distingués de cette garnison ont eu un pareil sort. Le commandant de place, M. Cazal, n'a pas été assez heureux pour avoir ce traitement : il a survécu à son déshonneur. Lorsque cet officier a pris sur lui de capituler, le fort était encore sans brèche, et il n'avait eu que vingt hommes tués ou blessés depuis le commencement du siège. Les Turcs n'auraient peut-être jamais pu parvenir à faire une brèche, puisqu'ils n'avaient que du 8, du 3 et du 5.
Le général en chef est toujours au Caire ; je pense qu'il ne viendra ici qu'autant que la suspension d'armes n'aurait pas lieu.
J'enverrai des reconnaissances au puits de El Babiar, par où les Turcs pourraient passer dans le cas où ils voudraient aller d'El Ahrich à Suez, afin de pouvoir marcher sur eux dans le cas où ils feraient ce mouvement, chose que je ne crois pas, car il leur faudrait trop de moyens de transport (objet qui leur manque) pour faire cette hasardeuse expédition" (Blocqueville A. (de) : « Le Maréchal Davout, prince d'Eckmühl, raconté par les siens et par lui-même », 1879-1880, t. 1, p. 336).
Les efforts de Kléber aboutissent à une suspension d'armes, qui se complète elle-même, un mois après, par la convention d'El-Arish, aux termes de laquelle l'évacuation de l'Egypte est admise.
En attendant leur départ pour la France, les deux premiers bataillons de la 61e sont envoyés d'abord à Belbeis, puis à Salahieh (17 janvier).
Jusqu'au mois de mars, la paix n'est troublée que par les excès de quelques fanatiques. Aux termes de la convention, la plupart des garnisons françaises du Delta sont remplacées par des troupes turques. Les deux premiers Bataillons de la 61e retournent au Caire.
- Reprise des hostilités.
Le 14 mars, alors que Kléber est à la veille de livrer le Caire à une armée turque que commande le Grand Vizir, on apprend, non sans stupeur, que le Cabinet britannique a désavoué la convention d'El-Arish.
A l'outrage qui lui est fait, Kléber répond par des apprêts de bataille. Il rappelle le Général Belliard, et dans la nuit du 19 au 20 mars toute l'armée française (14.000 hommes) se forme en quatre carrés, dans la plaine de la Coubbé, sous les murs du Caire (les troupes de la Haute-Egypte ont marché nuit et jour pour arriver plus vite).
Les 61e et 75e Demi-brigades constituent l'un de ces carrés, sous les ordres des Généraux Friant et Donzelot.
- Bataille d'Héliopolis.
L'armée turque, forte d'environ 60,000 hommes, occupe le village d'El Matarieh par une avant-garde de 6,000 Janissaires, dont les postes s'étendent depuis le Nil jusqu'à la mosquée de Sidi Yalem. Le camp du Grand Vizir est établi entre les villages d'El Kânqah et d'Abou-Zaabel. Kléber parcourt les rangs de sa petite troupe. "Mes amis, dit-il à ses soldats, vous ne possédez plus en Egypte que la terre qui est sous vos pieds; si vous reculez, vous êtes perdus !" Et ces paroles du Général en chef trouvent d'autant plus d'écho, que chacun est déjà complètement pénétré de la nécessité de vaincre.
Vers trois heures du matin, l'armée française se met en mouvement. La Brigade Donzelot, placée à l'aile droite, arrive au point du jour près de la mosquée de Sidi Yalem. Un poste de 600 cavaliers est mis en fuite à coups de canon. La Brigade continue sa route et se place entre les ruines d'Héliopolis et le village d'El Matarieh, que les deux carrés de la Division Reynier attaquent de front.
Pendant que ce mouvement s'exécute, toute l'armée turque se porte en avant et vient prendre position entre les villages d'El Merg et de Seriâqous.
Les Tirailleurs ennemis sont d'abord repoussés et le camp du Grand Vizir reçoit quelques boulets. Puis l'action s'échauffe et la canonnade devient terrible. Tandis que les troupes de la Division Reynier s'emparent d'El Matarieh dans une épouvantable lutte corps à corps, celles du Général Friant sont assaillies, près d'El Merg, par une quantité innombrable de cavaliers. Les soldats de la 61e ont assez de sang froid pour ne tirer qu'à bout portant. L'artillerie fait d'autre part de tels ravages dans les rangs ennemis, que le champ de bataille est bientôt couvert de morts.
Le Grand Vizir offre la paix en y mettant pour condition l'évacuation du Caire. Kléber la refuse et se porte sur El-Kanqâh. Vers le soir, l'armée ottomane est en pleine déroute, après avoir perdu près de 9.000 hommes, son artillerie et tous ses bagages. Les Français ne comptent que 150 hommes mis hors de combat. De ce nombre est le Chef de Brigade Conroux (François Conroux, né à Besançon le 8 octobre 1772, entre au service comme canonnier en 1788, Sous-lieutenant en 1792, Capitaine en 1794 et Chef de Bataillon en 1796, était le frère du Général Conroux avec lequel on l'a souvent confondu). Le Commandant Dorsenne le remplace avec le titre de Chef de Brigade provisoire.
"… Au milieu de la nuit suivante je me rendis, accompagné des guides de l’armée, et de mon état-major, dans la plaine de la Coubé, où se trouvait déjà une partie des troupes ; les autres arrivèrent successivement et se rangèrent en bataille.
… La ligne de bataille était composée de quatre carrés ; ceux de droite obéissaient au général Friant, ceux de gauche au général Régnier. L'artillerie légère occupait les intervalles d'un carré à l'autre, et la cavalerie en colonne, dans l'intervalle du centre, était commandée par le général Leclerc : ses pièces marchaient sur ses flancs, et étaient soutenues par deux divisions du régiment des dromadaires.
Derrière la gauche, en seconde ligne, était un petit carré de deux bataillons : l'artillerie de réserve, placée au centre, était couverte par quelques compagnies de grenadiers, et les sapeurs armés de fusils ; d'autres pièces marchaient sur les deux côtés du rectangle, soutenues et flanquées par des tirailleurs ; enfin des compagnies de grenadiers doublaient les angles de chaque carré, et pouvaient être employées pour l'attaque des postes. La première brigade de la division Friant était commandée par le général Belliart, et formée de la 21e légère et de la 88e de bataille ; les 61e et 75e de bataille formaient la deuxième brigade aux ordres du général Donzelot ...
… Vers les trois heures du matin, j'ordonnai que l'armée se mit en marche. L'aile droite arriva au point du jour près la mosquée Sibelli Hallem … les deux carrés de gauche arrivèrent devant le village de Matariéh, s'y arrêtèrent hors de portée de canon et donnèrent le temps à la division de la droite de venir se placer entre Héliopolis, et le village d'el-Marek, afin de s'opposer à la retraite des troupes ennemies et à l'arrivée des renforts que l'ennemi pouvoir envoyer.
Tandis que ce mouvement s'exécutait, je distinguais un corps de cavalerie et d'infanterie turque, uni à une forte troupe de Mamloùks, qui, après avoir fait un grand détour dans les terres cultivées, se dirigeaient vers le Caire : les guides eurent ordre de les charger; ceux-ci acceptèrent la charge·; et, renforcés successivement par de nouvelles troupes, ils enveloppèrent les nôtres : l'issue de cette mêlée nous eût été funeste, si le 22e régiment de chasseurs, et le 14e régiment de dragons ne se fussent portés aussitôt pour soutenir 1'action : après un combat long et opiniâtre, l'ennemi prit la fuite …
Le général Régnier commença l’attaque de Matariéh ; des compagnies de grenadiers, mises en réserve pour cet objet, reçurent l'ordre d'emporter les retranchements, et l'exécutèrent avec une bravoure digne des plus grands éloges. Tandis qu'ils s'avançaient au pas-de-charge, malgré le feu de l'artillerie ennemie, on vit les janissaires sortir de leurs retranchements, et courir, l'arme blanche à la main, sur la colonne de gauche; mais ils n'y rentrèrent plus : arrêtés de front par le feu vif et soutenu de cette colonne, une grande partie tombe sur la place ; le reste, pris en flanc par la colonne de droite, et bientôt attaqué de toute part, périt sous la baïonnette : les fossés, comblés de morts et de blessés, n’empêchent plus de franchir les retranchements; drapeaux, pièces d'artillerie, queues de pâchâs, effets de campement, tout reste en notre pouvoir; une partie de leur infanterie se jette dans les maisons à dessein de s'y défendre ; on ne leur laisse pas le temps de s'y établir, ils y sont tous égorgés, livrés aux flammes ; d’autres, essayant de sortir du village de Matariéh, tombent sous le feu de la division Friant ; le reste est tué ou dispersé par une charge de cavalerie.
… L'armée avait éprouvé de grandes fatigues dans cette journée ; elle prit quelque repos … aussitôt après que j’eus donné les ordres pour le départ du lendemain, le silence de la nuit me permit d’entendre le canon qui se tirait au Caire. J’avais laissé dans cette ville la 32e de bataille et des détachements de différents corps, ce qui formait deux mille hommes environ ; prévoyant qu'une émeute générale menaçait ces troupes, j'avais ordonné qu'elles se retirassent dans les forts ; et le général Verdier, à qui j'en avais laissé le commandement, avait pris pour instruction de se borner à maintenir les communications entre la ferme d'Ibrâhim-bey, la citadelle, et le fort Camin … je crus nécessaire d’envoyer du renfort, et le général Lagrange reçut ordre à êl-Hanka de s’y porter avec quatre bataillons, deux de la 25e, un de la 64e (61e ?), et un de la 75e. Il partit vers minuit …
Pendant que cela se passait, la cavalerie du général Leclerc battait l'estrade sur la route de Salêhié, et dans l'intérieur des terres, afin de reconnaitre s'il ne s'y était point jeté quelques partis. Le 17e régiment de hussards ramena, le premier au matin, quarante-cinq chameaux avec leurs conducteurs … Jugeant donc que l'armée ottomane était considérablement diminuée, tant par la perte essuyée dans la bataille que par la séparation des troupes qui occupaient le Caire, j'ordonnai au général Friant de marcher sur cette ville avec le général Donzelot, et cinq bataillons, dont deux de la 61e, deux de la 75e, un de la 25e, quelques pièces de l'artillerie légère, et un détachement de cavalerie ..." (RAPPORT fait au Gouvernement français par le général Kléber sur les événements qui se sont passés en Egypte depuis la conclusion d'êl-A'rych jusqu’à la fin de prairial an 8 (note : 19 juin 1800) - Pièces diverses et correspondances relatives aux armées d’orient.)
- Seconde Insurrection du Caire.
Pour marcher contre le Grand Vizir, Kléber n'a laissé au Caire que la 32e et quelques détachements des différents corps. Pendant la bataille d'Héliopolis une insurrection, formentée par Ibrahim-bey et le pacha turc Nassif, éclate dans la ville. Au bruit du canon qui lui parvient jusqu'à El Kanqâh, Kléber juge du danger que court la garnison . Il la fait aussitôt secourir par 4 Bataillons, dont un de la 61e, qui partent à minuit, sous les ordres du Général Lagrange.
Le lendemain, la poursuite du Grand Vizir continue. Mais à Belbeïs l'armée ottomane n'a plus aucune consistance. Les deux autres Bataillons de la 61e retournent au Caire avec le Général Friant et trois Bataillons des 25e et 75e.
- Reprise du Caire.
La révolte est encouragée, le 20, par l'arrivée de 12.000 cavaliers de l'armée du Grand Vizir. Elle prend en quelques instants, des proportions effrayantes. Pendant deux jours, le quartier franc est entièrement dévasté et les commerçants qui l'habitent sont mis à mort. La garnison ne cède le terrain que pied à pied et se retire dans la citadelle.
Le 22 au soir, le Général Lagrange est attaqué, sous les murs du Caire, par 4.000 cavaliers de Nassif-pacha. Il forme sa troupe en carré et se fait jour jusqu'à la citadelle, où il apporte à la fois la nouvelle de la victoire d'Héliopolis et l'espérance de nouveaux secours.
Jusqu'au 26, la lutte se poursuit avec acharnement. Le Général Friant rejette dans la ville tous les séditieux qui essaient d'en sortir, mais il ne peut pénétrer dans les rues où l'on rencontre, presqu'à chaque pas, des barricades de douze pieds de maçonnerie à deux rangs de créneaux. Il parvient cependant à arrêter les progrès des Turcs en faisant mettre le feu aux maisons qui avoisinent le Quartier général.
La 61e témoigne d'une grande bravoure dans les combats de tous les instants qu'elle livre pendant cinq jours. Le Général Friant la signale d'une façon toute particulière a l'attention du Général en chef.
"… Le principal but de Nasif pâchâ était d'emporter le quartier général, mais il ne put réussir; 200 Français soutinrent pendant deux jours ce siège extraordinaire … lorsqu'on aperçut la colonne du général Lagrange qui arrivait d'Elhanka … Le général Friant arriva sur ces entrefaites avec cinq bataillons … Les chefs de brigade Maugras, de la 75e, et Conroux, de la 61e, furent blessés dans une des premières attaques de ces retranchements : ce dernier officier, qui mourut de sa blessure, était de la plus grande espérance ..." (RAPPORT fait au Gouvernement français par le général Kléber sur les événements qui se sont passés en Egypte depuis la conclusion d'êl-A'rych jusqu’à la fin de prairial an 8 (note : 19 juin 1800) - Pièces diverses et correspondances relatives aux armées d’orient).
Le 26, les dernières troupes de l'Armée d'Egypte arrivent devant Le Caire. En attendant les munitions qui lui sont envoyées d'Alexandrie, Kléber jette la discorde dans le camp de ses ennemis et reste sur ses positions.
"… je partis de Salêhié le 3 au soir, et je me rendis au Caire avec la 88e demi-brigade, deux compagnies de grenadiers de la 61e, le 7e régiment de hussards, et les 3e et 14e de Dragons … C'est alors que j'appris ce qui s'était passé dans la capitale ..." (RAPPORT fait au Gouvernement français par le général Kléber sur les événements qui se sont passés en Egypte depuis la conclusion d'êl-A'rych jusqu’à la fin de prairial an 8 (note : 19 juin 1800) - Pièces diverses et correspondances relatives aux armées d’orient).
Jusqu'au 15 avril, la place est resserrée de tous les côtés.
Friant investit Boulâq et somme ce faubourg d'ouvrir ses portes. Une fusillade nourrie est la seule réponse des insurgés. Alors le Général, outré, ne les ménage plus; le faubourg est emporté par la 61e et tout est brûlé ou mis en pièces.
L'assaut de la ville est retardé jusqu'au 18 par une pluie continuelle. Enfin, dans la soirée du 18 au 19, à un signal donné, l'attaque commence de toutes parts. La Brigade Donzelot, dont la 61e fait partie, se porte avec fureur contre les Ottomans qui sont culbutés jusque sur la place Esbekieh. Leurs efforts désespérés ne peuvent triompher de la vigoureuse impulsion des troupes françaises. D'un autre côté, les Cheiks, qui n'ont jamais cessé d'être en relation avec Kléber, insistent sur les dangers d'une plus longue résistance.
"… Une fois maître de Boulac, et voulant presser continuellement l'ennemi, le général en chef fit préparer pour le lendemain l'attaque générale du Caire ; elle ne put cependant avoir lieu que le vingt-huit ...
… la division du général Friant formait la droite et le centre ; le général Donzelot dirigeait l'attaque de droite où Se tenait le général Friant ; elle était composée de détachements des 61e, 75e, et 88e demi-brigades ..." (RAPPORT fait au Gouvernement français par le général Kléber sur les événements qui se sont passés en Egypte depuis la conclusion d'êl-A'rych jusqu’à la fin de prairial an 8 (note : 19 juin 1800) - Pièces diverses et correspondances relatives aux armées d’orient)
Mourad-bey avait fait sa soumission et était devenu, comme il le disait lui-même, un Sultan des Français. Ses envoyés se joignent aux Cheiks, mais Nassif-pacha et Ibrahim-bey ne veulent livrer la ville qu'à des conditions inacceptables. La fusillade continue pendant toute la nuit avec une intensité sans égale. Au point du jour seulement, l'armée turque capitule et se retire à Salahieh, d'où elle retourne en Syrie.
La reprise du Caire, qui redonne l'Egypte à Kléber, coûte à la 61e une cinquantaine de tués, parmi lesquels le Sergent-major Devoigne et les Sergents Demardy, Artiges, Cornet et Amanaux. Le Sous-lieutenant Duveaux est au nombre des blessés, dont le chiffre est de 150 environ.
Le pays redevient tranquille, mais Kléber ne se fait aucune illusion sur le peu de durée de sa conquête. Mourad-bey, qui a reçu le commandement de la haute Egypte reste fidèle à son serment de servir la cause des Français.
Le 13 juin, Kléber est assassiné par un fanatique et le commandement de l'armée passe entre les mains du Général Menou.
Au commencement de septembre, la Division Friant remplace sur la côte celle du Général Lanusse. La 61e est envoyée à Alexandrie.
Dès le mois de janvier 1801, une armée anglaise erre sur les mers en attendant une occasion de secourir les Turcs. Au mois de mars, 6.000 Albanais et Janissaires quittent Constantinople, sous la conduite du Capitan-pacha, et font voile vers I'Egypte. Les Anglais, commandés par le Général Abercrombie, en profitent pour commencer leur débarquement, dans la rade d'Aboukir.
- Seconde bataille d'Aboukir.
Le 6 mars, quelques-unes de leurs chaloupes se dirigent vers la bouche du lac Madieh pour interrompre les communications entre Damiette et Alexandrie. Elles sont montées par une centaine d'hommes, qui sont culbutés et jetés à la mer par 40 Grenadiers de la 61e.
Le Général Friant, dès l'arrivée de la flotte anglaise, a réparti sa Division dans les différents postes du littoral. Rosette et le fort Julien sont occupés par 150 hommes de la 61e. Le reste de la Demi-brigade est dans le voisinage d'Aboukir.
Friant ne dispose que de 1.800 fantassins et 200 cavaliers. Il ne peut espérer un succès qu'en repoussant les troupes anglaises au fur et à mesure de leur arrivée. Le Général Abercrombie, qui ne l'ignore pas, cherche, dès le début, à s'assurer l'avantage du nombre. Le 7, avant le jour, 6.000 de ses meilleurs soldats, dont 400 d'une Légion corse, prennent place dans 820 chaloupes et se dirigent vers la côte, entre l'ouverture du lac Madieh et le fort d'Aboukir. Les matelots rament debout et avec vigueur, tandis que les fantassins restent couchés au fond des bateaux. Les premières troupes débarquées se portent rapidement sur un monticule de sable, dit des Puits d'Aboukir, où elles se forment en bataille. Mais elles sont à peine organisées, que la 61e les attaque avec impétuosité.
Les Ggrenadiers de cette Demi-brigade se précipitent dans douze chaloupes et prennent à revers leurs adversaires. L'arrivée de nouvelles chaloupes les déloge. Vers la gauche, la 75e, avertie trop tard, trouve les Anglais trop nombreux et ne peut se déployer sous leur feu. Elle recule jusqu'à 600 mètres du rivage, sous la protection de la cavalerie qui charge par deux fois. La 61e reste seule et se bat désespérément.
Après deux heures d'une épouvantable mêlé, Friant la rappelle. Mais elle combat encore pendant une heure et ce n'est que pied à pied, en emmenant toute son artillerie, qu'elle opère sa retraite.
La seconde bataille d'Aboukir coûte à la 61e Demi-brigade 254 hommes mis hors de combat. Le Lieutenant Couturier, l'Adjudant Courtois, le Sergent-major Fauchère et les Sergents Billard, Taillard et Viard sont au nombre des morts. Les Capitaines Bouillet et Duhoux, les Lieutenants Dupuy, Dupré et Mansuy sont blessés.
Les Sergents Audidier, Boulanger et Pérabot, le Caporal-sapeur Leclerc, les Caporaux Boutin, Lavergne, Thiriet, Manceau et Ceinturé, les Grenadiers Gambier, Béat et Gattelet, les Fusiliers Thouvenelle, Lizard et Menoury, font des prodiges de valeur.
- Bataille de Nicopolis.
Les Anglais, dès leur débarquement, se retranchent dans la presqu'île. Le 11 mars, à 8 heures du matin, ils lèvent leur camp pour se porter vers Alexandrie.
La Division Friant, occupe, en avant de la ville, les hauteurs voisines du camp des Romains. La 61e, dont l'effectif n'est plus que de 600 hommes, est placée avec les 25e et 75e, sous les ordres du Général Délégorgue. Avec l'appui de la Division Lanusse, arrivée depuis deux jours, Friant ne dispose que de 3.950 fantassins et 500 cavaliers. L'armée anglaise compte près de 20.000 hommes, dont 2.000 soldats de marine et 200 cavaliers.
Les Anglais marchent lentement. Leur infanterie a de la peine à se dégager des sables mouvants. A la vue des Français, le Général Abercrombie s'arrête et fait ouvrir le feu par ses canons. La Division Friant riposte et impressionne les Anglais, qui dressent leur camp, à 3 heures du soir, à moins de deux lieues de leur point de départ.
Le lendemain, au jour naissant, l'attaque recommence sur trois colonnes. La 61e prend l'offensive et se porte jusqu'à la pointe du lac Madieh contre la colonne de gauche de l'armée anglaise. Elle se bat avec beaucoup de courage ; mais son infériorité numérique, jointe à un échec que subit au centre la Division Lanusse, provoquent sa retraite sur les hauteurs de Nicopolis.
Les Anglais essaient vainement de poursu1vre leur succès. Ils sont arrêtés par la bonne contenance de l'armée française et se retranchent en arrière du camp des Romains, depuis la mer jusqu'au lac Madieh. Leurs pertes, dans cette journée sont de 1.500 hommes mis hors de combat. Celles des Français ne dépassent pas 500 hommes, mais la 61e est durement éprouvée. Elle compte une quarantaine de morts, parmi lesquels le Sergent Teissier, et près de 80 blessés, dont le Chef de Brigade Dorsenne, les commandants Bodelin et Boieldieu, les Capitaines Soulas et Goux, les Lieutenants Belavoine, Morlot, Bejet et Loreau, et les Sous-lieutenants Valentin et Charpentier (1).
- Bataille de Canope.
Après la seconde bataille d'Aboukir, dont la 61e a supporté tout le poids, Menou comprend, mais trop tard, la faute qu'il a commise en ne confiant qu'aux seules troupes d'Alexandrie le soin de s'opposer au débarquement des Anglais. Il quitte le Caire précipitamment, en n'y laissant qu'une forte garnison, livre le 18 un sanglant combat sur les bords du lac Mareotis, et arrive le lendemain au secours des Généraux Friant et Lanusse.
Le 21, deux heures avant le jour, toute l'armée française, forte de 8.330 hommes d'infanterie, 1.380 cavaliers et 46 pièces de canon, se porte contre les retranchements anglais.
La 61e, placée au centre sous les ordres du Général Rampon, se déploie dans une demi obscurité pour s'emparer d'une grande redoute, qui s'élève au milieu de la ligne ennemie. Elle est accueillie par un feu meurtrier; en quelques instants, presque tous ses Officiers sont mis hors de combat. Pour soutenir une charge de cavalerie, ordonnée par Menou sans aucune nécessité bien réelle, les troupes du Général Rampon font des prodiges de valeur. La 61e arrive jusque dans la redoute et lutte, pendant deux heures, avec acharnement, contre un ennemi dix fois supérieur en nombre.
A 11 heures du matin, l'armée française se retire sans être inquiétée. La bataille de Canope, excessivement meurtrière, coûte aux Anglais 2.500 hommes mis hors de combat. Les Français ont, pour leur part, 2.500 hommes tués, blessés ou prisonniers. Les Généraux Lanusse et Abercrombie sont au nombre des morts. La 6le compte 62 tués, parmi lesquels les Sergents Masson, Touraille, Dollin, Carron, Pernot, Verchère, Delong et Marotel. Le Capitaine Duhoux est au nombre des blessés. Le Tambour Marcort fait preuve d'une éclatante bravoure en battant la charge sous une grêle de projectiles. Le Capitaine Montmirot, les Fourriers Bourgeois et Dumangeon, les Grenadiers Beaurepaire, Lenoble, Monnoie et Legout, le Fusilier Lefebvre se distinguent par leur courage.
- Défense du fort Julien.
Le Général Hutchinson, qui a remplacé le Général Abercrombie, envoie contre la garnison de Rosette un détachement de 3,000 soldats, auquel s'ajoute l'armée du Capitan-Pacha, arrivée le 30 mars. Cette garnison, trop faible pour résister, passe le Nil et se retire, le 7 avril, à Fouah.
Dès le lendemain, 9,000 Anglais ou Turcs mettent le siège devant le fort Julien, dont la défense a été confiée à 25 hommes de la 61e. Alors s'accomplit un fait d'armes qui dépasse tout ce que l'imagination peut concevoir de plus hardi. Vingt-cinq soldats résistent pendant dix jours aux efforts de toute une armée ! Ils ne se rendent que faute de vivres, et lorsque le canon a déjà démoli les remparts confiés à leur garde. A la grande stupéfaction des ennemis, il ne sort du fort Julien, le 18 avril, que quelques hommes, pour la plupart blessés.
- Défense d'Alexandrie.
Après la bataille de Canope, l'armée française reste sur les hauteurs de Nicopolis dont elle perfectionne les défenses. Les Anglais se répandent dans le Delta et s'acheminent vers le Caire.
En 1798, l'Armée d'Orient, harcelée par les Mameluks et les fellahs, ne vivant que de légumes et de pastèques, était entrée au Caire le onzième jour de son débarquement. En 1801, l'armée anglaise parfaitement nourrie et aidée de l'influence du Capitan-pacha sur les habitants, met lO3 jours pour parcourir le même trajet.
Jusqu'au mois d'août, la 61e garde les fortifications de Nicopolis, au centre de la ligne, entre la 18e de la Division Rampon, et la 20e de la Division Friant dont elle fait partie. Le 17, le Général Hutchinson s'empare du fort de Marabout, et concentre ensuite ses efforts contre la partie occidentale du camp retranché, du côté des Bains de Cléopâtre.
Le 29, après huit jours de combat, le Général Menou fait des propositions de paix, qui sont acceptées. L'armée française obtient d'évacuer l'Egypte et le 2 septembre, les forts d'Alexandrie sont remis aux Anglo-Turcs.
L'embarquement des troupes commence le 14, dans la rade d'Aboukir, sur des bâtiments anglais.
La 61e, réduite à 200 hommes valides, arrive au Frioul, le 23 octobre, avec ses armes et ses bagages. Elle y séjourne jusqu'à la fin de novembre, et se rend ensuite d'abord à Besançon, puis à Malines.
Ainsi finit une expédition surprenante par sa grandeur même. Il a fallu à l'Angleterre une longue et tortueuse diplomatie pour reconstituer à son profit l'oeuvre gigantesque accomplie en quelques mois par les "héros en guenilles", dont Bonaparte disait, avec raison, que les yeux du monde étaient fixés sur eux.
/ Campagne d'Italie (2e Bataillon complémentaire).
En 1796, le Dépôt de la 61e est à Metz. En 1797, un second Dépôt est établi à Udine. Après le départ de l'Armée d'Orient, 1es deux Dépôts se fondent en un seul, qui est placé d'abord à La Cadière puis à Nice. Au commencement de janvier 1800, on le transporte à Chalon-sur-Saône.
Vers la même époque, les Dépôts des Demi-brigades d'Egypte, organisent des deuxièmes Bataillons complémentaires, qui servent à former quatre Demi-brigades, dites d'Orient, destinées à l'Armée d'Italie.
La 4e Demi-brigade est composée des Bataillons complémentaires des 25e, 32e et 61e Demi-brigades de Ligne. Le Chef de Brigade Veauquet en reçoit le commandement.
Au mois de février, les quatre Demi-brigades d'Orient constituent la Division Chabran.
Le 14 février 1800 (25 pluviôse an 8), Bonaparte écrit depuis Paris au Général Berthier, Ministre de la Guerre : "Vous donnerez au général de division Chabran l'ordre de se rendre sur-le-champ à Chalon-sur-Saône,pour prendre le commandement des quatorze bataillons de dépôt de l'armée d'Orient. Le général Chabran les passera en revue et veillera à leur équipement, armement, habillement et recrutement. Ces bataillons resteront cantonnés à Mâcon, Châlon, Seurre et Saint-Jean-de-Losne. Ils seront exercés deux fois par jour à la manoeuvre. La division commandée par le général Chabran portera le nom de 1re division de l'armée de réserve. Il sera attaché à cette division trois pièces de 8 et un obusier de 6 pouces, servis par l'artillerie légère, deux pièces de 12, quatre de 8 et deux obusiers, servis par l'artillerie à pied. Le général Chabran aura sous ses ordres deux généraux de brigade et un adjudant général. Son quartier général sera à Chalon-sur-Saône. Il ne recevra directement des ordres que du ministre de la guerre … Les bataillons de la 61e, de la 69e et de la 88e, seront commandés par un chef de brigade sortant d'un de ces corps" (Correspondance de Napoléon, t.6, lettre 4594; Correspondance générale, t.3, lettre 4983 ; De Cugnac (Cpt) : Campagne de l'Armée de Réserve en 1800, Paris, Chapelot, 1900, t.1, p. 50).
Le "Tableau des progrès de l'organisation des dépôts d'infanterie de l'armée d'Orient en bataillons, conformément à l'arrêté des Consuls de la République du 28 frimaire an 8 (19 décembre 1799), depuis le 3 pluviôse (23 janvier 1800) jusqu'au 1er germinal suivant (22 mars 1800)" indique pour la 61e de Ligne : 336 hommes à l'effectif, dont 292 présents; 664 hommes manquent au complet ; "Il va être réorganisé, et on y incorporera des conscrits à mesure qu'il en arrivera; ce bataillon est à Mâcon" (De Cugnac (Cpt) : Campagne de l'Armée de Réserve en 1800, Paris, Chapelot, 1900, t.1, p. 602 - Note : Ce tableau a été envoyé au Ministre, de Mâcon, le 24 mars 1800, par l'Inspecteur aux Revues Gaultier).
La situation du 24 mars 1800 donne :
Armée de réserve.
BATAILLONS (bis) DE L'ARMÉE D'ORIENT EMBRIGADÉS.
Infanterie de bataille
61e, 69e et 88e, 2,268 hommes (De Cugnac (Cpt) : Campagne de l'Armée de Réserve en 1800, Paris, Chapelot, 1900, t.1, p. 612).
Une situation en date du 10 avril donne au Bataillon supplémentaire (de l'Armée d'Orient) de la 61e de Ligne un effectif de 428 hommes (De Cugnac (Cpt) : Campagne de l'Armée de Réserve en 1800, Paris, Chapelot, 1900, t.1, p. 615 - Note : Cette situation, existant seulement à l'état de minute, ne peut inspirer une confiance absolue).
Le 23 Germinal an 8 (13 avril 1800), le Ministre de la Guerre écrit, depuis Paris, au Général Berthier, commandant en chef l'Armée de Réserve : "Suivant une dépêche que je reçois à l'instant, il parait que l'ennemi est parvenu à s'emparer du Mont-Cenis, et même qu'il est descendu en force à Lanslebourg et menace Chambéry. Au premier avis de cette incursion, le général commandant à Lyon a envoyé 400 hommes de troupes de renfort à celles qui s'étaient repliées sur Chambéry.
Le général Vignolle a, de son côté, dirigé sur-le-champ vers le même point la 6e demi-brigade légère, forte d'environ 2,000 hommes; elle arrivera à Chambéry le 1er floréal.
J'ai donné ordre au général Chabran de se tenir prêt à se porter de sa personne à Chambéry, par Genève, avec 1500 hommes, pris parmi les hommes disponibles de la demi-brigade composée des 61e, 69e et 88e; et si cela ne suffit pas pour compléter ce nombre, je l'ai autorisé à prendre un des bataillons d'infanterie légère faisant également partie de sa division.
Je l'ai chargé, en outre, de former un détachement de 100 hommes de cavalerie, pris parmi les escadrons de l'armée d'Orient, et, dans le cas où il ne serait pas possible d'extraire ce nombre d'hommes complètement armés et équipés, il doit prendre ce détachement dans le 7e régiment de chasseurs, qui est à Bourg.
Cependant, je lui ai recommandé de ne se mettre en mouvement que dans le cas où ce nouveau renfort deviendrait indispensable, et de se concerter à cet égard avec le général Turreau, commandant l'aile gauche de l'armée d'Italie.
L'intention du Premier Consul est que vous dirigiez les opérations dans la partie des Alpes qui avoisine le département du Mont-Blanc.
Je préviens en même temps le général Masséna de ces dispositions.
Salut et fraternité.
CARNOT" (De Cugnac (Cpt) : Campagne de l'Armée de Réserve en 1800, Paris, Chapelot, 1900, t.1, p. 138).
Situation des Corps de l'Armée de réserve arrivés dans leurs cantonnements le 26 germinal (16 avril).
Bataillons d'Infanterie de ligne provenant des Dépôs de l'Armée d'Orient.
A Mâcon, 61e, 416 présents; 463 effectif.
Signé : VIGNOLLE ("Extraits des mémoires inédits de Victor"; De Cugnac (Cpt) : Campagne de l'Armée de Réserve en 1800, Paris, Chapelot, 1900, t.1, p. 619).
Selon la "Force des corps de l'armée de réserve d'après la situation établie à Paris; le 1er floréal an 8 (21 avril 1800)", la 61e de Ligne a un effectif de 416 hommes présents sous les armes à Mâcon (De Cugnac (Cpt) : Campagne de l'Armée de Réserve en 1800, Paris, Chapelot, 1900, t.1, p. 621 - Archives nationales AF. IV; reg. 1132).
La situation de l'Armée de Réserve (1ère partie) datée du 5 Floréal an 8 (25 avril 1800) indique :
Armée de Réserve : Berthier, Général en chef.
Bataillons formés des Dépôts d'infanterie de l'Armée d'Orient.
61e de Bataille, à Mâcon, 427 hommes (De Cugnac (Cpt) : Campagne de l'Armée de Réserve en 1800, Paris, Chapelot, 1900, t.1, p. 622 - Note : Une autre situation a été établie la veille, 24 avril, sous une autre forme présentant les effectifs par armes et subdivisions d'armes au lieu de les donner par division. – Elle ne diffère de celle-ci que par quelques détails (Archives nationales AF. IV, registre, 1159.)). A noter qu'une situation établie le même jour à Paris, donc un peu moins fiable, donne la 61e avec un effectif de 416 hommes (De Cugnac (Cpt) : Campagne de l'Armée de Réserve en 1800, Paris, Chapelot, 1900, t.1, p. 627)
Les Demi-brigades quittent Chalon-sur-Saône à la fin d'avril.
Le 19 Floréal an 8 (9 mai 1800), le Général de Brigade Veaux, écrit, depuis Chalon, au Premier Consul : "... Il me reste 6 bataillons à organiser, qui sont : la 2e demi-brigade légère, les 18e, 19e, 25e, 61e et 32e demi-brigades de bataille. Ces corps formeront deux demi-brigades provisoires, dès qu'il sera arrivé des conscrits pour les compléter et des armes pour les armer. J'ai écrit à Dijon, au général Vignolle, à cet égard.
J'ai envoyé mon aide de camp à Mâcon, pour avoir les renseignements exacts des 3 bataillons qui s'y trouvent, ainsi que vous le demandez, mais seulement des 6 bataillons complémentaires restant des dépôts de l'armée d'Orient; ils vous parviendront incessamment.
J'aurai l'honneur de vous envoyer exactement l'état des hommes incapables de faire la guerre et restant aux dépôts des différents bataillons que je suis chargé d'organiser.
La pénurie de fusils et d'habits est absolue, ainsi que de la chaussure. Les bataillons qui sont ici n'ont rien. Il en faudra également pour les conscrits qui arriveront.
Je crois devoir vous rendre compte, citoyen Consul, de la désertion; elle est toujours considérable, surtout dans les mouvements que font les bataillons. La trop grande indulgence a pu seule l'enhardir jusqu'à présent.
Aussitôt que j'aurai terminé l'organisation des demi-brigades restantes, je vous demanderai, citoyen Consul, de vouloir bien ne pas me laisser dans l'intérieur. Depuis le commencement de la guerre, je n'ai cessé de servir activement, je la verrais terminer avec regret sans y avoir part ..." (De Cugnac (Cpt) : Campagne de l'Armée de Réserve en 1800, Paris, Chapelot, 1900, t.1, p. 251).
Les Demi-brigades franchissent les Alpes, le 16 Mai, au Petit-Saint-Bernard et se dirigent sur le fort de Bard, où elles opèrent leur jonction avec le reste de l'armée.
Siège du fort de Bard.
La Division Chabran, devenue 5e Division de l'Armée de réserve d'Italie, est employée au siège du fort de Bard, après le prodigieux passage de Bonaparte. Le ler juin, la garnison de cette place capitule et le 4, la 4e Demi-brigade d'Orient se rend à Casale, où elle couvre les derrières de l'armée pendant que se livrent les batailles de Montebello et de Marengo.
Le Général Veaux écrit, de Châlon-sur-Saône, à Dupont, le 11 juin 1800 : "... J'ai eu l'honneur de vous rendre compte différentes fois que ces bataillons ne sont point organisés et qu'ils n'ont que les anciens hommes de dépôt, n'ayant pas reçu de conscrits ; excepté les trois bataillons qui sont à Mâcon, savoir la 2e légère, la 18e et 19e de ligne, dont la force est de 1253 hommes, et ceux de la 25e, 32e et 61e, n'ont exactement que leurs anciens soldats de déppôt qui montent à 800 hommes, parmi lesquels il se trouve au moins cent hommes hors d'état de faire la guerre, officiers et sous-officiers compris. Ces six bataillons se trouvent absolument dépourvus de chaussure et la majeure partie est sans habits, excepté le bataillon de la 18e de ligne, qui est habillé ..." (De Cugnac (Cpt) : Campagne de l'Armée de Réserve en 1800, Paris, Chapelot, 1900, t.2, p. 32).
Au moment de la fusion de l'Armée de réserve avec l'ancienne Armée d'Italie, la 4e Demi-brigade d'Orient est affectée à la garde des places.
- Combat de Valeggio.
Au mois de novembre, à la reprise des hostilités, la Demi-brigade occupe les environs de Lonato, où elle a beaucoup à souffrir de la pluie et du manque de vivres. Elle franchit le Mincio le 25 décembre et participe au combat de Valeggio.
L'armistice de Trévise (16 janvier 1801) termine la guerre contre l'Autriche.
- Occupation du Royaume de Naples.
La 4e Demi-brigade d'Orient reste à Trévise jusqu'au 20 février.
Le 28 Ventôse an 9 (19 mars 1801), le Premier Consul écrit, depuis Paris, aux Sous-officiers de la 61e Demi-brigade de Ligne : "Soldats, j'ai lu votre lettre, je me suis fait rendre compte de votre conduite ; je vous reconnais pour des dignes enfants de la 61e. J'ai donné ordre que l'on vous rendit vos armes ; je saisirai la première occasion pour vous mettre à même de vous venger. Vous n'avez jamais été vaincus, vous ne mourrez pas sans être vainqueurs" (Collection générale et complète des lettres, proclamations, discours de Napoléon, rédigée d'après le Moniteur, publiée par C. Fisher, Leipzig, Graff, 1808-1813, t.1, p. 115 ; Correspondance générale de Napoléon, t.3, lettre 6144).
La 4e Demi-brigade de l'armée d'Orient est alors désignée pour faire partie, sous les ordres du Général Soult, du Corps d'observation du Midi de la Péninsule, composé surtout des Bataillons complémentaires de l'Armée d'Egypte.
Ce Corps arrive à destination à la fin d'avril, après avoir traversé toute l'Italie. Le Bataillon complémentaire de la 61e est placé à Tarente, où il tient garnison jusqu'à la paix d'Amiens (25 mars 1802).
Le 21 Messidor an 9 (10 juillet 1801), à Paris, on informe le Premier Consul que "La garnison du fort d'Aboukir était accusée de s'être faiblement défendue avant de capituler. Les sous-officiers et soldats, offensés de ce reproche, protestent et en appellent au témoignage du Premier Consul, qui les avait eus sous ses ordres en Égypte"; Bonaparte donne la réponse suivante : "Soldats, j'ai lu votre lettre ; je me suis fait rendre compte de votre conduite. Je vous reconnais pour de dignes enfants de la 61e. J'ai donné ordre que l'on vous rendît vos armes. Je saisirai la première occasion pour vous mettre à même de vous venger. Vous n'avez jamais été vaincus ; vous ne mourrez pas sans être vainqueurs" (Œuvres complètes de Napoléon, Stuttgart et Tubingue, 1822, t.4, p. 295 ; Correspondance de Napoléon, t.7, lettre 5632 - note : Cette lettre sans date est insérée dans le Moniteur du 22 Messidor an 9 - 11 juillet 1801 - voir ci-dessus la même lettre au 19 mars 1801).
Le 24 novembre 1801 (3 Frimaire an 10), le Premier Consul écrit, depuis Paris, au Général Berthier, Ministre de la Guerre : "... ARMÉE D'ORIENT
... La 61e demi-brigade de ligne restera dans la 8e division militaire ...
Ces demi-brigades de l'armée d'Orient resteront dans la 8e division militaire jusqu'à ce qu’elles soient embarquées, au nombre des deux tiers de la force de la demi-brigade.
Elles laisseront un chef de bataillon et plusieurs officiers à Marseille et à Toulon pour rejoindre les détachements qui arriveraient plus tard.
Vous donnerez des ordres pour envoyer, le plus promptement possible, dans tous les endroits où ces demi-brigades doivent tenir garnison, tout ce qui leur est nécessaire" (Correspondance générale de Napoléon, t.3, lettre 6654).
Le Dépôt de la 61e a été transféré de Chalon-sur-Saône à Malines.
Le 1er Prairial an 10 (21 mai 1802), le Premier Consul écrit, depuis Paris, au Général Berthier, Ministre de la Guerre : "Je vous prie, citoyen ministre, de donner l'ordre ... à la 61e de ligne, qui est dans la 8e division militaire, de se rendre à Besançon ...
Les bataillons provisoires des corps de l'armée d'Orient, qui font partie des corps du Midi, qui rentrent, rejoindront leurs demi-brigades et vous donnerez des ordres pour qu’ils soient incorporés sur-le-champ. Ayez soin de les adresser aux nouvelles destinations de ces corps ...
Donnez tous ces ordres de manière que les demi-brigades aient dix jours avant de partir, pour faire leurs préparatifs" (Correspondance générale de Napoléon, t.3, lettre 6896).
Le 2e Bataillon complémentaire, ramené en France au mois de mai 1802, est dirigé sur cette dernière ville. Il est licencié vers la fin du mois d'août et les soldats qui le composent sont versés dans les trois autres Bataillons.
Un Arrêté de Bonaparte, daté de Paris le 16 Messidor an 10 (5 juillet 1802), stipule : "ARTICLE 1ER. Les citoyens Baumard, lieutenant, et Berger, sous-lieutenant, de la 61e demi-brigade de ligne, qui ont été destitués en Egypte par le général en chef pour avoir participé à l'insurrection de Rome, sont réintégrés.
ART. 2. Ils seront promus aux premières places vacantes dans d'autres corps que la 61e.
ART. 3. Le ministre de la guerre est chargé de l'exécution du présent arrêté, qui ne sera pas imprimé" (Correspondance de Napoléon, t.7, lettre 6166).
Le 13 Vendémiaire an 11 (5 octobre 1802), le Premier Consul écrit, depuis Saint-Cloud, au Général Berthier, Ministre de la Guerre : "Je vous prie, citoyen ministre, ... d'écrire au général commandant la 6e division militaire que puisqu'il n'a pas d'autres troupes à sa disposition, il complète un bataillon de la 61e et l'envoie à Pontarlier où il sera sous les ordres du général Ney ...
Faites connaître ces dispositions au général Ney" (Œuvres complètes de Napoléon, Stuttgart et Tubingue, 1822, t.4, p. 391 ; Correspondance générale de Napoléon, t.3, lettre 7196).
Le 29 octobre 1802, le Général Séras s'empare de Zurich, sans coup férir; le Général Ney, l'apprenant, écrit, le 31 octobre 1802, au Ministre de la Guerre Berthier : "... j'ai expédié des ordres aux deux bataillons de la 15e légère, à celui de la 61e de ligne et à l'artillerie qui étaient déjà à Morat, de retourner à Pontarlier..." (Bonnal H. : « La vie militaire du Maréchal Ney », Chapelot, Paris, 1910, tome 1, p. 376).
Le 31 octobre 1802 (9 brumaire an 11), le Premier Consul écrit, depuis Rouen, au Ministre de la Guerre Berthier : "... les détachements de la 61e et de la 2e Légère se réuniront à Genève et à Besançon …
Le pain, la viande et les fourrages seront fournis par la Suisse ; vous vous en expliquerez avec le citoyen Stapfer. La solde sera fournie par le Gouvernement français ; en conséquence, à compter du 1er frimaire, le citoyen Barbé-Marbois aura un payeur pour la Suisse et fera la solde pour frimaire ..." (Oeuvres complètes de Napoléon, Stuttgart et Tubingue, 1822, t.4, p. 400 ; Correspondance de Napoléon, t.8, lettre 6404 ; Correspondance générale de Napoléon, t.3, lettre 7253).
Le 25 Prairial an 11 (14 juin 1803), le Premier Consul écrit, depuis Saint-Cloud, au Général Berthier, Ministre de la Guerre : : "Je vous renvoie, Citoyen Ministre, les projets que vous aviez rédigés pour le camp de Saint-Omer. Voici définitivement les bases auxquelles je me suis arrêté :
Six camps seront formés, lesquels, destinés à ne composer qu'une seule armée, seront commandés par six lieutenants généraux commandant en chef. Ils auront chacun un parc d'artillerie commandé par un général d'artillerie et par un colonel directeur du parc. Les six parcs seront tous soumis à un général commandant en chef l'artillerie et à un général de brigade directeur général des parcs des six camps. Chacun de ces camps aura un ordonnateur, lequel correspondra avec un ordonnateur en chef des six camps.
Ces six camps seront : un en Hollande, un à Gand, un à Saint-Omer, un à Compiègne, un à Saint-Malo, un à Bayonne ...
Pour le camp de Gand, les 6e et 13e légères; les 12e, 33e, 51e, 108e, 14e, 36e, 61e et 85e de ligne ... Chacune des demi-brigades ci-dessus ne fournira que ses 1er et 2e bataillons, lesquels seront complétés à 1,000 hommes. Il est donc nécessaire que ces corps soient prévenus sur-le-champ que leurs deux premiers bataillons doivent marcher vers la fin de l'été, afin qu'ils activent l'instruction, l'habillement, etc ..." (Correspondance de Napoléon, t.8, lettre 6814; Correspondance générale, t.4, lettre 7722).
Le 21 août 1803 (3 Fructidor an 11), Bonaparte écrit, depuis Saint-Cloud, au Général Berthier, Ministre de la Guerre : "... Ordre à la 61e demi-brigade de former ses deux premiers bataillons, chaque bataillon à 750 hommes, et de se rendre à Bruges ; le 3e bataillon et le dépôt resteront à Bruxelles ..." (Correspondance de Napoléon, t.8, lettre 7022 ; Correspondance générale de Napoléon, t.4, lettre 7945).
Le 28 août 1803 (10 Fructidor an 11), Bonaparte écrit depuis Saint-Cloud au Général Berthier, Ministre de la Guerre : "Je vous envoie, citoyen ministre, les dispositions que j'ai arrêtées pour l'organisation de quatre camps faisant partie des six qui vont être formés sur les côtes de l'Océan.
... Camp de Bruges
Le général Davout est nommé commandant en chef du camp de Bruges
... Le camp de Bruges sera composé de trois divisions
... La 1re division sera commandée par le général Oudinot qui aura à ses ordres les généraux de brigade :
De Billy,
Eppler,
Petit.
La 1re division sera composée des :
13e légère,
30e de ligne,
51e id,
61e id,
... Le ministre de la Guerre et celui de l'Administration feront former sur-le-champdeux camps en baraques à Ostende sur la droite et sur la gauche du port pour qu'au 1er vendémiaire, la 1re et la 2e division puissent s'y baraquer.
Le général Davout établira son quartier à Bruges et partira le 16 fructidor ..." (Correspondance générale, t.4, lettre 7972).
Le 10 septembre 1803 (28 Fructidor an 11), Davout écrit au Premier Consul : "Mon Général, j'ai prévenu le ministre de la guerre de mon arrivée, et lui ai mandé que je voulais avoir le temps de me mettre au fait du commandement que vous m'avez confié, et me procurer des renseignements sur les divers objets que me prescrivent vos instructions avant d'avoir l'honneur de vous rendre compte de l'exécution de vos ordres.
Trois objets m'ont été particulièrement recommandés :
1° La prompte organisation de l'armée et la faire baraquer pour le 1er vendémiaire dans les camps sous Ostende et Dunkerque ;
2° Les constructions maritimes ;
3° Défense des côtes et particulièrement Ostende.
1° La prompte organisation de l'armée, etc.
La 13e légère, les 51e, 61e, 108e et 111e de ligne, qui sont les seules troupes parvenues dans l'arrondissement du camp de Bruges, seront baraqués d'ici au 1er vendémiaire sous Ostende dans deux camps que j'ai reconnus sur les dunes à la droite et à la gauche de cette place, de manière à remplir vos intentions pour la proximité des lieux d'embarquement.
La position des camps est la plus saine du pays, et ayant fait creuser dans les dunes sur toute la ligne à 3 pieds de profondeur, on a trouvé de l'eau meilleure que celle dont on fait usage à Ostende.
Les baraques sont faites avec deux perches de sapin et couvertes de joncs. Cette couverture est préférée à la paille dans le pays, qui offre sous ce rapport assez de ressources.
J'ai envoyé pour commander provisoirement la division qui doit se rassembler sous Dunkerque, le général de division Durutte, le seul que j'eusse encore. Ce camp sera baraqué à peu près à la même époque.
Les divers services sont assurés ...
3° Défense des côtes, et particulièrement d'Ostende.
... Les rapports du général Monnet annonçant toujours l'attaque de l'ile de Walcheren, et quelques autres circonstances, ont porté mon attention sur la défense de l'île de Cadzandt : la mauvaise saison pour les maladies ne me permettant que d'y tenir des postes, j'ai fait reconnaître toutes les communications par lesquelles je me propose de m'y porter rapidement avec deux demi-brigades à la première annonce que j'aurai de l'approche de l'ennemi. A cet effet, je tiens à Ecloo la 13e légère qui se portera par Ardenbourg sur Groede et la 61e par l'Écluse (où les moyens de passer le Swin sont préparés) sur l'estran pour attaquer les Anglais par les derrières, en supposant qu'ils eussent effectué un débarquement et marché sur Breskens. Ma dernière brigade, dans ce cas, aurait l'ordre de se porter à l'Écluse pour servir de réserve ..." (Mazade C. (de) : « Correspondance du Maréchal Davout, prince d'Eckmühl : ses commandements, son ministère, 1801-1815 », t. 1, p. 9, lettre 4).
Le 12 septembre 1803 (25 Fructidor an 11), Bonaparte écrit depuis La Malmaison au Général Berthier, Ministre de la Guerre : "Dans la deuxième division militaire (chef-lieu Mézières), citoyen ministre, les 12e et 111e demi-brigades de ligne ... doivent seuls jouir de la gratification ...
Dans la 24e division, la 61e, la 36e, le 6e de cuirassiers ... pour les corps qui doivent également en jouir.
Cette gratification n'est accordée qu'aux seuls individus de ces corps qui ont passé la revue du Premier Consul ..." (Chuquet A. : « Ordres et apostilles de Napoléon, 1799-1815 », Paris, 1911, t.1, lettre 589 ; Correspondance générale, t.4, lettre 8020).
/ 61e Régiment d'Infanterie de ligne
Le 22 septembre 1803, les diverses armes sont réorganisées par un Décret du Premier Consul Bonaparte.
"Les corps d'infanterie sont désignés désormais sous le nom de Régiment ; les chefs de brigade prennent le titre de Colonel" (Article 1er du Décret).
Par l'Arrêté du 1er Vendémiaire an 12 (24 septembre 1803), la 61e Demi-brigade prend le nom de 61e Régiment d'infanterie de ligne (B. Coppens).
Le Chef de Brigade Dorsenne, confirmé dans son grade le 5 juillet 1802, en conserve le commandement.
/ Hostilités contre l'Angleterre
- Causes de la Guerre.
La paix conquise à Marengo est de courte durée. Le traité d'Amiens est à peine conclu, qu'il est violé de part et d'autre. L'Angleterre, en particulier, se refuse à la restitution de l'ile de Malte dont elle s'est emparée pendant la campagne d'Egypte. Elle désire la guerre et la rend inévitable en faisant mettre l'embargo sur 1200 navires français ou bataves (mai 1803).
- Préparatifs contre l'Angleterre.
Le Premier Consul reprend le séduisant projet, conçu par Hoche sous le Directoire, d'une descente en Angleterre. Dès la seconde moitié de 1803, d'immenses préparatifs sont faits dans ce but sur les côtes de l'Océan, de la Manche et de la mer du Nord.
Deux Bataillons du 61e, formés à 800 hommes chacun (Commandants Bodelin et Peugnet), se rendent à Ostende, près de Bruges, où ils passent sous les ordres du Général Davout (Division Oudinot).
La flottille batave, qui doit effectuer le transport des troupes du camp d'Ostende, se compose de 306 bâtiments. Chaque Compagnie fournit au bâtiment qui lui est affecté une garde de 25 hommes relevée tous les mois.
Un Sénatus-consulte du 18 mai 1804 institue l'Empire héréditaire au profit de Bonaparte, qui monte sur le trône sous le nom de Napoléon 1er. Le 16 août suivant, a lieu au camp de Boulogne, où le nouvel Empereur a établi son Quartier général, une distribution solennelle de 2000 croix de l'Ordre récemment créé de la Légion d'honneur. Le 2 décembre, aux fêtes du couronnement, à Paris, les Régiments reçoivent de nouveaux drapeaux (aigles).
- Combat naval de Nieuport.
Dans leurs déplacements le long de la côte, les bâtiments français sont souvent attaqués par les croisières anglaises. Le 23 octobre 1804, la Ville de Montpellier, gardée par un détachement des 51e et 61e de Ligne, est entourée, en se rendant d'Ostende à Dunkerque, par sept vaisseaux dont le plus faible est de sa force. Le combat, livré à hauteur de Nieuport, est excessivement violent. Il se termine par la fuite des Anglais et la prise d'un brick de 12 pièces.
La Ville de Montpellier fortement endommagée entre à Nieuport avec sa capture. Les Anglais ont fait usage, pendant la lutte, de projectiles creux remplis de verre pilé. Les pertes des Français ne sont cependant que de 10 hommes, tant matelots que soldats. Le Général Davout signale à cette occasion la brillante conduite du Sergent Vaussy et des Fusiliers Leuly, Dattiac, Ravot, Besson, Jonas et Chabert, du 61e.
Le 24 octobre 1804 (2 Brumaire an 13), Davout écrit, depuis Ostende, à l’Empereur : "Sire, j'ai l'honneur de rendre compte à Votre Majesté Impériale d'un combat notable et brillant que vient de soutenir la prame la Ville de Montpellier contre sept bâtiments anglais, dont le plus faible était de sa force. La bravoure a été récompensée par la prise d'un brick anglais de 12 pièces.
Le 1er brumaire, dans l'après-midi, une division de bateaux canonniers bataves a appareillé d'Ostende pour Dunkerque, ainsi que les prames la Ville de Bruxelles, la Ville de Montpellier, qui faisaient l'arrière-garde. Vers les cinq heures du soir, les bateaux canonniers (qui tous ont mouillé à neuf heures du soir dans la rade de Dunkerque) étant déjà à une grande distance, 7 voiles anglaises sont venues, à la hauteur de Nieuport, attaquer la Ville de Montpellier, qui se trouvait dans ce moment isolée. Le combat s'est engagé à portée de mitraille et a été très-vif. Un brick anglais ayant voulu se présenter à l'abordage a reçu un feu de mousqueterie et d'artillerie si soutenu et si bien dirigé, qu'il a été mis hors d'état de manœuvrer et a fini par échouer. Les autres bâtiments anglais ont pris le large. L'équipage a profité de la nuit pour s'échapper sur les embarcations.
La prame la Ville de Bruxelles est arrivée dans ce moment et a continué sa route sur Dunkerque, où elle a jeté l'ancre dans la nuit. La prame la Ville de Montpellier, ayant reçu beaucoup d'avaries et faisant eau, a été obligée d'échouer : elle a profité de la marée basse pour réparer les plus majeures, et a appareillé à la marée montante et est entrée dans Nieuport.
L'enseigne de vaisseau Deschamps, qui a fait preuve du plus grand sang-froid, a été blessé. Cet officier s'était déjà distingué dans le combat glorieux que la Ville d'Anvers a soutenu contre l'escadre de sir Sidney Smith. Il a été remplacé après sa blessure par l'enseigne Doude, qui s'est montré digne de son chef. Les détachements de vos troupes qui formaient la garnison étaient du 51e et du 61e, commandés par le lieutenant Auvergne du 51e. Ils ont tous montré avec l'équipage la bravoure la plus distinguée alliée au plus grand sang-froid. Je devrais tous les citer à Votre Majesté. Je me bornerai à ceux qui parmi tous ces braves ont le plus marqué dans cet honorable combat. Le lieutenant Auvergne, du 51e, s'est multiplié et a électrisé, par son exemple, tout son détachement. Il cite lui-même particulièrement les nommés Dumas, sergent, Gandon, caporal, Galendine, Dorel, Aimable, Ferant, Lenin, Moliart, fusiliers au 51e régiment ; Vaussi, sergent, Leuly, Dattiac, Ravot, Besson, Jonas, Chabert, fusiliers au 61e, comme ayant été remarqués, au milieu de leurs braves camarades, par leur intrépidité et leur sang-froid.
Sire, quelque vif qu'ait été ce combat, comme l'atteste la quantité de mitraille qui a digué la prame, brisé les bastingages et causé d'autres nombreuses avaries, il n'a coûté la vie qu'à 2 soldats du 51e. Il y a eu en outre 8 blessés, tant matelots que soldats.
Le général Friant, avec son activité ordinaire, s'est porté sur les lieux aux premières nouvelles de ce combat. Il a trouvé sur le brick anglais le lieutenant d'artillerie légère Riounec, ainsi que quelques canonniers. Tous étaient parvenus avec les plus grandes peines et par le moyen de leurs chevaux à monter à bord. Les détachements d'infanterie qui y arrivaient par ordre du général Friant ne pouvaient s'en approcher à raison de la marée qui montait. Les Anglais ayant voulu en profiter ainsi que de l'obscurité pour reprendre le brick avec quelques bâtiments légers et des embarcations, ont été forcés de renoncer à leur projet par le feu de notre artillerie légère et par celui de ce petit nombre de braves canonniers qui, se trouvant à bord, durent faire croire à l'ennemi, par la vivacité de leur feu, que ce bâtiment avait déjà une nombreuse garnison. Dans cette attaque, le feu a été mis deux fois à bord d'un bâtiment anglais par un obus.
Le 2 au matin, le capitaine de vaisseau Meyne s'est transporté sur les lieux et a ordonné toutes les dispositions pour que le brick appareillât aussitôt qu'il serait à flot : ce qui a eu lieu le même soir. Avec un équipage et une garnison suffisante, il a fait voile pour Nieuport en présence de 2 bricks anglais qui, au lieu de chercher à engager le combat, ont pris le large. A cinq heures et demie, le brick était dans le port.
Si les Anglais ont été dans cette occasion au-dessous de leurs prétentions maritimes, ils ont de plus donné des preuves de déloyauté et d'atrocité. Toutes leurs mitrailles trouvées à bord du bâtiment et dans les bastingages de la prame, en très grande quantité, étaient des balles creuses et remplies de verre pilé et autres poisons.
Tout l'équipage de ce brick l'a quitté avec tant de précipitation qu'il a laissé les instructions sur les signaux de jour et de nuit pour les reconnaissances, et le capitaine du bâtiment a abandonné tous ses papiers" (Mazade C. (de) : « Correspondance du Maréchal Davout, prince d'Eckmühl : ses commandements, son ministère, 1801-1815 », t. 1, p. 97, lettre 62).
Le 5 mars 1805 (14 ventôse an XIII), Napoléon écrit depuis Paris au Maréchal Berthier: "Mon Cousin, tous les régiments qui font partie des trois camps ne peuvent tous fournir 1,800 hommes sous les armes, surtout ceux qui ont des malades.
Le 30e régiment de ligne aurait besoin de 200 hommes, sans y comprendre ce qu'il doit recevoir de l'à-compte de l'an XIII : 200 hommes ...
Le 61e de ligne, de 200
Faites-moi un rapport, corps par corps, sur les régiments composant les trois camps; de leur situation au 1er ventôse, présents sous les armes et aux hôpitaux; de la situation des 3mes bataillons; du nombre d'hommes de la conscription de l'an XIII qu'ils doivent recevoir ..." (Correspondance de Napoléon, t.10, lettre 8393; Correspondance générale de Napoléon, t.5, lettre 9635).
- Coalition formée par l'Angleterre.
L'Angleterre, maîtresse des mers, agit en Europe. Elle cherche à détourner sur d'autres le coup qui la menace et réunit dans une coalition la Suède, la Russie et l'Au triche.
L'Espagne et la Bavière appuient de leur côté Napoléon.
Le 7 avril 1805, Davout lève son camp d'Ostende et se rend à Ambleteuse. L'armée française se concentre. Un ordre de l'Empereur, daté du 4 juin, lui donne le nom d'Armée des Côtes de l'Océan. Davout, nommé Maréchal, a le commandement du Corps de droite (3 Divisions). Les 51e et 61e, sous les ordres du Général Debilly, constituent la 2e Brigade de la 1re Division (Général Bisson).
Le Colonel Dorsenne, passé aux Grenadiers de la Garde, est remplacé, le 20 août, par le Colonel Nicolas (Jean-Marie-François Dorsenne, dit Lepaige, né à Ardres en 1773, Capitaine au 10e Batatllon des réserves en 1792, Chef de Bataillon en 1797, Chef de Brigade en 1800, Général de Brigade en 1805 et Général de Division en 1809, commanda en chef, en 1811, l'Armée du Nord de l'Espagne. Il se retira du service en 1812 et mourut à Paris peu de temps après. Son nom est inscrit au côté ouest de l'arc-de-triomphe de l'Etoile).
D'après un "Etat sommaire des hommes qui ont fait la guerre dans les différents corps composant l'armée des côtes (Exécution de l'ordre du 12 thermidor an XIII.)", au Corps de Droite, Division Bisson, le 61e de Ligne, sur un effectif de 1756 hommes, en a 587 qui ont déjà fait la guerre (Alombert P. C., Colin J. : « La campagne de 1805 en Allemagne », Paris, Chapelot, 1902, t. 1 (annexes et Cartes), p. 145).
Le Tableau des Forces de l'Empire au 16 thermidor an XIII (4 août 1805) indique que le 61e de Ligne a ses 1er et 2e Bataillons à Armée des Côtes, Corps de droite, 1622 présents, 134 aux hôpitaux, 1,756 hommes au total; le 3e Bataillon est à Malines, 24e division militaire, pour 587 hommes présents, 43 détachés ou en recrutement, 16 aux hôpitaux, total 646 hommes (Alombert P. C., Colin J. : « La campagne de 1805 en Allemagne », Paris, Chapelot, 1902, t. 1 (annexes et Cartes), p. 3 et suivantes).
D'après la "Situation de l'avant-garde de l'Armée des côtes de l'Océan, à l'époque du 1er Fructidor an 13" (19 août 1805), il y a, dans les troupes Troupes de la 1re Division du Corps de droite, le 61e de Ligne, Colonel Nicolas. Chefs de Bataillon Malval et Bodelin. 2 Bataillons. 1860 hommes au complet. 1622 hommes présents à Ambleteuse ; 630 hommes présents au Dépôt de Malines (Alombert P. C., Colin J. : « La campagne de 1805 en Allemagne », Paris, Chapelot, 1902, t. 1 (annexes et Cartes), p. 48 et suivantes).
- Napoléon se retourne contre l'Autriche.
L'inaction forcée des flottes de Brest et de Rochefort, le blocus sur les côtes d'Espagne, de celle de la Méditerranée (21 août) interdisent de passer la Manche.
Ne pouvant porter la guerre en Angleterre, Napoléon se retourne contre l'Autriche, dont les armements sont les plus avancés.
/ Campagne d'Autriche, 1805
Le 26 août, l'Empereur ordonne secrètement la levée de ses camps de la Manche. Les sept Corps dont il dispose s'acheminent vers le Rhin sous le nom de la Grande Armée. Les troupes de Davout forment le 3e Corps.
Un "État des présents sous les armes des bataillons de guerre de tous les corps de l'Armée des côtes de l'Océan en marche vers le Rhin, pour servir à établir la distribution des fonds accordés par l'Empereur pour fournir une paire de souliers par homme et le tiers de l'effectif en capotes", daté du 11 fructidor an 13 (29 août 1805) indique que le Corps de droite comprend une 1ère Division composée des :
13e Régiment d’infanterie légère, 1642 hommes.
17e Régiment d’infanterie de ligne, 1739 hommes.
30e Régiment d’infanterie de ligne, 1471 hommes.
51e Régiment d’infanterie de ligne, 1634 hommes.
61e Régiment d’infanterie de ligne, 1506 hommes (Alombert P. C., Colin J. : « La campagne de 1805 en Allemagne », Paris, Chapelot, 1902, t. 1, p. 384).
Le 31 août 1805 (13 Fructidor an 13), Napoléon écrit depuis Pont-de-Briques, au Maréchal Berthier, Ministre de la Guerre, Major général de la Grande Armée : "En conséquence des différents mouvements que j'ai faits avant-hier, ... manque d'un chef de bataillon à la 22e, 26e, 28e, 34e, 55e et 57e de ligne ... Mon intention est que vous me présentiez ... [pour] être chef de bataillon ... au 55e de ligne un capitaine du 61e. Présentez-moi le plus tôt possible [ces nominations].
[Je vous] recommande de me présenter des capitaines ayant six [ans] de grade [et fait la] guerre avec distinction, instruits. Vous sentez que dans le moment où se trouve l'armée [il faut que] ces nominations me soient présentées de suite. Prenez donc les renseignements nécessaires" (Correspondance générale de Napoléon, t.5, lettre 10713).
Le 10 septembre 1805 (23 fructidor an 13), Napoléon écrit depuis Saint-Cloud, au Maréchal Berthier, Ministre de la Guerre, Major général de la Grande Armée : "Mon cousin, donnez ordre :
- aux 3es bataillons des 51e, 30e et 61e de se rendre à Mayence " (Correspondance générale de Napoléon, t.5, lettre 10769).
Le 3e Bataillon du 61e se rend à Mayence, où il entre dans la composition du 2e Corps de Réserve, commandé par le Maréchal Lefebvre.
A Saint-Cloud, le 21 Fructidor an 13 (11 septembre 1805), on soumet à l'Empereur les "Motifs qui ont déterminé le sieur Ponthier, ex-sous-lieutenant au 61e régiment d’infanterie, à se retirer du service par démission; "Le ministre de la guerre fera connaître à cet officier que sa demande ne peut pas être prise en considération", répond Napoléon (Chuquet A. : « Ordres et apostilles de Napoléon, 1799-1815 », Paris, 1912, t.3, lettre 3320 ; Picard E. et Tuetey L. : « Correspondance inédite de Napoléon 1er conservée aux Archives de la Guerre », Paris, 1913, t. 1, lettre 166).
En 27 jours, les troupes de Davout arrivent à Mannheim par Lille, Mona, Charleroi, Namur, Luxembourg, Thionville, Sarrebruck, Kayserlautern et Frankenthal. Leur marche s'exécute par échelons de Division se succédant à une journée de distance.
Composition de la Grande Armée au moment où elle a passé le Rhin pour la campagne d'Autriche.
3e corps d'armée au passage du Rhin dans les premiers jours de vendémiaire an XIV.
1re division.
61e de Ligne, 2 Bataillons, 1,550 hommes (Alombert P. C., Colin J. : « La campagne de 1805 en Allemagne », Paris, Chapelot, 1902, t. 2, p. 158).
Des armées que l'Autriche a mises sur pied, celle du Danube, forte de 80.000 hommes sous les ordres du Général Mack, s'avance vers l'Iller. Napoléon entrevoit la possibilité de la couper de ses communications et règle en conséquence la marche de sa propre armée. Le Corps de Davout passe le Neckar, le 28, et s'arrête en avant de Neckar Elz. Le lendemain et les jours suivants, par Creilsheim, Dinkelsbühl et Oettingen, la 1re Division se dirige vers le Danube, qu'elle doit franchir près de Neubourg.
Les soldats disent de l'Empereur : "Il a trouvé une nouvelle manière de faire la guerre ; il ne la fait plus avec nos bras, mais avec nos jambes". On marche, en effet, tout le jour et une partie de la nuit. On ne s'arrête, que lorsque la fatigue devient extrême et pour quelques heures seulement.
- Combat de Dachau.
Le 7 octobre, le Général Bisson prend position sur la rive droite du Danube, à une lieue et demie de Neubourg. Le lendemain, il se met à la poursuite d'un Corps autrichien (Kienmayer), se repliant vers le Tyrol, et campe à Aichach, sur la route de Munich.
Le 12, le Sous-lieutenant Daubian, du 61e, atteint près de Dachau et culbute en leur faisant des prisonniers les dernières troupes d'une arrière-garde ennemie.
Enfin, le 13, le Général Bisson se porte sur Greifenberg, tandis que Napoléon manoeuvre contre Mack et lui fait mettre bas les armes, avec 26.000 hommes, 60 canons et 40 drapeaux, à la suite des batailles d'Albeck et d'Elchingen.
- Marche sur Vienne.
Débarrassé de l'armée de Mack par la capitulation d'Ulm et la poursuite qui a suivi des échappés de ce désastre, Napoléon se porte contre les Russes dont les colonnes arrivent sur l'Inn.
La "Situation des troupes composant le 3e corps de la Grande Armée à l'époque du 1er brumaire an XIV (23 octobre 1805)" indique que le 61e Régiment d’Infanterie de ligne, Colonel Nicolas, est à la 1ère Division, Général de Division Bisson; il compte 56 Officiers et 142 hommes présents sous les armes. Absents avec solde : 5 Officiers et 3 hommes détachés. Absents sans solde : 1 Officier et 186 hommes aux hôpitaux. 12 hommes en congé. Total 1692 hommes et 13 chevaux (Alombert P. C., Colin J. : « La campagne de 1805 en Allemagne », Paris, Chapelot, 1902, t. 3, 2e partie, p. 1091).
- Combat de Muhldorf.
Le 25 octobre, la 1re Division du 3e Corps bivouaque en arrière d'Haag et le lendemain entre dans Muhldorf. Le Général Kutuzof, qui commande l'armée russe, se retire vers la Traun pour aller au devant d'une seconde armée que conduit le tzar.
"Journal de la division Friant.
Sinkenbach à Mühldorf, le 5 brumaire an 14.
… Les 1re et 2e divisions bivouaquèrent dans les bois à droite de la route sur la crète des hauteurs qui forment le revers gauche du vallon étroit de l'Inn et élevé de 20 à 25 mètres au-dessus de ladite rivière ..... ici comme dans plusieurs autres bivouacs, les divisions ne tinrent point leur rang de bataille, la 1re division tenait la gauche, le 61e régiment était à Mühldorf, dont l'avant-garde s'était rendu maîtresse la veille, et le 17e régiment à Ecksberg, où il y a un château …" (Alombert P. C., Colin J. : « La campagne de 1805 en Allemagne », Paris, Chapelot, 1902, t. 4, p. 231).
Le passage de l'Inn, surtout contrarié par des difficultés matérielles, s'effectue le 28, après un court combat dans lequel se distingue le Sous-lieutenant Grosjean, du 61e. La 1re Division atteint la Salza et campe dans les bois, sur la route de Burghausen à Braunau.
Grande Armée à l'époque du 6 brumaire an XIV (28 octobre 1805). Alombert P. C., Colin J. : « La campagne de 1805 en Allemagne », Paris, Chapelot, 1902, t. 4, p. 711 |
- Combat de Rled.
Le 29, le camp de la 1re Division est établi en deça de Ried. Le lendemain la marche reprend dans la direction de Lambach. Le 17e de Ligne et la Compagnie de Sapeurs, dont quelques hommes du 61e font partie, attaquent en avant de Ried une arrière-garde austro-russe et 1ui font 200 prisonniers. L'ennemi est poursuivi jusqu'à Lambach. La lre Division campe sur le Schweigbach, à gauche de la grande route.
- Combat de Lambach.
Le Général Kutuzof continue sa retraite. Mais il laisse pour retarder le passage de la Traun 4.000 fantassins russes sous les ordres du Général Bagration.
Le 31 octobre, l'artillerie de la 1re Division couvre de projectiles le village d'Aïchet occupé par les Russes. On se bat pendant toute la journée d'une rive à l'autre. Le château de Stadt, bâti au confluent de la Traun et de l'Aller, est seulement enlevé, ainsi que le village d'Aïchet. Pendant la nuit, le pont de Lambach est rétabli. Au point du jour, la 1re Division franchit le cours d'eau et campe sur un plateau qui borde la rive gauche de l'Alben.
Le passage de la Traun coûte au 61e quelques hommes mis hors de combat. Le Général Bisson, grièvement blessé, est remplacé par le Général Caffarelli.
- Combat de Mariazell.
Après avoir pourvu à la sûreté de ses flancs, Napoléon se dirige vers l'Ips. Le 3 novembre, le 61e occupe Steyer à la suite d'un engagement, tandis que le reste du 3e Corps passe l'Enns, dont il a réparé les ponts et s'établit à une lieue de cette rivière, dans un bois.
Le Journal de la Division Friant raconte : "De Kirchberg à Sierninghofen, le 13 Brumaire an 14 (4 novembre 1805).
L'avant-garde marche sur Steyer et prend position sur la crête des hauteurs peu élevées et boisées du vallon de la Steyer, faisant face à la ville; elle s'empare d'abord de la partie de cette ville qui est sur la rive gauche de la Steyer et se rend maîtresse, encore dans ce jour, de la portion qui est entre la Steyer et l'Enns, après une faible résistance ...
Nous fîmes 400 à 500 prisonniers, et perdîmes plusieurs officiers. On envoya un parti de 50 chevaux sur la route d'Enns pour communiquer avec les troupes du général Margaron et quelques troupes à Pichlern, pour garder le pont sur la Steyer. elles rejoignirent l'avant-garde à l'arrivée de la 1re division qui passa l'Enns à Steyer et laissa le 61e dans la ville, quartier général du Maréchal ..." (Alombert P. C., Colin J. : « La campagne de 1805 en Allemagne », Paris, Chapelot, 1902, t. 4, p. 485).
"3e CORPS D'ARMÉE.
Journée du 14 brumaire (5 novembre 1805).
… 1re division : Steyer.
Le 61e occupe la ville. Le reste de la division passe l'Enns et va prendre position à une lieue de Steyer à cheval sur la route, dans un bois ..." (Alombert P. C., Colin J. : « La campagne de 1805 en Allemagne », Paris, Chapelot, 1902, t. 4, p. 527).
L'Empereur pense que pour couvrir Vienne, les Austro-Russes livreront une grande bataille sur la magnifique position de Saint-Poelten. Le Corps de Davout, placé à l'aile droite de la Grande Armée, se rend à Mariazell, afin de se porter de là, par la vallée de la Trasen, sur la ligne de retraite des coalisés.
Le 7, son avant-garde se heurte dans les montagnes, près de Mariazell, à une armée autrichienne que le Général Meervelt conduit à Saint-Poelten. Le combat, auquel participent bientôt toutes les troupes du 3e Corps, est excessivement violent. Mais il a aussi, pour les Français, tous les résultats d'une grande victoire. Le Général Meervelt, complètement battu, est rejeté au-delà des montagnes, vers le sud, après avoir perdu 600 hommes. Il lui est fait 4.000 prisonniers. Deux drapeaux, 18 pièces de canon et 80 chariots de bagages sont ramassés sur le champ de bataille ou retirés des ravins dans lesquels on les a précipités.
Le 8, la 1re Division campe près de Turnitz. Le lendemain, tout le 3e Corps franchit le col d'Ammersberg encombré par les neiges et se porte sur Lilienfeld. Le Général Kutuzof se dérobe en se jetant rapidement sur la rive gauche du Danube par le pont en bois de Mautern, qu'il brûle derrière lui.
- Entrée à Vienne.
La capitale de l'Autriche n'est pas défendue. Le 13, la Division Caffarelli passe sous les ordres du Maréchal Lannes (5e Corps) et traverse Vienne pour aller prendre position, à trois lieues au-delà, sur la route de Brünn. Le 61e est à Hirschteten.
- Opérations en Moravie.
Napoléon complète les mesures qu'il a déjà ordonnées pour la sécurité de ses communications. Puis il pénètre en Moravie à la poursuite des Austro-Russes.
La Division Caffarelli passe le 16 à Hollabrünn, où le Général Bagration sauve par sa ténacité l'armée de Kutuzof, franchit la Thaya à Znaïm et se concentre, le 19, aux environs de Pohrlitz, tandis que les Austro-Russes reçoivent à Wischau les renforts qui leur sont destinés.
L'Empereur accorde à ses troupes quelques jours d'un repos devenu indispensable. Le 61e se refait à Pohrlitz de ses fatigues excessives.
Le 27 dans la soirée, la Division Caffarelli traverse Brünn, où se trouvent le Maréchal Lannes et le Quartier général de Napoléon, et prend position à une lieue de la ville, aur la route d'Olmutz.
Les Austro-Russes sont bivouaqués à Olmutz et plus au sud, dans le camp d'Olschau. Une échauffourée insignifiante, qui a lieu le 27 à Wischau, se termine à l'avantage des coalisés. Elle les enhardit et, le 29, ils se portent en avant pour attaquer l'armée française dont la ligne s'étend depuis Brünn jusqu'à Austerlitz.
Le plan des ennemis est d'agir avec leur gauche, de tourner la droite de Napoléon et de le couper des routes de Vienne. Pour les encourager dans la dangereuse marche de flanc qu'ils entreprennent, l'Empereur reporte son armée sur la rive droite du Goldbach.
La journée du 1er décembre se passe à des reconnaissances. Dans la soirée Napoléon exalte le courage de ses soldats. Une proclamation qu'il leur adresse les renseigne sur ce que fera l'ennemi. Il visite les bivouacs, qui le saluent de leurs acclamations et lui promettent la victoire.
- Bataille d'Austerlitz.
Le 2 décembre, l'Empereur est en mesure d'opposer 81.000 hommes aux 82.500 que conduisent le Tzar et l'Empereur d'Autriche. Entre 7 et 8 heures du matin, le 5e Corps et la Réserve de cavalerie prennent position à hauteur du centre. Le Corps du Maréchal Lannes, composé des Divisions Suchet et Caffarelli, s'appuie au monticule du Santon (ce monticule est surmonté d'une chapelle ayant l'aspect d'un santon. De là le nom que lui ont donné les anciens soldats de l'Armée d'Egypte) et constitue la gauche de l'armée française. Il a pour mission de contenir à tout prix la droite des Austro- Russes, forte de 15 Bataillons et 114 Escadrons (25.000 hommes) que conduisent le Général Bagration et le Prince de Lichtenstein.
L’infanterie est rangée sur deux lignes de bataillons en colonnes d’attaque avec 200 pas de distance. Les Bataillons d’un même Régiment sont accolés. Le 17e Léger garde le Santon, et a détaché un poste à Bosenitz. Les Régiments de la Division Suchet sont disposés dans l’ordre suivant, de la gauche à droite : en première ligne, le 40e et le 34e ; en deuxième ligne, le 88e et le 64e ; la route d’Olmutz masse deux bataillons à gauche et six à droite. Dans la Division Caffarelli, la première ligne est formée, de gauche à droite, par le 30e et le 17e de Ligne, et le 13e Léger. La 2e Brigade de la Division Caffarelli (61e et le 51e) est en seconde ligne, à droite de la route d'Olmutz, à deux cents pas de la 1re. Elle est formée par Bataillons en colonne serrée (Alombert P. C., Colin J. : « La campagne de 1805 en Allemagne », Paris, Teissèdre, 2002, t. 5, p. 185).
Vers 8 heures du matin, au bruit du canon qui tonne sur sa droite, le Maréchal Lannes se porte en avant. La Division Caffarelli, précédée d'une Brigade de cavalerie légère commandée par Kellermann, est attaquée par les Uhlans du Grand-duc Constantin. La cavalerie française se replie par les intervalles des Bataillons et les Uhlans, lancés au galop, sont accueillis par un feu violent de mousqueterie. Quelques pelotons viennent donner contre la seconde ligne. Ils sont écrasés par les 51e et 61e, qui les fusillent à bout portant.
Les Uhlans ayant été secourus, la cavalerie française intervient. On n'aperçoit bientôt qu'une mêlée où tout le monde lutte corps à corps. Enfin, les Russes cèdent le terrain, ce qui permet au Maréchal Lannes de faire attaquer le village de Blaziowitz.
Les Divisions Suchet et Caffarelli continuent leur route d'un pas assuré sous le feu meurtrier de 22 pièces d'artillerie. Les Musiciens, placés au centre des Bataillons, jouent des airs entraînants, pendant que les Tambours battent la charge.
La cavalerie autrichienne charge sur la droite des deux lignes d’infanterie : arrêtée sur le flanc du 17e, elle passe derrière ce Régiment ; mais il fait demi-tour, pendant que le 61e se forme en carré. Les Régiments russes essuient le feu des deux lignes et s’échappent en laissant de nombreux morts sur le terrain. Blaziowitz est prise. Plusieurs relations françaises indiquent qu’il y aurait eu des Autrichiens parmi les défenseurs de Blaziowitz, et que la cavalerie russe aurait sabré ces malheureux au moment où le 13e Léger et le 51e les faisaient prisonniers. Il est avéré qu’il n’y avait pas d’infanterie autrichienne à Blaziowitz, et que nos soldats ont dû être trompé par quelque analogie d’uniformes ; mais il semble bien que les cavaliers russes ont sabré leur infanterie (Alombert P. C., Colin J. : « La campagne de 1805 en Allemagne », Paris, Teissèdre, 2002, t. 5, p. 192).
Vers midi, Blaziowitz est enlevé vigoureusement par la Division Caffarelli, cependant que la Division Suchet s'empare de Kruch et d'Hollubitz.
Vers midi, le combat devient très vif. Pendant que la Division Nansouty charge au sud de Kruch et d’Holubitz, une partie de la Division Caffarelli (30e, 17e et 61e) se rabat à droite pour enlever ces deux villages au 6e Régiment de Chasseurs russes. Le reste du 5e Corps, la cavalerie légère de Kellermann et les Dragons de Walther combattent le Corps de Bagration. Les deux adversaires ont des forces à près égales en infanterie (8000 hommes de chaque côté) mais la cavalerie russe est très supérieure à la nôtre (5000 contre 2000). Bientôt le 30e Régiment vient rejoindre le 1er Bataillon du 17e à droite de la Division Suchet. "L’infanterie en bataille soutint avec le plus grand calme le feu de la mitraille ; les files renversées étaient aussitôt remplies. L’ordre de Sa Majesté fut fidèlement exécuté et, pour la première fois peut-être depuis la guerre, la plupart des blessés se traînaient seuls à l’ambulance" (Rapport du Général Suchet). Le Général Valhubert, ayant eu la cuisse coupée par un boulet, refuse de se laisser porter à l’ambulance : "je mourrai aussi bien ici ; il ne faut pas qu’un homme en fasse perdre six" (Alombert P. C., Colin J. : « La campagne de 1805 en Allemagne », Paris, Teissèdre, 2002, t. 5, p. 194).
La cavalerie de Lichtenstein, rejetée sur les pentes du plateau de Pratzen, tente un dernier effort. Elle charge tout entière sur la Division Caffarelli, qui la reçoit de front, "avec son aplomb ordinaire" et la disperse en quelques instants. Une seconde tentative n'est pas plus heureuse. Les Cuirassiers d'Hautpoul et de Nansouty se déploient sous la protection de l'infanterie et complètent la déroute des Escadrons autrichiens.
La Division Caffarelli poursuit sa marche jusqu'à un quart de lieue au-delà de la maison de poste de Posoritz. Le Général Bagration, repoussé dans les bas fonds de Kowalowitz, fait un crochet et rallie les débris de son armée à Rausnitz, sur la route d'Olmutz.
Ainsi, vers la gauche, ainsi que l'a dit Thiers, Lannes vient de livrer à lui seul une véritable bataille. Il a fait 4.000 prisonniers et la terre est jonchée autour de lui de 2.000 morts ou blessés tant Russes qu'Autrichiens.
Au centre et à l'aile droite, le désastre des coalisés n'est pas moins grand. Les Grenadiers de tous les corps, formés depuis Boulogne en 10 Bataillons sous les ordres d'Oudinot, appuient le Corps de Bernadotte et le prolongent vers Kobelnitz, où la colonne russe du Général Prysbizewsky met bas les armes.
La bataille d'Austerlitz coûte aux Austro-Russes 15.000 tués ou blessés, 20.000 prisonniers, 270 canons, 400 caissons et la majeure partie de leurs bagages. Les pertes des Français sont de 7.000 hommes.
Le 61e, qui a pris une part très active au rôle glorieux de la Division Caffarelli, ne compte guère cependant qu'une vingtaine de morts. Le Sergent-major Lamotte, le Sergent-fourrier Gay et le Caporal Renoux sont de ce nombre.
"Tous les officiers du régiment, écrit le colonel Nicolas, ont fait leur devoir et ont donné les plus grandes preuves de courage et de talent militaire".
Le Commandant Bodelin, les Capitaines Barras, Hervieu, Clément, Bodin et Joubert, les Lieutenants Lange, Mansuy et Besombes, les Sous-lieutenants Daubian et Lamaire, le Chirurgien-major Geib, l'Aide-chirurgien Galette, les Sergents Antheaume et Engremy, le Caporal Deschamps, le Grenadier Moreau, les Fusiliers Chevalier, Fontaine et Roy, sont cités pour leur brillante conduite.
- Poursuite des Austro-Russes.
La Division Caffarelli bivouaque sur le champ de bataille. Les rigueurs de la saison et l'obscurité de la nuit facilitent, vers Goeding, la retraite des Austro-Russes.
Le 3 au matin, le Maréchal Lannes et la cavalerie de Murat s'engagent sur la route d'Olmutz et campent autour de Wischau. Le 61e est à Rostewitz.
Un armistice convenu le 4 décembre interrompt les hostilités. Le 61e, alors à Prosnitz, rétrograde sur Wischau. Il se rend ensuite, par Brünn, autour de Znaïm.
- Traité de Presbourg.
Le traité de Presbourg termine la guerre avec l'Autriche (26 décembre). La Division Caffarelli quitte les environs de Znaïm le 4 janvier 1806 et se porte sur la Traun par Hollabrünn, Krems, Moelk, Amstetten, Enns où elle rejoint le Maréchal Davout, Wels et Schwanstadt.
- Cantonnements en Allemagne.
Le 61e campe sur la rive droite de l'Agger, depuis Schwanstadt jusqu'à Voeklabruck. Le 19, après un repos de huit jours, on l'établit à Grieskirchen et dans les villages environnants.
Le 23 février, le Général Morand remplace le Général Caffarelli. Le lendemain, le 3e Corps se remet en marche pour aller cantonner dans la principauté d'Oettingen. Le 6le, passe à Lambach, Freysing, Pfaffenhofen, Wohburg, et arrive à destination le 25 mars. On l'établit d'abord à Wallerstein et Apperfheim, puis à Loepsingen et Appelhofen, enfin à Kirscheim et Allerheim où il séjourne jusqu'à la fin de septembre.
Le 22 juin 1806, l'Empereur écrit depuis Saint-Cloud au Général Dejean, Ministre directeur de l'Administration de la Guerre : "Monsieur Dejean, je vous envoie un travail sur l'emplacement que doit occuper la Grande Armée au moment de sa rentrée en France. Vous me proposerez une meilleure répartition, à peu près dans les mêmes divisions, si vous y entrevoyez quelque économie pour le service, soit pour les lits, soit pour le fourrage, soit pour le casernement.
... 3e corps du maréchal Davout
16e et 24e division
... Idem (pour Boulognz) le 61e de ligne à Valenciennes ..." (Correspondance générale de Napoléon, t.6, lettre 11352).
Le 11 juillet 1806, l'Empereur écrit depuis Saint-Cloud, au Maréchal Berthier, Major général de la Grande Armée : "Mon Cousin … La division du général Broussier est composée de 9,000 hommes qui se composent de détachements des 6e, 9e, 15e et 25e d'infanterie légère (la CGN et l’original parlent des 9e, 15e et 25e de Ligne), 76e, 21e, 27e, 30e, 33e, 39e, 51e, 59e, 61e, 69e, 12e, 85e et 111e de ligne : ordonnez que cette division soit dissoute et que ces détachements se dirigent à l'heure même, du lieu où ils se trouvent, par la route la plus courte, pour se rendre à leurs bataillons de guerre de l'armée ..." (Correspondance de Napoléon, t.12, lettres 10478 ; Correspondance générale de Napoléon, t.6, lettre 12461).
Le 3e Bataillon, resté à Mayence sous les ordres du Major Chemineau, n'a participé à la campagne que par l'envoi de quelques renforts.
/ Campagne de Prusse, 1806
Le 8 novembre 1805, par une convention devenue publique un peu contre la volonté des contractants, le Roi de Prusse, Frédéric-Guillaume III, promet à la coalition un secours de 180.000 hommes. Tout un plan de campagne élaboré par le Duc de Brunwick a été adopté vers la même époque. La Prusse doit déclarer la guerre à Napoléon si celui-ci n'accepte pas les conditions d'un ultimatum qui comporte en première ligne l'évacuation de l'Allemagne.
L'ambassadeur du Roi de Prusse est admis, le 28 novembre, auprès de l'Empereur. L'imminence d'une bataille le décide à différer la communication dont il est chargé. Il se contente d'offrir la médiation de son Souverain. Puis, au lendemain d'Austerlitz, il adresse au vainqueur des félicitations "dont la fortune a changé l'adresse".
Au mois de juin 1806, les différents Corps de la Grande Armée sont sur le point d'être rappelés. Mais l'exécution du traité de Presbourg soulève des difficultés et la politique équivoque de la Prusse préoccupe d'autre part Napoléon. La Grande Armée prolonge son séjour en Allemagne où elle se complète par des renforts. La 61e reçoit, le 5 août, un détachement de 600 conscrits tirés du 3e Bataillon.
- Causes de la Guerre.
Dès le commencement de septembre, la rupture ne fait aucun doute. L'établissement de la Confédération du Rhin et l'occupation d'une partie de l'Allemagne en fournissent les prétextes. En réalité, les Prussiens ne désirent la guerre que pour la gloire qu'ils en attendent.
Le Roi de Prusse fait envahir la Saxe pour forcer le cabinet de Dresde à une ligue contre l'Empereur. Toutes les forces de la monarchie prussienne s'avancent vers le Mayn. Napoléon se met en mesure de prendre l'offensive et ordonne, dans ce but, la concentration de la Grande Armée.
Le 24 septembre, le 61e quitte ses cantonnements de Kirscheim et d'Allerheim pour se rendre à Oettingen, où toute la Division dont il fait partie, et que commande le Général Morand, se trouve réunie le 26.
Le 28 septembre 1806, l'Empereur écrit, depuis Mayence, au Général Lorges, Commandant de la 26e Division Militaire : "Vous ferez partir demain en une seule colonne sous les ordres de l’adjudant commandant Levasseur :
30 cuirassiers du 9e
100 hommes du 27e [de ligne]
210 hommes du 30e
120 hommes du 33e
140 hommes du 51e
180 hommes du 61e
80 hommes du 85e
180 hommes du 111e
Chaque homme sera muni de 50 cartouches, cette colonne qui sera au moins de 1 000 hommes se dirigera sur Würzburg et marchera en bon ordre. Chaque soldat devra avoir deux paires de souliers dans son sac.
Cette colonne sera rangée demain matin à 7 heures du matin en avant de Kassel.
L'adjudant commandant Levasseur recevra de nouveaux ordres à Würzburg sur la destination de sa colonne" (Correspondance générale de Napoléon, t.6, lettre 13120).
Un ordre du Major général ayant prescrit au 3e Corps de se diriger sur Bamberg, la Brigade Debilly (51e et 61e) arrive dans cette ville le 2 octobre, par Gunzenhausen, Schwabach, Nuremberg, Erlangen et Forchheim.
Les hostilités commencent le 8, à la suite d'üne note impérative de Frédéric-Guillaume III demandant la retraite immédiate des Français. Les forces prussiennes sont alors groupées en deux masses : l'armée de Thuringe, que commande le Duc de Brunswick sous les yeux du Roi, et l'armée de Saxe aux ordres du Prince de Hohenlohe. La première est concentrée autour d'Erfuth; la seconde se réunit dans la haute vallée de la Saale. Napoléon projette de se porter sur les derrières de ses ennemis et de les couper de leurs communications avec Berlin.
Le Corps de Davout, placé au centre, quitte les environs de Lichtenfels, où il est arrivé le 7, passe le Mayn à Hochstaedt et se porte sur Kronach. Le lendemain il continue sa route, sous la protection des troupes de Murat (combat de Schleitz), et campe à Lobenstein. La 1re Division s'avance jusqu'à Rupersdorf. Le 10, tout le Corps d'armée se concentre autour de Schleitz.
Le brillant combat livré par Lannes à Saalfeld jette le trouble dans l'armée prussienne, qui voyant sa gauche débordée se hâte de rétrograder sur Weimar.
Le 11, la lre Division, formant l'avant-garde du 3e Corps, atteint Auma où elle prend position. Le 12, elle bivouaque à 9 heures du soir, sur les hauteurs, en arrière de Naumburg, après un combat de cavalerie livré par le Général Vialannes. Elle s'établit le lendemain le long de la route de Merseburg, entre Naumburg et le pont de Freyburg. Le pont de Koesen est solidement gardé par un Bataillon du 25e de Ligne.
Par ses manoeuvres habiles, l'Empereur a placé le 3e Corps de telle sorte, que l'armée de Frédéric-Guillaume III est à la veille "de subir le même sort que le général Mack tant censuré, tant injurié par les Prussiens".
En apprenant que Davout a pris position à Naumburg, le Duc de Brunwick ordonne à son armée une retraite rapide vers Apolda et Freyburg pour ressaisir ses communications et s'assurer le passage de la Saale. Le Prince de Hohenlohe, posté à Capellendorf entre Iéna et Weimar, a pour mission de couvrir ce mouvement.
Le 13 au soir, un ordre de l'Empereur prescrit à Davout de se porter le lendemain sur Apolda.
"C'est ainsi que le 3e corps, composé de trois divisions d'infanterie et de trois régiments de chasseurs à cheval, ne formant que 26,000 combattants, aura à lutter contre une armée forte de 54,000 hommes d'infanterie bien exercée et de plus de 12000 hommes de cavalerie en grande réputation dans l'Europe militaire" (Journal des opérations du 3e corps pendant les années 1806 et 1807. (Rapport rédigé par le général Legrand, chef d'état-major de Davout). Arch. hist. du min. de la guerre. Ce rapport a été publié récemment {Paris, 1896, in-8), d'après une copie).
- Bataille d'Auerstaedt.
Les Prussiens ont passé la nuit dans le voisinage d'Auerstaedt. Le 14 au matin, le Maréchal Davout les attaque résolument, malgré san infériorité numérique (d'après les instructions de Napoléon, le Maréchal Davout réclama l'appui de Bernadotte. Ce Maréchal lui "répondit qu'il partait pour Camburg").
La 1re Division, par sa position même, n'entre en ligne qu'en dernier lieu. Le combat se poursuit déjà avec fureur du côté de Hassenhausen entre les 2e et 3e Divisions (Friant et Gudin) du 3e Corps et les Divisions Schmettau, Wartensleben et Orange de l'armée prussienne, lorsque Morand débouche sur le champ de bataille.
La Brigade Debilly oblique à gauche vers Rehhausen et se déploie sous une pluie de mitraille, en face de la Division Wartensleben. Son mouvement est à peine commencé, qu'elle est assaillie par la cavalerie de cette Division, renforcée d'autres corps commandés par le Prince Guillaume de Prusse. Les Bataillons français, formés en carrés, ne tirent qu'à trente pas et se font un rempart des cadavres de leurs adversaires. Dans l'intervalle des charges, Davout et le Général Morand se portent tantôt dans un carré, tantôt dans un autre et sont partout témoins de l'intrépidité des troupes. Aucun carré n'est entamé. Le Prince Guillaume est blessé. Enfin, la cavalerie prussienne se retire et les Bataillons se reportent en avant.
"La droite de la division Morand commence à gagner du terrain. Le 61e régiment, commandé par le général Debilly et le colonel Nicolas, avance à la tête du ravin qui conduit à Rehhausen. Ce ravin est défendu par une nombreuse infanterie prussienne soutenue par un grand nombre de bouches à feu. Le choc est terrible. On se bat à portée de pistolet. La mitraille ouvre les rangs qui aussitôt se resserrent. Chaque mouvement du 61e est dessiné sur le terrain par les braves qu'il y laisse. Enfin, l'audace et l'intrépidité l'emportent. L'ennemi renversé et en désordre abandonne ses canons" (Journal des opératins, p. 41).
Le village de Rehhausen est enlevé à la baïonnette et dès ce moment la victoire est acquise aux Français. Les nouveaux efforts que tente le Roi de Prusse et l'entrée en ligne de ses dernières réserves, n'ont plus pour but que de protéger la retraite de son armée dans la direction de Weimar. La journée se termine dans le voisinage d'Eckartsberg, où les troupes de Davout arrivent exténuées vers 4 heures et demie.
Les pertes de l'ennemi sont de 500 Officiers et de 10.000 bommes mis hors de combat. Le Duc de Brunswick et le Général Scbmettau comptent parmi les morts. Le frère du Roi et la plupart des Généraux sont blessés. De nombreux drapeaux, 115 pièces de canon et 3.000 prisonniers restent aussi au pouvoir des Français (l'artillerie du 3e Corps n'était que de 44 pièces).
Le 3e Corps, de son côté, a beaucoup souffert de la bataille. Près de 7.000 hommes sont tués ou blessés. La 1re Division a perdu, pour sa part, plus du tiers de son effectif. Le Général Debilly est tué.
Au 61e, les Capitaines Buignet et Dumenge, les lieutenants Lefebvre, Garceran, Besombes et Jehan, les Sous-lieutenants Galette et Lemaire, le Sergent-major Pedot, les Sergents Bottus, Eluet, Lawdet, Baraux, Peret et 141 Caporaux ou soldats sont tués ou meurent de leurs blessures. Le Colonel Nicolas, le Commandant Peugnet, les Capitaines Pouget, Dupré, Regnier, Joubert, Montet et Duhoux, les Lieutenants Combarieu, Deloménie, Labroue, Bellangé et Abeille, les Sous-lieutenants Antbeaume, Andrieu, Jugenelle, Dessirier, Vallet et Soyez, ainsi que 300 Sous-officiers, Caporaux ou soldats sont blessés. Le Commandant Bodelin est cité pour sa brillante conduite.
Un modeste Fusilier de la 7e Compagnie du 2e Bataillon, nommé Péré dit "l'Empereur", se distingue par son courage et aussi par un trait d'esprit. "Au moment où le feu est le plus vif, le danger le plus grand, Péré s'écrie: "Mes amis, suivez l'Empereur", marche en avant et est suivi de tous ses camarades" (Journal des opérations, p. 51. Péré fut nommé Caporal de Grenadiers et décoré de la Légion d'honneur).
Napoléon, vainqueur à Iéna de l'armée du Prince de Hohenlohe, apprend avec joie l'éclatante victoire remportée par Davout.
"Je regrette les braves que vous avez perdus, lui écrit-il, mais ils sont morts au champ d'honneur. Témoignez ma satisfaction à tout votre corps d'armée et à vos généraux. Ils ont acquis pour jamais des droits à mon estime et à ma reconnaissance".
Le 5e Bulletin de la Grande Armée, daté de Iéna, le 15 octobre 1806, raconte : "La bataille d'Iéna a lavé l'affront de Rosbach, et décidé, en sept jours, une campagne qui a entièrement calmé cette frénésie guerrière qui s'était emparée des têtes prussiennes.
… nous n'avons à regretter, parmi les généraux, que la perte du général de brigade Debilly, excellent soldat. Parmi les blessés, le général de brigade Conroux ; parmi les colonels morts, les colonels … Nicolas, du 61e de ligne …" (Panckoucke : « Œuvres de Napoléon Bonaparte », 1821-1822, t. 4, p. 40 ; Kermoysan « Napoléon, Recueil par ordre chronologique de ses lettres, proclamations, bulletins », Paris, 1853, t.2, p. 33 ; Correspondance de Napoléon, t.13, lettres 11009).
- Marche sur Berlin.
Dans la soirée du 14, les troupes du 3e Corps bivouaquent sur le champ de bataille entre Eckartsberg et Auerstaedt. Le lendemain, la 1re Division s'engage sur la route de Leipzig et marche sur Berlin. Les troupes françaises lancées dans toutes les directions, ramassent des prisonniers par milliers. La Prusse n'a plus d'armée et l'affront de Rosbach, subi en 1757 par les armes de Louis XV, est lavé sur le terrain même où il a été infligé. Le monument qui en perpétuait le souvenir est renversé par le 3e Corps.
La 1re Division passe le 18 à Leipzig et le 20 à Wittenberg, où elle franchit l'Elbe, après avoir mis en fuite un détachement qui essaie d'en défendre le pont.
Comme témoignage de sa satisfaction, l'Empereur donne aux troupes de Davout "la plus belle récompense pour des Français" et décide qu'elles précèderont à Berlin les autres Corps de la Grande-Armée. Le 25 octobre, dix-sept jours après le commencement de la campagne, la 1re Division entre, par la chaussée de Dresde, dans la capitale de la Prusse et défile crânement devant une foule immense accourue pour voir de près les héros d'Austerlitz et d'Auerstaedt. Le 3e Corps traverse la ville, où Napoléon n'arrive que deux jours après, et s'arrête à Friedrichfeld sur la route de Francfort.
Le 28, l'Empereur se rend au camp de Davout. En passant devant le front des 12e, 61e et 85e de Ligne, qui ont le plus souffert à Auerstaedt, parce qu'ils ont soutenu les plus grands efforts, Napoléon se montre attendri de savoir morts ou grièvement blessés beaucoup de vieux soldats dont il connaissait le dévouement et la bravoure et dont les noms lui étaient familiers. Il distribue 500 croix de la Légion d'honneur et fait de nombreuses promotions.
Le 22e BULLETIN DE LA GRANDE ARMÉE, daté de Berlin le 29 octobre 1806, raconte : "… L'Empereur a passé, le 28, la revue du corps du maréchal Davout sous les murs de Berlin. Il a nommé à toutes les places vacantes ; il a récompensé les braves. Il a ensuite réuni les officiers et sous-officiers en cercle et leur a dit : « Officiers et sous-officiers du 3e corps d'armée, vous vous êtes couverts de gloire à la bataille d'Iena ; j'en conserverai un éternel souvenir. Les braves qui sont morts, sont morts avec gloire. Nous devons désirer de mourir dans des circonstances si glorieuses ». En passant la revue des 12e, 61e et 85e régiments de ligne, qui ont le plus perdu à cette bataille, parce qu'ils ont dû soutenir les plus grands efforts, l'Empereur a été attendri de savoir morts ou grièvement blessés beaucoup de ses vieux soldats, dont il connaissait le dévouement et la bravoure depuis quatorze ans ..." (Panckoucke : « Oeuvres de Napoléon Bonaparte », 1821-1822, t. 4, p. 80 ; Kermoysan « Napoléon, Recueil par ordre chronologique de ses lettres, proclamations, bulletins », Paris, 1853, t.2, p. 67 ; Correspondance de Napoléon, t.13, lettres 11111 ; cité par Mazade C. (de) : « Correspondance du Maréchal Davout, prince d'Eckmühl : ses commandements, son ministère, 1801-1815 », t. 1, p. 304).
Ce même 29 octobre 1806, l'Empereur écrit, depuis Berlin, au Général Dejean, Ministre Directeur de l’Administration de la Guerre : "Monsieur Dejean, les 85e, 12e, 61e et 25e régiments d'infanterie de ligne, et le 13e régiment d'infanterie légère ont beaucoup souffert. Je pense qu'il faut diriger les conscrits réfractaires et ceux qui n'ont point de destination sur ces corps" (Brotonne (L. de) : « Dernières Lettres inédites de Napoléon 1er, collationnées sur les textes et publiées » ; Paris, 1903, t. 1, lettre 486 (« les 25e, 12e, 61e et 25e régiments d'infanterie légère ont beaucoup souffert » ; pas de 13e Léger mentionné) ; Correspondance générale de Napoléon, t.6, lettre 13374).
Le Colonel Nicolas resté à l'hôpital de Naumburg, est nommé Général de brigade et remplacé par le Colonel Faure (Nicolas (Jean), né à Marbotte (Meuse) en 1765. Capitaine dans la Légion de la Meuse en 1792, Chef de Bataillon en 1803, Colonel en 1804, Général de Brigade en 1806, commanda le département des Pyrénées-Orientales en 1807 et la place de Barcelone en 1813. Devenu disponible en 1816, il fut retraité en 1825. Napoléon le créa Baron de I'Empire).
Opérations en Pologne.
Napoléon est avisé qu'une armée russe, conduite par Benningsen, vient de franchir le Niémen et marche sur Varsovie. Il ordonne à ses différents Corps de se porter contre elle et le 29, après quatre jours de repos, la 1re Division quitte Friedrichfeld pour se rendre à Posen, où elle arrive le 10 novembre par Francfort sur l'Oder et Meseritz.
Le Général Morand cantonne sur la rive droite de la Wartha, autour de Kobylepole, où il séjourne jusqu'au 15. Les Français sont partout reçus comme des libérateurs par les populations opprimées de Pologne. Les garnisons prussiennes des petites villes sont faites prisonnières par les habitants. Des Régiments polonais s'organisent pour le service de la France.
Le 11 novembre 1806, le Maréchal Berthier, Prince de Neuchâtel et Valengin, Major général de la Grande Armée, écrit depuis Berlin, au Général Dejean : "J'ai l'honneur de prévenir Votre Excellence qu'indépendamment des détachements que j'ai ordonné à M, le maréchal Kellermann de faire partir dans la première quinzaine de novembre, ainsi que je vous en ai informé par ma lettre du 2, je viens de lui adresser l’ordre de former huit bataillons provisoires conformément à l'état de composition que je joins ici.
Chaque bataillon sera composé de compagnies fournies par les troisièmes bataillons des corps de la Grande Armée, à raison d'une par bataillon, et chaque compagnie sera complétée à 140 hommes.
Le maréchal Kellermann nommera un chef de bataillon et un adjudant-major pour chaque bataillon et un major pour commander deux bataillons. Il aura soin de ne pas prendre les majors dans les mêmes corps où il prendra les chefs de bataillon ou adjudants-majors.
Je donne l'ordre aux généraux commandant les 25e et 2e divisions militaires de faire diriger de suite sur Mayence les compagnies que doivent fournir les bataillons qui ne sont pas stationnés dans les 5e et 26e divisions.
Pour accélérer la formation et le départ de ces bataillons il ne sera pas nécessaire que les conscrits soient dressés ; il suffira qu'ils aient huit ou dix jours d'instruction, qu'ils soient armés, qu'ils aient la veste, la culotte., les guêtres, le chapeau d'uniforme et une capote. Il ne faudra pas attendre qu'ils aient l'habit.
Sa Majesté espère que ces troupes seront réunies à Mayence le 25 et en partiront le même jour pour se rendre le plus promptement possible, conformément aux ordres que je donne à M. le maréchal Kellermann : savoir les 5e et 6e bataillons à Cassel pour maintenir la tranquillité de cet électorat et les six autres à Magdeburg où ils achèveront leur instruction.
Je préviens le maréchal Kellermann qu'il ne doit pas perdre un moment pour former ces bataillons que, pourvu qu'ils soient armés, tout est bon ; qu'ils seront fournis à Magdeburg de tout ce qui leur sera nécessaire ; que Sa Majesté doit en tirer deux avantages, puisqu'ils ne coûteront rien en France et qu'ils garderont Magdeburg, ce qui rendra d’autres troupes disponibles ..." (Picard E. et Tuetey L. : « Correspondance inédite de Napoléon 1er conservée aux Archives de la Guerre », Paris, 1913, t. 1, lettre 793). Le 5e Bataillon doit comprendre 1 compagnie du 27e Régiment de ligne, 1 du 30e, 1 du 33e, 1 du 51e, 1 du 61e; total : 720 hommes.
Le 12 novembre 1806, le 3e Corps du Maréchal Davout comprend (effectifs théoriques car tous les renforts n’ont pas encore rejoint) :
1ère Division, Général Morand : 13e Léger, 17e, 30e, 51e et 61e de Ligne, 10 Bataillons, 12 pièces, 8103 hommes.
2e Division, Friant : 33e, 48e, 108e, 111e de Ligne, 8 Bataillons, 8 pièces, 6319 hommes.
3e Division Gudin : 12e, 21e, 25e et 85e de Ligne, 8 Bataillons, 12 pièces, 5023 hommes.
Cavalerie légère, Général Marulaz : 1er, 2e et 12e chasseurs, 9 Escadrons, 1527 hommes (Cazalas E. : « Mémoires du Général Bennigsen », tome 2, page 296).
Le 16, le 3e Corps se remet en mouvement dans la direction de Varsovie.
La 1re Division fait son entrée dans Varsovie, le 29, saluée par les mêmes acclamations qui l'ont accueillie à Posen.
Maître de Vartovie, Napoléon se contente, à cause des rigueurs de la saison, de faire observer l'armée russe, dont la gauche s'appuie au Bug, près de Czarnowo, et la droite à l'Ukra. Le 3e Corps reste jusqu'au 20 décembre, dans la capitale de la Pologne, mais non pas toutefois sans avoir avec les Russes de fréquents engagements.
Le 7 décembre 1806, Davout écrit, depuis Varsovie, au Grand-Duc de Berg : "Monseigneur, le général Morand, qui est établi à Praga, a reçu l'ordre dès hier de mettre à la disposition du général Cazals le nombre de travailleurs militaires que cet officier général demanderait.
J'ai vu par moi-même, hier soir, à Praga, un certain nombre de paysans que les officiers du génie et des sapeurs étaient occupés à rassembler.
Les régiments qui se trouvent en ce moment sur la rive droite de la Vistule sont :
1ère division. Les 17e, 30e, 51e et 61e de ligne ; quelques détachements de ces deux derniers régiments qui étaient de garde passeront aujourd'hui.
3e division. Les 12e et 85e de ligne ont commencé leur passage hier et le finissent aujourd'hui ; 300 du 25e ont déjà passé, le reste passera dans la journée.
2e division. Rien.
Cavalerie. Rien.
ARTILLERIE,
Deux pièces de 4 de la 1re division et une compagnie d'artillerie à cheval sont passées.
Votre Altesse Impériale n'ignore pas que les moyens de passage sont lents et peu considérables ; il serait même possible que le 25e régiment ne pût entièrement effectuer son passage que demain, les glaçons continuant à rendre ce trajet extrêmement difficile tant par la dérive qu'ils causent aux bateaux que par la difficulté de vaincre de pareils obstacles" (Mazade C. (de) : « Correspondance du Maréchal Davout, prince d'Eckmühl : ses commandements, son ministère, 1801-1815 », t. 1, p. 361, lettre 242).
Le 8 décembre, pendant le combat d'Okunin, la 1re Division donne des craintes à l'ennemi en faisant, vis-A-vis de Dembe un simulacre de passage sur la rive droite de la Narew.
Le 15 décembre 1806, Napoléon écrit depuis Posen au Général Lacuée : "… Je vous recommande, dans la répartition de la conscription, les régiments suivants, qui ont souffert à la bataille d'Iena : les 12e, 25e, 40e, 61e, 85e de ligne …" (Correspondance de Napoléon, t.14, lettres 11478 ; Correspondance générale de Napoléon, t.6, lettre 13870).
- Combat de Czarnowo.
Le 20 décembre, afin de permettre à l'armée française de se reposer en toute sécurité autour de Varsovie, l'Empereur ordonne l'offensive. Le 22, le Corps de Davout se réunit sur les bords de la Narew près d'Okunin et le 23, à 7 heures du soir, la Division Morand franchit ce cours d'eau, pour se porter sur Czarnowo par les bois épais qui précèdent ce village.
Les 51e et 61e de Ligne, conduits par le Général d'Honnières, nommé en remplacement du Général Debilly, passent l'Ukra sous la protection des Voltigeurs. Le village et les environs de Czarnowo, défendus par 15.000 Russes, sont enlevés à la baïonnette.
"Dans ce combat de nuit les manoeuvres sont faites comme en plein jour, avec autant d'ordre et de précision que d'audace" (Journal des opérations, p. 126).
Les Russes comptent 1.800 hommes mis hors de combat et les Français un peu moins de 700. Le 61e, qui a formé le dernier échelon de l'ordre de bataille et n'a pris à la lutte qu'une part très effacée, n'a que des blessés.
- Combat de Golymln.
Le 24, la 1re Division se rend à Nasielsk, dont la 2e Division s'est emparée le même jour à la suite d'un combat assez violent. Le lendemain, les trois Divisions du 3e Corps reprennent leur route dans la direction de Strzegoczyn, d'où l'ennemi, après quelques coups de feu, est délogé par la 1re division.
Le Maréchal Davout ayant appris que deux colonnes russes (Buxhowden et Kaminski) rétrogradent 1'une sur Pultusk, l'autre sur Golymin, ordonne au Général Morand d'appuyer vers ce dernier point le 7e Corps de la Grande Armée (Murat).
La cavalerie du Général Marulaz, qui précède la 1re Division, s'empare tout d'abord de 26 canons et de 200 voitures que les Russes ont abandonnés. Puis elle marche sur Garnowo, où elle opère sa jonction avec la cavalerie du 7e Corps.
Toute la Division, formée en colonne par Bataillons, se porte alors contre les bois de Golymin, que défend une infanterie dix fois plus nombreuse. "L'ennemi fait une vive résistance. Il finit par jeter ses sacs pour charger à la baïonnette, mais le feu et l'audace des bataillons le forcent d'abandonner le bois et le champ de bataille, sur lequel il laisse un grand nombre de morts et 4.000 sacs" (Journal des opérations, p. 138). Comme A Czarnowo, le 61e ne compte que des blessés.
- Cantonnements en Pologne.
Le combat de Golymin, et celui de Pultusk livré non loin de là par le 5e Corps (Lannes) décident les Russes à la retraite. Ils profitent de l'obscurité de la nuit pour évacuer leurs positions et se replier sur Ostrolenka. D'un autre côté le Maréchal Ney (6e Corps) écrase à Soldau un Corps prussien (Lestocq) qui a réussi à se reformer et le rejette sur la Vistule. Momentanément débarrassé de ses ennemis, Napoléon a conquis ce qu'il souhaitait : des quartiers d'hiver. Un Décret du 7 janvier 1807 en détermine les emplacements. Le Corps de Davout occupe les environs de Pultusk et une partie de la région comprise entre la Narew et le Bug.
Les cantonnements du 61e sont pris autour de Kosniewo, sur la rive gauche de la Narew.
/ Campagne de Pologne, 1807
Les Russes, malgré leurs pertes, ne se sont pas éloignés autant que le croit Napoléon. Dès le 12 janvier, le Général Benningsen quitte Grodno à la tête d'une armée de secours et forme le projet de se porter par la basse Vistule, sur les communications de la Grande Armée. Il passe la Bober près de Goniondz, recueille sur sa route les troupes des Généraux Buxhowden et Kaminski, opère sa jonction avec le Corps prussien du Général de Lestocq.
Le 15 janvier 1807, l'Empereur écrit, depuis Varsovie, au Maréchal Berthier, Ministre de la Guerre, Major général de la Grande Armée : "Donnez ordre que sur les 1500 capotes que j'ai destinées au corps du maréchal Augereau et qui devaient être délivrées aujourd'hui :
4 capotes soient données au détachement du 24e de ligne
Donnez ordre qu'il soit délivré :
... au 61e 2 ...
Donnez ordre qu'il soit délivré des magasins de Varsovie 20 paires de souliers au 7e d'infanterie légère,
36 au 61e id. ..." (Picard E. et Tuetey L. : « Correspondance inédite de Napoléon 1er conservée aux Archives de la Guerre », Paris, 1913, t. 1, lettre 881 ; Correspondance générale de Napoléon, t.6, lettre 14057).
Bennigsen arrive, le 25, devant Mohrungen, où son avant-garde se fait battre par les Divisions Dupont et Drouet d'Erlon.
Le 26 janvier 1807, l'Empereur écrit, depuis Varsovie, au Général Lacuée, Directeur général des revues et de la conscription : "L’état n°3 que vous m'avez accordé m'a fait plaisir ; il m'a paru ne rien laisser à désirer. Je disposer des 20000 hommes de la réserve de la manière suivante :
Annexe
Etat des hommes de la réserve à donner aux corps d'infanterie ci-après :
Ceux 12e de ligne 280 hommes ...
161e 260" (Correspondance générale de Napoléon, t.6, lettre 14172).
A la nouvelle de ce combat, l'Empereur reprend l'offensive. Le 28, le 3e Corps se concentre à Pultusk. Le plan de Napoléon consiste à déborder les Russes par leur gauche et à les rejeter vers la mer. Mais la capture d'un courrier destiné à Bernadotte donne l'éveil au Général Benningsen, qui se replie en toute hâte sur Allenstein. L'armée française le serre de si près, que sa retraite est inquiétée à chaque instant (combats de Bergfried, Deppen, Guttstadt, Hoff, etc.).
Le 3e Corps, placé à l'aile droite, passe à Myszyniec, Ortelsburg, Passenheim, Wartenburg et Guttstadt. La 1re Division arrive le 6 février devant Heilsberg, dont elle s'empare et qu'elle traverse pour aller s'établir à Grossendorf sur la rive gauche de l'Alle.
Le Général Benningsen,s'est replié jusque dans les plaines de la Prusse entre l'Alle et la Passarge, pour y trouver à la fois un champ de bataille à sa convenance et couvrir la place de Koenigsberg.
Le 7 février, Napoléon se rend maître d'Eylau. Le Maréchal Davout, en marche sur cette ville, est dirigé vers Bartenstein. Le rôe du 3e Corps est de se porter, le lendemain, sur la gauche des ennemis. Le Général Benningsen comprenant en effet que l'intérêt et l'honneur de son armée, autant que la force des circonstances, lui commandent de se battre, a pris position au-delà d'Eylau, depuis Altrof jusqu'à Serpallen.
Les forces en présence ne sont pas égales. L'Empereur ne peut opposer que 54.000 hommes aux 70.000 combattants de l'armée russe et aux 10.000 prussiens du corps de Lestocq.
- Bataille d'Eylau.
La bataille d'Eylau débute, le 8 au point du jour, par une effroyable canonnade. Les deux armées luttent sur un terrain coupé d'étangs glacés que la neige recouvre. Vers sept heures, les premières troupes du 3e Corps arrivent à Molwitten où elles se placent à la droite de la Division Saint-Hilaire, du 4e Corps. Le combat se poursuit sur ce point avec un acharnement sans exemple. La Brigade d'Honnières, placée en réserve, est en arrière du village de Serpallen contre lequel se concentrent tous les efforts.
"Vers midi, dit le Général Morand, les bataillons (de la 1re brigade) étant réduits au tiers, je fis avancer, à la gauche de ce village, le 61e régiment ... Vers une heure après-midi, la ligne d'infanterie de l'ennemi, contre laquelle nous combattions depuis cinq heures, descendit des hauteurs, s'avançant sur nous à la baïonnette. Nous courûmes à sa rencontre ; cette ligne fut renversée, mise en fuite et poursuivie jusqu'à ses canons dont nous nous emparâmes. Dix-huit bouches à feu étaient à notre pouvoir ; nous étions maîtres des hauteurs dominant la route de Koenigsberg, un grand nombre de prisonniers ne pouvaient nous échapper, lorsque tout à coup une colonne de dragons russes, que les accidents de terrain nous avaient cachée, tombe sur le flanc d'un bataillon du 10e d'infanterie légère qui, formé en colonne, avait appuyé la gauche de notre ligne, tandis que le 61e, formé sur deux lignes, couvrait la droite ("Un vent des plus violents nous lançait à la figure une neige fort épaisse qui empêchait de voir à plus de quinze pas" (Mémoires du Général de Marbot, t. 2, p. 338). Les Russes recevaient la neige par derrière et en étaient, par cela même, beaucoup moins incommodés). Le bataillon du 10e se renverse sur notre ligne ; les bataillons se groupent ; les efforts des officiers ne peuvent parvenir à former un carré. L'ennemi presse sur tous les points un groupe qu'il ne peut pénétrer, mais qu'il refoule une centaine de toises. Quelques escadrons de dragons arrivent, qui occupent l'ennemi et donnent ainsi le temps à l'infanterie de se reformer. La division Saint-Hilaire, qui avait beaucoup souffert, ne put nous soutenir ...
Cependant, l'ennemi ayant été vivement attaqué sur la route de Koenigsberg, nous reprîmes les hauteurs, où nous nous sommes maintenus jusqu'à la nuit, que nous y avons passée et d'où ses colonnes ont été vivement canonnées.
La division a fait des efforts prodigieux. Jamais troupe n'a déployé plus de courage, de fermeté, de valeur et d'audace. L'énorme perte qu'elle a faite en est la malheureuse preuve. Elle s'est trouvée pendant six heures sous un feu terrible d'artillerie et de mousqueterie ; l'espace qu'elle a parcouru pour arriver à l'ennemi est marquée par des légions de cadavres ..." (Rapport du Général Morand daté du bivouac d'Eylau le 9 février 1807).
"Les 30e et 17e régiments avaient à leur gauche1 bataillon du 10e régiment d'infanterie légère de la division Saint-Hilaire, et à leur droite, à quelque distance, les deux lignes du 61e régiment. L'armée russe n'était plus qu'à 200 pas ; elle arrivait tête baissée, la baïonnette en avant, soutenue par 39 bouches à feu. On s'approcha à demi-portée de pistolet ; mais les Russes disséminés et effrayés par le feu que faisaient en marchant nos bataillons lâchèrent pied et s'en furent dans le plus grand désordre, abandonnant leur artillerie, dont les canonniers furent tués sur leurs pièces … lorsqu'un corps de cavalerie et d'infanterie, que les Russes avaient en réserve et que les tourbillons de neige et les accidents du terrain avaient dérobé jusqu'alors, fondit sur le bataillon du 10e régiment d'infanterie légère ... Ce bataillon renversé sur la 1re division y porta le désordre et elle fut refoulée en masse à 200 ou 300 pas ... Un corps de dragons de la division Klein arriva et permit aux bataillons de se reformer en avant de Serpallen, qui resta au pouvoir du général Morand" (Journal des opérations du 3e Corps - In Cazalas E. : « Mémoires du Général Bennigsen », tome 1, page 216).
Vers dix heures du soir, la lutte se termine dans le voisinage d'Auklappen. Tandis que Napoléon fait allumer ses feux de bivouac, les Russes et les Prussiens battent en retraite sur Koenigsberg. La victoire appartient donc aux Français, mais depuis l'antiquité, aucune bataille n'a été plus meurtrière.
Les coalisés perdent 25.000 hommes et les Français environ 20.000, soit en tout 45.000 hommes, dont plus de la moitié sont. tués sur place ou meurent de leurs blessures. La 1re Division du 3e Corps compte à elle seule 2.926 hommes mis hors de combat. Les pertes du 61e dépassent le tiers de son effectif (le 1er février, l'effectif du 61e était de 62 Officiers et 1398 hommes ; le lendemain de la bataille, 21 Officiers et 561 hommes manquaient à l'appel). Le Colonel Faure, les Capitaines Belavoine, Baillargeau, Morel, Loreau, Regnier et Cardon, les Lieutenants Passemard, Gaillard, Laboureau et Jouzeau, le Sous-lieutenant Toupart, les Sergents-majors Barbet et Cardey, les Sergents Dumont, Guenat, Petit et Poiret, les Caporaux Bonnevaux, Cantin, Collet, Deschamps, Grard, Guilbert, Kircq, Leté et Peroneaud sont au nombre des morts ou meurent de leurs blessures. Les Capitaines Jaboulet et Pouget, l'Adjudant-major Peltret, le Lieutenant Delomenie, les Sous-lieutenants Delcroix, Béraud et Baudry sont blessés. Le Capitaine Labroue, le Sergent-major Lambert, le Sergent-tambour Denel, les Sergents Bretinière er Levesque, les Caporaux Fauchoy et Perrin, les Grenadiers Fauquerel et Maurin se distinguent parmi les plus braves.
Le Sergent-major Cardey, qui porte l'aigle de son Bataillon, est frappé de trois coups de sabre et de six coups de lance. Déjà les Russes se précipitent pour lui ravir son précieux fardeau, lorsque le Commandant Peugnet accourt et le dégage.
Le 3e Corps passe la nuit sur le champ de bataille, entre Lampasch et Auklappen. La Division Morand, qui a le plus souffert, reste à Auklappen jusqu'au 11 février et cantonne ensuite à Kapsitten, entre Eylau et Domnau.
- Combat d'Ostrolenka.
Sur les bords de la Narew, à 0strolenka, les Généraux Oudinot et Suchet battent complètement, le 16 février, un Corps suédois aux ordres du Général Essen. Les deux Compagnies d'élite du 3e Bataillon du 61e, employées à la Brigade Ruffin de la Division Oudinot, participent à ce combat où elles n'ont que des blessés.
- Combat de Guttstadt.
Le 16 également, toute l'armée française se rapproche de la Vistule. La 1re Division du 3e Corps passe par Bartenstein, Heilsberg, Guttstadt, Allenstein et cantonne, le 24, autour de Hohenstein. Mais à mesure que les Français se retirent, leurs adversaires deviennent plus hardis. Le 1er mars, les Russes se présentent en force devant les avant-postes du Maréchal Ney et s'emparent de Guttstadt. La Division Morand marche contre eux et contribue à la reprise de la ville. Elle se replie ensuite sur Allenstein, dont le 61e occupe les faubourgs.
Le Major Bouge, du 96e, remplace le Colonel Faure à la tête du Régiment (les Archives administratives du Ministère de la Guerre ne contiennent pas les états de service du Colonel Faure).
Le 6 mars 1807, l'Empereur écrit, depuis Osterode, à Daru, Intendant général de la Grande Armée : "Monsieur Daru, faites une circulaire à tous les commissaires des guerres, pour leur faire connaître les points sur lesquels ils doivent diriger les hommes isolés des différents corps d’armée, ainsi que les bagages et effets desdits corps. Vous y joindrez l'état des corps qui composent chaque corps d'armée, conformément au tableau ci-joint ...
3e corps
... 61e de ligne ...
Dépôts à Thorn ..." (Correspondance générale de Napoléon, t.7, lettre 14497).
- Combat de Villemberg.
Le Maréchal Murat, avec 6.000 cavaliers et les Grenadiers du Général Oudinot, manoeuvre contre le Général Essen et s'empare de Villemberg après un court engagement. Il se porte ensuite sur Wartenburg, puis revient à Allenstein, d'où les Grenadiers sont détachés, le 14, au siège de Dantzig, que conduit le Maréchal Lefebvre (la ville capitule le 26 mai, après 51 jours de tranchées).
- Cantonnements sur les bords de l'Alle.
Le 31 mars, le 65e de Ligne, provenant du 8e Corps, arrive à la Division Morand et forme, avec le 61e, la Brigade du Général Lhuillier (nommé en remplacement du Général d'Honnières tué A Eylau. Le 8e Corps a combattu en Italie contre le Prince Charles, puis en Allemagne contre les Suédois).
Ce même 31 mars, depuis Osterode, Napoléon décide d'accorder 18 aigles d'honneur, dont neuf aux Officiers, et neuf aux Sous officiers et soldats, aux Régiments qui se sont distingués à Eylau. Il écrit au Maréchal Berthier : "Vous enverrez à chaque maréchal ce qui, dans les dispositions suivantes, concerne son corps d'armée, et sans que l'un connaisse ce qui regarde l'autre. 1° Il est accordé aux régiments dont l'état suit 18 aigles de la Légion d'honneur, dont 9 aux officiers et 9 aux sous-officiers et soldats qui se sont fait remarquer par leur courage et leur bonne conduite, depuis le commencement de la guerre de la quatrième coalition : … 61e ... d'infanterie de ligne ...
Du moment que les maréchaux auront reçu ma décision, ils ordonneront à chaque général de division de réunir chez lui les colonels et chefs de bataillon de chaque régiment, ainsi que les généraux, de brigade, et de dresser un procès-verbal qui constate les individus qui méritent le mieux la décoration. Ce procès-verbal sera envoyé au maréchal commandant le corps d'armée, qui le transmettra, avec ses observations, au major général. Tous ces procès-verbaux devront être arrivés avant le 6 avril. Le 7, le major général me les soumettra …" (Correspondance de Napoléon, t.14, lettre 12240 ; Correspondance générale de Napoléon, t.7, lettre 145013).
Le 15 avril, cette Brigade est baraquée à la tête des bois de Deuthen, en arrière d'Allenstein. Elle conserve cette position jusqu'au 5 juin et participe au combat d'Allenstein, livré le 15 mai contre les Cosaques. Le 61e se renforce par des détachements tirés de son Dépôt (son effectif, au 31 mai, est de 1154 hommes. Napoléon tire des Dépôts 12 Régiments de conscrits dont l'instructton se fait en marchant).
Le 21 avril 1807, l'Empereur écrit, depuis Finkenstein, au Maréchal Kellermann, commandant un Corps de réserve de Gardes nationales : "Mon cousin, dans l'état de situation de votre armée de réserve au 15 avril, je trouve ...
Que le 44e avait 462 hommes ; pourquoi n'en enverriez-vous pas 300 hommes ...
Je suppose que si vous ne les avez pas fait partir, c'est qu'ils n'étaient pas habillés. Mais moyennant l'autorisation que je vous ai donnée de les envoyer non habillés dans les régiments provisoires et de garnison, je pense que vous les avez mis en route ...
Je vois que de Mayence vous pourriez faire partir :
du 15e de ligne 400 hommes ...
du 61e 800 ...
Je suppose donc que tout cela sera parti ; si ce ne l'était pas, faites-le parti sans délai ..." (Correspondance générale de Napoléon, t.7, lettre 15379).
Le 7 mai 1807, l'Empereur écrit, depuis Finkenstein, au Général Lacuée, Directeur général des Revues et de la Conscription : "Dans votre projet de distribution, je vois que ... le 61e, ... n'ont pas suffisamment. Il faut porter à chacun de ces 32 régiment l’un portant l’autre 300 hommes, ce qui fera 9 600 hommes. Vous trouverez de l'économie en suivant les bases que je vous indique, c'est-à-dire en mettant quelque chose de moins pour les légions, pour l'artillerie, pour les dragons" (Correspondance générale de Napoléon, t.7, lettre 15579).
Composition du 3e Corps du Maréchal Davout au 16 mai 1807 :
1ère Division, Général Morand : 13e Léger, 17e, 30e, 51e et 61e et 65e de Ligne, 12 Bataillons, 7185 hommes.
2e Division, Friant : 15e Léger, 33e, 48e, 108e, 111e de Ligne, 10 Bataillons, 7361 hommes.
3e Division Gudin : 7e Léger, 12e, 21e, 25e et 85e de Ligne, 10 Bataillons, 7632 hommes.
Artillerie et Génie
Cavalerie légère, Général Marulaz : 1er, 2e et 12e chasseurs, 9 Escadrons, 692 hommes (Cazalas E. : « Mémoires du Général Bennigsen », tome 2, page 302).
Le 21 mai 1807, l'Empereur écrit, depuis Finkenstein, au Général Lacuée, Directeur général des Revues et de la Conscription : "J’ai reçu les états de situation que je vous avais demandés. Les 20000 hommes de la réserve doivent être distribués de la manière suivante :
12000 hommes à l'infanterie de ligne et légère conformément au tableau ci-joint.
… Répartition de 12 000 hommes de la réserve de 1808 entre les corps ci-après de l'infanterie de ligne et de l'infanterie légère.
... INFANTERIE DE LIGNE
CORPS NOMBRE DES CONSCRITS
... 61e 100 ..." (Correspondance générale de Napoléon, t.7, lettre 15681).
Combat de Koenen.
Les Russes et les Français ne sont séparés sur certains points que par la ligne de l'Alle. Au commencement de juin, le Tzar Alexandre, arrivé depuis peu avec une armée de secours, ordonne de reprendre l'offensive. Le 5, à 7 heures du matin, 800 Cosaques forcent le passage du cours d'eau, à Koenen et engagent le combat contre une Compagnie de Voltigeurs du 61e établie dans le voisinage de cette localité. Une fusillade bien nourrie les contient pendant quelques instants, mais les Voltigeurs sont écrasés par le nombre et contraints à se replier sur Kaltfliess, après avoir perdu 16 hommes. Le Capitaine Hamel est au nombre des blessés.
Le même jour, le Maréchal Ney est attaqué, vers Guttstadt, par 40.000 hommes ; il fait bonne contenance et se retire sur Deppen. Le 3e Corps, qui a pris les armes pour le soutenir, se porte sur Neu-Schoenenberg.
"Un parti de cavalerie ennemie passa le 5 Juin l'Alle à la nage à Kainen ; une partie mit pied à terre et attaqua le camp d'une compagnie de voltigeurs du 61e régiment, qui se replia sur Kaltfliess avec une perte de 6 hommes tués et de 10 blessés.
On apprit en même temps que le pont de l'Alle à Bergfried avait été forcé" (Journal des Opérations du 3e Corps in Cazalas E. : « Mémoires du Général Bennigsen », tome 2, page 137).
- Reprise de l'offensive.
Cette résistance, d'autres combats heureux livrés par les Maréchaux Soult et Murat et aussi une ruse de Davout provoquent la retraite des Russes (dans une dépêche qu'il fait capturer par les Cosaques, Davout prévient le Maréchal Ney que toute la Grande Armée va se porter sur les derrières de l'armée russe). L'Empereur, qui s'attend à une grande bataille du côté de Saalfeld, poursuit alors ses ennemis avec l'intention de s'emparer de Koenigsberg et de les refouler derrière la Pregel.
Le 3e Corps, en marche sur Osterode, est dirigé sur Heilsberg. La 1re Division franchit la Passarge à Hasenberg et campe le 9, à Knopen. Puis elle prend position à Alt-Kirch, pendant que Napoléon gagne la bataille d'Heilsberg.
Le 11, vers 8 heures du matin, tout le 3e Corps débouche sur les hauteurs de Grassendorf. Les Russes sont coupés de leur retraite sur Eylau et rejetés sur l'Alle.
- Bataille de Friedland.
Le 12, la 1re Division se rend à Warschkeiten, près d'Eylau. Elle y séjourne le lendemain jusqu'à 4 heures du soir et repart contre le Général de Lestocq, dans la direction de Koenigsberg où le Maréchal Davout a reçu l'ordre de se porter à marche forcée. La 1re Division et avec elle tout le 3e Corps doivent à cette circonstance de ne pas se trouver le 14, à la bataille de Friedland. Le 61e y est cependant représenté par les Grenadiers et les Voltigeurs de son 3e Bataillon. On sait quel fut le rôle de la Division Oudinot à laquelle ils appartenaient et quel carnage elle fit de l'aile droite ennemie.
La victoire de Friedland a pour conséquence la retraite du Tzar sur le Niémen. Le 3e Corps est arrêté à Abschwangen dans sa marche vers le champ de bataille et dirigé d'abord sur Tapiau, où il franchit la Pregel, puis sur Labiau et Tilsitt. Il fait de nombreux prisonniers aux Prussiens sortis de Koenigsberg.
- Traité de Tilsitt.
Le Maréchal Davout arrive le 19 dans le voisinage de Tilsitt et cantonne sur les bords du Niémen.
"Là devait se terminer la marche audacieuse de l'armée française, qui, partie de Boulogne en septembre 1805, avait parcouru la plus grande étendue du continent et vaincu en vingt mois toutes les armées européennes" (Thiers, Hist. du Consulat et de l'Empire).
Le 25 juin, les deux Empereurs se réconcilient dans une entrevue célèbre sur un radeau construit au milieu du Niémen. Par le traité de Tilsitt, signé le 8 juillet, le Tzar s'engage à fermer ses ports aux Anglais (blocus continental) et renonce à une partie de la Pologne, qui devient le Grand-duché de Varsovie. Une lourde contribution de guerre est imposée aux Prussiens avec défense d'entretenir une armée de plus de 40.000 hommes. Le Royaume de Westphalie, surtout constitué avec les possessions prussiennes de la vallée du Rhin, est donné au Prince Jérôme, frère de Napoléon.
- Inspection du Dépôt du 61e Régiment à Mayence par le Général Schauenburg, 23 novembre 1807
"Dépôt du 61e Régiment d’Infanterie de Ligne. Revue passée à Mayence le 23 novembre 1807.
Espèce d’hommes. Passable.
Habillement. Bon.
Equipement. Idem.
Armement. Idem.
Tenue. Bonne.
Discipline. Idem.
Maniement d’armes. Passable.
Manœuvres. Bonnes.
Retenue. Point.
Ordinaire. Bon.
Pain. Bon.
Casernes et fournitures. Mauvaise et délabrée.
Conscrits. Bien tenus.
Finances. La comptabilité l’an 13 en deniers et effets n’a pas arrêtée par le Général de division Inspecteur général d’infanterie, ne l’ayant pas trouvée arrêtée par l’Inspecteur aux revues.
L’Inspecteur général a trouvé que les dépenses pour les frais de bureau étaient excessives.
Résumé.
Ce Dépôt est commandé par le Chef de Bataillon Peugnes ; cet Officier blessé assez gravement sert avec beaucoup de zèle et m’a paru mériter la confiance que Son Excellence peut prendre aux notes qu’il donne sur ses Officiers, sans y comprendre le Quartier-maitre ainsi qu’elle le verra par l’ordre laissé à ce corps, car je ne puis attribuer le peu d’économie sur les frais de bureau qu’aux Quartiers-maitres vu les mutations qu’éprouvent les conseils, d’ailleurs le Chef de Bataillon que je crois un brave et très galant hommes, ne m’a pas paru avoir des connaissances administratives, ni celles nécessaires pour bien conduire un conseil d’administration. J’ai eu 18 hommes à refuser à ce corps.
Ordre.
Le Général de division Schauenburg Inspecteur général d’Infanterie n’a pas arrêté définitivement pour l’an 13 les registres de comptabilité en deniers et effets du 61e Régiment de Ligne, ne les ayant pas trouvés arrêtés par l’Inspecteur aux revues.
D’après l’examen qu’il en a fait il a trouvé que les dépenses pour les frais de bureau sont excessives elles se montent à la somme de 4335 frs 46 c. pour l’an 13, dans laquelle somme se trouve comprise celle de 969 frs 15 c. pour l’achat de plusieurs registres.
L’Inspecteur recommande au commandant du Dépôt et aux membres du conseil d’administration de mettre la plus grande régularité dans ses opérations et que l’économie dans l’emploi des fonds dépend d’une bonne administration" (Schauenburg (Général baron Alexis-Balthazar-Henri-Antoine de) : « Revues particulières d’inspection, ordonnée le 23 octobre 1807 » ; Bibliothèque Nationale et Universitaire de Strasbourg: MS.0.491 ; document numérisé par la BNU à la demande conjointe de F. Berjaud, L. Claudel et D. Davin).
"Ordre donné à tous les corps sur la manière d’exercer les conscrits et pour l’administration.
Nota. Le présent ordre a été adressé à S. E. le Ministre de la guerre, le 20 novembre dernier ; lequel précèdera les autres donnés.
Les commandants des dépôts prescriront aux officiers et sous-officiers de s’appliquer à connaitre autant que les circonstances le permettront les facultés de l’homme qu’ils ont à instruire afin de les traiter en conséquence, ils leur recommanderont la patience, les brusqueries étant contraires aux succès de l’instruction.
Le premier objet auquel ils devront avoir attention, c’est d’inspirer aux recrues le goût de la propreté, pour y parvenir, il faut qu’il lui indique tous les moyens qui sont en usage dans la troupe pour entretenir et nettoyer avec ménagement toutes les parties de l’habillement et équipement, après la propreté du corps, si essentielle à la santé du soldat, vient l’entretien de ses armes dont il doit avoir le plus grand soin, à cet effet, il faut faire connaitre aux recrues toutes les parties de son armement et lui enseigner la manière de nettoyer et remonter son fusil.
Lorsque l’on sera à l’exercice l’instructeur entretiendra la recrue pendant l’intervalle de chaque repos, de ses devoirs envers les officiers et sous-officiers, et lui fera connaitre les nomes des généraux sous les ordres desquels se trouvera le corps, le nom des officiers de sa compagnie, et de ceux supérieurs en exigeant de lui qu’il les retiennent.
Le commandant de chaque dépôt fera pratiquer le règlement concernant le service intérieur, la police et la discipline de l’infanterie du 24 juin 1792 sur tout ce qui n’est pas contraire aux lois actuelles, aux localités et aux circonstances.
Ils assembleront au moins chaque semaine les officiers et sous-officiers pour les examiner sur les bases de la discipline, de la police, du service intérieur et sur celui de la place duquel il devra être donné connaissance aux conscrits à la fin de chaque exercice en classant les devoirs de chaque grade.
Ils feront aussi suivre par gradation le règlement concernant la manœuvre et l’exercice de l’infanterie du 1er août 1791, sans se permettre sous aucun prétexte quelconque la moindre innovation dans ses principes.
En surveillant la stricte exécution de l’ordre ci-dessus, ils exigeront que les officiers et sous-officiers , par leur conduite et leur application à remplir leur devoir, servent de modèle aux jeunes soldats pour l’éducation militaire de laquelle ils sont chargés.
Tous les officiers et sous-officiers devront se trouver aux exercices journaliers et y être employés en raison de leurs connaissances et moyens d’instruction, et ceux qui n’en auront pas suffisamment devront également s’y trouver pour en acquérir ou pouvoir y être utilisés à la volonté du chef.
L’on n’exercera jamais de grand matin, à moins que les circonstances ne l’exigent, afin de donner le temps au soldat de soigner toutes les parties de son vêtement et la propreté de la chambrée ; l’on préfèrera autant que possible les exercices de l’après midi attendu qu’elles empêchent le soldat de s’écarter trop loin de son quartier.
Conformément à l’article 20 du règlement concernant le service intérieur, tous les officiers devront se trouver à la garde journalière que fournira le corps quand même elle ne défilerait qu’au quartier ; les chefs n’en exempteront personne que pour objet de serves, ils exigeront qu’ils se présentent dans la tenue prescrite pour le journalier, et qu’ils ne se permettent aucun autre costume dans la journée, que celui qu’ils doivent avoir eu à la parade.
Administration.
Les membres du conseil d’administration devront se pénétrer du devoir de la plus exacte surveillance sur toutes les parties de l’administration qui leur est confiée, et les commandants des compagnies porteront toute l’attention nécessaire aux fournitures qui seront faites à leurs soldats, feront les représentations au conseil d’administration si elles étaient défectueuses et rendront compte à l’inspecteur général dans le cas où il ne serait pas fait droit à leurs réclamations.
Le premier dimanche de chaque mois, il sera fait lecture de l’arrêté du 19 Vendémiaire an 12 relatif à la désertion.
Il ne sera fait aux soldats et conscrits, et sous quelque prétexte que ce puisse être, aucune autre retenue que celles prescrites par les règlements.
On ne peut sous quelque prétexte que ce soit, et sans se rendre coupable d’un délit, se permettre de recevoir des hommes en remplacement des militaires qui sont sous les drapeaux sans l’autorisation formelle et préalable transmise par le directeur général de la conscription.
Il ne doit être délivré aucune espèce de congé si ce n’est sur des imprimés envoyés par le ministre. Aucun enrôlé volontaire ne doit être admis qu’après avoir contracté un engagement en présence d’un maire.
On ordonnera que cette formalité soit remplie sur le champ par les enrôlés volontaires qui ne s’y seraient pas conformés.
L’intention de l’Empereur est que tout militaire qui reçoit son congé définitif soit pour ancienneté de service, soit pour cause de blessures reçues à l’armée, puisse rentrer dans ses foyers avec une tenue décente et qu’il doit par conséquent être pourvu d’un habit uniforme en bon état et de son sabre, s’il est sous-officier ou grenadier.
Si le corps a plus de huit musiciens (que les règlement accordent), ceux qui dépassent ce nombre devront être admis comme soldats, et s’ils l’avaient été seulement comme gagistes, ils devront de suite contracter un engagement militaire, s’ils s’y refusent et que le corps veuille les conserver, il est expressément défendu de les porter sur les revues de solde et de fournitures et ils seront mis entièrement à la charge des officiers, mais dans tous les cas, le total de la dépense de la musique ne doit pas excéder une journée de solde des officiers par mois.
Le présent ordre sera transmis de suite sur le registre des délibérations et lu aux officiers rassemblés.
Les commandants des dépôts restent responsables de son entière exécution" (Schauenburg (Général baron Alexis-Balthazar-Henri-Antoine de) : « Revues particulières d’inspection, ordonnée le 23 octobre 1807 » ; Bibliothèque Nationale et Universitaire de Strasbourg: MS.0.491 ; document numérisé par la BNU à la demande conjointe de F. Berjaud, L. Claudel et D. Davin).
Le Général Schauenburg adresse au Ministre de la Guerre, au Ministre Lacuée et au Ministre Dejean le résultat de sa revue le 11 janvier 1808; le résultat de la Revue est également adressé au Corps le 11 janvier 1808, et le 16 janvier lui est expédié les pièces pour une retraite (Schauenburg (Général baron Alexis-Balthazar-Henri-Antoine de) : « Revues particulières d’inspection, ordonnée le 23 octobre 1807 » ; Bibliothèque Nationale et Universitaire de Strasbourg: MS.0.491 ; document numérisé par la BNU à la demande conjointe de F. Berjaud, L. Claudel et D. Davin).
Le 16 janvier 1808, le Général Schauenburg adresse au Ministre de la Guerre une retraite pour le 61e de Ligne (Schauenburg (Général baron Alexis-Balthazar-Henri-Antoine de) : « Revues particulières d’inspection, ordonnée le 23 octobre 1807 » ; Bibliothèque Nationale et Universitaire de Strasbourg: MS.0.491 ; document numérisé par la BNU à la demande conjointe de F. Berjaud, L. Claudel et D. Davin).
/ 1807, Formation du Corps d'Observation des Côtes de l'Océan
L’autre grande affaire pour l’Empereur après Tilsitt, c’est le Portugal et l’Espagne où il envoie des troupes, en général des Régiments provisoires, dans des Corps d’ Observation formés de divers détachements, pour contrôler discrètement les places fortes du Royaume bourbonien, alors notre allié, et lancer la conquête du Portugal.
Le Corps d’Observation des Côtes de l’Océan était sous les ordres de Moncey. Avec le 4e Régiment provisoire d’infanterie formé de détachements des 61e, 88e, 96e et 100e de Ligne.
Le 11 novembre 1807, l'Empereur écrit, depuis Fontainebleau, au Général Clarke, Ministre de la Guerre : "Monsieur le Général Clarke Clarke, le corps d'observation des côtes de l'Océan ne sera réuni à Metz, Nancy et Sedan, tout entier, que vers le 25 novembre ; cela ne peut point cadrer avec mes projets. Voici donc les mesures que mon intention est que vous preniez sans délai.
Faites préparer à Metz et sur toute la route de Metz à Bordeaux, des voitures en nombre suffisant pour porter mille hommes par convoi ; et vous ferez ainsi aller en poste, par un mouvement continu, les troupes qui seront arrivées à Metz le 15 et le 16 novembre.
Le 15 novembre, à cinq heures du matin, les premiers 1,000 hommes ... partiront sur ces voitures et continueront leur mouvement sur Bordeaux, de manière à y être rendus, si c'est possible, le 25 ou le 26 novembre.
Six heures après, le second convoi, compose des deux compagnies du 24e, de deux du 44e et des deux du 63e, suivra et prendra les mêmes relais ...
Une autre route sera tracée de Nancy à Bordeaux, une troisième sera tracée de Sedan ; mais de manière que les trois routes ne se rencontrent pas.
De Nancy, de Sedan comme de Metz, le premier convoi partira le 15, en sorte que 10,000 hommes de ce corps soient arrivés à Bordeaux avant la fin de novembre ; les secondes compagnies de tous ces régiments, qui n'arriveront que du 20 au 25 novembre, partiront de même pour aller rejoindre les premières et de manière à arriver du 5 au 10 décembre.
Quant aux quatre compagnies du 17e d'infanterie légère, qui arrivent toutes ensemble, à celles du 34e de ligne, à celles du 51e de ligne, à celles du 61e, à celles du 94e, à celles du 95e, à celles du 28e d'infanterie légère, à celles du 25e d'infanterie légère, à celles du 105e de ligne, à celles du 14e de ligne, à celles du 85e, à celles du 3e, à celles du 21e, à celles du 33e, formant quatorze bataillons, chacun de 600 hommes, c'est-à-dire de 7 à 8,000 hommes, ils continueront leur route sans s'arrêter jusqu'à Orléans, en marche ordinaire, et ils seront formés à Orléans ..." (Correspondance de Napoléon, t.16, lettre 13344 ; Correspondance générale de Napoléon, t.7, lettre 16760).
/ 1808, formation de la Division de Réserve à Orléans
Le 12 janvier 1808, l'ordre suivant est promulgué : "L'Empereur a ordonné la formation d'une division de réserve d'infanterie qui sera réunie à Orléans le 1er février 1808.
Cette division sera composée de trois brigades, chaque brigade de deux régiments provisoires et chaque régiment de trois bataillons. La 1re brigade sera composée des 13e et 14e régiments provisoires, la 2e brigade sera composée des 15e et 16e régiments provisoires, la 3e brigade sera composée des 17e et 18e régiments provisoires ...
... Les trois bataillons du 15e régiment provisoire doivent être composés de quatre compagnies chacun, tirées des 39e 40e, 45e, 54e, 57e, 61e, 63e, 76e, 85e, 88e, 94e et 95e régiments de ligne ...
Le général de division Verdier commandera cette division de réserve, le général Schramm y sera employé" (Picard E. et Tuetey L. : « Correspondance inédite de Napoléon 1er conservée aux Archives de la Guerre », Paris, 1913, t. 2, lettre 1511).
Toujours le 12 janvier 1808, un deuxième ordre est promulgué, portant sur la composition de la Division de Réserve d'infanterie qui se réunit à Orléans : "Cette division sera composée de trois brigades, chaque brigade de deux régiments provisoires, chaque régiment de trois bataillons, chaque bataillon de quatre compagnies, chaque compagnie de 150 hommes, total 10.800 hommes.
La 1re brigade sera composée des 13e et 14e régiments provisoires, la 2e, des 15e et 16e, la 3e des 17e et 18e.
... Le 15e régiment provisoire sera composé, savoir :
... 2e bataillon : d'une compagnie de 150 hommes du 57e de ligne, d'une du 61e, d'une du 63e et d'une du 76e ..." (Picard E. et Tuetey L. : « Correspondance inédite de Napoléon 1er conservée aux Archives de la Guerre », Paris, 1913, t. 2, lettre 1514).
Le même 12 janvier 1808, l'Empereur écrit, depuis Paris, au Général Clarke, Ministre de la Guerre : "Monsieur le Général Clarke, vous donnerez les ordres pour la formation d'une division qui portera le titre de division de réserve, et qui se réunira à Orléans. Cette division sera composée conformément au tableau ci-joint ... Vous donnerez l'ordre qu'avant de faire partir les compagnies qui doivent former la division de réserve d'Orléans on complète tout ce que les corps doivent fournir aux douze régiments provisoires du corps d'observation des côtes de l'Océan. Le général de division Verdier commandera cette division de réserve. Le général Schramm y sera employé.
P. S. Les ordres seront donnés sur-le-champ pour la formation de cette division, et elle se mettra en marche au 1er février. Vous aurez soin de lui faire fournir des capotes et de veiller à ce que les hommes soient bien habillés.
COMPOSITION DE LA RÉSERVE D'INFANTERIE QUI SE RÉUNIT À ORLÉANS
Cette division sera composée de trois brigades ; chaque brigade de deux régiments provisoires ; chaque régiment de trois bataillons ; chaque bataillon de quatre compagnies ; chaque compagnie de 150 hommes : total 10 800 hommes.
... la 2e brigade 15e et 16e ...
Le 15e régiment provisoire sera composé : ... 2e bataillon
une compagnie de 150 hommes du 57e régiment de ligne
une du 61e régiment de ligne
une du 63e régiment de ligne
une du 76e régiment de ligne ..." (Correspondance de Napoléon, t.16, lettre 13448 ; Correspondance générale de Napoléon, t.8, lettre 16987).
/ Période de Paix
- Occupation de la Pologne.
Aux termes d'une convention signée avec la Prusse, l'armée française doit se replier, d'abord jusqu'à la Vistule; puis jusqu'à l'Oder et finalement jusqu'à l'Elbe, au fur et à mesure du paiement de la contribution de guerre. Le 3e Corps se rend dans le Duché de Varsovie, dont le Maréchal Davout a reçu le commandement.
Le 61e occupe Varsovie et le faubourg de Praga. Les Compagnies d'élite de son 3e Bataillon retournent à Dantzig avec la Division dont elles font partie.
- Réorganisation du régiment.
En 1808, le 61e est réorganisé à quatre Bataillons de guerre, sans augmentation du nombre de ses Compagnies.
Le 22 février 1808, l'Empereur écrit, depuis Paris, au Général Clarke, Ministre de la Guerre : "Monsieur le Général Clarke, vous devez avoir reçu mon décret pour la nouvelle organisation de l'armée. Je me suis hâté de vous l'envoyer, ainsi que les différents tableaux, afin que vous puissiez donner tous les ordres préparatoires. Mon intention est cependant qu'aucun dépôt ne se mette en marche pour sa nouvelle destination, et qu'aucun embrigadement ne soit fait qu'en conséquence d'une instruction que vous donnerez aux généraux chargés de ce travail, et qui, avant d'être expédiée, sera mise sous mes yeux. Voici quelles sont mes vues ; je vous les fais connaître afin que cela vous serve pour la rédaction de cette instruction.
3e Corps de la Grande Armée. Vous chargerez le maréchal Davout de faire l'opération pour son corps d'armée. Il y a dans ce corps d'armée des régiments qui ont deux bataillons et d'autres qui en ont trois ... Le 12e de ligne a deux bataillons au 3e corps ; il n'y a pas de difficulté pour le former à trois bataillons. Il en est de même des 25e, 48e, 65e, 85e, 108e et 111e ... Mais les 30e, 33e, 61e, ayant moins de 2,000 hommes à l'effectif, n'auront pas assez pour former leurs trois bataillons. Mon intention est donc que vous ordonniez que l'on forme les deux premiers bataillons conformément aux tableaux ; qu'on y mette tous les hommes disponibles des régiments, et que l'on se borne à former les cadres du 3e bataillon qu'on enverra en France pour se compléter ... Avant de rédiger les instructions du maréchal Davout, vous vous assurerez de tous ces faits" (Correspondance de Napoléon, t.16, lettre 13593 ; Correspondance générale de Napoléon, t.8, lettre 171260).
Le 4e Bataillon ne se compose, momentanément, que des deux Compagnies détachées à Dantzig.
Le 17 mars 1808, l'Empereur écrit, depuis Paris, au Maréchal Berthier, Major général de l'Armée : "Voulant donner une preuve de notre satisfaction aux officiers et soldats de notre Grande Armée pour les services qu'ils nous ont rendus, nous avons accordé et accordons par la présente en gratification aux corps d'infanterie dont l'énumération suit la somme de 6 340 000 francs. Notre intention est que vous fassiez connaître aux conseils d'admnistration desdits corps que cette somme doit être distribuée entre les officiers et soldats qui se trouvaient aux batailles d'Ulm, d'Austerlitz, d'Iéna, d'Eylau et de Friedland entendant que ceux qui se sont trouvés à trois de ces batailles recevront deux jours de solde en gratification et que ceux qui ne se sont trouvés qu'à une ou deux de ces batailles ne reçoivent qu'un jour de solde ; ceux qui auraient été blessés, soit à trois, soit à une seule de ces batailles recevront trois jours de gratification au lieu de deux. Lorsque ce travail sera ainsi proposé par le conseil d'administration on donnera autant de jours et de mois qu'il sera possible avec la somme qui aura été assignée au corps. Les colonels ni les majors ne sont pas compris dans la distribution de ces gratifications qui s'arrêtera au grade de chef de bataillon ou d'escadron inclusivement ... ANNEXE :
... 3e corps
... 61e id. 100 000 ..." (Correspondance générale de Napoléon, t.8, lettre 17415).
Les Compagnies de Fusiliers restées au Dépôt du Corps, à Mayence, sont réunies à Metz, aux Compagnies correspondantes des 88e, 96e et 100e de Ligne. Elles servent à former, au mois de mars, le 4e Régiment provisoire d'infanterie destiné à l'armée d'Espagne.
Le 20 mai 1808, l'Empereur écrit, depuis Bayonne, au Général Clarke, Ministre de la Guerre : "Monsieur le général Clarke, je reçois votre lettre du 13 mai relative aux anciens et nouveaux dépôts. Je conçois que les conscrits ont été dirigés sur les nouveaux dépôts ... Le 17e a son nouveau dépôt à Lille et l'ancien à Boulogne. Je pense qu'il serait convenable d’en faire de même, et qu'ainsi de suite il faudrait diriger les magasins ... du 61e de Mayence sur Worms ...
Aucun de ces mouvements n'est bien considérable et moyennant cette mesure les conseils d’admistration et les magasins seront établis à demeure. Les 4 compagnies qui formeront le dépôt recevront les conscrits de leur corps, et au fur et à mesure qu'ils auront 60 hommes armés, habillés, sachant tenir leurs fusils, prêts à partir, vous m'en rendrez compte dans des états particuliers pour que je les envoie à celui des 4 bataillons de guerre qui en a besoin ...
Aucun de ces mouvements n'est bien considérable et moyennant cette mesure les conseils d’administration et les magasins seront établis à demeure. Les 4 compagnies qui formeront le dépôt recevront les conscrits de leur corps, et au fur et à mesure qu'ils auront 60 hommes armés, habillés, sachant tenir leurs fusils, prêts à partir, vous m'en rendrez compte dans des états particuliers pour que je les envoie à celui des 4 bataillons de guerre qui en a besoin.
Il serait possible que le reflux d'un si grand nombre de dépôts dans l'intérieur diminuât beaucoup l'armée de Boulogne. Mon intention est donc que tous les soldats disponibles y restent et que les officiers se rendent aux dépôts avec les cadres des compagnies de sorte que s'il y a à Boulogne 150 soldats dans le cas de se battre qui en conséquence de ces arrangements quitteraient Boulogne, le général Saint-Cyr gardera un des cadres des 4 compagnies avec ces hommes" (Picard E. et Tuetey L. : « Correspondance inédite de Napoléon 1er conservée aux Archives de la Guerre », Paris, 1913, t. 2, lettre 1908 ; Correspondance générale de Napoléon, t.8, lettre 18000).
Le 23 juin 1808, l'Empereur rédige des "PROJETS ET NOTES RELATIFS A L'ORGANISATION DE L'INFANTERIE ET DE LA CAVALERIE"; il écrit :"1° NOTE
Il y a dix-neuf compagnies de grenadiers et de voltigeurs hors de ligne ...
3° NOTE ...
2e régiment de marche : deux bataillons de dix-huit compagnies (à Mayence) 2520 ...
Réunir cette division à Magdeburg.
4° GRANDE ARMÉE.
PROJET DE FORMATION DE RÉGIMENT DE MARCHE.
Infanterie.
1er régiment de marche. 1.860.
2e Id. 3.920 ...
PROJET DE DÉCRET.
Article premier. Il sera formé six régiments de marche de la Grande Armée ; ils seront organisés conformément au tableau ci-annexé.
Art. 2. Toutes les troupes qui doivent composer ces régiments seront bien habillées, bien armées, enfm mises en bon état et prêtes à partir de leur garnison le 1er août prochain.
Art. 3. Le 1er régiment de marche se réunira à Hanau ...
Le 2e – à "
Art. 4. Nos ministres de la guerre, de l'administration de la guerre et du Trésor public, sont chargés de l'exécution du présent décret ...
6° 2e RÉGIMENT DE MARCHE OU RÉGIMENT DE MARCHE DU 3e CORPS ...
3e bataillon (7 compagnies).
Trois compagnies, chacune de 140 hommes, de Worms, 61e de ligne. 420
Trois compagnies, chacune de 140 hommes, d'Anvers, 48e de ligne. 420
Une compagnie de 140 hommes, d'Anvers, 65e de ligne 140
Total : 980 ...
2.
61e. 3
85e 3
111e 3
Mayence, 840 ..." (Picard E. et Tuetey L. : « Correspondance inédite de Napoléon 1er conservée aux Archives de la Guerre », Paris, 1913, t. 2, lettre 2037 - date présumée).
Au mois de juillet suivant, le 4e Régiment provisoire est amalgamé avec le 8e Provisoire pour constituer le 115e d'infanterie.
- Occupation de la Silésie.
L'Empereur d'Autriche, François II, soutenu par l'Angleterre et sollicité par son entourage, fait de grands armements dirigés contre la France. La guerre parait inévitable dès le mois de juillet 1808.
Napoléon, gravement engagé contre l'Espagne, cherche à isoler l'Autriche en ouvrant avec la Prusse des négociations pour le retrait des troupes françaises, que le non paiement de la contribution de guerre a considérablement retardé.
Le 6 juillet 1808, l'Empereur écrit, depuis Bayonne, au Général Clarke, Ministre de la Guerre : "Monsieur le général Clarke, il sera formé trois brigades composées de régiments de marche, sous les ordres du maréchal Kellermann. La 1re brigade se réunira à Wesel, la 2e à Mayence et la 3e à Strasbourg ...
La 2e brigade qui se réunira à Mayence sera composée des 3e et 6e régiments de marche, composés chacun de détachements des 3e et 6e corps de la Grande Armée qui ont besoin d'être renforcés pour être portés au complet.
... La 2e brigade qui se réunira à Mayence sera composée des 3e et 6e régiments de marche, composés chacun de détachements des 3e et 6e corps de la Grande Armée qui ont besoin d'être renforcés pour être portés au complet.
Le 3e régiment de marche sera composé de 2 bataillons :
... 2e bataillon : 3 compagnies du 61e de ligne
3 compagnies du 85e de ligne
et 3 compagnies du 111e
... Cette brigade se réunira à Mayence." (Picard E. et Tuetey L. : « Correspondance inédite de Napoléon 1er conservée aux Archives de la Guerre », Paris, 1913, t. 2, lettre 2077 ; Correspondance générale de Napoléon, t.8, lettre 18486).
Le 24 août 1808, l'Empereur écrit, depuis Saint-Cloud, au Général Clarke, Ministre de la Guerre : "Monsieur le général Clarke, j'ai lu avec attention l'état de situation n° 3 des corps de la Grande Armée. Je vous le renvoie pour que vous y fassiez quelques changements : ... aux 3 bataillons du 61e il manque 100 hommes ...
Il manque donc plus de 4 000 hommes au corps du maréchal Davout pour porter ses 48 bataillon au complet.
… En faisant des recherches pour bien faire cet état, vous me ferez un rapport qui me fasse connaître s'il est possible de former à Mayence un 3e régiment de marche (bis) de 3 bataillons qui serait composé de la manière suivante :
1er bataillon, 4 compagnies du 13e léger 600 hommes ; 3 compagnies du 17e de ligne 450 hommes ; 1 compagnie du 30e 140 hommes ; 1 compagnie du 61e 140 hommes ; 2 compagnies du 65e 300 hommes ; total : 1 630 hommes ...
Ce régiment serait de 4 000 hommes. Il serait suffisant que chaque compagnie fût commandée par un officier, deux sergents, quatre caporaux. Ce corps, après avoir passé la revue à Mayence et dans le comté de Hanau, serait dirigé en temps opportun sur le corps du maréchal Davout, pour renforcer ses 48 bataillons ; et alors ce maréchal aurait un effectif de 39 000 hommes... " (Picard E. et Tuetey L. : « Correspondance inédite de Napoléon 1er conservée aux Archives de la Guerre », Paris, 1913, t. 2, lettre 2211 ; Correspondance générale de Napoléon, t.8, lettre 18751).
Le 27 août, la 1re Division du 3e Corps rétrograde sur l'Oder et se répand autour de Breslau, dans des baraquements dont l'insalubrité occasionne des maladies. Le 6 octobre, le quartier général de la 1re Division est transféré à Neisse. Le 61e occupe aux environs de cette ville les villages d'Oppeln, de Krappitz et de Falkenberg.
Le 29 août 1808, l'Empereur écrit, depuis Saint-Cloud, au Général Clarke, Ministre de la Guerre : "Monsieur le général Clarke, je vois que dans sa situation actuelle le corps du général Oudinot n'a que 8794 hommes, tandis qu'il devrait être de 11200 hommes ; il lui manque donc 2500 hommes. Je désire que vous donniez les ordres suivants aux bataillons de guerre.
Nombre d’hommes à fournir
... Du 30e de ligne, de fournir audit corps 30 grenadiers, 15 voltigeurs
Au 61e de ligne 50 50 ...
... Ces hommes seront fournis sur-le-champ, en les choisissant aux bataillons de guerre de la Grande Armée, ce qui complétera ces compagnies à 140 hommes chacune ..." (Picard E. et Tuetey L. : « Correspondance inédite de Napoléon 1er conservée aux Archives de la Guerre », Paris, 1913, t. 2, lettre 2222 ; Correspondance générale de Napoléon, t.8, lettre 18779).
Le 4 septembre 1808, l'Empereur écrit, depuis Saint-Cloud, au Général Clarke, Ministre de la Guerre : "… … Les 4es bataillons du 3e corps qui doivent rejoindre l'armée cet hiver, sont ceux des ... 12e, 21e, 25e, 30e, 33e, 48e, 61e, 65e, 85e, 108e et 111e ..." (Picard E. et Tuetey L. : « Correspondance inédite de Napoléon 1er conservée aux Archives de la Guerre », Paris, 1913, t. 2, lettre 2255; Correspondance générale de Napoléon, t.8, lettre 18825).
En Octobre 1808, devant les mauvaises conditions climatiques, l’état des baraques qui laissent passer l'eau et le froid et créent des maladies, Davout évacue ses cantonnements. Il écrit à Berthier, depuis Breslau, le 8 octobre 1808 : "Monseigneur, j'ai l'honneur de rendre compte à Votre Altesse que j'ai dû faire lever les camps aux troupes sous mes ordres ; plusieurs motifs m'ont déterminé à cette mesure.
Les divers camps établis en Silésie avaient été construit pendant la belle saison ; toutes les baraques étaient en planches, et il s'en faut de beaucoup que l'on ait apporté dans leur construction tous les soins nécessaires pour les rendre tenables dans la saison des pluies. Le peu de précautions qu'on avait prises particulièrement dans la construction des toitures rendait ces baraques extrêmement froides pendant les belles nuits et inhabitables par un temps de pluie. Les pluies continuelles qui ont eu lieu pendant la dernière quinzaine de septembre et les premiers jours d'octobre influaient déjà d'une manière alarmante sur la santé des troupes campées, à qui il n'était pas possible de procurer des paillasses et des couvertures ; nos hôpitaux s'encombraient chaque jour, au point de faire craindre de ne pouvoir y recevoir l'affluence des malades.
La plupart des camps étaient d'ailleurs mal situés, les terrains sur lesquels ils étaient établis étant inondés après les premiers jours de pluie.
D'après ces considérations, je n'ai pas hésité à ordonner l'évacuation des camps et à faire cantonner les troupes ; elles le sont dans l'ordre suivant :
1re division. - Deux régiments de la 1re division commandée par le général Morand, le 17e et le 30e de ligne, tiennent garnison à Neisse, où se trouve également l'artillerie de cette division ; le 61e régiment occupe Oppeln, Krappitz et Falkemberg ; le 65e occupe Brieg, Lowen et Grottkau ...
Depuis la levée des camps, les malades ont beaucoup diminué, et la situation des hôpitaux s'améliore sensiblement" (Mazade C. (de) : « Correspondance du Maréchal Davout, prince d'Eckmühl : ses commandements, son ministère, 1801-1815 », t. 2, p. 301, lettre 516).
- Armée du Rhin.
Une convention secrète, signée à Erfurt, le 12 octobre, assure à Napoléon l'alliance de la Russie. La Grande Armée est dissoute ; mais pour parer à toute éventualité, le 3e Corps, sous le nom d'Armée du Rhin est maintenu en Allemagne.
Le 5 décembre 1808, à Madrid, l'Empereur ordonne : "1° Les vingt et un régiments de l'armée du Rhin seront complétés à quatre bataillons. A cet effet, les compagnies de grenadiers et voltigeurs des 4es bataillons des 30e et 33e de ligne, du 10e d'infanterie légère, des 105e, 22e, 57e, 65e, 72e, 3e, 12e, 61e, 85e et 111e de ligne, qui font partie du corps que commande le général Oudinot, partiront au 10 janvier prochain de leurs cantonnements actuels pour rejoindre les bataillons de guerre de leurs régiments respctifs, hormis les régiments qui ont ordre déja, qui rentrent en France.
Les 4es bataillons des 48e de ligne, 13e légère, 108e, 72e et 65e et autres joindront également leurs corps à l'armée du Rhin aussitôt qu'ils seront complétés à 840 hommes et commenceront le 1er mars.
Les compagnies de grenadiers et voltigeurs des 4es bataillons qui rejoindront leurs régiments formeront le fond des 4es bataillons ..." (Picard E. et Tuetey L. : « Correspondance inédite de Napoléon 1er conservée aux Archives de la Guerre », Paris, 1913, t. 2, lettre 2522).
Le 61e est placé à Magdebourg où il arrive vers la fin de décembre.
Les armements toujours croissants de l'Autriche et les nouvelles multipliées qu'il en reçoit, surprennent Napoléon à Valladolid au commencement de janvier 1809. Il rentre à Paris précipitamment avec sa Garde et quelques autres troupes.
L'Autriche, qui ne peut se méprendre sur la signification de ce brusque retour, dispose déjà de 300.000 hommes.
Le 13 février 1809, l'Empereur écrit, depuis Paris, au Général Clarke, Ministre de la guerre : "Monsieur le général Clarke, voulant compléter mon armée du Rhin, mon intention est que le dépôt du 13e léger fasse partir pour Mayence 500 hommes nécessaires pour compléter les trois premiers bataillons ; le dépôt du 17e de ligne, 300 hommes ; le dépôt du 30e de ligne, 200 hommes ; le dépôt du 61e, 200 hommes ; le dépôt du 75e, 300 hommes. Ces détachements formant 1 500 hommes se réuniront le plus tôt possible à Mayence. Ils formeront ensemble un bataillon de marche sous le titre de 1er bataillon de marche de l’armée du Rhin.
Ces bataillons de marche se réuniront à Mayence le plus tôt possible. On n’y mettra que le nombre d’officiers et de sous-officiers nécessaires pour conduire les hommes. Vous me ferez connaître le jour de leur arrivée à Mayence, et je donnerai des ordres pour leur direction sur l’armée du Rhin ...
Indépendamment de ce que les 30e et 61e fourniront aux bataillons de marche de l’armée du Rhin, ils prépareront chacun une compagnie de fusiliers complétée à 140 hommes, pour leur 4e bataillon ; ce qui portera ces 4e bataillons à 3 compagnies" (E. et Tuetey L. : « Correspondance inédite de Napoléon 1er conservée aux Archives de la Guerre », Paris, 1913, t. 2, lettre 2766 ; Correspondance générale de Napoléon, t.9, lettre 20015).
Le 25 février 1809, l'Empereur écrit, depuis Paris, au Général Clarke, Ministre de la Guerre : "Monsieur le général Clarke ... Le 30e tiendra prête une compagnie ; le 33e, une compagnie, le 61e, une compagnie, le 85e, une compagnie et le 111e, 3 compagnies.
Toutes ces compagnies se réuniront à Mayence, à l'exception de celles du 7e régiment d'infanterie légère, qui resteront à Huningue.
Aussitôt qu'elles seront rendues à Mayence, elles formeront deux bataillons de marche, l'un de 7, et l'autre de 6 compagnies, sous le nom de 1er et 2e bataillons de marche des 4es bataillons de l'armée du Rhin.
Vous me ferez connaître quand ces différentes compagnies seront en état de se mettre en route ..." (Picard E. et Tuetey L. : « Correspondance inédite de Napoléon 1er conservée aux Archives de la Guerre », Paris, 1913, t. 2, lettre 2822 ; Correspondance générale de Napoléon, t.9, lettre 20127).
Le 26 février 1809, l'Empereur écrit, depuis Paris, au général Lacuée, Directeur général des Revues et de la Conscription : "J'ai lu avec attention l'état général de l'année que vous m'avez envoyé après la conscription de 1810. Je vois qu'il manquera encore beaucoup de monde au complet des corps, 300 hommes au 1er régiment, ... 200 au 61e ... Il faudra me proposer des moyens pour remédier à cette grande irrégularité, et surtout pour les 3e et 4e bataillons qui sont à portée de fournir une réserve pour la défense de la côte.
Je désire une note qui me fasse connaître combien il y a de régiments qui n'ont pas de 5e bataillon et quel accroissement de dépenses occasionnerait la formation des 5es bataillons, en calculant ce que coûteraient les officiers et sous-officiers seulement, car les soldats ne peuvent pas augmenter les dépenses, mais la création de ces 5es bataillons rendrait plus utile et plus facile l'emploi du grand nombre d'hommes que j'ai.
Cela passerait-il 2 millions ?" (Correspondance générale de Napoléon, t.9, lettre 20150).
Le 3 mars 1809, l'Empereur écrit, depuis Paris, au Général Clarke, Comte d'Hunebourg, Ministre de la Guerre, à Paris et lui prescrit d'étudier la formation d'un Corps de Réserve en utilisant les 5e Bataillons en tout ou en partie : "Monsieur le Général Clarke, je vous envoie le projet de formation d’une réserve de régiments provisoires, sur lequel je désire que vous me fassiez un rapport. Faites-moi connaître si je n'ai rien oublié et s'il y a des changements qu'il soit convenable de faire pour épargner des marches aux troupes. Enfin présentez-moi des états qui m'apprennent si les 5es bataillons pourront fournir ces quatre, trois ou deux compagnies pour concourir à ladite formation. Les 10,000 hommes de réserve que forme ma Garde sont destinés à compléter les 5es bataillons et à les mettre à même de fournir les hommes nécessaires. Il faut donc qu'une colonne des états que vous ferez dresser indique le nombre d'hommes qui leur manquera, après avoir épuisé tout leur monde ; cette colonne sera la colonne de distribution des 10,000 hommes de la Garde. Il ne vous échappera pas que, par ce moyen, j'aurai 6,000 hommes à la Rochelle, 3,000 en Bretagne, 9,000 à Paris, 5,000 au camp de Boulogne, 2,500 pour la défense de l'Escaut, 2,500 pour garder Wesel, 5,000 à Strasbourg, 2,500 à Metz et 10,000 Français en Italie; total, 45,500 hommes.
NAPOLÉON
Annexe
PROJET DE FORMATION D'UN CORPS DE RÉSERVE
1
Il sera formé une réserve de seize régiments provisoires composée des compagnies des cinquièmes bataillons qui seront complétés avec les conscrits de 1810;
2
... 9e régiment provisoire :
Le 9e régiment provisoire sera composé de 3 bataillons formés de 3 compagnies des 5es bataillons des 27e, 30e, 33e, 61e, 111e, 40e. Il se réunira à Mayence ..." (Correspondance de Napoléon, t.18, lettre 14838 ; Correspondance générale de Napoléon, t.9, lettre 20195).
Le 3 mars 1809 encore, l'Empereur écrit, depuis Paris, au Général Clarke, Ministre de la Guerre : "Monsieur le général Clarke, donnez l'ordre qu'une ou deux compagnies de fusiliers complétées à 140 hommes des quatrièmes bataillons des 12e, 25e, 33e, 61e, 65e, 22e, 85e, 111e, et 5e légère, partent sans délai pour Strasbourg.
On formera de ces compagnies autant de bataillons de marche qu'il y aura de fois six compagnies, en ayant soin de mettre ensemble les compagnies des régiments qui appartiennent à l'armée du Rhin.
On appellera ces bataillons, bataillons de marche des quatrièmes bataillons de l'armée du Rhin ; ainsi il y aura à Strasbourg trois espèces de bataillons de marche : les bataillons de marche du corps d'Oudinot, les bataillons de marche de l'année du Rhin, les bataillons de marche des 4es bataillons de l'armée du Rhin.
Je crois avoir compris dans ce nombre toutes les compagnies des quatrièmes bataillons qui ont leurs grenadiers et voltigeurs à l'armée du Rhin ; s'il m'était échappé quelque corps, faites-le-moi connaître" (Picard et Tuetey : Correspondance inédite de Napoléon 1er, conservée aux Archives de la guerre. T. II. 1808-1809. 2849; Correspondance générale de Napoléon, t.9, lettre 20196).
Le 4 mars 1809, le Maréchal Davout écrit, depuis Pris, au Général Compans, Chef de l’Etat-major : "Je vous adresse, Monsieur le général, copie d'un ordre que je viens de recevoir du major général ; exécutez-en tout de suite les dispositions dans l'esprit suivant :
Les régiments qui se trouveraient plus rapprochés d'Erfurt que les généraux sous les ordres desquels ils se trouvent devront recevoir de vous directement les ordres de marche que vous leur enverrez par des officiers de votre état-major, ou, à leur défaut, par des officiers du 17e régiment ...
Vous ne ferez connaitre ni aux généraux ni aux colonels leur destination définitive ; vous leur indiquerez pour destination le point de l'itinéraire que vous leur aurez tracé, qui sera le plus voisin d'Erfurt, sans même leur faire connaitre qu'ils doivent aller au-delà ; vous leur indiquerez seulement que là on leur fera connaitre les cantonnements qu'ils doivent prendre; vous prendrez des mesures pour qu'à leur arrivée dans ces endroits ils trouvent des ordres de continuer leur route jusqu'à Bamberg ...
Il ne faut pas prévenir les autorités du pays à l'avance ; les régiments enverront seulement vingt-quatre heures en avance dans chaque gite un officier, porteur de feuilles de route, pour faire préparer les vivres et logements. Cependant vous pouvez écrire au ministre de la guerre de Westphalie pour lui annoncer le passage des troupes et lui donner l'itinéraire qu'elles suivront à travers la Westphalie seulement ...
Le 30e régiment partira, à la réception de l'ordre, avec toute l'artillerie de la division. Le 61e partira le lendemain, et dans le cas où des régiments du général Saint-Hilaire, qui ont dû, déjà avoir reçu l'ordre d'aller à Magdebourg (ces ordres étaient contenus dans les dépêches adressées au général Saint-Hilaire, qui ont été portées par le courrier Bertheuille), il y en aurait un d'arrivé, le 65e partirait le lendemain de l'arrivée de ce régiment. Le 11e de chasseurs qui est à Magdebourg partira le lendemain du départ du 61e.
Il est à désirer que les troupes qui sont en Hanovre marchent par plusieurs routes pour soulager le pays. Les régiments se mettront en marche dans l'ordre où ils se trouvent; les plus près partiront les premiers. Par ce moyen, tout ce qui est en Hanovre partira en deux jours.
Le général Friant laissera ses troupes cantonnées comme elles sont dans le pays de Bayreuth et d'Erlangen, et ne les réunira que dans le cas d'événements imprévus. Il faut recommander au général Friant, dans le cas peu vraisemblable où les Autrichiens marcheraient avec des forces supérieures, de prendre une position qui puisse couvrir Bamberg et Wurtzbourg ; j'en conférerai avec M. l'intendant général à mon arrivée, qui aura lieu vingt-quatre heures après la réception de cette lettre.
Je vous recommande, mon cher général, de ne point parler de mon retour ni de ce mouvement, et de donner les ordres de marche de manière que personne n'en ait connaissance à Erfurt ...
Il est bon que les troupes en partant prennent du pain pour deux jours et qu'on s'arrange de manière à avoir toujours cette avance pendant la route ; cela facilitera l'établissement des troupes dans leurs cantonnements.
Recommandez de maintenir la meilleure discipline dans la marche, et que chaque corps ait à se pourvoir d'un certificat de bonne vie ...
Je vous prie de faire passer la lettre ci-jointe par le courrier militaire qui ira à Varsovie" (Mazade C. (de) : « Correspondance du Maréchal Davout, prince d'Eckmühl : ses commandements, son ministère, 1801-1815 », t. 2, p. 384, lettre 586).
Le 9 mars 1809, depuis Paris, l'Empereur écrit au Général Clarke, Ministre de la Guerre : "Monsieur le général Clarke, les deux compagnies du 10e d'infanterie légère, du 3e de ligne, du 57e, du 62e et du 22e formant dix compagnies seront réunies en un bataillon de marche qui portera le titre de bataillon de marche des 4es bataillons de la division Saint-Hilaire.
Les deux compagnies du 12e, du 30e, 61e, 65e, 85e, 105e et 111e formeront un second bataillon de marche qui portera le titre de bataillon de marche du 4e bataillon de l'armée du Rhin.
Faites-moi connaître le plus tôt possible le nombre d'officiers, sous-officiers et soldats que les corps pourront fournir à ces compagnies afin de pourvoir à les compléter. Ces 2 bataillons se rendront à Strasbourg" (Picard E. et Tuetey L. : « Correspondance inédite de Napoléon 1er conservée aux Archives de la Guerre », Paris, 1913, t. 2, lettre 2906 ; Correspondance générale de Napoléon, t.9, lettre 20308 - La minute (Archives nationales, AF IV 879, mars 1809, n° 146), qui est la dictée, est datée à posteriori de Rambouillet le 11 mars). Ces «Bataillons de marche» sont composés de renforts destinés aux Corps d'armée stationnés en Allemagne.
Le 21 mars 1809, l'Empereur écrit, depuis La Malmaison, à Alexandre, Prince de Neuchâtel, Major général de l'Armée d'Allemagne, à Paris : "Mon Cousin, donnez ordre au général sénateur Demont de se rendre à Würzburg pour être employé au corps du duc d'Auerstaedt. Faites connaître au duc d'Auerstaedt que je désire qu'il mette sous les ordres de ce général une réserve qui serait composée des 4es bataillons du 30e, du 61e, du 65e, du 33e, du 111e, du 12e et du 85e de ligne ; ce qui fait sept bataillons. Ces sept bataillons ne sont encore qu'à 500 hommes ; ils ne forment donc qu'une force de 3,500 hommes ; mais ils vont bientôt recevoir une compagnie qui leur produira une augmentation de 1,100 hommes. Les 4es bataillons des 48e, 108e, 25e de ligne et 13e léger ne doivent pas tarder à partir de Boulogne ; ce qui portera le nombre des 4es bataillons à onze ; on pourrait y joindre ceux des 7e léger, 17e et 21e de ligne ; ce qui ferait quatorze bataillons. Cette réserve paraît nécessaire ; les divisions restant composées de cinq régiments, et chaque régiment ayant un complet de 2,500 hommes, les divisions seraient de plus de 12,000 hommes ; si l'on y laissait les 4es bataillons, elles seraient de 14 à 15,000 hommes ; ce qui est beaucoup trop fort pour une division. La formation des 4es bataillons n'est pas encore terminée ; il sera bon de les avoir sous la main et en dépôt pour être réunis. Il y a aussi un avantage à cette mesure, c'est qu'un régiment qui a trois bataillons en ligne et un bataillon à la division de réserve, qui peut ne pas se trouver compromis le même jour, peut trouver dans ce bataillon des ressources pour réparer ses pertes. Je désire donc que le corps du duc d'Auerstaedt soit composé de la manière suivante : des divisions Morand, Gudin, Friant et d'une quatrième division formée des kes bataillons de chacune des trois premières divisions. Chacune de ces trois premières divisions doit avoir trois généraux de brigade, un pour l'infanterie légère, et les deux autres commandant deux régiments de ligne ou six bataillons. La division du général Demont devra avoir trois généraux de brigade : un, commandant les 4es bataillons de la 1re division ; un, commandant les 4es bataillons de la 9e division, et un, commandant les 4es bataillons de la 3e division. Deux ou trois bataillons de la même division seront réunis sous le commandement d'un major. Les 4es bataillons des 13e léger, 17e et 30e de ligne seront réunis sous un major de l'un de ces trois régiments. Les 4es bataillons des 61e et 65e seront commandés par un major de l'un de ces deux régiments. Par cette formation, tous les avantages se trouvent réunis ; et le duc d'Auerstaedt aura quatre généraux de division, douze généraux de brigade, quatre adjudants commandants, et soixante pièces de canon, à raison de quinze pièces par division, indépendamment de l'artillerie attachée à la cavalerie, et des généraux et adjudants commandants attachés à son état-major" (Correspondance de Napoléon, t.18, lettre 14934 ; Correspondance générale de Napoléon, t.9, lettre 20469).
Le 23 mars 1809, l'Empereur écrit, depuis La Malmaison, au Général Clarke, Ministre de la Guerre : "Monsieur le général Clarke, j'ai signé le décret sur la composition des 17 demi-brigades provisoires de réserve ...
On fera autant de bataillons de marche qu'il y a de divisions à l'armée. Ainsi, le 1er bataillon sera composé de deux compagnies du 30e, du 61e, du 65e, formant 840 hommes (le 65e partant de Paris). Ce bataillon s'appellera bataillon de marche des 4es bataillons de la division Morand ..." (Picard E. et Tuetey L. : « Correspondance inédite de Napoléon 1er conservée aux Archives de la Guerre », Paris, 1913, t. 2, lettre 2992 ; Correspondance générale de Napoléon, t.9, lettre 20514). Le Décret sur la création des 17 Demi-brigades de 2520 hommes chacune a été signé le même jour (voir Saski, Campagne de 1809 en Allemagne et en Autriche, Paris, Berger-Levrault et cie, 1899 , t. 1, p. 550-554).
Le même jour, 23 mars 1809, l'Empereur écrit encore, depuis La Malmaison, au Général Clarke, Ministre de la Guerre : "Monsieur le général Clarke, il manque pour compléter les 4 divisions de l'armée du Rhin 1550 hommes.
Donnez ordre qu'il soit réuni un bataillon de marche de la division Morand à Strasbourg, qui sera composé de 150 hommes du 30e, dont 100 hommes pour le 4e bataillon et de 300 hommes du 61e, dont 120 pour le 4e bataillon.
Total : 450 hommes.
Les dépôts de ces corps fourniront, sans délai, ce nombre d'hommes, et les dirigeront sur Strasbourg, où ce bataillon de marche sera formé ..." (Picard E. et Tuetey L. : « Correspondance inédite de Napoléon 1er conservée aux Archives de la Guerre », Paris, 1913, t. 2, lettre 2994 ; Correspondance générale de Napoléon, t.9, lettre 20515).
- Reconstitution du 3e Corps.
De Paris, Napoléon presse l'organisation de ce qu'il appelle encore l'Armée du Rhin. Il fait constituer quatre Corps, dont le 3e aux ordres du Maréchal Davout, se compose des trois anciennes Divisions Morand, Friant et Gudin. La 2e Brigade de la 1re Division comprend toujours les 61e et 65e de Ligne. Le Général Lhuillier en conserve le commandement. Les quatrièmes Bataillons des Régiments du 3e Corps se rendent à Anspach. Ils servent à former une Division de Réserve confiée au Général Demont. Les Chefs de Bataillons Malval, Peugnet, Clément et Rougelin commandent les Bataillons du 61e.
Le 30 mars 1809, l'Empereur adresse, depuis Paris, à Berthier, Major général, ses instructions, pour la campagne à venir, suivies d'un Etat de la Composition des Divisions et Brigades des différents Corps de la Grande Armée. Le 61e de Ligne doit faire partie du 3e Corps d'Armée commandé par le Maréchal Duc d'Auerstadt; 1ère Division Morand, 3e Brigade Lhuillier de Hoff ; le 4e Bataillon du 61e de Ligne doit faire partie de la 1ère Brigade de la 4e Division Demont du 3e Corps de Davout (Correspondance de Napoléon, t.18, lettre 14975 ; Correspondance générale de Napoléon, t.9, lettre 20619).
/ Campagne d'Autriche (1809)
En attendant des renseignements suffisants pour établir son plan de campagne, Napoléon fait converger son armée vers le Danube bavarois, dans une position centrale entre les deux régions, Bohême et Haute-Autriche, où ses adversaires peuvent se concentrer. La 1re Division du 3e Corps lève ses cantonnements dans le courant de mars et se porte entre Teining et Nuremberg où elle reste en position jusqu'au 8 avril. A cette date, et sur la nouvelle que les Autrichiens ont envahi la Bavière, on l'envoie à Ingolstadt. Le 61e cantonne à Kosching.
- Combat devant Ratisbonne.
Le 3e Corps devant se réunir à Ratisbonne, la 1re Division s'y rend par Dietfurt et prend position, le 17, sur le plateau de Wentzer à proximité du pont de la Regen. Vers midi, de nombreux Tirailleurs autrichiens, soutenus par de la cavalerie, descendent des hauteurs de la rive gauche du cours d'eau et menacent le pont sur lequel ils braquent quelques pièces. Trois Compagnies de Voltigeurs, dont une du 61e, se portent contre eux et les repoussent, après un combat qui dure jusqu'à la nuit. Le Sergent-major Liomain, du 61e, est au nombre des morts.
- Bataille de Tengen.
- Les mouvements effectués jusqu'au 17 avril ont été prescrits par le Maréchal Berthier, qui dirige les opérations en l'absence de l'Empereur. L'armée française se trouve alors disséminée sur un front de 180 kilomètres, le long du Danube et du Lech. Les Autrichiens, au contraire, sont groupés en deux masses, dont l'une, forte de 120.000 hommes conduits par l'Archiduc Charles, a passé l'Isar à Landshut, tandis que l'autre, de 40.000 hommes commandés par Kollowrat, descend la Naab et se dirige sur Ratisbonne. Dès son arrivée à Donauwert, le 17, Napoléon rappelle le Maréchal Davout à Ingolstadt, par la rive droite du Danube. U lui fait ainsi exécuter, en présence de l'ennemi, une marche de flanc qui n'est possible qu'avec les soldats aguerris du 3e Corps.
Le 19 au matin, le Maréchal Davout quitte Ratisbonne, où il laisse le 65e, et se remet en route sur deux colonnes. La lre Division fait partie de la colonne de droite. Son itinéraire est tracé par Ober-Isling, Gebraching, Peising, Tengen et Peter-Feking. Elle échappe à l'Archiduc Charles, en marche sur Ratisbonne, et opère sa jonction, vers Abensberg, avec le Corps d'armée du Maréchal Lefebvre, pendant que les Divisions Friant et Gudin (colonne de gauche) soutiennent victorieusement, en avant de Tengen, les efforts de toute une armée.
- Bataille d'Abensberg.
Après la bataille de Tengen, Napoléon projette de couper, vers Landshut, la ligne de retraite de ses adversaires. La Division Morand se sépare momentanément du Maréchal Davout, qui reste sur ses positions de la veille, et passe sous les ordres du Maréchal Lannes (2e Corps). Trois Brigades ennemies sont culbutées sur Rohr. "Tout le corps ennemi fut pris, général, canons, bagages et drapeaux. On arriva sans trouver d'autres résistances jusqu'au village de Peissing, derrière lequel on aperçut une ligne de 15 à 20.000 hommes en bataille, qui bientôt s'ébranlant par sa gauche chercha à tourner la droite de la division. La brigade du général Lacour (13e légère et l7e) se précipita sur le flanc de cette colonne, qu'elle mit dans une déroute complète. Le Chef d'escadron Lavoy, avec son artillerie, et le général Lhuillier avec sa brigade (61e) secondèrent cette attaque avec autant de sang froid que d'habileté" (Rapport du Général Morand, daté du bivouac de Peissing, le 10 avril 1809, minuit). Ce combat, qui constitue l'une des affaires dont l'ensemble est désigné sous le nom de bataille d'Abensberg, coûte à la Division Morand 66 hommes mis hors de combat. Le 61e compte, pour sa part, 2 tués et 80 blessés.
- Combat de Landshut.
Le 21, à la pointe du jour, le Maréchal Lannes poursuit le Corps du Général Hiller, contre lequel il a combattu la veille. La Division Morand, qui a passé la nuit sur les hauteurs, en arrière de Rottenburg, chasse devant elle les immenses convois de l'armée autrichienne et arrive ainsi jusqu'aux portes de Landshut.
"L'ennemi, dit le Général Morand, sorti en foule de la ville pour couvrir le grand pont de l'Isar, arrêta notre mouvement. La division arriva à la tête du faubourg de Landshut; l'Empereur me donna l'ordre d'enlever la ville. Le 3e bataillon du 17e de ligne se précipita sur le pont en flammes et fut suivi du reste de la division, qui chassa entièrement l'ennemi de la ville et des hauteurs qui la dominent. L'ennemi ayant voulu se rallier sur la route de Muhldorf, le colonel Bouge, à la tête du 61e, le culbuta. On fit 12 à 15.000 prisonniers dans cette journée. Un grand nombre de canons, des équipages de pont et d'immenses bagages furent pris" (Rapport du Général Morand, daté de Landshut, le 21).
Les pertes de la Division s'élèvent à 27 tués et 132 blessés. Le 61e est le plus éprouvé de tous les corps. Le Capitaine Chevalier et 13 soldats sont au nombre des morts ; le Capitaine Hervieu, les Lieutenants Beaurepaire, Monteil et 62 soldats sont blessés. Le Colonel Bouge et le commandant Clément sont signalés à l'Empereur pour leur brillante conduite.
La Division Demont, faisant partie d'un détachement commandé par le Maréchal Lefebvre, combat de son côté vaillamment dans le voisinage de Lanquart.
- Bataille d'Eckmühl.
En manoeuvrant du côté de Landshut, Napoléon croyait fermement que le Maréchal Davout, laissé à Tengen, n'avait devant lui que des forces peu importantes, alors que la majeure partie de l'armée autrichienne était en position sur la route de Ratisbonne. Il rebrousse chemin, en apprenant quels efforts le 3e Corps a dû soutenir pendant toute la journée, et la Division Morand, repassent l'Isar, campe à 7 heures du soir sur la rive gauche de ce cours d'eau, près de Landshut. Le 22, à 5 heures du matin, cette Division se porte sur Ergoltsbach et Martinohab. Napoléon groupe ses forces pour livrer une bataille décisive à la masse principale de ses ennemis.
Vers 4 heures du soir, après une marche de 40 kilomètres, la Division Morand débouche en vue d'Eckmühl, sur le champ de batsille où les Maréchaux Davout et Lefebvre (Division Demont) luttent désespérément depuis le matin. Elle renforce aussitôt la Division Gudin et déposte l'aile gauche autrichienne d'une colline boisée qui lui sert d'appui. Vers 7 heures, après un sanglant combat de cavalerie, cent dix mille hommes, pressés sur tous les points, se retirent en désordre. Leurs pertes sont de 5.000 tués ou blessés, 15.000 prisonniers, 12 drapeaux et 16 canons. Celles des Français ne dépassent pas 800 hommes. Le 4e Bataillon du 61e, qui a combattu avec acharnement vers Obersantling, a perdu une cinquantaine d'hommes. Les trois autres Bataillons du Régiment ne comptent que 8 tués et 20 blessés.
- Bataille de Ratisbonne.
L'occupation de Ratisbonne où le 65e a été fait prisonnier, favorise la retraite des Autrichiens sur la rive gauche du Danube. La ville est emportée d'assaut, dans la soirée, sous les yeux de Napoléon, par les troupes des Maréchaux Lannes et Davout, mais la bonne contenance de quelques Régiments, dans le faubourg de Stadt-am-Hof, permet à l'Archiduc Charles de se retirer derrière la Regen.
Malgré toute la rapidité de leur marche, les Divisions Morand et Demont, arrivées trop tard, ne prennent que peu de parts à la bataiile de Ratisbonne. Elle sont passées en revue par l'Empereur, qui leur accorde de nombreuses distinctions, et bivouaquent à la nuit sous les murs de la ville.
- Marche sur Vienne.
Après la prise de Ratisbonne, la Division Morand retourne au 3e Corps. Napoléon se dirige sur Vienne, avec la masse principale de son armée, et chasse devant lui les troupes du Général Hiller (combat inutile d'Ebersberg). Le Maréchal Davout poursuit d'abord l'Archiduc Charles, dont il précipite la retraite par le combat de Vittenau, auquel la 1re Division, restée à Regenstauf, ne prend aucune part. Puis il revient sur ses pas et s"engage à son tour sur la route de Vienne par Straubing, Passau, Efferding et Lintz.
Tandis que Napoléon s'empare de la capitale de l'Autriche, le 3e Corps prend position autour de Saint-Poelten, autant pour surveiller les points de passage du Danube, que pour faire face à de nombreux rassemblements signalés vers Mariazell.
Le 16 mai, dans la matinée, une forte patrouille ennemie, débarquée à Arnsdorf, surprend la Compagnie du 7e Léger qui y est encore de grand'garde. Le Capitaine Roth, commandant le poste, et Demestre, Aide de camp du Général Leclerc, sont faits prisonniers. La Compagnie, trop disséminée, ne résiste pas et aurait peut-être été enlevée, sans l'arrivée des quatre Compagnies du 61e de Ligne (Division Morand), qui entrent dans Arnsdorf au pas de charge et obligent l'ennemi à se rembarquer en toute hâte (Pajol (Cte de) : « Pajol, Général en chef », Firmin Didot, Paris, 1874, t. 2, p. 360).
Le 61e est employé le 18 mai autour de Moelk et le 18 à Mautern.
Le Maréchal Davout redouble de précautions : il renforce ses avant-postes du 61e de Ligne, que Morand a ordre d'expédier en toute hâte à Mautern. Pajol a, dès lors, à sa disposition trois Régiments d'infanterie (7e Léger, 15e Léger et 61e de Ligne), deux Régiments de cavalerie légère (5e et 7e Hussards), plus une assez grande quantité d'artillerie. La Division Gudin s'établit, dans la journée du 19 mai 1809, à Sieghardskirchen, derrière la droite de Pajol, qui a derrière sa gauche le Général Morand, restant à Mölk avec le 17e et le 30e de Ligne, jusqu'à l'arrivée des Wurtembergeois, que Vandamme amène de Lintz ; enfin la Division Friant est aux environs de Vienne, prête à revenir à Saint-Pölten, si c'est nécessaire.
Si l'ennemi jugeait prudent de se reporter vis-à–vis d'Ebersdorf, le 3e Corps se mettra en mouvement vers Vienne : la Division Friant entrant dans cette ville, Gudin se portant à Nussdorf. Pajol, renvoyant à leur Division (Gudin ) les 7e et 15e Légers, laissera devant Krems le 61e de Ligne et de la cavalerie, puis s'acheminera vers Tulln et Klosterneuburg ; Morand viendra à Saint-Pölten, lorsque Vandamme l'aura relevé à Mölk (Pajol (Cte de) : « Pajol, Général en chef », Firmin Didot, Paris, 1874, t. 2, p. 361).
Le 19 mai 1809, à 3 heures après midi, le Maréchal Davout écrit, depuis Saint-Poelten, à l’EMpereur : "… Le général Morand est avec le 17e et le 30e à Moelk ; le 61e est à Mautern …" (Mazade C. (de) : « Correspondance du Maréchal Davout, prince d'Eckmühl : ses commandements, son ministère, 1801-1815 », t. 2, p. 549, lettre 745).
- Bataille d'Essling.
Les ponts d'Ebersdorf étant complétement achevés le 20 mai vers trois heures de l'après-midi, l'Empereur fait immédiatement commencer le passage des Corps de Masséna et de Lannes. L'apparition subite des troupes françaises sur la rive gauche ne peut manquer d'attirer l'attention de l'ennemi du côté de l'île Lobau. Davout reçoit avis de ne plus tenir compte des démonstrations, peu dangereuses, qui pourraient se faire aux environs de Krems, et de rapprocher tout son Corps d'armée d'Ebersdorf, où il franchira le Danube, à la suite de Masséna. Pajol se prépare donc à partir pour Tulln et Klosterneuburg, avec le 7e Léger, deux Régiments de cavalerie (7e Hussards et 11e Chasseurs) et l'artillerie de la 3e Division ; il laisse à Mautern le 61e de Ligne tout entier et un Régiment de cavalerie (5e Hussards), sous le commandement du Général L'Huillier (Pajol (Cte de) : « Pajol, Général en chef », Firmin Didot, Paris, 1874, t. 2, p. 363).
La Division Demont a été placée, le 24 avril, sous les ordres du Maréchal Lannes. Le 20 mai, dans la soirée, cette Division quitte Vienne, où elle est arrivée, le 10, et se forme dans l'ile Lobau. Des difficultés matérielles ne lui permettent pas de traverser le fleuve, le 21, et de participer à la première journée de la bataille d'Essling, contre toutes les forces autrichiennes. Mais elle opère son passage, le 22 au point du jour, et prend position en troisième ligne, derrière la Division Carra Saint-Cyr, du 4e Corps, pendant que les troupes qui ont combattu la veille débouchent des villages d'Aspern et d'Essling.
Dans la matinée, par suite de la rupture des ponts sur le grand bras du Danube, et de la perspective de manquer de munitions qui en est la conséquence, les troupes françaises, quoique victorieuses, sont rappelées du champ de bataille. La Division Demont soutient la retraite et se déploie vers midi, en avant d'Essling.
Le 4e Bataillon du 61e, exposé à une effroyable canonnade, ne cède le terrain que pied à pied. Le Maréchal Lannes tombe mortellement frappé par un boulet qui lui fracasse les deux jambes. La lutte se prolonge jusqu'à la nuit. L'Archiduc Charles renonce alors à continuer son attaque, et le 23, à deux heures du matin, le Bataillon du 61e est ramenée dans l'île Lobau. Les pertes qu'il a subies s'élèvent à 22 tués et 80 blessés. Le Sous-lieutenant Bonvalot, les Caporaux Clerc et Ignace sont au nombre des morts.
- Garde du Danube.
La 1re Division, restée dans ses cantonnements pendant la bataille d'Essling, continue jusqu'au 28 à garder la rive droite du Danube.
Le 25, vers 3 heures du matin, un parti ennemi débarque dans une île entre Odlenbourg et St-Georges et se porte à l'attaque d'un poste du 61e, qui le repousse en lui faisant deux prisonniers.
Le même jour, à Zidentendorf, une autre portion du 61e engage une action avec le poste autrichien d'Altenwert et lui fait 10 prisonniers.
Le 29, la 1re Division est remplacée dans son service par un Corps de Wurtembergeois. Elle rejoint le Maréchal Davout, entre Vienne et Ebersdorf et le 61e prend position, le 30, à Ettengestadt.
Le Général Demont a été remplacé, le 26 mai, par le Général Puthod. Le 10 juin, la Division qu'il commandait quitte l'ile Lobau pour passer sous les ordres du Maréchal Davout dont elle devient la 4e Division.
Le même 10 juin 1809, l'Empereur, qui vient de décider d'une importante levée de Conscrits, sur la classe 1810, mais aussi sur les classes 1806 à 1809, afin de compenser les pertes du début de la campagne, et renforcer l'Armée, écrit depuis Schönbrunn au Général Clarke pour lui donner le détail de cette opération particulièrement complexe; lettre accompagnée de 3 Etats différents très détaillés, et d'une annexe intitulée "Répartition des 40 000 conscrits de l'appel supplémentaire de 1810"; cette dernière donne la composition de la 10e Demi-brigade provisoire : 27e de ligne qui reçoit 40 hommes; 30e id. 40; 33e id. complété à la Division Friant; 61e id. qui reçoit 250 hommes; 111e id.; 40e id. qui reçoit 110 hommes; au total donc, 440 hommes. Il est par ailleurs précisé que l'on doit porter "les 18 compagnies à 2520 hommes" (Correspondance générale de Napoléon, t.9, lettre 21182).
Dans le courant de juin, l'Archiduc Charles et Napoléon se préparent à une grande bataille. L'Archiduc Jean, rappelé d'Italie où il combattait contre le Prince Eugène, cherche, vers le 15, à franchir le Danube aux environs de Presbourg. La Division Puthod, envoyée contre lui, prend position à Kitsee.
Le 3 juillet, l'Empereur est en mesure d'attaquer son adversaire. Toute l'armée française se concentre dans l'ile de Lobau.
- Bataille de Wagram.
Dans la nuit du 4 au 5 juillet, le passage de fleuve commence sous la protection de nombreuses batteries qui mettent le feu au village d'Enzersdorf. Le 3e Corps débouche vers 3 heures du matin et se forme à droite de Wietau. Les 1re et 4e Divisions sont en seconde ligne.
Pendant toute la journée, le Maréchal Davout, constituant l'aile droite, manoeuvre, sans rencontrer beaucoup de résistance, dans l'immense plaine du Marchfeld. Après une tentative sur Neusiedel, le bivouac de son Corps d'armée est établi, vers dix heures du soir, dans le voisinage de Glinzendorf. La ligne française s'étend alors depuis ce village jusqu'à Kagran, en face des Autrichiens postés depuis le Danube jusqu'à Neusiedel, par Gerardsdorf et Wagram.
Le 6 juillet, aux premiers rayons du soleil, le 3e Corps est attaqué en faisant un mouvement pour se rapprocher du centre. Les coups de feu qui sont échangés donnent le signal de la bataille. L'Empereur fait renforcer son aile droite par une Division de Cuirassiers, ce qui permet au Maréchal Davout de se maintenir dans Grosshofen et Glinzendorf.
Vers dix heures et demie, le 3e Corps reçoit l'ordre de s'emparer de la position de Neusiedel et de tourner la gauche autrichienne. Tandis que les Divisions Puthod et Gudin attaquent de front, les Divisions Morand et Friant passent le Russbach en avant du village et cherchent à déborder leurs ennemis. La lutte est extrêmement vive, mais le courage des assaillants finit par triompher. Les Autrichiens, battus de toutes parts, se replient sur Wagram.
A quatre heures du soir, la journée est presque terminée. Les mouvements qui suivent jusqu'à la nuit n'ont pour but que de précipiter la retraite d'une masse d'hommes dont les premiers fuyards couvrent déjà les routes de la Moravie. Vers sept heures, la 1re Division chasse l'ennemi du village de Bockfuss et prend position sur la route de Schweinbart, à hauteur de Regendorf. La 4e Division bivouaque en avant de Wagram, où se trouve le Quartier général du 3e Corps.
Les pertes, pour chaque armée, atteignent 25.000 hommes. Celles de la lre Division sont de 9 Officiers et 200 hommes tués, 44 Officiers et 1.107 hommes blessés. Les trois Bataillons du 61e qui en font partie comptent 69 hommes tués et 374 blessés. Les Capitaines Daubian et Lange, le Lieutenant Frémont, le Sous-lieutenant Seguin, les Sergents-majors Damin et Vernier, les Sergents-fourriers Koetsche et Villeunier, les Sergents Dumont et Duhaudant, les Caporaux Aupicon, Demoulin, Fontange, Vinceleau, Cuisinier, Roussel et Berthier sont tués ou meurent de leurs blessures. Le Commandant Peugnet, les Sous-lieutenants Abeille, Deroche et Chausseprat sont blessés. De tous les Régiments du 3e Corps, le 61e est celui qui a le plus souffert. Encore les pertes, restées inconnues, subies par le 4e Bataillon ne sont-elles pas comprises dans les chiffres qui précèdent.
En rendant compte au Maréchal Davout des événements de la journée, le Général Morand signale, d'une façon particulière, la brillante conduite du Colonel Bouge et du Lieutenant Morgan, du 61e, "qui se sont fait remarquer en entrainant leurs hommes contre les positions de Neusiedel, sous le feu de plus de trente canons et malgré les charges furieuses de la cavalerie ennemie".
- Cantonnements en Moravie.
Le 7 juillet à midi, les lre et 4e Divisions lèvent leurs bivouacs et se portent sur Wolkersdorf. Elles campent ensuite à Wulfersdorf et Wolsburg, d'où le 3e Corps est dirigé, le 10, sur Znaïm, pour seconder le Maréchal Marmont, contre les débris de l'armée autrichienne. Les 1re et 4e Divisions passent la Thaya à Laab et s'arrêtent, à 10 heures du soir, en deça de Znaïm.
Une suspension d'armes, convenue le 12, interrompt les hostilités. La lre Division est alors établie le long de l'lglawa et de la Thaya, depuis Pohrlitz jusqu'à Nicolsburg.
Le 15 juillet 1809, l'Empereur écrit, depuis Schönbrunn, au Général Clarke, Ministre de la Guerre : "Monsieur le général Clarke ... Mon intention est de supprimer les demi-brigades provisoires suivantes : ... la 10e demi-brigade provisoire ; ainsi les compagnies des 27e, 30e, 33e, 61e, 111e, 40e qui en font partie se rendront sans délai à Vienne" (Picard E. et Tuetey L. : « Correspondance inédite de Napoléon 1er conservée aux Archives de la Guerre », Paris, 1913, t. 3, lettre 3308 ; Correspondance générale de Napoléon, t.9, lettre 21511).
Le 15 donc, la 4e Division est dissoute par l'incorporation, dans leurs Régiments respectifs, des 4es Bataillons dont elle se compose.
Le 61e, établi près de Nicolsburg, au camp de Guldenfurt, reste jusqu'au 10 septembre dans des baraquements rapidement construits. Il se rend ensuite à Brünn, au chef lieu du cercle dont le Maréchal Davout a reçu le commandement.
- Traité de Vienne.
Le traité de Vienne, signé le 14 octobre, termine la guerre. L'Autriche perd de ses états au profit de la France, de la Bavière et du Duché de Varsovie. La Russie alliée de la France, mais dont le rôle a été à peu près nul pendant toute la campagne, ne reçoit, pour sa part, que la ville de Tarnapol.
/ Période de Paix.
Le traité de Vienne est suivi d'une convention militaire stipulant certains délais pour l'évacuation de l'Autriche. Le 61e ramené d'abord à Koenigsfeld, puis à Wels et de là à Goldeck, est cantonné, au commencement de 1810, dans le voisinage de Salzbourg.
Au 1er février, les cadres du 4e Bataillon retournent au Dépôt, à Worms, après avoir passé leurs hommes aux trois autres Bataillons qui se rendent Bayreuth.
La 1ère Division (Général Morand) de l'Armée d'Allemagne, composée des 13e Léger, 17e, 30e, 57e et 61e de Ligne, des Tirailleurs corses et du Pô, quitte Salzbourg à partir du 5 février 1810 pour se rendre à Bayreuth où elle arrive du 24 février au 2 mars (Margueron (Cdt) : « Campagne de Russie, première partie », tome 1, Lavauzelle, page 299).
Le 4 mars 1810, à Paris, l'Empereur est informé que "M. Bouge, colonel du 61e régiment d'infanterie de ligne, demande un congé de convalescence"; l'Empereur le lui accorde (Picard E. et Tuetey L. : « Correspondance inédite de Napoléon 1er conservée aux Archives de la Guerre », Paris, 1913, t. 3, lettre 4068 - Non signée ; extraite du « Travail du ministre de la guerre avec S. M. l'Empereur et Roi, daté du 28 février 1810 »).
Le 15 mars 1810, l'Empereur ordonne, depuis Paris : "Notre ministre de la guerre donnera les ordres ci-après :
ARMÉE D'ALLEMAGNE ...
Le grand quartier général, les grandes administrations, les parcs généraux d'artillerie et du génie, et tout ce qui appartient à l'état-major général de la Grande Armée, sont dissous à dater du 1er avril prochain.
Les états-majors et administrations, et tout ce qui tient à l’organisation des 2e et 4e corps et de la réserve générale de cavalerie, sont dissous conformément aux dispositions prescrites par des décrets des 7 et 18 février dernier.
En conséquence, l'armée qui restera en Allemagne sous le commandement du prince d’Eckmühl sera composée de la manière suivante, savoir :
... 1re division d’infanterie, commandée par le général Morand, composée des 13e régiments d'infanterie légère, 17e, 30e, 57e et 61e régiments d'infanterie de ligne. Cette division sera cantonnée à Bayreuth jusqu'à nouvel ordre ..." (Picard E. et Tuetey L. : « Correspondance inédite de Napoléon 1er conservée aux Archives de la Guerre », Paris, 1913, t. 3, lettre 4105; Margueron (Cdt) : « Campagne de Russie, première partie », tome 1, Lavauzelle, page 93).
En Juin 1810, La 1re Division Morand reçoit l'ordre de se rendre dans les villes hanséatiques pour remplacer la Division Molitor qui est envoyée à Emden, à la disposition du Duc de Reggio (ordre du 8 juin 1810). Elle se met en marche du 19 au 22 juin (Margueron (Cdt) : « Campagne de Russie, première partie », tome 1, Lavauzelle, page 299).
Le ministre de la guerre rend compte à l'Empereur, le 23 juin, de l'exécution des mouvements effectués par l'Armée d'Allemagne : "Sire, j'ai l'honneur de rendre compte à Votre Majesté qu'en exécution de son ordre du 8 juin et d'après ceux que j'avais à cet effet adressés à M. le maréchal prince d 'Eckmühl, la division du général Morand s'est mise en marche du 19 au 22 pour les villes hanséatiques, le quartier général de l'armée d'Allemagne pour Francfort, le parc d'artillerie pour Manheim, et le parc du génie pour la même place.
En conséquence, le 17e régiment d'infanterie de ligne et le 13e d'infanterie légère arriveront à Lubeck les 13 et 15 juillet. Les 30e et 57e d'infanterie de ligne arriveront à Hambourg les 12 et 13 juillet. Le 61e d'infanterie de ligne et l'artillerie de la division Morand arriveront les 12 et 13 juillet à Bremen. Le quartier général de l'armée d'Allemagne, avec la 3e compagnie du 3e bataillon de sapeurs et la 1re du 2e bataillon de mineurs, seront rendus à Francfort le 4 juillet. Le parc général d'artillerie, marchant en deux colonnes, arrivera du 25 au 26 juin à Manheim, et le parc du génie avec la 4e compagnie du 3e bataillon de sapeurs seront rendus à Manheim les 4 et 5 juillet" (Margueron (Cdt) : « Campagne de Russie, première partie », tome 1, Lavauzelle, page 114).
Dans un rapport à l’Empereur, en date du 30 juin, le Ministre de la Guerre rend compte de la marche de la Division Molitor mise à la disposition du Duc de Reggio et de la répartition des troupes de cette Division en attendant l'arrivée de la Division Morand : "Sire, j'ai l'honneur de rendre compte à Votre Majesté que les 16e et 67e régiments d'infanterie de ligne de la division Molitor, ainsi que le 23e régiment de chasseurs, sont en ce moment en marche avec quatre bouches à feu, pour se diriger sur Emden, pour y demeurer, conformément aux intentions de Votre Majesté, à la disposition de M. le maréchal duc de Reggio.
En conséquence, le 67e régiment d'infanterie et le 23e régiment de chasseurs arriveront successivement à Emden les 5 et 7 juillet.
Quant au 16e régiment d'infanterie, le général Molitor a fait diriger sa marche sur Groningue, où il sera rendu le 9 juillet, d'après la demande de M. le maréchal duc de Reggio.
Le 37e régiment d'infanterie avec deux bouches à feu, la 8e compagnie du 1er bataillon de pontonniers et la 3e compagnie du 5e bataillon de sapeurs, sont restés dans les villes hanséatiques pour garder la côte, depuis Lubeck jusqu'à la Jahde, en atlendant l'arrivée de la division du général Morand.
Ces troupes sont réparties de la manière suivante :
Le 1er bataillon du 37e régiment à Bremen, avec deux bouches à feu, pour garder l'embouchure du Weser;
Le 2e bataillon à Hambourg, avec les sapeurs et les pontonniers, fournit un poste à Cuxhaven;
Le 3e bataillon à Lubeck.
La division du général Morand, qui doit remplacer ces troupes dans les villes hanséatiques marche, à cet effet, sur trois colonnes :
La première, composée du 17e régiment d'infanterie de ligne et du 13e d'infanterie légère, arrivera à Lubeck du 13 au 15 juillet.
La deuxième colonne, composée des 30e et 57e régiments d'infanterie de ligne, arrivera à Hambourg du 12 au 13 juillet.
Enfin, la troisième colonne, composée du 61e régiment d'infanterie de ligne et de l'artillerie de la division, arrivera à Bremen du 12 au 13 juillet.
D'après cette disposition, le 37e régiment pourra être relevé sur les points qu'il occupe vers le 15 juillet et se mettre immédiatement en marche avec tout ce qui appartient à la division du général Molitor pour rejoindre cette division en Hollande.
J'ai l'honneur de proposer à Votre Majesté de faire rentrer sous le commandement du général Molitor le 2e régiment d'infanterie de ligne qui faisait précédemment partie de cette division et qui se trouve en ce moment à Emden.
Le général Bordessoulle pourrait reprendre, en même temps, le commandement de sa brigade de cavalerie légère composée des 3e et 23e régiments de chasseurs qui vont se trouver réunis à Emden.
Je demande, à cet égard, les ordres de Votre Majesté" (Margueron (Cdt) : « Campagne de Russie, première partie », tome 1, Lavauzelle, page 126). L'Empereur approuve ces dispositions à Saint-Cloud, le 3 juillet 1810.
De juillet à septembre, le 61e de Ligne est à Brême (Margueron (Cdt) : « Campagne de Russie, première partie », tome 1, Lavauzelle, page 299).
Le 6 octobre 1810, l'Empereur adresse, depuis Fontainebleau, au Général Clarke, Duc de Feltre, Ministre de la Guerre, à Paris, une Note sur l'organisation des armées; concernant l'Armée d'Allemagne, il écrit : "… 1er corps : le 7e d'infanterie légère formerait quatre bataillons ; le 13e, quatre ; le 15e, quatre (le 4e bataillon de ce régiment, étant en Espagne, serait remplacé par le 3e bataillon du 6e léger) ; le 33e d'infanterie légère, quatre ; le 12e de ligne, quatre ; le 17e, quatre ; le 21e quatre ; le 25e, trois (le 4e bataillon en Espagne) ; le 30e, quatre ; le 33e quatre ; le 48e, quatre ; le 57e, quatre ; le 61e, quatre ; le 85e, quatre ; le 108e, quatre ; le 111e, quatre ; total, 16 régiments formant 63 bataillons.
Ces 63 bataillons composeraient 4 divisions ; chaque division serait formée d'un régiment d'infanterie légère et de 3 régiments de ligne. Ce premier corps serait celui qui est actuellement en Allemagne, sous les ordres du prince d'Eckmühl ..." (Correspondance de Napoléon, t.21, lettre 17000 ; Correspondance générale de Napoléon, t.10, lettre 24816 ; Margueron (Cdt) : « Campagne de Russie, première partie », tome 1, Lavauzelle, page 172).
Le 9 octobre 1810, le Ministre de la Guerre adresse son Rapport à l’Empereur : "Sire, j'ai l'honneur de soumettre à Votre Majesté, conformément à votre ordre du 4 de ce mois, un projet d'organisation de l'armée d'Allemagne.
Les trois divisions d'infanterie se trouvent déjà organisées, savoir :
La 1re, sous les ordres du général Morand, se compose du 13e régiment d'infanterie légère, des 17e, 30e, 57e et 61e de ligne, des 1re et 16e compagnies du 7e d'artillerie à pied, des trois premières compagnies du 1er bataillon principal du train, plus de deux compagnies du 9e régiment d'artillerie à pied qui viennent de recevoir l'ordre de partir de la Hollande, pour se rendre à Cuxhaven ; au total : 15 bataillons, 7 compagnies d'artillerie, 11610 hommes et 771 chevaux du train ..." (Margueron (Cdt) : « Campagne de Russie, première partie », tome 1, Lavauzelle, page 188).
Le 8 novembre 1810, l'Empereur écrit, depuis Fontainebleau, au Général Clarke : "Monsieur le due de Feltre, donnez des ordres pour qu'il soit formé un régiment de marche, qui sera composé des hommes disponibles des :
4e et 5e bataillons du 13e léger, jusqu'à concurrence de 500 hommes; Du 17e de ligne. 400; Du 30e – 30; Du 57e – 40; Du 61e – 30; Du 15e léger. 30; Du 48e 600; Du 108e 700; Des détachements du 12e de ligne. 6; Du 21e de ligne. 60; Du 85e – 30.
Ce régiment de marche, fort de 2.500 hommes, se réunira à Wesel, d'où il se rendra à Hambourg, quartier général de l'armée d'Allemagne. Là, il sera dissous, et les cadres des 4es et 5es bataillons rentreront en France, sans qu'il en soit rien retenu ..." (Picard E. et Tuetey L. : « Correspondance inédite de Napoléon 1er conservée aux Archives de la Guerre », Paris, 1913, t. 3, lettre 4797; Margueron (Cdt) : « Campagne de Russie, première partie », tome 1, Lavauzelle, page 202).
Le 6 décembre 1810, le Prince d’Eckmühl écrit, depuis Paris, à l’Empereur : "Sire, en conformité des ordres que Votre Majesté m'a donnés par sa lettre du 5, j'ai l'honneur de lui transmettre un état de situation de son armée d'Allemagne, à l'époque du 20 octobre dernier. Les observations à la suite de cet état indiquent les troupes de diverses armes, qui, jusqu'à ce jour, ont eu ordre de rejoindre l'armée d'Allemagne, et qui n'y étaient pas arrivées au 20 novembre.
Situation de l'armée d'Allemagne à la date du 20 octobre 1810.
(Extrait.)
1re Division Général Morand à Hambourg ...
61e. Depuis Hambourg jusqu'à Cuxhaven ..." (Margueron (Cdt) : « Campagne de Russie, première partie », tome 1, Lavauzelle, page 216).
Vers la fin de l'année, et après avoir occupé pendant quelque temps les garnisons de Stade et de Haarburg, on réunit les Bataillons du 61e à Hambourg.
Le 13 février 1811, l'Empereur écrit, depuis Paris, au Général Clarke, Duc de Feltre, Ministre de la Guerre, à Paris : "Monsieur le Duc de Feltre, au 1er avril l'armée d'Allemagne sera composée de la manière suivante :
1re division : le général de division Morand, commandant ; les généraux Dalton et Lhuillier, généraux de brigade. 13e d'infanterie légère ; 17e, 30e, 61e de ligne.
... Chaque régiment, dans le courant de l'été, aura 4 bataillons ; ce qui fera 16 bataillons par division ou 12,000 hommes.
Chaque régiment aura également, dans le courant de l'été, 4 pièces de canon ; ce qui fera 16 pièces de canon par division ...
Les mouvements de l'armée d'Allemagne doivent se faire par Wesel, qui est le grand dépôt.
Ces ordres doivent être tenus secrets, et vous devez prescrire les différentes dispositions sans que personne ait connaissance de cette lettre. Vous m'apporterez vous-même la formation de l'armée en ses différentes parties, avec la désignation des officiers, pour que je l'approuve, et vous l'enverrez ensuite au prince d'Eckmühl, comme définitivement arrêtée ..." (Correspondance de Napoléon, t.21, lettre 17328 ; Correspondance générale de Napoléon, t.10, lettre 25918; Margueron (Cdt) : « Campagne de Russie, première partie », tome 2, Lavauzelle, page 39).
Le 6 mars 1811, le Prince d’Eckmühl écrit, depuis Hambourg, à l’Empereur : "Sire, j'ai l'honneur de rendre compte à Votre Majesté que, d'après l'autorisation qu'Elle a bien voulu m'en donner à Paris, j'ai établi une école, dans chacun des quinze régiments d'infanterie de l'armée d'Allemagne, de 200 hommes par régiment, sachant déjà tous lire et écrire et ayant au moins deux ans de service. Ils sont exempts de tout autre service que de celui d'aller à l'école, afin de se perfectionner dans la lecture, l'écriture et tout ce que doit savoir un bon sous-officier, et être capables dans peu d'instruire des recrues.
Dans ces 200 hommes, on a désigné 60 caporaux.
Ces écoles sont déjà en activité depuis quelque temps. Tous les rapports des colonels s'accordent sur le zèle et la bonne volonté qu'apportent tous ceux qui en font partie.
Les 57e et 61e ont leurs écoles à Hambourg : à en juger des autres régiments par ce que j'ai vu dans ces deux écoles, je puis assurer à Votre Majesté qu'Elle aura d'ici à deux ou trois mois, par régiment, non compris les 60 caporaux, 140 excellents sous-officiers.
J'observerai qu'on n'a pris, pour former ces écoles, que des hommes présents, et qu'il se trouve parmi les semestriers des soldats susceptibles de faire de très bons sous-officiers, sachant bien lire et écrire.
Il y a dans tous ces régiments une assez grande quantité de soldats ne faisant pas partie des écoles qui ont demandé à leurs colonels la permission de les suivre.
Ainsi, en supposant qu'il y ait quelques ressources dans les dépôts, chaque régiment aura dans trois mois, indépendamment de ses trois bataillons de guerre, de quoi fournir le cadre de trois autres bataillons.
Il y a des artilleurs attachés à ces écoles pour montrer à faire confectionner les fascines, gabions, le canonnage, à enclouer et désenclouer une pièce, etc.
On y montre aussi à tracer des ouvrages de grand'garde et le service des sous-officiers dans les sièges.
Une commission d'officiers instruits rédige une instruction extraite des différentes ordonnances, où sera insérée la théorie qu'on montrera dans ces écoles; je la ferai imprimer et l'on en distribuera 2 à 300 par régiment.
Il y a aussi une école de trois ou quatre tambours par compagnie, outre ceux qui existent déjà.
On établit de ces écoles dans les différents régiments de cavalerie de l'armée d'Allemagne, mais elles seront moins nombreuses.
Ces établissements ne coûtent rien à Votre Majesté" (Margueron (Cdt) : « Campagne de Russie, première partie », tome 2, Lavauzelle, page 72).
Le 7 mars 1811, l'Empereur écrit, depuis Paris, au Général Clarke, Ministre de la Guerre : "Monsieur le duc de Feltre ... Donnez ordre que ce qu'il y a de disponible dans le 72e soit versé dans le 4e bataillon.
Même ordre pour· les 62e, 61e, 57e, 55e, 53e, 52e, 51e, 48e, 44e, 35e, 33e, 30e, 29e ..." (Picard E. et Tuetey L. : « Correspondance inédite de Napoléon 1er conservée aux Archives de la Guerre », Paris, 1913, t. 4, lettre 5136 ; Correspondance générale de Napoléon, t.10, lettre 26122).
Le 2 avril 1811, l'Empereur écrit, depuis Paris, au Général Clarke, Duc de Feltre, Ministre de la Guerre, à Paris : "Je vous renvoie l'état de situation de l'armée d'Allemagne. Il ne faut pas mettre les deux bataillons du 127e à la 1re brigade ; ce serait une chose funeste pour l'armée. Il faut la composer du 13e d'infanterie légère et du 17e de ligne.
La 2e doit l'être du 30e et du 61e ; la 3e des deux bataillons suisses et des deux bataillons du 127e. Au lieu du général Ledru, il faut mettre le général Teste ..." (Correspondance de Napoléon, t.22, lettre 17549 ; Correspondance générale de Napoléon, t.11, lettre 26479. La CGN donne le 12e Léger à la place du 13e Léger).
Le 8 avril 1811, le Prince d’Eckmühl écrit, depuis Hambourg, à l’Empereur : "Sire, en conséquence des ordres de Votre Majesté, j'ai donné celui de compléter de suite toutes les places de sergents et de caporaux; il y a beaucoup de régiments où ces places sont complètes. L'ordre sera exécuté dans le délai fixé.
Vos intentions, pour établir une école de tambours dans chacun des régiments d'infanterie, sont déjà mises à exécution depuis quelque temps; deux soldats par compagnie vont à l'école des tambours. Ainsi ce serait 36 par régiment, outre les tambours ordinaires, dans le cas où Votre Majesté en aurait besoin. Ils ne sont payés que comme soldats. Je donne aussi des ordres pour qu'on élève les enfants de troupe comme tambours, s'il s'en trouve dans les corps.
J'ai rendu compte à Votre Majesté que, d'après l'autorisation qu'Elle m'avait donnée à Paris, j'ai formé dans chaque régiment une école composée de 200 militaires, dont 60 caporaux et 140 soldats, tous sachant lire et écrire et la plupart les quatre règles. Il règne une très grande émulation dans ces écoles; le matin ils sont pour lire, écrire et compter, et le soir à l'exercice.
Il y a quelques jours, j'ai été voir les écoles du 57e et du 61e; j'ai été très satisfait. J'ai fait sortir les soldats des rangs les uns après les autres et les ai fait commander; ils avaient presque tous le ton du commandement, et expliquaient assez bien ce qu'ils commandaient.
Tous les colonels réclamaient un manuel des sous-officiers; je l'ai fait faire. Ce sont absolument des règlements militaires qu'il importe aux sous-officiers de connaître. J'adresse à Votre Majesté le premier volume. Il n'y a qu'un article qui ne se trouve pas dans les règlements, mais qui est un résumé des différents ordres du jour, comme Elle pourra s'en convaincre Elle-même.
L'article est intitulé: Devoirs des sous-officiers dans tous les temps, et est renfermé depuis la page 216 jusqu'à celle 224.
Le 2e volume, qui sera un peu moins considérable, est à l'impression; il renferme quelques principes sur le canonnage, les quatre règles d'arithmétique, et enseigne à faire les petits ouvrages de grand'gardes; on n'y a rien mis qui ne soit à la portée des sous-officiers.
L'ouvrage entier est extrait des règlements.
Je l'adresserai à Votre Majesté aussitôt qu'il sera imprimé" (Margueron (Cdt) : « Campagne de Russie, première partie », tome 2, Lavauzelle, page 170).
"DÉCRET DU 11 AVRIL 1811.
Titre 1er.
Création d'un 6e bataillon à quatorze régiments de l'armée d'Allemagne.
ART. 1er. — Il sera formé un 6e bataillon aux 13e et 7e régiments d'infanterie légère et aux douze régiments d'infanterie de ligne qui font partie du corps de l'armée d'Allemagne.
ART. 2. — Ces sixièmes bataillons n'auront pas de compagnies de grenadiers ni de voltigeurs; ils ne seront composés que de six compagnies de fusiliers.
ART. 3. — Au 1er mai prochain, notre ministre de la guerre nous présentera la nomination des chefs de bataillon qui commanderont ces sixièmes bataillons.
Les colonels, qui commandent les bataillons de guerre qui sont en Allemagne, désigneront dans ces trois bataillons deux capitaines et deux lieutenants par bataillon. Il sera pris, en outre, sur tout le régiment, un adjudant-major.
Six sous-lieutenants seront pris, soit dans les vélites de notre Garde, soit dans notre école militaire de Saint-Cyr.
Notre ministre de la guerre fera désigner en outre 6 sergents-majors pris parmi les sergents en activité dans les trois bataillons de guerre; 24 sergents pris moitié dans les sergents en activité des bataillons de guerre et moitié parmi les caporaux et soldats desdits bataillons, et 48 caporaux, desquels 21 seront pris parmi les caporaux en activité et 24 parmi les soldats ayant au moins quatre ans de service dans les bataillons de guerre.
ART. 4. — Les ordres seront donnés pour que les cadres soient rendus aux dépôts au 1er juin, afin qu'ils soient prêts pour recevoir la conscription.
ART. 5. — Lorsque les sixièmes bataillons seront arrivés en ligne, les colonels en feront faire le tiercement avec les autres bataillons, de manière que les compagnies aient un égal nombre de vieux et de nouveaux soldats.
ART. 6. — Les régiments étant ainsi composés à six bataillons, il sera attaché à chaque régiment un major en second qui rejoindra les bataillons de guerre aussitôt que les quatrièmes bataillons y seront arrivés.
Les 1er et 2e bataillons, en bataille, seront commandés par le colonel; les 3e et 4e bataillons, en bataille, seront commandés par le major en second ..." (Margueron (Cdt) : « Campagne de Russie, première partie », tome 2, Lavauzelle, page 173 - Ce décret est complété par celui du 23 avril 1811).
Le 19 avril 1811, l'Armée d'Allemagne est composée de trois Corps; le 1er est le Corps d'observation de l'Elbe, commandé par Davout. L'Empereur écrit en effet ce jour à au Général Clarke, Duc de Feltre, Ministre de la Guerre, à Paris : "Monsieur le Duc de Feltre, l'armée d'Allemagne sera composée de trois corps :
1° Le corps d'observation de l'Elbe ;
2° Le corps d'observation du Rhin ;
3° Le corps d'observation d'Italie.
CORPS D'OBSERVATIONDE L'ELBE.
Le corps d'observation de l'Elbe sera commandé par le prince d'Eckmühl. Il sera composé de cinq divisions d'infanterie et formé de la manière suivante :
... 5e Division : 25e de ligne, cinq bataillons ; 61e, cinq ; 108e, cinq ; 111e, cinq ; total, 20 bataillons.
Cette 5e division sera commandée par le général Compans ...
ARTILLERIE. — Chaque régiment aura quatre pièces de régiment, ce qui fera douze pièces par division, à l'exception de la 5e, qui en aura seize ..." (Correspondance de Napoléon, t.22, lettre 17630 ; Correspondance générale de Napoléon, t.11, lettre 26753; Margueron (Cdt) : « Campagne de Russie, première partie », tome 2, Lavauzelle, page 220).
"Décret du 23 avril 1811.
ART. 1er. — Il sera formé un sixième bataillon à chacun de nos 7e et 13e régiments d'infanterie légère; 12e, 17e, 21e, 30e, 33e, 48e, 57e, 61e, 85e, 108e et 111e de ligne.
Ces sixièmes bataillons seront organisés à notre armée d'Allemagne, où se trouvent les bataillons de guerre de ces régiments. Ils seront complétés avec des hommes tirés des dépôts indiqués à l'état joint au présent décret.
ART. 2. — Le cadre de chacun de ces sixièmes bataillons sera formé de la manière suivante :
Notre ministre de la guerre nous proposera le chef du bataillon.
Les trois bataillons de guerre du régiment fourniront chacun, au choix du colonel, un capitaine et un lieutenant, deux sergents-majors, dont un pris parmi les sergents-majors du bataillon et un parmi les sergents; 8 sergents, dont 4 pris parmi les sergents et 4 parmi les caporaux; 2 caporaux-fourriers, dont un pris parmi les fourriers et un parmi les caporaux, et 16 caporaux, dont 8 pris parmi les caporaux et 8 parmi les soldats susceptibles de le devenir.
Le colonel choisira également, parmi les lieutenants des trois bataillons, l'adjudant-major du 6e et parmi les sous-officiers les deux adjudants sous-officiers de ce bataillon.
Les sous-lieutenants de ce sixième bataillon seront tirés de notre école militaire de Saint-Cyr.
Les trois autres capitaines et les trois autres lieutenants, qui devront compléter le cadre de chaque 6e bataillon, seront tirés, soit de notre Garde, soit des cadres des officiers venant des îles, soit enfin du nombre des officiers en réforme.
Tous les officiers et sous-officiers pris dans les trois premiers bataillons de guerre, pour passer dans le 6e, seront remplacés au bataillon qu'ils quitteront.
ART. 3. — Les sixièmes bataillons n'auront jusqu'à nouvel ordre ni grenadiers ni voltigeurs; ils seront seuls composés de six compagnies de fusiliers portées à la même force que celle des autres bataillons.
ART. 4. — Le tiercement de ces bataillons avec les premiers s'opérera au 1er juillet prochain, de manière à ce que toutes les compagnies de fusiliers aient un nombre égal d'anciens et de nouveaux soldats.
ART. 5. — Notre ministre directeur de l'administration de la guerre prendra les mesures nécessaires pour que les anciens soldats et les conscrits, destinés à compléter ces régiments et qui seront tirés d'autres corps, soient pourvus, avant leur départ pour l'armée, de tous les effets d'habillement et d'équipement qui leur reviennent, et notre ministre de la guerre leur fera fournir ceux de l'armement.
ART. 6. — Notre ministre de la guerre les fera diriger sur l'armée par détachements, dont la conduite sera confiée à des officiers et sous-officiers tirés des corps qui les auront fournis et en nombre proportionné à la force de chaque détachement. Ces officiers et sous-officiers retourneront à leurs corps après avoir fait la remise des détachements.
ART. 7. — Les dispositions du décret du 11 de ce mois auxquelles il n'est pas dérogé par le présent recevront leur exécution" (Margueron (Cdt) : « Campagne de Russie, première partie », tome 2, Lavauzelle, page 238 - Note : Ce Décret complète et modifie celui du 11 avril 1811).
Le 23 avril 1811, l'Empereur écrit, depuis Saint-Cloud, au Général Clarke, Ministre de la Guerre : "Monsieur le duc de Feltre, vous recevrez le décret par lequel j'ai réglé la formation des 6es bataillons de l'armée d'Allemagne. J'ai changé les éléments de cette formation. Vous verrez par l'état joint au décret que ces bataillons sont composés de trois manières :
1° Avec des conscrits fournis par les dépôts de leurs régiments.
2° Avec ce qu'on peut tirer d'anciens soldats des dépôts de l'armée d'Espagne.
3° Avec des conscrits tirés des dépôts de l'armée d'Espagne.
J'y ai ajouté, pour chaque 6e bataillon, un détachement de 150 conscrits tirés du régiment de Walcheren.
Donnez ordre que les détachements d'anciens soldats qui se trouvent dans les dépôts des régiments se mettent en marche du 1er au 10 mai. Les cadres doivent être formés en Allemagne dans le même délai, de sorte que dès leur arrivée, ces hommes formeront de petits bataillons de 3 à 400 hommes. Ces bataillons seront ensuite complétés par la conscription, tant pour les conscrits arrivant du dépôt du régiment, que pour ceux venant des autres dépôts qui fournissent à cette incorporation.
Quant aux détachements à prendre dans l'île de Walcheren, vous donnerez les ordres suivants : la 2e compagnie de chaque 5e bataillon composée d'un capitaine, de 2 lieutenants, 2 sous-lieutenants, 1 sergent-major, 4 sergents, 1 caporal fourrier, 8 caporaux et 2 tambours, doit se mettre en marche du 1er au 10 mai pour l'île de Walcheren. À son arrivée, le général commandant dans l'île y incorporera 150 hommes choisis parmi les conscrits les plus sûrs et de la meilleure volonté. Vous aurez soin de faire envoyer d'avance au régiment de Walcheren des boutons de ces 2 régiments, afin que le changement d'uniforme des conscrits puisse être préparé sans frais.
Aussitôt que ces détachements bien habillés, bien équipés et bien armés se trouveront formés, le général commandant l'île de Walcheren les passera lui-même en revue avant leur départ. Un inspecteur aux revues en dressera les contrôles et aura soin d'y inscrire les noms, prénom et signalement, afin que si ces hommes désertent, on puisse les faire poursuivre dans leurs familles par des garnisaires. Il ne partira de l'île de Walcheren que deux détachements par semaine. Ces détachements remonteront par eau jusqu'à Willemstad et Berg-op-Zoom, d'où ils rejoindront les bataillons de guerre en traversant la Hollande. Il y aura quelques brigades de gendarmerie pour observer leur passage ...
ANNEXE
Etat indiquant les éléments de la formation des 6es bataillons des régiments de l’Armée d’Allemagne
Régiments qui forment les 6e bataillons |
Conscrits du régiment |
Supplément de 150 conscrits à tirer du régiment de Walcheren (ce supplément ne compte que pour 50 |
Suppléments à tirer d'autres régiments |
Total de ce que 6e bataillons aura |
||||||
Conscrits que le régiment reçoit et hommes disponibles |
Conscrits pour compléter les bataillons suisses |
Conscrits du 4e bataillon A |
Reste pour le 6e bat. B |
Numéros du régiment d'où on les tire |
Anciens soldats C |
Conscrits D |
Total |
|||
61e de ligne |
1200 | 100 |
800 |
300 |
50
|
Le 96e |
62 |
63 |
125 |
726 |
Le 100e |
62 |
3 |
125 |
|||||||
Le 63e |
63 |
63 |
126 |
A : Ces conscrits partiront le 1er juillet 1811 de leur dépôt pour les 6es bataillons en Allemagne.
B : Ces 1500 conscrits partiront de Walcheren par compagnie, dirigés sur le dépôt en France pour le 5e bataillon. Elles commenceront à partir le 15 mai.
C : Ces conscrits partiront dès le 10 mai pour l'Allemagne.
D : Ces conscrits partiront le 1er juin de leur dépôt" (Correspondance générale de Napoléon, t.11, lettre 26814; ce tableau est donné par Margueron (Cdt) : « Campagne de Russie, première partie », tome 2, Lavauzelle, page 239).
Le 30 avril 1811, l'Empereur écrit, depuis Saint-Cloud, au Général Clarke, Ministre de la Guerre : "Monsieur le duc de Feltre, vous trouverez ci-joint une lettre du prince d'Eckmühl qui vous fera connaître qu'il a dirigé sur France les cadres des 6es bataillons. Le prince d'Eckmühl paraît désirer que ces cadres aillent à leurs dépôts où il pense qu'ils seraient mieux formés, mais je trouve la plupart des dépôts trop éloignés pour adopter cette idée. Envoyez au-devant de ces cadres un officier d 'état-major qui les fera arrêter moitié à Wesel et moitié à Münster, et faites diriger sur ces 2 places les conscrits qui doivent remplir ces cadres. Par exemple, le 7e d'infanterie légère dont le dépôt est à Huningue pourrait se servir du Rhin jusqu'à Wesel pour envoyer ses conscrits lorsqu'ils seront habillés et armés selon 1'ordre que vous leur donnerez à la fin de mai. Il en est de même ... du 61e qui est à Worms ... Ainsi le Rhin pourra servir au mouvement des dépôts sur les cadres des 6es bataillons. Ainsi le Rhin pourra servir au mouvement des dépôts sur les cadres des 6es bataillons" (Picard E. et Tuetey L. : « Correspondance inédite de Napoléon 1er conservée aux Archives de la Guerre », Paris, 1913, t. 4, lettre 5420 ; Correspondance générale de Napoléon, t.11, lettre 26897).
Le 24 mai 1811, l'Empereur écrit, en effet, depuis Caen, au Général Clarke, Duc de Feltre, Ministre de la Guerre, à Paris : "Je vous envoie cinq états pour vous servir de direction dans un rapport que vous me ferez au 15 juin, pour donner une nouvelle organisation, au 1er juillet, aux différents corps d'observation.
CORPS D'OBSERVATION DE L'ELBE. — Ce corps restera à quatre divisions jusqu'au 1er juillet. A cette époque, il sera formé à cinq divisions. Les 4es et 6es bataillons s'y réuniront dans les lieux indiqués, de sorte qu'au commencement d'août l'organisation soit complète, et que ce corps ait acquis toute la consistance qu'on peut en attendre ...
Je n'ai pas besoin de vous dire que vous ne devez donner aucun ordre, faire aucun mouvement en conséquence de ces états, mais que vous devez vous borner à me faire un rapport général au 15 juin, époque à laquelle vous me demanderez en même temps mes ordres.
En attendant, toutes les dispositions nécessaires pour porter au complet le corps d'observation de l'Elbe, tel qu'il a été arrêté, doivent avoir lieu.
N°1
Le ministre de la Guerre trouvera dans ces notes ce qui est relatif à l’organisation et mouvement du corps d’observation de l’Elbe au mois de juillet. Elles serviront de matière à un rapport qu’il devra me faire pour le 20 juin.
NOTE.
CORPS D'OBSERVATIONDE L'ELBE.
Le corps d'observation de l'Elbe doit être composé de cinq divisions. Il restera à quatre divisions jusqu'au 1er août et ne sera composé de cinq divisions qu'à cette époque, à laquelle les 6es et 4es bataillons auront rejoint.
Je vous ai déjà fait connaître que la composition de ces divisions doit être faite de la manière suivante ... :
Division Compans. — 61e, cinq ; 111e, cinq ; 25e, cinq ; 57e, cinq ; total, 20 bataillons ...
Chaque division aurait quatre brigades, et chaque brigade se composerait de cinq bataillons ; quatre généraux de brigade seraient-attachés à chaque division ; les cinq divisions formeraient en tout vingt brigades et quatre-vingt-dix-huit bataillons ...
On procédera de la manière suivante : au 1er juillet, les 4es bataillons, complétés de tous les conscrits destinés aux 6es bataillons, se mettront en marche pour se diriger sur les quatre points suivants : ceux de la 1re division, sur Wesel ; ceux de la 2e, sur Cologne ; ceux de la 3e, sur Düsseldorf, et ceux de la 4e, sur Aix-la-Chapelle. Les cadres des 6es bataillons, qui sont actuellement à Wesel et à Munster, se rendront dans ces différentes places, et par ce moyen il y aura à Wesel les 4e et 6e bataillons du 13e léger, les 17e, 30e et 61e de ligne ; total, huit bataillons ; à Cologne, le 6e bataillon du 15e léger, les 4e et 6e bataillons des 33e, 48e et 11e de ligne ; total, sept bataillons ; à Düsseldorf, les 4e et 6e bataillons du 7e léger, des 12e et 21e de ligne, et le 6e du 25e de ligne ; total, sept bataillons ; à Aix-la-Chapelle, les 4e et 6e bataillons des 57e, 85e et 108e ; total, six bataillons ..." (Correspondance de Napoléon, t.22, lettre 17247 ; Correspondance générale de Napoléon, t.11, lettre 27150; Margueron (Cdt) : « Campagne de Russie, première partie », tome 2, Lavauzelle, page 333).
Au mois de juin 1811, on place le 61e à Lunebourg.
Le 12 juin 1811, le Ministre directeur de l'Administration de la Guerre écrit, depuis Paris, au Duc de Feltre, Ministre de la Guerre : "Monsieur le Duc, toutes les mesures que j'avais à prendre pour l'exécution du décret du 22 avril sont prises depuis longtemps. Les conseils d'administration des régiments ont dû organiser leurs équipages respectifs avec célérité, et je vois en effet par des correspondances qu'ils ont maintenant ou qu'ils sont près de recevoir, par les marchés qu'ils ont passés, tout ce qu'ils doivent se procurer.
Pour vous mettre à même, Monsieur le Duc, de voir d'un coup d'oeil le résultat des dispositions que j'ai faites à cet égard, j'ai l'honneur d'adresser ci-joint à Votre Excellence un état, par corps d'armée, des régiments qu'elle m'a désignés elle-même comme devant être pourvus d'équipages. Cet état indique la composition de ces équipages en raison du nombre des bataillons de guerre de chaque corps, sauf quelques exceptions ordonnées par l'Empereur lui-même.
État nominatif des régiments d'infanterie qui ont reçu ordre de se pourvoir d'équipages en exécution du décret du 22 avril 1811.
Corps d'observation de l'Elbe"
RÉGIMENTS |
Bataillons de guerre |
OBSERVATIONS. |
61e de ligne * |
5 |
D'après un décret du 11 février 1811, les seize régiments désignés par l'astérisque ont été pourvus de chevaux, selles et harnais, pour les pièces et voitures ci-après : 1° 4 pièces d'artillerie; 6 caissons de munitions à canon; 4 - à cartouches; 1 forge de campagne; --- 15 voitures d'artillerie (75 chevaux). 2° 1 caisson d'ambulance; 1 - de comptabilité; 4 - des vivres ; --- 6 caissons d'administration (24 chevaux). Il leur a été donné en outre les moyens de se pourvoir des chevaux, selles et harnais, pour un caisson de munitions à cartouches et d'un caisson des vivres pour un 5e bataillon de guerre. Les 127e, 128e et 129e, ainsi que le corps de Portugais, ont été exceptés, jusqu'à nouvel ordre, de ceux qui de vaient avoir des équipages à leur suite, par une lettre de Sa Majesté en date du 2 mai dernier. L'Empereur a décidé aussi que le 33e de légère n'aurait que les équipages déterminés par le décret du 11 février. |
(Margueron (Cdt) : « Campagne de Russie, première partie », tome 2, Lavauzelle, page 362).
Napoléon écrit le 14 juin : "Monsieur le duc de Feltre, donnez ordre de faire réunir à Walcheren en 4 détachements les 11 compagnies des 5es bataillons des régiments de l'armée d'Allemagne qui sont dans l'île de Walcheren, savoir :
1er détachement les compagnies du 17e, 30e et 61e régiments ...
Le général Gilly passera la revue de ces détachements et complétera les compagnies qui les composent à 150 hommes en prenant les meilleurs sujets des 1er et 2e bataillons du régiment de Walcheren. Tous les malades seront effacés du contrôle des compagnies et rentreront dans les cadres du régiment de Walcheren. Ces détachements s'embarqueront à Veere pour se rendre à Willemstadt ou à Gertruydenberg.
Le 1er détachement partira le 20 ou le 21 juin ...
Vous aurez soin d'ordonner que les contrôles de ces compagnies soient faits en ordre avec le lieu de naissance et le signalement bien spécifiés. Ces détachements ne débarqueront qu'à Gertruydenberg. De là, ils passeront le Rhin à Gorcum et seront dirigés par la gauche du Rhin sur le quartier général de la division du corps d'observation de l'Elbe dont font partie les régiments auxquels ils appartiennent. À leur arrivée, ces bataillons seront dissous ; les cadres rentreront en France ; les hommes seront incorporés par égale partie dans les 3 bataillons de guerre du régiment.
Vous donnerez l'ordre aux cadres des 6es compagnies du 6e bataillon du 13e léger, 17e de ligne, 30e de Ligne, 61e, 33e de ligne, 48e, 111e, 7e d'infanterie légère, 12e, 21e, 57e, 85e et 108e de se rendre dans l'île de Walcheren pour recevoir chacun 150 hommes, ce qui fera l'emploi de 1 950 hommes, tous ces hommes seront habillés par le dépôt du régiment de Walcheren. On aura soin de placer dans ces compagnies les hommes qui sont déjà depuis longtemps dans le régiment de Walcheren et dont on peut être le plus sûr. On ne mettra de nouveaux conscrits que dans les cadres d'infanterie légère pour ne pas défaire les habits. Ces 13 compagnies devront être prêtes à partir du 20 au 30 juillet pour se rendre en Allemagne.
... Donnez ordre aux commandants de la gendarmerie dans les 25e, 17e et 24e divisions militaires d'envoyer des officiers pour suivre ces détachements, de prendre toutes les dispositions convenables et de redoubler de surveillance pour prévenir la désertion. Si ces mesures réussissent, mon intention est de compléter de cette manière les bataillons de guerre du corps d'observation de l'Elbe, de sorte qu'au ler août, tous ces bataillons de guerre soient portés au-delà du complet de 840 hommes, les malades non compris" (Picard E. et Tuetey L. : « Correspondance inédite de Napoléon 1er conservée aux Archives de la Guerre », Paris, 1913, t. 4, lettre 5608 ; Correspondance générale de Napoléon, t.11, lettre 27312 ; Margueron (Cdt) : « Campagne de Russie, première partie », tome 2, Lavauzelle, page 364).
Le même 14 juin 1811, l'Empereur écrit, depuis Saint-Cloud, au Maréchal Davout, Commandant en chef du Corps d'Observation de l'Elbe, et Gouverneur général des villes hanséatiques : "Mon cousin, les cadres des 2es compagnies des 5es bataillons des 12e, 17e, 21e, 30e, 33e, 48e, 57e, 61e, 85e, 108e et 111e régiments sont depuis six semaines dans l'île de Walcheren. Ils s'y sont complétés avec des conscrits et partent en 4 détachements. Ayez soin de faire incorporer les détachements de chaque régiment par égales parties dans les trois bataillons de guerre, de manière qu'il y ait de ces recrues dans chaque compagnie, mais sans retirer d'un régiment pour mettre dans un autre. Ces compagnies s'embarqueront à Veere et arriveront par mer jusqu'à Gorcum. Faites-moi connaître s'il y a de la désertion en route. Aussitôt qu'elles seront sur le territoire de votre commandement, veillez à ce qu'il y ait des détachements de cavalerie et de gendarmerie qui les côtoient et empêchent la désertion. Si cela réussit, mon intention est de vous en envoyer ainsi jusqu'à la concurrence de 3 à 4000, ce qui portera au 1er août le complet de vos bataillons de guerre au-delà de 840 hommes, non compris les malades. Il n'y aurait pas même d'inconvénient à porter ce complet à 900 ou à 1 000. Ces conscrits sont tous de très beaux hommes de 23 à 24 ans, et, si on les soigne, ils feront d'excellents soldats. Les affaires du Nord paraissent moins pressantes. J'ai pris le parti de faire revenir les cadres des 6es bataillons aux dépôts, où ces bataillons seront mieux formés ..." (Correspondance générale de Napoléon, t.11, lettre 27316).
Le 18 juin 1811, l'Empereur écrit, depuis Saint-Cloud, au Général Clarke, Ministre de la Guerre : "Je reçois votre lettre du 18, bureau de mouvement. Je vois que le cadre de la 2e compagnie du 5e bataillon du 19e léger arrive à Flessingue le 26 juin et que le cadre de la 6e compagnie du 6e bataillon du même régiment y arrive le 27. Demandez au général Gilly quand ces compagnies seront prêtes à partir.
Les cadres des 6e compagnies du 6e bataillon du 12e et 48e de ligne, et ceux du 21e, 30e, 33e et 61e qui y seront arrivés le 6 juillet se tiennent prêts à partir le 15 ..." (Correspondance générale de Napoléon, t.11, lettre 27340).
Le 4 juillet 1811, l'Empereur écrit, depuis Saint-Cloud, au Général Clarke, Ministre de la Guerre : "Monsieur le duc de Feltre, donnez ordre que les 4e et 6e bataillons du 13e léger reçoivent tout ce qui est disponible dans le 5e bataillon et se complètent chacun à 700 hommes. Donnez le même ordre pour les 17e léger, 7e léger et les 30e, 33e, 48e, 12e, 21e, 85e, 108e, 61e, 111e et 57e de ligne. Les 6es bataillons du 15e léger et du 25e de ligne seront complétés à 840 hommes. Ces 28 quatrièmes et 6es bataillons se mettront en marche du 15 au 25 juillet, parfaitement habillés et équipés et se dirigeront sur Wesel et de là sur leurs régiments respectifs dans la 32e division militaire. Les 2 bataillons de chaque régiment marcheront sur une seule colonne. Vous enverrez un officier général à Wesel afin qu'à leur passage par cette ville, chacun de ces bataillons soit passé en revue et que l'on constate leur bon état, l'état de leur habillement, équipement, leur nombre, les places vacantes, etc. Les 2 bataillons du 7e léger s'embarqueront sur le Rhin à Huningue ; les bataillons qui sont à Strasbourg, Mayence, Spire s'embarqueront sur le Rhin jusqu'à Wesel. Le général Compans pourrait être chargé de passer cette revue : il devra être rendu le 25 juillet à Wesel ..." (Picard E. et Tuetey L. : « Correspondance inédite de Napoléon 1er conservée aux Archives de la Guerre », Paris, 1913, t. 4, lettre 5731 ; Correspondance générale de Napoléon, t.11, lettre 27526; Margueron (Cdt) : « Campagne de Russie, première partie », tome 3, Lavauzelle, page 24).
Le 7 juillet 1811, l'Empereur écrit, depuis Saint-Cloud, au Général Clarke, Ministre de la Guerre : "Monsieur le duc de Feltre, donnez ordre que les compagnies des 17e, 108e, 12e, 48e, 21e, 30e, 33e et 61e de ligne, complétées par des conscrits réfractaires de l'île de Walcheren formant 8 compagnies ou 1200 hommes, partent de l'île de Walcheren du 15 au 20 juillet pour se rendre à Hambourg. Ces 1200 hommes seront incorporés à Hambourg dans les différents régiments. Les compagnies des 85e, 57e et 111e partiront du 25 au 30 juillet et les 4 compagnies des 7e et 13e légers au plus tard le 10 août. Ainsi ces 2250 hommes seront arrivés en Allemagne dans le courant du mois d'août, ce qui avec les 1600 hommes des 11 premières compagnies et les 1800 hommes des deux bataillons des îles de Gorée et Schouwen fera un renfort de 5600 hommes. Il ne manquera donc plus pour les régiments de l'armée d'Allemagne que 3 000 hommes pour être portés au grand complet" (Picard E. et Tuetey L. : « Correspondance inédite de Napoléon 1er conservée aux Archives de la Guerre », Paris, 1913, t. 4, lettre 5750 ; Correspondance générale de Napoléon, t.11, lettre 27568).
Le 8 juillet 1811, le Prince d'Eckhmül écrit, depuis Hambourg, à l'Empereur : "Votre Majesté m'ayant fait connaître, par sa lettre du 7 mai, qu'Elle désirait savoir combien avaient d'années de service les capitaines, lieutenants et sous-lieutenants de l'armée d'Allemagne, ainsi que les sergents et caporaux, j'ai l'honneur de lui adresser le travail que j'ai fait faire pour remplir ses intentions. Il est fait par régiment. Elle verra que tous les cadres sont composés de vieux militaires ayant plus ou moins d'années de service" (Margueron (Cdt) : « Campagne de Russie, première partie », tome 3, Lavauzelle, page 37). Le tableau qui accompagne cette lettre, intitulé « Armée d’Allemagne, Etat sommaire des Officiers et Sous-officiers, indiquant le nombre de leurs années de service en juillet 1811 », donne pour le 61e de Ligne : 1 Colonel, 20 ans ; 1 Chef de Bataillon 25 ans, 1 Chef de Bataillon 19 ans ; 1 Adjudant-major 19 ans ; 1 Officiers payeur 12 ans ; 5 Capitaines 19 ans, 1 Capitaine 23 ans, 1 Capitaine 21 ans, 2 Capitaines 18 ans, 1 Capitaine 20 ans, 2 Capitaines 13 ans, 1 Capitaine 11 ans, 1 Capitaine 6 ans; 2 Lieutenants 18 ans, 1 Lieutenant 13 ans, 1 Lieutenant 12 ans, 1 Lieutenant 11 ans, 2 Lieutenants 8 ans, 2 Lieutenants 7 ans, 1 Lieutenant 6 ans, 2 Lieutenants 5 ans ; 1 Sous-lieutenant 19 ans, 3 Sous-lieutenants 18 ans, 2 Sous-lieutenants 12 ans, 2 Sous-lieutenants 10 ans, 2 Sous-lieutenants 9 ans, 1 Sous-lieutenant 7 ans, 1 Sous-lieutenant 5 ans, 1 Sous-lieutenant 4 ans ; 1 Adjudant sous-officier 12 ans, 2 Adjudants sous-officier 10 ans, 1 Adjudant sous-officier 6 ans, 2 Adjudants sous-officiers 4 ans ; 1 Tambour-major 9 ans ; 1 Sergent-major 18 ans, 1 Sergent-major 14 ans, 2 Sergents-majors 12 ans, 1 Sergent-major 10 ans, 2 Sergents-majors 9 ans, 3 Sergents-majors 6 ans, 1 Sergent-major 8 ans, 6 Sergents-majors 3 ans, 2 Sergents-majors 2 ans ; 2 Sous-officiers porte-aigles 18 ans ; 3 Sergents 19 ans, 11 Sergents 18 ans, 4 Sergents 17 ans, 1 Sergent 16 ans, 1 Sergent 15 ans, 2 Sergents 12 ans, 1 Sergent 11 ans, 2 Sergents 10 ans, 14 Sergents 9 ans, 10 Sergents 8 ans, 5 Sergents 7 ans, 5 Sergents 6 ans, 7 Sergents 5 ans, 4 Sergents 4 ans, 3 Sergents 3 ans, 2 Sergents 2 ans, 1 Sergent 1 an ; 1 Fourrier 11 ans, 1 Fourrier 9 ans, 1 Fourrier 8 ans, 1 Fourrier 7 ans, 1 Fourrier 6 ans, 1 Fourrier 5 ans, 2 Fourriers 3 ans, 8 Fourriers 2 ans, 3 Fourriers 1 ans ; 1 Caporal 19 ans, 5 Caporaux 18 ans, 1 Caporal 17 ans, 1 Caporal 11 ans, 3 Caporaux 10 ans, 12 Caporaux 9 ans, 14 Caporaux 8 ans, 9 Caporaux 7 ans, 23 Caporaux 6 ans, 21 Caporaux 5 ans, 17 Caporaux 4 ans, 21 Caporaux 3 ans, 19 Caporaux 2 ans.
Le 13 juillet 1811, le Maréchal Davout écrit, depuis Hambourg, à l’Empereur : "Sire, Votre Majesté m'a renvoyé le 2 de ce mois un rapport du ministre de la guerre, en me prescrivant de lui faire connaitre s'il y avait eu de la désertion dans les compagnies des 5es bataillons qui sont dirigées sur l'armée d'Allemagne pour être incorporées dans les bataillons de guerre.
J'ai l'honneur de rendre compte à Votre Majesté que le premier détachement est arrivé le 8 de ce mois à Brémen; il était composé des compagnies ci-après :
Du 17e de ligne, 4 officiers, 127 fusiliers ; du 30e, 3 officiers, 139 fusiliers ; du 61e, 5 officiers, 129 fusiliers.
Ne connaissant point encore la force de ces compagnies au moment de leur départ de Walcheren, je ne puis dire au juste quelle désertion elles ont éprouvée ; je vais me faire donner des renseignements détaillés à cet égard, et j'aurai l'honneur de les transmettre à Votre Majesté.
Il parait, d'après une lettre du général Durutte, en date du 8 de ce mois, qu'à Deventer, 48 hommes du 2e détachement désertèrent le jour de leur arrivée ; il en attribue la cause : 1° à la négligence du capitaine du 33e de ligne, qui commandait l'escorte ; 2° aux mauvais traitements qu'on a fait éprouver aux conscrits ; 3° au défaut de solde, attendu qu'ils n'ont rien reçu en partant de Walcheren, ni même en route.
Les ordres sont donnés dans toute la 32e division militaire, et sur toute la ligne que doivent parcourir les détachements, pour que les hommes qui déserteraient ne puissent échapper. J'ai prescrit d'adresser leur signalement au conseiller d'État directeur général des revues et de la conscription militaire ; il sera également donné à la gendarmerie" (Mazade C. (de) : « Correspondance du Maréchal Davout, prince d'Eckmühl : ses commandements, son ministère, 1801-1815 », t. 3, p. 243, lettre 965).
Le 17 juillet 1811, l'Empereur écrit, depuis Trianon, au Général Clarke, Ministre de la Guerre : "Monsieur le duc de Peltre ... Donnez ordre que la 2e compagnie des 5es bataillons des 19e, 72e, 2e, 18e, 56e, 37e, 93e, 108e, 48e, 33e, 30e, 12e, 21e, 25e, 85e, 17e, 57e et 61e se forment à Anvers, et tiennent garnison à bord des 15 vaisseaux de ligne français qui sont dans 1'Escaut et des 2 vaisseaux hollandais ; la 18e compagnie sera destinée au premier vaisseau qui sera mis à 1'eau cette année ...
Vous donnerez ordre que toutes ces compagnies soient composées d'officiers, sous-officiers et soldats de l'ancienne France ; que tous les officiers, sergents, caporaux et fourriers aient au moins 4 ans de service, et que les soldats aient au moins un an de service et soient à l'école de bataillon. Vous recommanderez qu'on porte un soin particulier à la formation de ces compagnies, à les maintenir au complet ; qu'on y mette des officiers de choix, hommes d'ordre et d'honneur qui puissent être utiles à bord des vaisseaux" (Picard E. et Tuetey L. : « Correspondance inédite de Napoléon 1er conservée aux Archives de la Guerre », Paris, 1913, t. 4, lettre 5796 ; Correspondance générale de Napoléon, t.11, lettre 27681).
Le 24 juillet 1811, Davout écrit, depuis Hambourg, à l'Empereur : "Sire, je reçois la lettre de Votre Majesté, du 19. Elle aura vu, par les comptes que je lui ai rendus le 23, que les deux 3es bataillons westphaliens ne sont pas encore en marche sur Danzig.
Je ne néglige rien, Sire, pour diminuer les propos de guerre que produira nécessairement la quantité de troupes qui est en marche pour l'Allemagne.
Un moyen qui me paraîtrait atteindre le but de Votre Majesté, ce serait que le ministre de la guerre écrivit au général Compans, qui est à Paris, pour le prévenir que la division composée des 23e, 61e, 57e et 111e, qui est sous son commandement, devant se rendre en France dans le courant de septembre, il peut attendre à Paris la rentrée de cette division; et qu'en même temps le ministre prévint directement ces régiments que l'on m'adresse des itinéraires pour les faire rentrer en France dans le courant de septembre; qu'en conséquence ils aient à exécuter les ordres que je leur donnerai à cet égard, et à se conformer à l'itinéraire que je leur transmettrai. Le ministre de la guerre devrait aussi prévenir directement les commandants de Wesel, Munster, Bremen et Osnabrück, de la rentrée de ces troupes, en leur faisant connaître que j'indiquerai les jours, afin qu'ils puissent disposer les subsistances et le logement.
Mon langage sera dans ce sens, et je ne doute point qu'alors le but de Votre Majesté ne soit complètement rempli.
Lorsque les deux bataillons westphaliens seront arrivés à Magdebourg, je leur ferai faire seulement quelques marches, et je les ferai rentrer dans cette place.
Je ferai part de ce mouvement à M. le comte de Saint-Marsan dans le sens de l'ordre de Votre Majesté, et je manderai au général Rapp que sa garnison sera diminuée.
Comme il y aura de l'ensemble dans tous ces bruits, les intentions de Votre Majesté seront remplies" (Margueron (Cdt) : « Campagne de Russie, première partie », tome 3, Lavauzelle, page 69).
Le 26 juillet 1811, le Ministre de la Guerre adresse un rapport à l'Empereur : "Sire, j'ai eu l'honneur de rendre compte à Votre Majesté, par un rapport du 11 de ce mois, des ordres que j'avais donnés pour le mouvement des 4es et 6es bataillons destinés à rejoindre leurs régiments, employés au corps d'observation de l'Elbe.
J'ai en même temps informé Votre Majesté que j'avais ordonné à M. le maréchal prince d'Eckmuhl de former la 5e division de son corps d'armée, conformément aux ordres que Votre Majesté m'avait précédemment donnés à ce sujet.
M. le maréchal prince d'Eckmühl vient de me faire connaître que, d'après les intentions de Votre Majesté, il a donné les ordres nécessaires pour que les 4es et 6es bataillons fussent dirigés, à leur arrivée à Osnabrück, par la route la plus courte, sur leurs corps respectifs.
Il a joint à sa lettre le tableau de l'emplacement actuel des régiments d'infanterie du corps d'observation de l'Elbe, formés en cinq divisions ainsi qu'il suit, savoir :
... A Bremen. 5e division, général Compans.
Dupellin. 25e — sur la Jahde;
Sont commandés par le général Morand jusqu’à l’arrivée du général Compans. 61e - embouchure de l'Elbe ; 57e - embouchure du Weser;
Commandé par le général Friant jusqu’à l’arrivée du général Compans. 111e — dans le Mecklembourg (reste jusqu'à l'arrivée du général Compans).
M. le maréchal prince d'Eckmühl annonce que pour faire faire le moins de mouvements possible, il laisse provisoirement le 111e dans le Mecklembourg, jusqu'à l'arrivée du général Compans; que le 33e régiment d'infanterie légère doit aller à Stettin; mais comme il s'y trouve déjà trois régiments alliés, avec les 85e et 108e de ligne français, il croit devoir attendre que ces régiments alliés aient une destination, alors il enverra le 33e léger à Stettin et le 7e léger le remplacera à Magdebourg ...
M. le maréchal prince d'Eckmuhl me fait remarquer que, par la disposition actuelle des troupes, il lui sera facile de réunir chaque division quand il le jugera nécessaire.
J'ai cru devoir mettre ces détails sous les yeux de Votre Majesté" (Margueron (Cdt) : « Campagne de Russie, première partie », tome 3, Lavauzelle, page 86).
Le 31 juillet, l'Empereur écrit depuis Saint Cloud au Général Clarke : "Monsieur le duc de Feltre, la 6e compagnie du 6e bataillon des 17e, 30e, 33e et 61e ont dû partir le 17 juillet de l'île de Walcheren, et successivement les autres cadres des 15 compagnies appartenant au corps de l'Elbe remplies par des conscrits réfractaires. Ces compagnies sont-elles parties le 17, le 20 et le 28 juillet ? Faites-moi connaître ce qui en est ..." (Ernest Picard, Louis Tuetey : "Correspondance inédite de Napoléon Ier, conservée aux Archives de la guerre", t. 4 ; Correspondance générale de Napoléon, t.11, lettre 27895).
Obligé de faire exécuter rigoureusement le blocus continental, de défendre la Hollande et de garder les villes hanséatiques, Napoléon se voit, dès 1811, dans la nécessité de coordonner plus étroitement toutes les forces dont il dispose.
Le 2 août 1811, le Maréchal Davout écrit, depuis Hambourg, au Duc de Feltre, Ministre de la Guerre : "Monseigneur, par votre lettre du 11 juillet dernier vous m'avez annoncé la marche de quinze compagnies, dont treize 6es compagnies des 6es bataillons des 12e, 17e, 21e, 30e, 33e, 48e, 57e, 61e, 85e, 108e et 111e régiments de ligne, 7e et 13e d'infanterie légère, et les deux compagnies des 5es bataillons de ces deux derniers régiments.
J'ai l'honneur de rendre compte à Votre Excellence de l'arrivée à Lingen des deux premiers détachements de ces troupes.
Le 1er, composé des compagnies des 61e, 17e, 30e et 33e régiments, est arrivé le 28 juillet.
Ces compagnies sont parties de Lingen le lendemain de leur arrivée, et ont été dirigées sur leurs corps respectifs.
Je joins à cette lettre leur état de situation au moment de leur arrivée à Lingen.
Votre Excellence remarquera que sur 74 déserteurs, 43 ont déserté à Ryssen. D'après le compte qui m'est rendu, cette désertion est attribuée en partie au mauvais esprit des habitants qui ont fourni à plusieurs conscrits des habits pour les déguiser : quelques-uns ont reçu de leurs parents des passeports pour rentrer en France. Presque tous ces déserteurs sont, ou du Brabant, ou du département de la Lippe.
Il parait que la remise de ces compagnies s'est faite avec beaucoup de négligence les conscrits n'ont pas de livrets ; les officiers de cadres ont été obligés de les recevoir sans signalement, et beaucoup de ces conscrits ne savent même pas de quel département ils sont.
Ils arrivent tous sans capotes ni bonnets de police ; les habits sont trop étroits ; les vestes et les culottes sont trop courtes, et de mauvais drap ; en général, l'habillement est mal confectionné ; beaucoup de gibernes sont mauvaises et vieilles, ainsi que les porte-giberne. La majeure partie des souliers est usée.
Les officiers commandant ces compagnies se plaignent de ce qu'on leur a donné des hommes qui, au moment du départ, sortaient de l'hôpital, et de ce qu'on a retiré à la plupart des conscrits leurs vestes et leurs culottes pour leur en donner de très-vieilles.
Leur armement est aussi, en général, en mauvais état, et les hommes n'ont ni épinglettes ni tournevis.
Ces huit compagnies ont été payées de leur solde et indemnité de route, depuis le jour de leur départ jusqu'au 31 juillet ; mais les officiers qui les conduisent n'ont aucun renseignement relativement à la comptabilité antérieure.
J'ai donné des ordres pour qu'au moment de l'arrivée de ces compagnies aux régiments pour qui elles sont destinées, on fit donner aux conscrits des capotes et des bonnets de police ; qu'on leur payerait tout ce qui pourrait leur être du, et qu'ils fussent pourvus sans délai des effets d'équipement qui leur manquent. A mesure que les compagnies arriveront à leur régiment, elles y seront incorporées par portions égales dans les trois bataillons de guerre, et il en sera dressé un contrôle nominatif et signalétique, que j'aurai l'honneur d'adresser à Votre Excellence. Un état signalétique séparé des déserteurs est envoyé au conseiller d'État directeur des revues et de la conscription, et une expédition est remise au commandant de la gendarmerie.
Les onze 2es compagnies des 5es bataillons annoncées par votre lettre du 18 juin sont arrivées à Lingen du 4 au 10 de ce mois ; elles avaient éprouvé à cette époque une désertion de 175 hommes, dont la majeure partie à Deventer et à Ostmarsum. Les rapports qui m'ont été adressés attribuaient cette désertion à la mauvaise volonté des conscrits, aux insinuations des habitants de Walcheren, et à ce qu'ils n'avaient pas reçu de solde à leur départ, ni en route.
J'aurai l'honneur d'adresser à Votre Excellence les contrôles signalétiques de ces compagnies, aussitôt que je les aurai tous réunis ; mais j'ai l'honneur de vous faire observer que les compagnies destinées aux 85e et 108e régiments n'arrivent qu'aujourd'hui 2 août à Stettin, et que je ne pourrai recevoir les états que dans quelques jours.
Les ordres ont été donnés pour que les cadres des 5es bataillons rétrogradassent sur France, aussitôt l'arrivée des compagnies à leurs régiments, et presque tous sont en route. Quant aux cadres des 6es bataillons, ils ont ordre de rester à l'armée pour y attendre leur bataillon" (Mazade C. (de) : « Correspondance du Maréchal Davout, prince d'Eckmühl : ses commandements, son ministère, 1801-1815 », t. 3, p. 246, lettre 967).
Le 14 août 1811, l'Empereur écrit, depuis Saint-Cloud, au Général Clarke : "Monsieur le duc de Feltre ... Donnez ordre aux dépôts des 12e de ligne, 7e et 13e légers, 57e, 48e, 108e, 21e, 30e, 33e, 61e, 111e, 85e, et 17e de ligne de faire partir pour les bataillons de guerre tout ce qu'ils ont de disponible au 5e bataillon, en hommes habillés et en état de faire la guerre. Toutefois, ils ne feront pas partir moins de 60 hommes à la fois ; ceux qui ne les auront pas attendront qu'ils les aient, avant de rien faire partir ...
Je trouve, qu'en général, tous ces régiments ont beaucoup d'hommes, sous le titre d'administration, d'instructeurs d'ateliers, d'enfants de troupe, puisque je vois que chacun de ces régiments a près de 160 hommes. Ces régiments ont 380 hommes qui attendent leur retraite; il faut la leur donner. Je vois qu'il y a 680 hommes à réformer ; je suppose que ce sont des conscrits, il faut recommander qu'on soit sévère" (Picard E. et Tuetey L. : « Correspondance inédite de Napoléon 1er conservée aux Archives de la Guerre », Paris, 1913, t. 4, lettre 5985 ; Correspondance générale de Napoléon, t.11, lettre 28158).
Le 22 août 1811, depuis Saint Cloud, l'Empereur écrit au Général Clarke "Monsieur le duc de Feltre, donnez les ordres suivants pour la répartition des compagnies destinées à former les garnisons de vaisseaux.
Escadre de l'Escaut ...
Vous ferez également former à Anvers la 2e compagnie du 5e bataillon des (...) 61e (...). Les bataillons de guerre du corps d'observation de l'Elbe enverront, par chaque régiment, 30 hommes ayant quatre ans de service. Le surplus sera fourni par la conscription, avec la condition principale que ce soient des hommes des départements de l'ancienne France. Ces compagnies seront placées, savoir : ... celle du 61e sur l'Illustre ..." (Picard E. et Tuetey L. : « Correspondance inédite de Napoléon 1er conservée aux Archives de la Guerre », Paris, 1913, t. 4, lettre 6042 ; Correspondance générale de Napoléon, t.11, lettre 28292).
TABLEAU A de répartition dans les régiments d'infanterie du corps d'observation de l'Elbe des conscrits réfractaires et condamnés graciés, qui se rassemblent à Wesel et à Strasbourg (22 août 1811).
Désignation des Corps | Force après l’arrivée des détachements de Walcheren, Gorée et Schouwen, et des 4es et 6es Bataillons | Manquant au complet de 4200, c’est-à-dire 140 hommes par Compagnie | Conscrits. Wesel : 2250 | Conscrits. Strasbourg : 4500 | Conscrits. Graciés : 626 | Effectif après l’incorporation | Observations |
61e de Ligne | 4010 | 190 | 150 | 300 | 40 | 4500 |
Le 5e Bataillon (Dépôt) détache sa 2e Compagnie à Anvers. Elle est embarquée à bord de l'Illustre, où elle restera jusqu'à la fin de 1812.
Le 30 août 1811, le Prince d'Eckmühl écrit, depuis Hambourg, à l'Empereur : "Sire, je m'empresse de satisfaire à la demande que Votre Majesté me fait par sa lettre du 25 de ce mois, pour connaître l'emplacement des cinq divisions du corps d'observation de l'Elbe et les lieux où sont les brigades et les bataillons ...
5e division, commandée par M. le général (Note : C'est le général Compans qui est désigné).
1re brigade, général - , 25e de ligne, 4 bataillons ; 1 en Ost-Frise, 1 à Warel, 1 à Abbehausen.
2e brigade, général - , 57e de ligne, 5 bataillons, 1à Dorum, 2 à Ritebuttel et Cuxhaven, 1 à Otterndorf, 1 à Neuhaus.
3e brigade, général - , 61e de ligne,5 bataillons, 2 à Stade1 à Basbeck, 1 à Harbourg.
4e brigade, général Duppelin, 111e de ligne, 5 bataillons, 2 à Ratzebourg, 1 à Möln, 1 à Potrau, 1 à Lauenbourg.
L'état-major et les généraux destinés pour cette division n'étant point encore arrivés, M. le général Desailly commande le 25e régiment, et M. le général Leguay les 57e et 61e. Ils rejoindront leurs brigades aussitôt qu'ils pourront être remplacés.
MM. les généraux de brigade Gratien et Coutard sont annoncés" (Margueron (Cdt) : « Campagne de Russie, première partie », tome 3, Lavauzelle, page 149).
Corps d'observation de l'Elbe, 1er septembre 1811.
1re Division, Général Morand, à Hambourg : 13e Léger, 3 Bataillons; 17e de Ligne, 3 Bataillons; 30e de Ligne, 3 Bataillons; 61e de Ligne, 3 Bataillons (Margueron (Cdt) : « Campagne de Russie, première partie », tome 1, Lavauzelle, page 306).
Il a par ailleurs été prescrit la formation d'une 5e Division avec les 61e, 25e, 57e et 111e Régiments d'infanterie, tirés des quatre premières Divisions, qui, par suite, sont réduites chacune à trois Régiments (Margueron (Cdt) : « Campagne de Russie, première partie », tome 1, Lavauzelle, page 307).
Le 5 septembre 1811, le Maréchal Davout écrit, depuis Hambourg, au Duc de Feltre, Ministre de la Guerre : "Monseigneur, j'ai l'honneur d'accuser à Votre Excellence la réception de sa lettre du 1er de ce mois, par laquelle elle m'informe que les bataillons de dépôt des 7e et 13e d'infanterie légère, 12e, 17e, 21e, 30e, 33e, 48e, 57e, 61e, 85e et 111e de ligne reçoivent l'ordre d'envoyer aux bataillons de guerre tout ce qu'ils ont de disponible en hommes habillés et en état de faire la guerre ..." (Mazade C. (de) : « Correspondance du Maréchal Davout, prince d'Eckmühl : ses commandements, son ministère, 1801-1815 », t. 3, p. 258, lettre 975).
Le 8 septembre 1811, Davout écrit, depuis Hambourg, à l'Empereur : "Sire,
J'ai fait connaître à Votre Majesté, par des lettres antérieures, l'emplacement des troupes; je le rappelle ici :
La 1re division a deux régiments à Hambourg et le troisième à Lubeck;
La 2e division a ses trois régiments campés près de Rostock;
La 3e division a un régiment à Hanovre et deux à Magdebourg;
La 4e division à deux régiments à Stettin et un à Magdebourg; La 5e division est la plus disséminée; elle a un régiment, le 25e, entre le Weser et la Jahde; le 57e est entre Dorum et Ritzbuttel; le 61e régiment est à Stade et environs; le 111e est à Ratzebourg et environs.
J'eusse désiré pouvoir faire baraquer ces quatre régiments, mais on est en France et les dépenses eussent été très grandes : c'est ce qui m'en a empêché.
La cavalerie est cantonnée dans un rayon d'une lieue ou une lieue et demie, de manière à pouvoir manoeuvrer par régiment deux ou trois fois par semaine" (Margueron (Cdt) : « Campagne de Russie, première partie », tome 3, Lavauzelle, page 175).
Le 10 septembre 1811, le Maréchal Davout écrit, depuis Stade, à l'Empereur : "Sire, je reçois la lettre de Votre Majesté, du 5 septembre, par laquelle elle me demande mon opinion sur les questions de savoir :
1° S'il conviendrait de porter l'effectif de toutes les compagnies du corps d'armée à 160 hommes;
2° S'il serait préférable de créer à chaque régiment un 7e bataillon;
3° Et si un effectif de 960 hommes faisait un trop gros bataillon, on ne pourrait pas former dans chaque régiment 2 bataillons de 10 compagnies d'élite, ce qui ferait 7 bataillons par régiment, savoir : 5 bataillons à 4 compagnies et 2 bataillons d'élite à 5 compagnies.
Avant de répondre à ces questions, je dois, Sire, vous faire les observations que m'ont fait naître les revues que je viens de passer de trois régiments de votre armée d'Allemagne, les 13e d'infanterie légère, 17e de ligne et 61e, que je viens de voir aujourd'hui.
Les compagnies ont en général un effectif de 120 hommes, et de 100 à 110 présents; elles m'ont presque paru suffisantes pour le nombre des officiers; pour peu qu'il y aurait de malades, ce que l'on peut supposer, efles sont tout ce que peuvent surveiller deux officiers.
Ces compagnies, qui ont un effectif de 120 hommes, en auront au moins 140 avec ce que l'on doit envoyer de Wesel; elles seront réellement alors de 120 à 130 hommes présents, et je crois qu'il ne faut pas dépasser ce nombre.
Ces observations répondent à la première question.
Quant à la seconde, je trouve qu'il serait préférable de former un 7e bataillon.
Dans six semaines ou deux mois, les cinq bataillons de guerre pourront fournir à Votre Majesté des cadres pour un 7e bataillon, en bons sous-officiers, instruits et ayant, pour la plupart, dans tous les régiments, le nombre d'années de service requis par votre décret.
Il y aura cependant quelques régiments où il faudra faire quelques exceptions relativementà ces cadres; mais, alors, cela ne souffrira aucun inconvénient, en faisant sous-officiers les hommes qui l'étaient et que j'ai fait rentrer dans les rangs par défaut du nombre d'années de service. Je n'ai voulu admettre aucune exception. Je les ai fait tous mettre aux écoles régimentaires, où ils se perfectionneront et auront acquis, en fort peu de temps, tout ce qui constitue le bon sous-officier.
Ma réponse à la troisième question est, Sire, que le plus mauvais parti à prendre serait celui de former, sur les 7 bataillons, 5 bataillons à 4 compagnies et 2 bataillons d'élite à 5 compagnies.
Sans doute que ces deux bataillons seraient d'excellentes troupes; mais ce ne serait qu'au détriment des cinq autres; il faudrait leur ôter trop de ces hommes qui donnent l'impulsion et déterminent les succès.
J'ai parlé à Votre Majesté des écoles régimentaires; elles remplissent bien au delà de ce qu'on pouvait en espérer, Je les ai vues dans le plus grand détail; il y règne un excellent esprit et beaucoup d'émulation. Elles seront une pépinière d'excellents officiers et sous-officiers. Le 61e a une très grande richesse; j'ai vu aujourd'hui 60 soldats, dont la presque totalité a le nombre d'années de service requis; ils ont en outre une belle écriture, ils connaissent les quatre règles, possèdent le ton du commandement et feront de bons sous-officiers. J'ai remarqué que la conscription du Haut-Rhin a fourni beaucoup de soldats qui savent écrire l'allemand.
Le 13e d'infanterie légère a autant de ressources; le 17e moins. Dans le 61e, il y a eu, depuis le 15 août, un peu plus de malades. Ce sont des fièvres éphémères, et nullement inquiétantes, qui cèdent facilement. Le régiment a, à peu près, un douzième de malades.
Je fais faire quelques changements dans les cantonnements que j'ai remarqués fournir des malades.
Il y a quelques places vacantes, mais le ministre de la guerre a les mémoires de proposition. Ce régiment vient de recevoir un chef de bataillon nommé Duhaupt, qui sort du 122e régiment. Il est incapable de faire un service actif; cet officier a des moyens, mais il a huit blessures, un palais en or, beaucoup de difficultés à parler, et il est estropié de la main droite. M. Duhaupt serait plus utile à Votre Majesté dans un poste ou dans le commandement d'une place de guerre qu'à la tête d'un bataillon. La seule revue d'aujourd'hui l'a mis sur les dents.
Je pars demain matin pour Cuxhawen, pour aller voir le 57e régiment" (Margueron (Cdt) : « Campagne de Russie, première partie », tome 3, Lavauzelle, page 178).
Le 12 septembre 1811, le Prince d'Eckmühl écrit, depuis Ritzbuttel, à l'Empereur : "Sire, j'ai l'honneur de rendre compte à Votre Majesté que j'ai passé aujourd'hui la revue du 57e régiment. Je l'ai trouvé dans un état de santé beaucoup plus satisfaisant que je ne devais m'y attendre.
Ce régiment a un effectif de 4.083 hommes, dont 731 aux hôpitaux, mais je dois observer à Votre Majesté que, sur ces 731 hommes, il faut en défalquer 369, qui n'y sont portés que pour mémoire et n'ont jamais rejoint; ils sont restés dans les hôpitaux de Walcheren, dans les lieux de passage, ou au dépôt des régiments; ainsi, ce régiment n'a donc de malades, depuis le tiercement, que 362 hommes, ce qui est environ le douzième, proportion la plus avantageuse qu'on puisse avoir dans la saison actuelle et après les marches qu'ont faites les 4e et 6e bataillons et les compagnies qu'il a reçues de Walcheren.
Sur les 362 malades, je puis affirmer à Votre Majesté que plus des deux tiers sont des nouveaux soldats des 4e et 6e bataillons et de ceux venus de Walcheren.
Je dois dire aussi que je ne comprends pas, dans les 362 malades, 244 hommes qui sont à l'infirmerie régimentaire, puisque ce sont des galeux ou des vénériens que l'on peut considérer comme disponibles.
Ce sont surtout les compagnies venues de Walcheren qui ont fourni des galeux. Sous dix à douze jours, tous ces traitements seront achevés.
Pour donner des idées exactes à Votre Majesté, je lui adresse l'état de situation de ce régiment au 12 septembre, qui est le résultat de la revue du sous-inspecteur.
J'ai été extrêmement satisfait de l'inspection de l'école régimentaire de ce régiment; j'y ai trouvé plus de 60 soldats ayant au moins deux ans de service, sachant bien lire, ayant une bonne écriture, connaissant les quatre règles, et susceptibles de faire de bons sous-officiers.
Dans ce calcul, je suis encore au-dessous des ressources en ce genre. Quelqu'un de moins sévère aurait pu les porter à 100 soldats; mais les autres ne sont pas assez forts sur les quatre règles et n'en connaissent bien que trois. Il leur faut encore un mois.
Sur quatre régiments de votre armée, Sire, dont je viens de passer la revue, il y en a deux autres qui offrent autant de ressources : les 13e léger et 61e de ligne.
Je n'ai point trouvé autant de ressources dans le 17e de ligne. Cependant, il y en a suffisammentpour faire un cadre de bataillon.
Le général Compans va passer après-demain la revue du 25e régiment de ligne. Par les renseignements que j'ai, je dois le supposer dans le même état de santé que le 57e. Immédiatement après la revue, il sera réuni en entier à Bremen, afin qu'il puisse manoeuvrer; lorsqu'il y sera établi je le verrai; ce pourra être vers les premiers jours d'octobre" (Margueron (Cdt) : « Campagne de Russie, première partie », tome 3, Lavauzelle, page 181).
Corps d'observation de l'Elbe, 15 septembre 1811.
5e Division, Général Compans, à Stettin : 25e de Ligne, 4 Bataillons; 57e de Ligne, 5 Bataillons; 61e de Ligne, 5 Bataillons; 111e de Ligne, 5 Bataillons (Margueron (Cdt) : « Campagne de Russie, première partie », tome 1, Lavauzelle, page 306).
Le 20 septembre 1811, le Prince d'Eckmühl écrit, depuis Hambourg, à l'Empereur : "Sire, Votre Majesté peut voir, par tous les rapports que j'ai l'honneur de lui adresser par ce courrier, que les préparatifs militaires des Prussiens prennent de jour en jour plus de couleur. Ce gouvernement me parait employer tous les moyens pour faire prendre le change; Votre Majesté en jugera par un article qui a été envoyé de Berlin, pour être mis dans le Correspondant.
Il est à désirer que M. le comte de Saint-Marsan ne se laisse pas abuser; car il me parait démontré que ce gouvernement se précipite dans l'abîme. Il me semble qu'il est très important, dans les commencements, de débuter avec vigueur pour désorganiser l'armée prussienne; en conséquence, il faut être le plus tôt possible sur l'Oder. Voici comment je compte remplir vos intentions.
Au premier avis, la division Friant, qui est à Rostock, se met en marche pour Stettin. J'y arriverai avec elle et la brigade Bordessoulle. Je mettrai en mouvement le 30e, qui est à Lubeck, le 111e, qui est dans le Lauenbourg, le 13e d'infanterie légère, le 17e et le 57e de ligne, qui se trouvent à Hambourg. Le 25e et le 61e, qui sont sur la rive gauche de l'Elbe, à une ou deux journées de marche de Hambourg, suivraient le mouvement. Je dirigerai toutes ces troupes sur Templin, par le Mecklembourg, et, suivant les circonstances, je les rejoindrai à Templin pour les diriger sur Berlin ou ailleurs.
Avec ces troupes, marcheraient le 8e de hussards et le 16e de chasseurs, que j'ai fait rapprocher de l'Elbe.
Ainsi, je me trouverai avoir sous la main douze régiments d'infanterie français et cinq régiments de cavalerie légère.
Dans le même moment, je ferai diriger sur Berlin le général Gudin, avec les 7e et 33e d'infanterie légère, 12e et 21e de ligne, qui, au premier avis de départ de M. de Saint-Marsan,ont l'ordre de se réunir à Magdebourg, ainsi que la division de cuirassiers du général Saint-Germain.
Étant de ma personne à Stettin, je saurai tout ce qui se passe et pourrai donner des ordres en conséquence, parce qu'il importe de ne pas perdre de temps et de mettre toute la vigueur nécessaire, afin que la plus grande partie de l'armée prussienne soit désarmée avant qu'elle ait pu passer la Vistule.
Ma crainte est, je le répète à Votre Majesté, que M. le comte de Saint-Marsan ne se laisse abuser. Cette crainte est fondée sur ce que M. de Saint-Marsan m'a exactement informé de tous les mouvements que les Prussiens ont faits sur la côte pendant le mois d'avril, et que depuis tous ces derniers mouvements, qui sont authentiques, il ne m'a donné aucun avertissement.
Je désirerais que Votre Majesté me donnât des instructions dans l'hypothèse où M. de Saint-Marsan prolongerait son séjour à Berlin et où les Prussiens continueraient leurs mouvements et armements.
J'ai écrit à Dresde, afin qu'aussitôt que la nouvelle du départ de M. de Saint-Marsan de Berlin sera arrivée, l'armée saxonne se porte et se masse sur Glogau,
Arrivé à Stettin, je prendrai des mesures pour qu'aucun des Prussiens qui sont entre l'Elbe et l'Oder ne puisse repasser ce dernier fleuve" (Margueron (Cdt) : « Campagne de Russie, première partie », tome 3, Lavauzelle, page 196).
Au mois d'octobre, les anciens éléments du 3e Corps servent à constituer le Corps d'observation de l'Elbe. Le Maréchal Davout se rend à Hambourg, moins encore pour empêcher l'importation des marchandises anglaises, que pour contenir la Prusse et se prémunir contre la Russie.
Le 8 novembre 1811, le Maréchal Davout écrit, depuis Hambourg, au Duc de Feltre, Ministre de la Guerre : "... Le 33e régiment d'infanterie légère ne recevra point non plus de conscrits de bataillons de marche de l'ile de Rhé. Le bataillon du major Cardillac, qui lui avait d'abord été destiné, a reçu contre-ordre en route, et les 3 compagnies qui le composent seront incorporées, savoir celle des 26e et 66e régiments dans le 30e de ligne, et celle du 82e dans le 57e régiment de ligne.
Le chef d'état-major a dû faire connaitre à Votre Excellence la répartition des deux autres bataillons de marche de l'île de Rhé : le premier dans le 30e régiment de ligne, et le second dans les 33e et 61e de ligne ..." (Mazade C. (de) : « Correspondance du Maréchal Davout, prince d'Eckmühl : ses commandements, son ministère, 1801-1815 », t. 3, p. 275, lettre 995).
Le 25 novembre 1811, le Prince d’Eckmühl écrit, depuis Hambourg, à l’Empereur : "Sire, j'ai l'honneur d'adresser à Votre Majesté, ainsi que je le lui ai annoncé hier, une carte de Schroetter, sur laquelle elle trouvera la dislocation des troupes de toute arme, françaises, prussiennes, saxonnes, westphaliennes et polonaises. Elle est accompagnée d'un état d'emplacement de toutes ces troupes. Il peut y avoir, je le répète, quelques inexactitudes pour l'emplacement des troupes prussiennes, mais elles doivent être de peu d'importance; cette dislocation que je donne est le résultat de tous les renseignements que j'ai comparés avec le plus grand soin.
J'adresse aussi un état de l'emplacement des troupes russes qui se trouvent sur les frontières de la Pologne. Je ne donne cet état que comme vraisemblable; les rapports, sur lesquels il a été fait, ayant été trop contradictoires pour y avoir une absolue confiance.
Après avoir fait connaître à Votre Majesté l'état de l'échiquier, je vais, conformément à son ordre, lui communiquer mes idées dans le cas où elle voudrait prendre l'initiative dans la guerre que tout annonce devoir éclater.
Pour rendre cette initiative le plus profitable possible, il faut faire prendre le change au gouvernement prussien.
Au jour fixé, la division Friant, qui est à Rostock, le régiment de Joseph Napoléon, la brigade de cavalerie légère du général Bordessoulle, composée des 1er et 3e de chasseurs qui sont dans le Mecklembourg, se porteront sur Stettin en suivant la route militaire.
Je m'arrangerai pour arriver avec cette colonne à Stettin.
Le jour où elle entrerait sur le territoire prussien, c'est-à-dire à Demin, un officier serait expédié pour annoncer à Berlin qu'ayant reçu la nouvelle authentique que trois divisions russes sont entrées sur le territoire du duché de Varsovie et se portent sur Zamosc, j'ai cru, en attendant les ordres de mon gouvernement et pour ne pas perdre de temps, devoir porter les troupes françaises sur l'Oder.
Le gouvernement prussien peut avoir avec la Russie des relations qui lui feraient apprécier cette allégation à sa juste valeur; mais j'aurais soin d'ajouter, pour la rendre plus vraisemblable, que cette nouvelle me paraît à moi-même d'autant plus extraordinaire que je sais que tout est tranquille sur les autres points, à Brzesc, Grodno, Vilna, etc.; que, sans doute, ce ne peut être qu'un coup de tête d'un général ou un malentendu qui ne peut pas tarder à s'éclaircir. Alors, si cette idée, que l'on a, même à Varsovie, se réalisait, le calme serait bientôt rétabli, et les troupes françaises rentreraient dans leurs anciens cantonnements.
La chose présentée sous ce rapport donnerait au moins une grande incertitude au gouvernement prussien.
J'ajouterais que, dans une pareille circonstance, toute réunion de troupes prussiennes occasionnerait des malentendus, et qu'il est, en conséquence, utile de se concerter. Je demanderais qu'on envoyât à cet effet un officier général au général Friant à Stettin; je ne ferais pas connaître que je m'y porte de ma personne.
On chargerait même un officier intelligent de donner verbalement ces assurances, et, pour mieux y faire croire, cet officier serait trompé lui-même.
Le même jour où le général Friant, qui, de Demin, continuera sa route sur Stettin, y sera arrivé, le général Gudin, dont la division est réunie à Magdebourg, arriverait par la route militaire de Nauem. Il serait précédé du 16e régiment de chasseurs, qui appartient à la brigade de cavalerie légère du général Piré et qui est cantonné sur la rive gauche de l'Elbe à une marche ou deux de Magdebourg, de la division de cuirassiers du général Saint-Germain, qui est en Westphalie, et de la 3e de la même arme qui est à Erfurt.
Le 61e régiment qui est à Lunebourg irait rejoindre le général Gudin à Magdebourg et y arriverait le jour où le général Gudin devrait en partir.
Le parc d'artillerie qui est à Minden se rendrait à Magdebourg et y arriverait le lendemain du départ du général Gudin.
Les bataillons des différents corps qui doivent se réunir à Hanovre, sous le commandementdu général Gratien, se rendraient à Magdebourg avec le parc et y tiendraient garnison. Le lendemain de l'arrivée de ces bataillons, le général Gratien partirait avec le 61e régiment et le parc, pour rejoindre le général Gudin, à la disposition de qui il serait.
Le général Morand, avec les 13e d'infanterie légère, 17e et 30e de ligne, qui forment sa division, serait mis en mouvement de manière à être rendu à Templin le jour où le général Friant serait avec sa division à Stettin, et où le général Gudin serait à Nauem.
Le général Compans, avec les 25e, 57e et 111e de ligne, arriverait le même jour à une marche du général Morand, ainsi que le 8e de hussards, qui est le second régiment de la brigade de Piré.
Ce serait ce même jour que le plan se développerait. Je partirai de Stettin avec la majeure partie des troupes des divisions Friant et Dessaix, et trois régiments de cavalerie légère, qui sont ceux de la brigade Bordessoulle, et le 7e de hussards, pour agir suivant les circonstances.
Le général Gudin, avec tout ce qui serait sous ses ordres, — le régiment de cavalerie légère et les deux divisions de cuirassiers, — cernerait Spandau et se porterait sur Berlin.
Je donnerais aux divisions Compans et Morand, avec lesquelles je maintiendrais une communication, des ordres de direction suivant les circonstances.
On empêcherait les Prussiens de se rallier; on désarmerait toutes les troupes, les détachements isolés, et on arrêterait les convois. Des ordres sévères seraient donnés aux autorités pour empêcher les congés, les recrues et les travailleurs de rejoindre.
Je proposerais que le prince Poniatowski ne partit de Thorn, avec tous les régiments qui seraient dans les environs, en se faisant suivre par quelques autres, que le premier ou le second jour de notre marche en Prusse.
Il aurait surtout l'instruction d'arrêter tous les courriers expédiés de Berlin.
Le général Grandjean partirait de Danzig le même jour et irait avec sa division faire sa jonction avec les troupes du prince entre Marienbourg et Graudenz. Il aurait les mêmes instructions pour les courriers.
Ces troupes réunies seraient sous les ordres du prince Poniatowski, qui agirait suivant les circonstances contre les troupes qui seraient sur l'une ou l'autre rive de la Vistule. Le reste des troupes polonaises serait concentré entre Varsovie et Thorn, ayant des troupes légères sur les frontières de Russie. Les garnisons de Zamosc et Modlin seraient désignées.
Pour faire prendre le change sur ce point, on ferait courir différents bruits qu'il y a des négociations, des arrangements, etc.
J'ai pensé que c'était surtout à la hauteur de Graudenz qu'on devait avoir beaucoup de troupes sous la main, parce que ce serait là, vraisemblablement, que les troupes prussiennes qui sont entre l'Oder et la Vistule chercheraientà se retirer. Tous les rapports annoncent qu'il y a deux équipages de pont à Graudenz.
Je prendrais la précaution de tromper même les divisions Friant, Morand, Gudin, Compans, etc., sur le but de la marche. Ce ne serait que le jour où tout concourrait au plan pour désorganiser l'armée prussienne, que les troupes connaîtraient le véritable objet.
Ces mesures et tous les accessoires concourraient à jeter la désorganisation. Toutes les autorités prussiennes seraient frappées de terreur par cet événement et les injonctions qui leur seraient faites.
Le plus grand secret serait observé; il ne serait confié qu'à la dernière extrémité et à ceux qui doivent le connaître.
Les Saxons ne recevraient l'ordre de se mettre en mouvement pour se porter sur Glogau que le jour à peu près où nous arriverions sur l'Oder. Jusque là, tout serait dans le plus grand calme, et ce calme contribuera beaucoup à faire prendre le change aux Prussiens.
Je proposerais de prendre deux ou trois régiments de cavalerie saxonne, un ou deux régiments d'infanterie et une ou deux batteries d'artillerie légère de cette nation pour garder les routes de Berlin en Saxe, et arrêter tout ce qui voudrait se sauver par là, même les individus dont on saisirait les papiers avec le plus grand soin.
On s'emparera de beaucoup de boute-feux, et on saisira des papiers qui donneront de bons renseignements sur leurs projets. Cette troupe se mettrait le plus tôt possible en communication avec le général Gudin et agirait suivant les circonstances, s'emparerait de Crossen, etc.
Je serais même d'avis d'envoyer là un général français et des officiers d'état-major.
Tel est le canevas que je propose à Votre Majesté, sur lequel je ferais des instructions claires et qui laisserait la latitude nécessaire aux commandants des colonnes pour agir suivant les circonstances qui se présenteraient.
Je dois poser l'hypothèse où le roi pourrait être surpris dans Berlin; sa prise serait si importante, que je suppose qu'il ne faudrait pas la manquer.
Je demanderais aussi l'intention de Votre Majesté sur tous les ministres étrangers qui seraient à Berlin; la présence de ces gens-là y est toujours très nuisible.
Je propose d'arrêter tous les courriers étrangers, venant ou allant à Pétersbourg, et de saisir leurs dépêches, en y mettant toutes les convenances possibles.
Je vais parler maintenant des troupes westphaliennes.
J'ai fait connaître à Votre Majesté que je ne croyais pas qu'on dût faire beaucoup de fond sur elles, surtout si elles étaient réunies.
Deux ou trois régiments de cavalerie et d'infanterie, qui se trouveraient le plus près de Magdebourg, suivraient le mouvement du général Gudin et seraient à sa disposition.
Les autres partiraient successivement et seraient répartis dans les autres divisions de l'armée.
Je n'ai point parlé des 2e et 37e, ni des autres régiments qui ne font point partie du corps d'armée.
Le prince Poniatowski, le général Rapp, et les gouverneurs des places de l'Oder ont déjà des chiffres depuis longtemps, et s'il était question de mettre ces idées à exécution, j'en donnerais aux généraux de division.
Par ce projet, Sire, j'évite de mettre qui que ce soit dans la confidence; ainsi le général Poniatowski lui-même n'y serait qu'en recevant des ordres. Ce n'est pas que je me méfie de lui, je le regarde comme un homme sûr et dévoué à Votre Majesté, mais une lettre peut traîner, et il y a dans ce pays-là des femmes bien adroites.
On peut espérer que le résultat sera une désorganisation parfaite, et que personne en Prusse ne saura ce qu'il a à faire, ni l'état des choses, puisque les courriers seront presque tous interceptés.
On pourrait tirer parti de ces circonstances, et je dois communiquer à Votre Majesté les idées qui me viennent.
Arrivé sur l'Oder, ramassant les escadrons et bataillons prussiens, je ferais courir le bruit, en me portant dans le pays, qu'on est en négociation. Je fabriquerais un traité entre M. de Saint-Marsan et M. de Hardenberg, qui annoncerait que S. M. le roi de Prusse, pour convaincre Votre Majesté de sa volonté invariable de confondre ses intérêts avec ceux de la France, a nommé M. de Hardenberg pour son plénipotentiaire, pour conclure avec M. de Saint-Marsan des arrangements qui pourront la satisfaire et la convaincre de la pureté de ses intentions.
Suivraient les articles en vertu desquels les places de Colberg, Graudenz, Spandau et Pillau, ainsi que tous les retranchements qui sont dans le Mecklembourg et du côté de Lochstaedt, seraient mis, sur la présentation de ce traité, au pouvoir des troupes françaises, et les garnisons prussiennes de ces places dirigées, d'après un itinéraire convenu avec les généraux français et les commandants des places, sur la Silésie.
Ce traité stipulerait que le tiers des approvisionnements de guerre et de vivres pourrait être évacué par les Prussiens sur les places de la Silésie, et les deux autres tiers remis au gouvernement français, qui se chargera d'en tenir compte, moyennant les prix qui seront convenus ultérieurement entre les deux gouvernements.
Un autre article stipulerait que la place de Glogau serait rendue aux troupes prussiennes huit jours après la reddition de la dernière de ces quatre places;
Que S. M. le roi de Prusse entretiendrait 1.000 hommes d'infanterie, 50 bouches à feu attelées avec leurs caissons et munitions, 3.000 chevaux, et 2.000 hommes d'artillerie et du génie, à la disposition de Votre Majesté;
Que Votre Majesté tiendrait compte dé toutes les dépenses et fournitures qui pourraient être faites à ces troupes, et ses alliés, par la Prusse;
Que tous les détachements français et prussiens, qui auraient été pris par l'effet de malentendus antérieurs, seront rendus immédiatement après la remise des quatre places.
Un article porterait que Votre Majesté garantit l'intégrité du territoire actuel de la monarchie prussienne.
Il faudrait donner à cette pièce, qui serait fausse, toute la vraisemblance possible. On pourrait la rédiger à Paris, en imitant l'écriture de M. de Hardenberg et en employant le protocole usité; en mettant les cachets et signatures de MM. de Hardenberg et Saint-Marsan. On ferait, en quadruple expédition, ce soi-disant traité.
Il serait porté dans toutes les places et par des officiers français qui iraient dans la bonne foi, et de concert avec des officiers prussiens que l'on gagnerait, ou par d'autres moyens les plus vraisemblables possible qui viendraient à l'idée dans le moment.
Je ne puis point garantir que ces ruses auront un plein succès, mais dans la désorganisation qui doit résulter de la mise à exécution du projet que je soumets à Votre Majesté, il y aurait assez de vraisemblance pour qu'on les tentât.
Je sais bien qu'aucun mot de ce projet n'a le cachet de la bonne foi; mais on ne ferait qu'user de représailles envers le gouvernement prussien. C'est par ce motif que je le propose, et parce qu'il remplirait les intentions de Votre Majesté, de rendre le plus possible l'initiative profitable.
Dans les instructions à donner au général Rapp, il aurait celle de surprendre les retranchements qui sont dans le Nehrung.
Il peut se faire que Votre Majesté rejette la plus grande partie des idées comprises dans ce projet, surtout celles relatives à un faux traité; mais cela peut se modifier. Ce qui m'a fait naître cette idée, c'est une ruse de cette nature que les Prussiens ont employée à Mayence; ils ont fabriqué un ordre du général Custine au commandant de la place de se rendre et de capituler aux meilleures conditions, n'ayant plus de secours à attendre. Je sens que la représaille est un peu forte, mais on peut la modifier dans l'exécution.
J'ai fait marquer sur la carte ci-jointe toutes les routes militaires qui existent en Prusse, et j'ai distingué par une couleur particulière l'ancienne route que nous avions de Stettin à Danzig, et sur laquelle nous avons encore une ligne de correspondance que les Prussiens veulent que nous retirions pour la placer sur l'autre route" (Margueron (Cdt) : « Campagne de Russie, première partie », tome 3, Lavauzelle, page 323).
Le "TABLEAU DE L'EMPLACEMENT DES TROUPES FRANÇAISES, WESTPHALIENNES, SAXONNES, POLONAISES, PRUSSIENNES ET RUSSES A L'ÉPOQUE DU 25 NOVEMBRE 1811" indique pour la 5e Division du Corps d'Observation de l'Elbe, que le 61e de Ligne a ses 5 Bataillons à Lunebourg (Margueron (Cdt) : « Campagne de Russie, première partie », tome 3, Lavauzelle, page 329).
Le 20 décembre 1811, l'Empereur écrit, depuis Paris, au Général Lacuée, Ministre directeur de l’Administration de la Guerre : "Monsieur le comte de Cessac, je vous envoie une lettre sur des refus de draps faits au dépôt du 61e. Y-a-t-il quelque chose à faire contre les fournisseurs qui fournissent des draps inférieurs aux échantillons ? Car enfin ces refus ne laissent pas que de retarder la formation de l’armée" (Correspondance générale de Napoléon, t.11, lettre 29417).
Le 26 décembre 1811, l'Empereur écrit, depuis Paris, au Général Clarke : "Monsieur le duc de Feltre, le 13e régiment d'infanterie légère fera partir, pour recruter ses bataillons de guerre, 60 hommes du 5e bataillon ...
Le 61e de ligne fera partir. 60 – ..." (Picard E. et Tuetey L. : « Correspondance inédite de Napoléon 1er conservée aux Archives de la Guerre », Paris, 1913, t. 4, lettre 6531 ; Correspondance générale de Napoléon, t.11, lettre 29475).
/ 1810, Espagne
Concernant l'Espagne, l'Empereur écrit, le 7 janvier 1810, depuis Paris, au Général Clarke, Ministre de la Guerre : "Monsieur le duc de Feltre, les quatre premiers bataillons auxiliaires qui sont à Versailles seront réduits à deux, composés de la manière suivante. Savoir :
1er bataillon (infanterie de ligne) ...
3e compagnie 1 [officier] 90 [soldats] du 3e de ligne
1 [officier] 60 [soldats] du 61e
1 [officier] 48 [soldats] du 85e de ligne
[Total ] 3 [officiers] 147 [soldats] ...
2e batailllon (infanterie légère) ...
Le comte de Lobau dressera procès-verbal de la formation de ces deux bataillons avant le 10 janvier ; les compagnies seront égalisées, leur chef de bataillon sera nommé pour commander chaque bataillon. Il sera également nommé à toutes les places d'officiers et de sous-officiers.
Les sous-officiers et soldats seront effacés des contrôles de leurs corps et, à dater du 1er janvier 1810, l'existence de ces bataillons sera reconnue, et ils seront payés directement par te Trésor.
Il y aura trois tambours par compagnie.
Au fur et à mesure que les bataillons auxiliaires viendront à se former, au lieu de 12, les cadres seront resserrés, de manière que chaque bataillon soit porté au complet de 840 hommes.
Un colonel en second sera nommé inspecteur de tous les bataillons auxiliaires. Il sera chargé de rendre compte au ministre de leur formation et de veiller à ce que les différents détachements partent des lieux où ils se rassemblent, bien organisés et complets en officiers, sous-officiers et soldats.
Le 5e bataillon auxiliaire qui se réunit à Lyon en partira avec la formation provisoire qu’il aura reçue dans cette ville, et se rendra à Bayonne où il sera définitivement formé.
Faites-moi connaître pourquoi les corps ont envoyé aux bataillons auxiliaires des détachements dont la force est si peu proportionnée aux demandes qui leur ont été faites ; je désire savoir quand ils pourront envoyer le reste.
Aussitôt qu’un bataillon auxiliaire sera formé, présentez-moi un projet de décret pour lui donner une éxistence régulière.
Faites mettre à la dispositionn du comte Lobau une trentaine de jeunes gens de Fontainebleau, pour être placés dans ces bataillons.
Surtout ayez soin de mettre à Versailles un colonel en second qui veille à l’instruction
P.S : Vous dirigerez sur le second bataillon deux compagnies d'infanterie légère, faisant 300 hommes, pour compléter ce bataillon" (Picard E. et Tuetey L. : « Correspondance inédite de Napoléon 1er conservée aux Archives de la Guerre », Paris, 1913, t. 3, lettre 3904 ; Correspondance générale de Napoléon, t.9, lettre 22808).
/ Campagne de Russie (1812)
Le 61e se sépare du Général Morand pour former la 3e Brigade (Guyardet) de la 5e Division (Compans). Son effectif s'accroit par de nouvelles incorporations et aussi par l'arrivée de ses 4e et 6e Bataillons, ce dernier de création récente (La 5e Division, dans laquelle chaque Régiment forme une Brigade, se compose des 25e, 57e, 61e et 111e de Ligne).
Le 1er janvier 1812, le 61e Régiment d'Infanterie de ligne a son Dépôt à Worms (Margueron (Cdt) : « Campagne de Russie, première partie », tome 1, Lavauzelle, page 14).
Le 2 janvier 1812, l'Empereur écrit, depuis Paris, au Général Lacuée, Comte de Cessac, Ministre directeur de l’Administration de la Guerre, à Paris : "Monsieur le Comte de Cessac, je vous envoie pour votre gouverne l’organisation de la Grande Armée. Le corps de l’Elbe formera deux corps. Il est nécessaire d’envoyer un ordonnateur à chaque corps et tout le personnel d’administration qui est indispensable. Présentez-moi un projet d’organisation. Comme je n’ai pas encore organisé en deux corps le corps d’observation de l’Elbe, envoyez-y tout double.
NOTE SUR L’ORGANISATION DE LA GRANDE ARMÉE.
La Grande Armée sera partagée en quatre corps : le corps d’observation de l’Elbe en fera deux; le corps d’observation de l’Océan en fera un ; le corps d’observation d’Italie en fera un autre.
La Grande Armée sera organisée en 15 divisions d’infanterie.
... 5e division : 25e de ligne, 5 bataillons ; 57e de ligne, 5 bataillons ; 61e de ligne, 5 bataillons ; 111e de ligne, 5 bataillons ; total, 20 bataillons ..." (Correspondance de Napoléon, t.23, lettre 18410 ; Correspondance générale de Napoléon, t.11, lettre 29642).
1er Corps d’Observation de l’Elbe, 31 janvier 1812
5e Division, Général Compans.
25e de Ligne, 5 Bataillons ; 57e de Ligne, 5 Bataillons ; 61e de Ligne, 5 Bataillons ; 111e de Ligne, 5 Bataillons ; Artillerie, Génie et Train (Margueron (Cdt) : « Campagne de Russie, première partie », tome 1, Lavauzelle, page 310).
- Causes de la Guerre.
Les agrandissements de la France aux dépens du Duc d'Oldenbourg, parent du Tzar, les difficultés d'application du blocus continental et une certaine rivalité personnelle amènent une rupture entre Napoléon et Alexandre II. Après plusieurs mois de négociations inutiles, la guerre est déclarée le 11 mai 1812.
- Premières opérations de la campagne.
Le Corps d'observation de l'Elbe, devenu le 1er Corps de la Grande Armée dont il forme l'avant-garde, s'est acheminé, dès le mois de mars, vers la Vistule. Le 10 avril, le 61e occupe Sthum, Hohendorf et les villages environnants, qu'il quitte neuf jours après pour se concentrer à Kobbelbude.
Napoléon arrive à Marienbourg le 6 juin et porte le 1er Corps sur les bords de la Pregel. Le 61e est d'abord établi au camp de Georgenburg et à Pillau.
Le 15 juin 1812, à Königsberg, "Le prince d'Eckmühl demande que le bataillon du 61e régiment, qui est à Pillau, rejoigne son corps"; Napoléon répond : "Lui donner l’ordre de rejoindre sans délai son régiment" (Picard E. et Tuetey L. : « Correspondance inédite de Napoléon 1er conservée aux Archives de la Guerre », Paris, 1913, t. 5, lettre 7351).
Le même 15 juin 1812, l'Empereur écrit, depuis Koenigsberg, au Prince de Neuchâtel et de Wagram, Major général de la Grande Armée, à Königsberg : "Mon Cousin, donnez l'ordre au gouverneur de Koenigsberg de faire cesser tous les travaux qui se font au camp de Lochstædt. Vous lui ferez connaître que j'ai à Pillau 25 ouvriers et une compagnie d'artillerie prussienne. Il fera placer la compagnie d'artillerie moitié dans les ouvrages du Nehrung et moitié dans la place, mêlée avec les canonniers français. Le bataillon du 61e ayant quitté la ville de Pillau, il n'y aura plus qu'un bataillon de Bade dans la ville ..." (Correspondance de Napoléon, t.23, lettre 18795 ; Correspondance générale de Napoléon, t.12, lettre 30923).
Encore le 15 juin 1812, l'Empereur écrit, depuis Koenigsberg, au Maréchal Davout, Prince d'Eckmühl, commandant le 1er Corps de la Grande Armée, à Gumbinnen : "Mon Cousin, le major général vous envoie un ordre de mouvement suivant lequel votre corps doit être réuni à Wilkowyszki le 20. De Gumbinnen il n'y a que deux marches ; en partant le 19, vous serez donc le 20 à Wilkowyszki. Les deux bataillons du 25e vous rejoignent et passent aujourd'hui à Koenigsberg. J'ai ordonné qu'il n'y eût pas un seul homme du 111e demain à Koenigsberg. Les 4e et 6e bataillons du 25e sont partis de Danzig ; celui du 61e est également parti de Pillau. Un détachement de 200 hommes du 25e, que vous aviez laissé près d'Elbing, a eu ordre de rejoindre. Il est probable que du 22 au 23 on se battra, et que ce sera à deux marches plus loin que Wilkowyszki. Il est donc convenable que vous réunissiez le plus tôt possible vos détachements, et principalement vos troupes françaises. Vous avez pour vos escortes les troupes du Mecklenburg et les autres troupes allemandes ; vous pouvez donc ne pas donner ces corvées aux troupes françaises, et les ménager. Il me semble que vous ne suivez pas assez ce système, qui est important. Comme vous êtes éclairé par la cavalerie du 1er corps de réserve sur les directions de Kovno et Olitta, placez votre cavalerie légère sur la direction de Georgenburg, entre le Niémen et vous. Ayez des officiers d'état-major du côté de Georgenburg et ailleurs, qui vous instruisent promptement du mouvement offensif que ferait l'ennemi. Consultez vos états de situation, et rappelez tous vos détachements. Aussitôt que les voitures qui vous sont expédiées de Koenigsberg, et qui vous portent à Gumbinnen 10 à 12.000 quintaux de farine, seront arrivées, je crois qu'il serait convenable qu’après leur déchargement vous les renvoyassiez sur-le-champ à Insterburg pour s'y recharger, et alors ce qu'elles apporteraient d'Insterburg filerait jusqu'à votre camp de Wilkowyszki" (Correspondance de Napoléon, t.23, lettre 18801 ; Correspondance générale de Napoléon, t.12, lettre 30934 ; Mazade C. (de) : « Correspondance du Maréchal Davout, prince d'Eckmühl : ses commandements, son ministère, 1801-1815 », t. 3, p. 355).
Le 61e passe à Preuss-Ziszcken.
- Passage du Niémen.
Le 23, à onze heures du soir, le Maréchal Davout passe le Niémen près de Kowno. La Division Compans, restée en arrière autour d'Alxnehnen, ne rejoint le ler Corps que dans la soirée du 25, à Jilmoroni. Trois cent-vingt-cinq mille hommes, dont la moitié seulement sont Français, attaquent chez eux 400.000 Russes commandés par le Tzar, ou mieux, par son Chef d'Etat-major, le Général Benningsen, et partagés en trois armées sous les ordres des Généraux Barclay de Tolly, Bagration et Wittgenstein.
- Premières Opérations.
Le 1er Corps, à qui incombe toujours le rôle glorieux de précéder la Grande Armée, atteint Vilna le 28 juin, après une marche que la chaleur a rendue très pénible. Les Russes se replient sans combattre sur la Dwina et le Dnieper. L'armée de Bagration, forte de 35.000 hommes, est encore sur le haut Niémen et manoeuvre pour rejoindre le Tzar. Napoléon la fait poursuivre par Davout avec la Division Compans, deux Régiments de la Division Dessaix, la Division de cavalerie Valence et le 3e Régiment de Chasseurs.
Le 61e entre à Minsk, le 8 juillet, et y séjourne jusqu'au 14, dans l'attente inutile d'un mouvement, que doit faire l'aile droite de la Grande Armée, conduite par le Roi Jérôme, pour déboucher par Bobruisk sur le flanc gauche des Russes. Bagration est sauvé et l'Empereur en éprouve une violente colère, mais Davout, quoique réduit à ses propres moyens, n'en poursuit pas moins son adversaire avec toute la ténacité qui lui est habituelle.
Le 16, la Division Compans arrive à Ighoumen, où elle séjourne jusqu'au 19, et le lendemain elle entre à Mohilew, avec deux jours d'avance sur l'armée russe.
- Bataille de Mohilew.
Le Maréchal Davout, pour disputer le passage à ses ennemis, établit sa troupe à quatre lieues au sud de Mohilew, sur la position de Soulta Nowka, dont le front resserré est en outre protégé par un petit affluent du Dnieper.
Dans son rapport daté de Dobrowna, le 7 août 1812, le Maréchal Davout écrit au Prince de Neuchâtel, Major général de la Grande Armée : "Monseigneur, j'ai l'honneur de mettre sous les yeux de Votre Altesse le rapport de l'affaire qui a eu lieu le 23 juillet, en avant de Mohilew, entre une partie des troupes du 1er corps et le corps russe du prince Bagration.
Votre Altesse sait qu'une légère avant-garde aux ordres du général Bordesoulle était entrée le 20 à Mohilew, et qu'après s'en être rendue maitresse, elle poursuivit, dans une fausse direction, le corps ennemi fort de 12,000 hommes, à qui elle avait fait 3 ou 400 prisonniers. Le reste de ce corps s'était retiré par la toute de Staroi-Bichow sur la tête des colonnes du prince Bagration.
Le 21 eut lieu, à la hauteur de Bouitniki, l'attaque des Cosaques sur le 3e régiment de chasseurs, dans laquelle ce régiment, accablé par le nombre, éprouva une grande perte.
J'employai le 21 à faire une reconnaissance avec le reste de ce même régiment et le 85e de ligne en avant de Bouistrys ; je la poussai jusqu'au-delà du Nowielski ; l'ennemi ne montra que de la cavalerie en assez grande quantité.
Tous les rapports annoncent l'arrivée de l'armée du prince Bagration à Novoi-Bichow et sa marche sur Mohilew, déterminé à donner une bataille pour y entrer. On parlait de quatre divisions d'infanterie, du corps de Platow et de plusieurs divisions de cavalerie.
Je n'avais alors à Mohilew que les 57e, 61e et 111e régiments d'infanterie de la division Compans, le 25e ayant été laissé, avec la brigade Pajol et le 1er de chasseurs, sur la Bérézina, pour couvrir Minsk, les 85e et 108e de la division Desaix, la division Valence et le 3e de chasseurs.
Il fallait choisir un terrain d'un petit développement, qui pût rendre nulles la nombreuse cavalerie et l'artillerie de l'ennemi.
La position de Solta-Nawka, dont j'envoie un croquis à Votre Altesse, me parut remplir ce but. Dans la nuit du 22, je fis barricader le pont qui est sur la grande route, créneler l'auberge qui est vis-à-vis. Le pont du moulin de droite fut coupé par mes compagnies de sapeurs, et les maisons des environs crénelées. Le 85e fut chargé de défendre ces postes et de tenir en cas d'attaque, pour donner le temps aux autres troupes, échelonnées entre cette position et Mohilew, d'arriver.
Ces dispositions prises, je me retirai à Mohilew, pour presser l'arrivée de la division Claparède, des troupes détachées du général Pajol.
Le 23, à sept heures et demie du matin, je reçus les rapports que les avant-postes étaient attaqués. A huit heures, je trouvai le 85e attaqué très-vivement. Le général Fredericks, qui le commandait, avait fait de bonnes dispositions, et pendant toute la journée a déployé du calme et beaucoup d'intrépidité.
L'artillerie légère de la division et celle du 85e avaient été disposées la veille. Leur feu fut très-meurtrier, et au bout d'une heure de combat, il y avait déjà au-delà de 500 morts russes. Douze à quinze pièces russes débouchèrent du bois et se mirent en bataille sur le plateau du moulin, dont le pont avait été détruit. Des régiments d'infanterie russe se formèrent ; un bataillon du 108e fut envoyé pour soutenir les compagnies du 85e, qui étaient sur ce point. Quelques pièces d'artillerie furent opposées à celles des Russes. Le combat devint très-vif de ce côté. Les forces de l'ennemi augmentaient à chaque instant. Le bataillon du 108e, qui avait poussé les Russes, fut obligé de céder au nombre. Le général Guyardet, avec deux bataillons du 61e, arrêta la poursuite de l'ennemi et fit repasser le ravin aux Russes, qui t'avaient passé en poursuivant le bataillon du 108e.
Pendant que ces choses se passaient sur la droite, je donnai ordre au général Fredericks, qui défendait le débouché de la grande route avec beaucoup de vigueur, de faire passer le défilé à un bataillon du 108e et à quelques compagnies du 85e, et de charger les pièces ennemies. Ce mouvement, qui fut exécuté avec une grande décision et dirigé par le colonel Achard, du 108e, eut une grande influence sur les mouvements de la gauche de l'ennemi, qui se vit forcé à rétrograder.
Le bataillon commandé par le colonel Achard avait fait prisonnier un bataillon ennemi, qui fut ensuite délivré. Le colonel fut blessé d'une balle au travers du bras, et ne put se soutenir sur les hauteurs qu'il avait occupées.
L'ennemi avait fait avancer une masse considérable formée en colonne serrée, pour entreprendre de nouveau de forcer 1e défilé du pont ; elle se trouvait dans la direction de la batterie du chef d'escadron Polinier, qui l'arrêta par un feu terrible et lui fit beaucoup de mal. Le nombre des morts de l'ennemi, qui était déjà considérable sur ce point, fut doublé.
L'action se soutenait encore avec chaleur de part et d'autre, et avec une grande infériorité de notre côté.
Les autres troupes étaient en réserve sur notre droite, où l'on devait supposer que l'ennemi porterait des forces, et surtout sa nombreuse cavalerie. Sur les six heures du soir, toutes mes reconnaissances de la droite n'ayant pas vu d'ennemis, les troupes qui avaient été mises en réserve, et en particulier le 111e régiment, furent dirigés sur la grande route. Le général Fredericks reçut l'ordre de renouveler son attaque. Un bataillon du 85e qui, dès la veille, avait été placé à l'extrême droite, et un du 61e, attaquaient la gauche de l'ennemi. Ces deux attaques eurent du succès ; l'ennemi retira son artillerie. Les troupes suivirent ce mouvement sur tous les points.
Le 111e et le 61e de la 5e division, conduits par le général Compans, furent chargés de poursuivre l'ennemi jusqu'à Nowosilski. La nuit arrêta la poursuite à cet endroit, où des forces considérables étaient formées pour protéger la retraite du 12e régiment d'infanterie russe, qui avait été très-maltraité.
Je dois les plus grands éloges à la conduite des troupes, et en particulier à celle du 85e. Aucun soldat n'a quitté son poste pour conduire les blessés, et les jeunes comme les anciens soldats ont montré une grande valeur. Les anciens soldats ont donné à leurs camarades l'honorable témoignage qu'il n'y avait plus de conscrits dans leur régiment.
La perte de l'ennemi a été grande. Il a laissé sur le terrain au-delà de 1,200 morts et plus de 4,000 blessés, dont 7 à 800 sont restés entre nos mains, ainsi que 150 à 200 prisonniers.
Les localités n'ont pas permis d'en faire un plus grand nombre. Notre perte, suivant les états des corps, monte à 900 hommes tués, blessés ou disparus.
Je réitère les éloges que je dois au général Fredericks, à tous les officiers d'état-major, qui ont bien payé de leur personne un d'eux a été tué.
Je profite de cette occasion pour prier Votre Altesse de demander à Sa Majesté des récompenses pour plusieurs d'entre eux ; j'en joins ici l'état à celui des officiers, sous-officiers et soldats des 4e et 5e divisions qui ont mérite d'être cités avec distinction.
Je prie Votre Altesse de mettre cet état sous les yeux de Sa Majesté et de solliciter pour eux ses faveurs" (Mazade C. (de) : « Correspondance du Maréchal Davout, prince d'Eckmühl : ses commandements, son ministère, 1801-1815 », t. 3, p. 379, lettre 1075).
Le Capitaine Pagès, le Lieutenant Boulanger et le Sous-lieutenant Pernet, du 61e, sont tués ou meurent de leurs blessures. Le Capitaine Delcroix, les Lieutenants Garnon, Abeille et Lambert sont blessés (on ne sait rien des hommes de troupe perdus par le Corps à la bataille de Mohilew. Il en sera du reste toujours ainsi pendant la campagne de 1812).
Le même 7 août 1812, le Maréchal Davout écrit, depuis Dobrowna, à l’Empereur : "Sire, j'ai l'honneur d'adresser à Votre Majesté, conformément à sa demande, la situation détaillée des troupes du 1er corps qui sont avec moi et des divisions Claparède et Valence, au 1er août.
Cet état présente une assez grande différence en moins dans les présents au 85e et 108e de ligne, avec l'état de la revue d'appel passée le juillet, et que j'ai eu l'honneur d'envoyer à Votre Majesté.
Cette différence provient de quelques faibles détachements d'hommes restés en arrière, mais plus encore d'erreurs faites par le sous-inspecteur aux revues de la division dans ses états, erreurs que j'ai reconnues et fait rectifier.
L'état que j'adresse à Votre Majesté présente une colonne des hommes égarés, sur lesquels je n'ai aucun renseignement.
Je soumets le résultat par régiment à Votre Majesté ...
Le 33e a en arrière 917 hommes ...
Le 61e 343 ..." (Mazade C. (de) : « Correspondance du Maréchal Davout, prince d'Eckmühl : ses commandements, son ministère, 1801-1815 », t. 3, p. 379, lettre 1075).
- Combat de Sutamiska.
Le 61e passe la nuit du 23 au 24 en arrière du bois de Nowoselky. Il retourne ensuite à Mohilew. Le Capitaine Wiss est blessé, le 25, dans un engagement près de Sutamiska.
Le Général Bagration, ayant pris sa route par Staroï Bichow se trouve désormais hors de portée du Maréchal Davout. Le 28, la Division Compans remonte le Dnieper pour rejoindre la Grande Armée dans le voisinage d'Orscha. Le 8 août, après avoir rallié ses traînards et renouvelé ses approvisionnements, elle se remet en marche.
- Bataille de Smolensk.
Les Généraux Barclay de Tolly et Bagration s'arrêtent à Smolensk pour défendre la seconde capitale religieuse de leur pays.
Le 16, le 61e arrive en vue de la ville et s'établit sur les hauteurs qui la dominent à l'ouest. Une démonstration contre le faubourg de Micislaw ne donne lieu qu'à un combat de Tirailleurs. La véritable bataille ne commence que le 17 et tandis qu'elle se déroule, la Division Compans, placée en réserve sur le plateau qui fait face à Czenesi, reçoit sans les rendre, les coups de l'artillerie ennemie. Elle n'entre en ligne qu'à six heures du soir, pour s'emparer du faubourg. L'attaque du corps de place ayant été renvoyée au lendemain, elle passe ensuite la nuit sous les armes.
Avant le lever du soleil, la ville est incendiée et évacuée par les Russes. La Division Compans est obligée de s'ouvrir un passage à travers les ruines et les cadavres pour aller prendre position sur la rive gauche du Dnieper.
La prise de Smolensk coûte à l'armée française 12.000 hommes tués ou blessés. Le 19, après le rétablissement des ponts, le 61e passe sur la rive droite du Dnieper et s'engage sur la route de St-Pétersbourg, tandis que Barclay de Tolly et Bagration, battus à Valoutina par le Maréchal Ney et le Général Gudin, s'échappent dans la direction de Moscou (la bataille de Valoutina coûte la vie au Général Gudin).
- Premier combat de Wiasma.
Le 20, lorsque la retraite des Russes est mieux connue, le 1er Corps reprend son poste à l'avant-garde de l'armée. La 5e Division passe le 22 à Ilob Penevo, le 24 à Dorogobouje, le 26 à Slavkovo et le 27 arrive devant Wiasma, où elle participe au combat livré, sous les murs de cette ville, par la cavalerie du Roi Murat.
Le 28, avant d'entrer dans Wiasma que les Russes incendient, les Voltigeurs de la Division soutiennent encore un sérieux engagement, pendant que les Bataillons, formés en colonne, manoeuvrent pour se porter sur le flanc droit de l'ennemi. Le Sous-lieutenant Molière, du 61e, est blessé.
L'avant-garde française, prenant à peine le temps de préparer ses aliments, continue sa route sur un sol mouvant, par une chaleur accablante. Elle ne trouve devant elle que des villages dévastés. Le 30, la Division Compans entre à Koslovo et le 1er septembre à Ghjat.
Le Général Barclay de Tolly, accusé de ne pas mettre assez de vigueur dans la conduite de la guerre, est remplacé par le vieux Général Kutuzof. La 5e Division quitte Ghjat, le 4 septembre, pour se porter sur Borodino où toute l'armée russe, fortement retranchée, a été arrêtée par son nouveau chef.
- Combat de Schwardino.
Le 5 septembre, dans l'après-midi, la cavalerie du Roi Murat est attaquée par celle des Russes dans la plaine en avant de Schwardino. Napoléon reconnaît la position de ses ennemis. Des nombreuses redoutes qui garnissent les hauteurs, celle de Schwardino, derrière la Kolocza, commande le chemin par lequel doit déboucher l'avant-garde de l'armée française. L'Empereur ordonne au Général Compans de s'en rendre maître avec sa Division.
Vers 4 heures, le combat commence. Le Général Compans franchit la Kolocza, sous la protection de Compagnies de Voltigeurs. Le village de Doronino est enlevé et quelques pièces de 12 sont mises en batterie sur un monticule, à proximité de la redoute.
Après une canonnade assez vive, le Général Compans déploie ses quatre Régiments en ligne, le 61e à droite, et les porte contre l'ouvrage. Pour l'atteindre, il faut descendre dans un ravin, remonter la pente opposée et culbuter 10.000 Russes. Le 61e et à côté de lui, le 57e, gagnent du terrain sous le feu du canon et de la mousqueterie. A petite distance, le Général Compans commande l'assaut. Au milieu de la fumée et de la fusillade, son ordre n'est pas compris. Alors il s'élance au galop vers le 57e et l'entraine baïonnette baissée. Le 61e suit le mouvement et en quelques instants le redoute est prise. Les Russes font de vains efforts pour la reconquérir. Vers sept heures du soir, à la lueur de l'incendie de Schwardino, ils se retirent; sous la protection de leur cavalerie. Les capitaines Chatelain et Destor, du 61e, sont blessés.
- Bataille de la Moskowa.
Par une pluie torrentielle, le 61e passe la journée du 6 sur la position où il a combattu la veille. Pour récompenser la 5e Division de l'héroïsme dont elle a fait preuve, l'Empereur décide qu'elle aura l'honneur de commencer la bataille du lendemain et de s'emparer des ouvrages de gauche de l'armée russe.
Le 7, dès 2 heures du matin, Napoléon, quoique souffrant, donne ses ordres à ses Maréchaux. A 5 heures et demie, le soleil se lève sans nuages. "C'est le soleil d'Austerlitz", dit l'Empereur, et l'armée en accepte l'augure. Vers six heures, un ordre du jour est lu à tous les corps : "Soldats, y est-il dit, voilà la bataille que vous avez tant désirée ! Désormais la victoire dépend de vous. Elle nous est nécessaire. Elle nous donnera l'abondance, de bons quartiers d'hiver et un prompt retour dans la patrie ! Conduisez-vous comme à Austerlitz, à Friedland, à Witepsk, à Smolensk, et que la postérité la plus reculée cite avec orgueil votre conduite dans cette journée ; que l'on dise de vous : il était à cette grande bataille sous les murs de Moscou !".
L'armée répond par des acclamations et bientôt la bataille s'engage. Le Maréchal Davout, précédé de 32 pièces d'artillerie, conduit la Division Compans et longe la lisière de la forêt d'Outitza contre laquelle s'appuie l'aile gauche de l'armée russe. Vers six heures et demie, les régiments se déploient devant les flèches de Semenoffskoie. Le 61e, qui se dirige contre la plus extrême et la plus considérable d'entre elles, est accueilli par un feu meurtrier. Une foule d'Officiers et de soldats tombent frappés. Enfin, l'assaut est ordonné et les 57e et 61e, comme à Schwardino, se précipitent en avant. Après quelques minutes d'une épouvantable mêlée au cours de laquelle les canonniers russes sont massacrés sur leurs pièces, les flèches sont emportées par les deux Régiments. Le Général Compans, grièvement blessé, est remplacé par le Général Rapp. Vers 8 heures, la plupart des positions de l'ennemi sont au pouvoir des Français. Les Russes voient la bataille compromise et dans cette extrémité, le Général Kutuzof ordonne l'offensive.
La lutte recommence avec une ardeur nouvelle. Rapp, blessé, est remplacé à son tour par le Général Dessaix, dont la Division est en réserve. Le 61e, appuyant à gauche, se porte, sous une pluie de fer, jusqu'au ravin de Semenoffskoie où le rejoignent les autres régiments de la Division Compans et ceux de la Division Dessaix.
Le Général Bagration, qui commande sur ce point, rassemble toute son infanterie disponible et la lance dans un suprême effort. Le 61e plie sous le choc; mais le Colonel Bouge le ramène et le terrain perdu est reconquis après une mêlée sanglante. Repoussés dans leurs tentatives désespérées, les Russes se replient lentement. Vers 3 heures, la 5e Division les poursuit sous la protection de 200 pièces d'artillerie qui tirent à toute volée sur leurs colonnes profondes. Le général Bagration est tué (par une curieuse coincidence, le Général Bagration était propriétaire du terrain sur lequel se livra la bataille). La cavalerie russe se sacrifie pour contenir les vainqueurs, puis toute l'armée de Kutuzof rétrograde sur Moscou (les Russes se sont toujours attribué le gain de la bataille de la Moskowa. On en trouvera peut être les raisons dans une curieuse anecdote racontée, en 1816, par le Général Orlof au Général Koch, chez le Lieutenant-général Jomini. Cette anecdote est conservée en manuscrit aux Archives historiques du Ministère de la guerre - papiers relatifs à la campagne de Russie).
La bataille de la Moskowa, la plus sanglante du siècle, coûte aux deux nations 50.000 morts ou blessés. Le 61e, pour sa part, a subi des pertes énormes. Son 2e Bataillon tout entier a succombé à la prise des oqvrages de Semenotfskoie. A l'Empereur qui lui en demande des nouvelles le lendemain, le Colonel Bouge ne trouve à répondre que ces simples mots : "Sire, ce bataillon est resté dans la redoute" (ce 2e Bataillon fut reconstitué par des prélèvements opérés sur les quatre autres). Les Commandants Paillier et Dupré, le Capitaine Roy, les Lieutenants Roques et Thomas, et beaucoup d'autres Officiers sont frappés mortellement. Les Capitaines Labroue et Charpentier, l'Adjudant-major Mazard, les Lieutenants Abeille, Chausseprat, Pameyer, des Mazis et Jehan, les Sous-lieutenants Tondut, Burnier et Bitsh sont au nombre des blessés (on remarquera qu'il n'est ici question que d'Officiers qui revinrent en France. Les blessés qui, plus tard, furent faits prisonniers ou moururent pendant la campagne ne sont pas connus. Cela tient à ce que leurs états de services n'ont jamais été complétés).
- Combat de Mojaïsk.
Après une journée de combat contre l'arrière-garde des Russes, la 5e Division arrive le 8 au soir devant Mojaïsk où le Général Kutuzof a pris position. L'attaque, remise au lendemain, est d'abord fort vive. Mais au moment de donner l'assaut, la ville est abandonnée et livrée aux flammes. Le 61e, qui a longé la rive droite de la Moskowa, campe au-delà de Mojaïsk, sur la grande route de Moscou.
Le 10 septembre est encore marqué par quelques escarmouches. Le 11, la 5e Division campe à Koubinskoë, et le 14 au matin, toute l'armée française est en avant de Moscou.
"La vue de cette vieille métropole, qui semblait marquer le but de leurs efforts, rendit aux soldats assombris par la souffrance la confiance et la gaité qu'ils avaient aux premiers temps de la campagne" (Capitaine Adam, Historique du 111e p. 104).
- Entrée à Moscou.
Le 15, la 5e Division reprend sa place parmi les troupes du 1er Corps. La Grande Armée pénètre dans Moscou, mais cette ville immense est déserte. Son Gouverneur, Rostopchine, en a fait sortir tous les habitants. Le 61e est cantonné dans le faubourg de Kalouga.
Dans la nuit du 15 au 16, sur l'ordre même de Rostopchine, 800 incendiaires, recrutés parmi les forçats, mettent le feu simultanément dans les différents quartiers. Ne pouvant l'éteindre, faute de pompes (Rostopchine les avait fait enlever), les Régimënts de la Grande Armée évacuent la ville. Le 6le reprend son bivouac du 14, à proximité de la porte de Smolensk.
L'incendie dure trois jours. Le 19, les troupes rentrent dans Moscou et s'établissent tant bien que mal sur les ruines fumantes des cantonnements qu'elles ont dû quitter(il y avait à Moscou 2571 maisons en briques, 320 églises, 17 hôpitaux, 6591 maisons en bois, 6324 boutiques en briques et 2191 boutiques en bois. On ne comptait plus, après l'incendie, que 578 maisons en briques ; tout le reste avait disparu {Cf. Le Rebours, Correspondant, 1891, p. 1026 et suiv.). Rostopchine, banni par les Russes, termina ses jours à Paris).
A Moscou, le 6 octobre 1812, on soumet à l'Empereur un "Rapport du maréchal Berthier sur les circonstances de la prise d'un détachement du 61e de ligne par l'ennemi"; "Approuvé", répond Napoléon (Picard E. et Tuetey L. : « Correspondance inédite de Napoléon 1er conservée aux Archives de la Guerre », Paris, 1913, t. 5, lettre 7591).
Le même 6 octobre 1812, le Maréchal Davout écrit, depuis Moscou, au Prince de Neuchâtel, Major général de la Grande Armée : "Monseigneur, j'ai l'honneur d'adresser à Votre Altesse copie d'une lettre d'un sous-officier du 61e régiment, faisant connaître que M. le commandant de la place de Minsk s'est opposé au départ d'un convoi de souliers, destiné pour les régiments du corps d'armée, sous le prétexte de demander les ordres de son colonel, pour retirer de ce convoi les souliers nécessaires à son régiment.
Je demande à Votre Altesse la punition de cet officier, pour s'être permis d'arrêter de son autorité le départ d'objets aussi nécessaires aux troupes que le sont dans ce moment les souliers, et je la prie de vouloir bien donner des ordres pour lever tous les obstacles qui pourraient s'opposer au départ du convoi.
Cet officier commandant de place est un chef de bataillon du 33e d'infanterie légère" (Mazade C. (de) : « Correspondance du Maréchal Davout, prince d'Eckmühl : ses commandements, son ministère, 1801-1815 », t. 3, p. 404, lettre 1107).
Le 10 octobre 1812, le Maréchal Davout écrit, depuis Moscou, au Prince de Neuchâtel, Major général de la Grande Armée : "Monseigneur, j'ai l'honneur d'adresser à Votre Altesse les renseignements qu'elle m'a chargé de prendre relativement au véritable motif qui a pu déterminer M. B ..., capitaine au 61e régiment de ligne, à demander à être employé en qualité d'adjoint à l'état-major général de l'armée.
Votre Altesse trouvera ces renseignements dans la copie ci-jointe d'une lettre de M. le général Compans.
Je joins également ici la lettre de M. B ..." (Mazade C. (de) : « Correspondance du Maréchal Davout, prince d'Eckmühl : ses commandements, son ministère, 1801-1815 », t. 3, p. 410, lettre 1116).
Le 14 octobre 1812, le Maréchal Davout écrit, depuis Moscou, au Prince de Neuchâtel, Major général de la Grande Armée : "Monseigneur, j'ai l'honneur d'accuser réception à Votre Altesse de sa lettre d'hier renfermant 223 lettres d'avis des grâces accordées par l'Empereur aux troupes du corps d'armée qui ont été passées en revue le 10 du courant par Sa Majesté, savoir :
... Pour le 61e 10 [avancements] 32 [décorations] 1 [retraite] 1 [dotation] ...
J'ai fait remettre ces lettres aux militaires qui y sont désignés" (Mazade C. (de) : « Correspondance du Maréchal Davout, prince d'Eckmühl : ses commandements, son ministère, 1801-1815 », t. 3, p. 416, lettre 1129).
- Retraite de Russie.
Napoléon ne se fait aucune illusion sur l'état précaire de son armée, dont l'effectif n'est déjà plus que de 93.000 hommes (le 61e comprenait au 15 septembre, 54 Officiers et 1826 hommes de troupe présents, 443 bommes en arrière, 23 Officiers et 1721 hommes aux hôpitaux). L'espérance d'obtenir la paix le retient seule à Moscou. Elle lui fait perdre un temps précieux.
Le 18 octobre, après un mois de négociations inutiles, la Grande Armée commence sa retraite par la route de Kalouga. Le 1er corps quitte Moscou le 19 et campe, le 23, en arrière de Borowsk.
- Bataille de Malo-Jaroslawetz.
L'armée russe s'est refaite dans le voisinage de Kalouga. Le 24, elle attaque le Prince Eugène, qui précède la Grande Armée, et lui livre une sanglante bataille à Malo-Jaroslawetz. L'entrée en ligne du ler Corps, vers cinq heures du soir et le mouvement débordant qu'il exécute après avoir franchi la Lougra, donnent la victoire aux Français. Mais la ténacité dont les Russes ont fait preuve impressionne Napoléon. A la suite d'un conseil de guerre tenu le 25, la route de Kalouga est abandonnée. La Grande Armée rétrograde sur Mojaïsk pour y reprendre la route de Smolensk déjà dévastée par l'invasion.
Le 1er Corps, chargé du service de l'arrière-garde, reste jusqu'au 27 à Malo-Jaroslawetz. Il passe le 28 à Mojaïsk, le 29 à Kolotskoie et le 30 à Ghjat. Sa marche n'est qu'un combat continuel contre les Cosaques de l'Hetman Platow. Et par une fâcheuse imprévoyance, il ne reçoit aucune part des maigres ressources que présente encore le pays. Toute sa nourriture consiste dans la viande des chevaux qui tombent sur la route.
- Combat de Kolskoï.
Le 2 novembre, par un froid de dix degrés, le 1er Corps s'achemine péniblement sur Wiasma. Il livre à Kolskoï un combat acharné contre les Russes et se fait jour les armes à la main.
- Second combat de Wiasma.
Le 3, le Maréchal Davout parvient à Wiasma en même temps que les Russes, dont les têtes de colonnes sont contenues par le Corps du Maréchal Ney. Plus de 25.000 hommes garnissent les hauteurs qui dominent la route et font feu de leurs batteries. Le 1er Corps, coupé du reste de l'armée, engage résolument le combat. Sous une pluie de boulets, les Régiments de la 5e Division se forment en colonne dans la plaine en avant du bois de Mesaiedowa et se précipitent sur leurs adversaires. La route est bientôt libre. Le 61e en profite pour se déployer au-delà du ravin de Pruditska, de façon à couvrir la ville. Un nouveau combat s'engage entre les 40 canons que traîne le 1er Corps et l'artillerie trois fois plus nombreuse des Russes. Ney parvient à faire passer quelques hommes sur les derrières de l'ennemi. A la nuit tombante, la retraite peut enfin être reprise sous la protection de la Division Compans qui lutte encore pour l'assurer.
Le second combat de Wiasma coûte au 61e un assez grand nombre de morts et de blessés. Les Sous-lieutenants Pignet et Fressancourt sont tués; les Lieutenants Tondut, Delforge, et Sureaud comptent parmi les blessés.
Le 6, après une longue marche, le 1er Corps bivouaque au-delà d'Ouswiate, dans un bois où toute l'artillerie s'est arrétée. La nuit est consacrée à brûler les affûts des canons qui n'ont plus d'attelages et à faire sauter les caissons que l'on ne peut conserver.
"Ces explosions multipliées, a dit le Général Lejeune, étaient chaque fois le signal de nos désastres. Elles nous déchiraient le coeur ...
Pendant la nuit du 6, et toute la journée du 7, une neige épaisse, entraînée par un vent très vif qui ajoutait à l'intensité du froid, rendit notre marche excessivement pénible. Souvent on ne voyait pas à deux pas de soi, et cependant les boulets de l'ennemi sillonnaient notre route et faisaient, de loin en loin, quelques victimes. Personne n'avait le coeur de s'arrêter pour porter secours à celui qui était frappé ... C'est dans cet état d'engourdissement que nous arrivâmes à Pnewo, sur un des affluents du Dnieper qui présentait un passage de rivière difficile. Pour garantir notre passage on y avait construit un blokhaus entouré d'un faible épaulement. Ce réduit étant le seul abri qut n'eût pas été brûlé sur la route que nous venions de parcourir, le 1er corps s'y arrêta pour y passer la nuit; mais l'intérieur ne pouvait contenir qu'une cinquantaine de personnes et l'armée dût camper tout autour. La neige abondante, les arbres éloignés, nous permettaient peu de faire du feu que le vent éteignait. Cette nuit fut terrible à passer ..." (Souvenir d'un officier de l'Empire, t. II, p. 393).
Le 10, le ler Corps atteint Smolensk où l'Empereur est arrivé depuis deux jours. L'armée prend quelque repos dans cette ville et se remet en route dans la direction d'Orscha. Le Maréchal Ney commande l'arrière-garde.
Combat de Krasnoë.
Le 17, à 5 heures du matin, le 1er Corps sort de Smolensk. En arrivant près de Krasnoë, où le Prince Eugène a déjà combattu la veille, le Maréchal Davout se trouve en présence des Russes, qui ont pris position sur la route et les hauteurs voisines. Le Général Compans se met à la tête des débris de sa Division et se fait jour à la baïonnette sous le feu de l'artillerie ennemie. Il rejoint ainsi les tronpes de la Jeune Garde que le Maréchal Mortier conduit à son secours.
Dans Krasnoë, la confusion est à son comble. Quelques Escadrons de Cosaques jettent le désordre dans tout ce qui débouche. Le Général Latour-Maubourg dégage la route en faisant occuper la lisière d'un bois qui la domine et favorise ainsi la retraite de la Garde et du ler Corps.
Au combat de Krasnoë où tout le monde a fait preuve d'héroïsme, le Sous-lieutenant Floury, du 61e, est tué; le Capitaine Brossard reçoit une blessure dont il meurt quatre jours après; le Commandant Duhoux, les Sous-aides chirurgiens Lefebvre et Laviale, le Capitaine Rousseau et le Lieutenant Segond sont blessés.
- Passage de la Bérézina.
A partir de Krasnoë, la Division Compans est désignée pour escorter l'Empereur. Sa brillante conduite pendant la campagne, et aussi l'effectif relativement élevé dont elle dispose encore, lui procurent cet honneur. Elle passe le 19 à Orscha, le 20 à Kokanow, le 21 à Toloczia, le 23 à Sloveni, le 24 à Kroupki, le 25 à Lochnitza et arrive le 26 à Studianka (le Tzar Alexandre fait paraitre, le 24 octobre, un ordre du jour où il est dit : "... Il serait honteux pour nos troupes légères si un seul homme de l'armée ennemie parvenait à retourner en France et ne payait point de sa vie, ou par la captivité, l'audace criminelle d'avoir osé suivre en Russie le coupable agresseur qui se fait un jeu du sang de ses peuples ... On le répète, aucun français ne doit revoir sa patrie. Mais on met particulièrement sur la responsabilité des commandants et chefs des régiments des Cosaques, ainsi qu'aux détachements et partis, d'entourer tellement l'armée française, que Napoléon ne puisse pas échapper de sa personne. On joint pour cela son signalement à cet ordre du jour. Ce signalement doit servir à tous les chefs de district, à toutes les autorités civiles et militaires, à tous les maitres de poste.
Signalement de S. M. l'Empereur Napoléon : la taille épaisse et ramassée ; les cheveux noirs, plats et courts ; la barbe noire et forte rasée jusqu'au-dessus de l'oreille ; les sourcils bien arqués et froncés vers le nez ; le regard atrabilaire ou fougueux ; le nez aquilin, avec des traces continuelles de tabac ; le menton très saillant. Toujours en petit uniforme, sans appareil, et le plus souvent enveloppé d'un petit surtout gris pour n'être pas remarqué. Est sans cesse accompagné d'un mameluck" - Arch. Hist., campagne de Russie).
Le 27, elle franchit la Berezina et s'avance jusqu'à Zambin, où elle est rejointe le lendemain par le reste du 1er Corps. Séparée des autres troupes par une fondrière, peu exposée aux attaques des Russes, elle ne prend aucune part au sanglant combat livré le 28, à Studianka, par les Maréchaux Ney, Oudinot et Victor. Elle reste également en dehors des tristes scènes de désordre qui marquent le passage du célèbre cours d'eau.
- Marche sur Vilna.
Le 29 novembre, le 1er Corps reprend sa route et se porte au-delà de Pletschenitzy. Il arrive le 30 à Kovalevitschi, le ler décembre à Ilia, le 2 à Molodeczno, le 3 à Kelenow, le 4 à Markow, le 5 à Smorgoni, le 6 à Ochmiana, le 8 à Niednicky et le 9 à Vilna. Chaque bivouac ressemble le lendemain à un champ de bataille. Le thermomètre descend certaines nuits jusqu'à 30 degrés au-dessous de zéro. A Vilna, le désordre et l'indiscipline, conséquences fatales des souffrances endurées, détruisent les espérances de bien-être que les quelques survivants de la Grande Armée ont pu concevoir. Napoléon se rend à Paris et cède le commandement au Roi Murat. La retraite recommence, mais on ne compte plus, à partir de ce moment, qu'une poignée d'hommes par Corps d'armée.
- Combat de Kowno.
Les survivants du 61e, groupés autour de leur aigle, prennent rang dans une cohue d'hommes. Le 12, les débris du 1er Corps, atteignent Kowno, où ils perdent leurs derniers bagages (presque tous les papiers de la campagne sont alors capturés par les Cosaques). Quelques hommes armés du 61e, se joignent au 3e Corps, dont la force n'est plus que de 60 hommes et luttent pendant toute la journée du 13, sous les ordres du Maréchal Ney, contre les Russes qui les talonnent.
En sollicitant le zèle de chacun, homme par homme, Ney parvient en vue de Bruce. Il y trouve sa route barrée par du canon. Le brave des braves demande à ses soldats de se faire jour à la baïonnette, mais les forces physiques leur manquent. Désespéré, il profite de la nuit pour redescendre le Niemen et le 16, après avoir pris quelques heures de repos à Zapiesciszki, il regagne Gumbinen avec 150 hommes.
- Marche sur Thorn.
Satisfaits d'avoir reconquis leur territoire, très éprouvés eux-mêmes par le froid et ne sachant pas d'ailleurs s'ils doivent envahir la Prusse, les Russes ne dépassent pas le Niemen. Les quelques troupes du ler Corps se rendent à Thorn où elles arrivent le 31. Le 61e ne compte plus, sous les armes, que 189 combattants conduits par 1e Commandant Labroue.
Nous donnons ci-après la liste des Officiers du 61e qui ont participé à la campagne de Russie. Les pertes subies par le Corps (morts ou prisonniers) sont indiquées en italique. Colonel Bouge ; Major Monteyremard ; Chefs de Bataillon : Paillier, Peltret, Duprè, Dehaupt, Bazy ; Adjudants-majors : Vallet, Fourgeau, Mazard, Tavenet; Capitaine officier payeur, Abeille (Louis) ; premier Porte-aigle, Dumeige ; Chirurgien-major, Levert; Aides-majors, Chaussepied, Astoul, Deyroux; Sous-aides-majors, Vacoussaint, Laviale, Mellet, Roux, Lefèvre, Maurel ; Capitaines, Duhoux, Prudhomme, Soyez, Destor, Monteil, Delcroix, Labroue, Perron, Millet, Jugenelle, Bejet, Charpentier, Andrieu, Maillard, Audibert, Wiss, Morgan, Pagès, Roy, Vasseur, Béraud, Bonnaud, Engremy, Chatelain, Beaurepaire, Brix, Abt, Brossard, Ursleur, Béranger ; Lieutenants Thomas, Feydel, Lavergne (Jean), Allard, Abeille (François), Ricaud, Roudier, Demann, Chausseprat, Pameyer, Mireur, Des Mazis, Boulanger, Lecrosnier, Couhnain, Orillat, Canalis, Roques, Pérabot, Koeblé, Jouglet, Galette, Garnon ; Sous-lieutenants Pignet, Segond, Veyler, Chaves, Martel, Gambier, Leclerc, Perjaud, Ceinturé, Massan, Jehan, Delforge, Molière, Barbier, Prinie, Rodeau, Dumonteil, Floury, Tondut, Houpillard, Burnier, Mille, Fressancourt, Dauboin, Rousseau, Mauriot, Poirson, Vaussy, Lambert, Sureau, Forsten, Barral, Deflandre, Gobelet, Cherain, Catoire, Sordez, Schleiler, Lavergne (Henri), Muller, Bitsh, Cantel, Dumas ; Lieutenant d'artillerie Lerique.
- Retraite sur l'Oder.
Depuis la fin de la campagne de 1807, la ville de Thorn est à peu près déserte. Les débris de la 5e Division sont établis le 2 janvier 1813 à Wroclaweck, où ils vivent plus commodément. Le 13, en prévision d'une attaque de la part des Russes, le Maréchal Davout les rappelle à Thorn. Le 21, trois mille Bavarois, conduits par Gouvion Saint-Cyr, arrivent dans la place. Le 1er Corps rétrograde jusqu'à Custrin, et bientôt toutes les places de la Vistule sont abondonnées.
/ 1812, Demi-brigades de marche, Division de Réserve et 9e Corps de Victor
Le 2 avril 1812, Napoléon décide, pour renforcer sa Grande Armée, de former 4 Demi-brigades de marche à partir de détachements des 5ème bataillons (Dépôts) de Régiments déjà mobilisés. Chaque Demi-brigade à 3 Bataillons de 6 Compagnies chacun. Les Demi-brigades doivent se former le long du Rhin, avant d’être envoyées vers l’Est. Il écrit à Clarke ses instructions et la composition de ces nouvelles unités. "Monsieur le duc de Feltre, je vous ai fait connaitre la formation des 16 demi-brigades provisoires ; mais comme cette organisation n’emploiera pas plus de 40000 conscrits de l’année, il faut que vous me fassiez dresser un état exact du superplus [sic] avec un projet de formation de bataillons de marche supplémentaires à réunir dans le courant de mai pour recruter la Grande Armée. Vous composerez chaque bataillon de marche de 6 compagnies, c'est-à-dire de 900 hommes à peu près. On les dirigerait sur Mayence et Wesel ; de là sur Berlin où ils recevraient les ordres du major général pour leur incorporation définitive.
J’ai actuellement à vous faire connaitre mes intentions relativement à la formation de 4 demi-brigades de marche composées de compagnies tirées des 5es bataillons des régiments qui sont à la Grande Armée. Ces 4 demi-brigades fortes ensemble de 10000 hommes formeront une seconde division de réserve pour la défense de tout le pays entre l’Elbe et le Rhin, et pour le recrutement de la Grande Armée. Je ne leur donnerai pas le nom de demi-brigades provisoires mais bien celui de demi-brigades de marche. Elles seront composées de la manière suivante :
2e demi-brigade de marche.
1er bataillon : 2 compagnies du 48e de ligne à Anvers, 2 compagnies du 108e de ligne à Anvers ; 2 compagnies du 85e de ligne à Coblentz
2e bataillon : 2 compagnies du 30e de ligne à Mayence, 2 compagnies du 33e de ligne à Mayence, 2 compagnies du 21e de ligne à Juliers
3e bataillon : 2 compagnies du 57e de Ligne à Strasbourg, 2 compagnies du 61e de ligne à Worms, 2 compagnies du 111e de ligne à Spire
Cette demi- brigade se réunira à Cologne ...
Les 2 premières demi-brigades de marche comprendront ainsi : les 16e régiments du 1er corps ...
Vous nommerez un major en second pour commander chaque demi-brigade. Ces majors se mettront en marche avant le 8 avril pour parcourir les différents dépôts. Tous les dépôts qui sont sur le Rhin, comme le 7e léger, etc. embarqueront leurs détachements sur ce fleuve. Vous nommerez un général de brigade ou même un colonel pour être chargé, comme inspecteur, de la formation de ces quatre demi-brigades, qui se composeront ainsi de douze bataillons ou de 9.000 à 10.000 hommes. Le général commandant la 25e division répartira ces 10.000 hommes dans des cantonnements entre Cologne, Juliers, Aix-Ia-Chapelle et Clèves ...
Formation des demi-brigades de marche de la Grande Armée
Demi-brigades du 1er corps ...
2e demi-brigade 1ère division de réserve de la Grande Armée 2400
1er bataillon :
2 compagnies du 5e bataillon du 48e de ligne (dépôt à Anvers) : 272 conscrits du Pas-de-Calais, 234 de la Somme ; total 506 ; 206 conscrits de 1812 non employés dans cette organisation.
2 compagnies du 5e bataillon du 108e de ligne (dépôt à Anvers) : 557 conscrits de Mayence ; total 557 ; 257 conscrits de 1812 non employés dans cette organisation.
2 compagnies du 5e bataillon du 85e de ligne (dépôt à Coblentz) : 524 conscrits du Bas-Rhin ; total 524 ; 224 conscrits de 1812 non employés dans cette organisation.
2e bataillon :
2 compagnies du 5e bataillon du 30e de ligne (dépôt à Mayence) : 554 conscrits de la Moselle ; total 554 ; 254 conscrits de 1812 non employés dans cette organisation.
2 compagnies du 5e bataillon du 33e de ligne (dépôt à Mayence) : 488 conscrits du Loir-et-Cher ; total 488 ; 188 conscrits de 1812 non employés dans cette organisation.
2 compagnies du 5e bataillon du 21e de ligne (dépôt à Juliers) : 497 conscrits du Puy-de-Dôme ; total 497 ; 197 conscrits de 1812 non employés dans cette organisation.
3e bataillon :
2 compagnies du 5e bataillon du 57e de ligne (dépôt à Strasbourg) : 506 conscrits du Haut-Rhin ; total 506 ; 206 conscrits de 1812 non employés dans cette organisation.
2 compagnies du 5e bataillon du 61e de ligne (dépôt à Worms) : 273 conscrits du Haut-Rhin, 243 du Bas-Rhin ; total 513 ; 216 conscrits de 1812 non employés dans cette organisation.
2 compagnies du 5e bataillon du 111e de ligne (dépôt à Spire) : 212 conscrits de la Doire, 462 de Marengo ; total 674 ; 374 conscrits de 1812 non employés dans cette organisation ..." (Picard E. et Tuetey L. : « Correspondance inédite de Napoléon 1er conservée aux Archives de la Guerre », Paris, 1913, t. 5, lettre 7055 (extrait d’un ordre de l’Empereur daté de Saint-Cloud le 2 avril 1812) ; Correspondance générale de Napoléon, t.12, lettre 30371 - intégrale).
/ Campagne d'Allemagne, 1813.
- Réorganisation du Régiment.
le 17 janvier 1813, l'Empereur écrit, depuis Paris, au Général Clarke, Ministre de la Guerre : "Monsieur le duc de Peltre, il ne faut rien prendre de la conscription 1813 dans les 40 régiments dont l'état suit, savoir : ... 61e ... Total, 40 régiments.
Il faut donc, après que le corps d'observation de l'Elbe, le corps d'observation d'Italie et les 2 corps d'observation du Rhin seront partis, pouvoir former un corps de réserve avec ce qui existe dans les 40 dépôts ci-dessus désignés, avec ce qu'ils reçoivent de la conscription de 1813 et ce qu'ils vont recevoir sur la levée des 100 000 hommes.
Ce corps de réserve serait composé de 120 bataillons fournis par les 40 régiments ci-dessus. Il faut y ajouter un bataillon de marche des 8e et 18e légers ; un autre du 3e et du 105e ; d'autres bataillons de marche, formés de 2 compagnies tirées des 34 dépôts de la Grande Armée ; plus 5 bataillons de marche de la 32e division militaire. Cela ferait donc environ 150 bataillons ou une réserve de 120 000 hommes qui partirait avec les cadres des 5e et 6e bataillons et avec les cadres qui reviennent de la Grande Armée.
P.S. Je vous prie d'observer que cette lettre dérange quelque chose à l'approuvé que j'ai donné, dans mes lettres précédentes, aux dispositions faites par les bureaux pour compléter les régiments provisoires et différents corps.
Aussitôt que le chef de division aura terminé, il m'apportera ce travail" (Correspondance générale de Napoléon, t.13, lettre 32318).
Le 27 janvier 1813, l'Empereur écrit, depuis Fontainebleau, au Général Clarke, Ministre de la Guerre : "Monsieur le duc de Feltre, je reçois votre lettre du 26 (bureau du mouvement des troupes). Donnez des ordres au général Doucet ... que lorsque le 61e et le 125e qui arrivent le 23 et le 24 se seront reposés 4 jours, il les envoie également à Leipzig sous les ordres du même général ... Par ce moyen, ce général de brigade aura 6 bataillons du 1er corps bien complétés avec les cadres des seconds, et il les fera reposer à Leipzig 3 ou 4 jours, leur procurera les souliers, et tout ce dont ils ont besoin pour réparer leur habillement, et il se mettra avec eux immédiatement en marche pour Wittenberg sur l'Elbe, où il attendra des ordres de son général de division ..." (Correspondance générale de Napoléon, t.13, lettre 32514).
Le même 27 janvier 1813, l'Empereur écrit, depuis Fontainebleau, à Eugène Napoléon, Vice-Roi d’Italie, commandant en chef la Grande Armée, à Posen :"Mon Fils, le ministre de la guerre vous a écrit pour vous faire connaître que les détachements de conscrits de chacun des vingt-huit régiments de la Grande Armée qui doivent se rendre à Erfurt, où ils trouveront les cadres des 2e bataillons, ce qui complétera ces vingt-huit bataillons, partent de France ; les premiers, c'est-à-dire les détachements des 30e et 33e, le 10 février, et ils arriveront le 19 à Erfurt ; le dernier, c'est-à-dire celui du 13e d'infanterie légère, arrivera le 17 mars. Avant le 1er mars, les bataillons du 30e et du 33e, celui du 61e et celui du 111e, celui du 85e celui du 18e et celui du 57e seront arrivés, ce qui fera sept bataillons. Ordonnez à un des généraux de brigade du 1er corps de prendre sous son commandement ces sept bataillons et de se porter à Wittenberg, où ils pourront être arrivés du 1er au 5 mars ..." (Mémoires du Prince Eugène, t.8, page 274 ; Correspondance de Napoléon, t. 24, 19523 ; Correspondance générale de Napoléon, t.13, lettre 32518).
Le 6 février 1813, le Maréchal Davout écrit, depuis Custrin, au Vice-Roi d’Italie : "… J'adresse à Votre Altesse Impériale le duplicata de ma dépêche d'hier. Journellement il arrive des soldats qui ont traversé la Prusse après s'être échappés des mains de l'ennemi. Tous déclarent que les levées d'hommes et de chevaux dans les lieux occupés par l'ennemi ont lieu avec la plus grande activité. Il en est de même dans ce pays-ci. Un homme du 61e que j'ai questionné dit qu'il avait vu à Schwedt une grande quantité de chevaux marqués pour le compte des Prussiens. Il a rencontré des convois de recrues se dirigeant sur Graudenz et Colberg …" (Mazade C. (de) : « Correspondance du Maréchal Davout, prince d'Eckmühl : ses commandements, son ministère, 1801-1815 », t. 3, p. 491, lettre 1186).
Le 8 février 1813, le Maréchal Davout se rend à Stettin avec les troupes dont il a le commandement. Le 14, il rétrograde sur l'Elbe et occupe Magdebourg. Les débris du 61e constituent deux Compagnies (Capitaines Beaurepaire et Charpentier) qui restent à Stettin et à Damm, sous les ordres du Commandant Labroue.
Le 13 février 1813, l'Empereur écrit, depuis Paris, à Eugène, Vice-Roi d’Italie, commandant en chef de la Grande Armée : "Mon fils, le général Lauriston devant être du 15 au 20 février à Magdebourg, il devient important que vous donniez ordre au prince d'Eckmühl de revenir à Stettin. Il y a de l'anarchie dans cette place, et on y éprouve le besoin d'une autorité supérieure. D'ailleurs le 2e bataillon du 30e et celui du 33e seront arrivés à Erfurt le 19 février. Les 2es bataillons des 23e, 57e, 61e, 85e et 111e y arriveront le 22, le 25, le 24 et le 28 février. Voilà donc tout de suite une augmentation de 4,000 hommes pour Stettin. Vous avez reçu la lettre par laquelle je vous instruis de quelle manière mon intention est que ces bataillons soient dirigés sur Stettin ; mais vous pouvez donner ordre d'y venir de suite, si vous n'y voyez pas d'inconvénient. Je pense effectivement qu'il est très important que nous ayons le plus tôt possible entre Stettin et la Poméranie et sur cette place une vingtaine de mille hommes. Or, dans le courant de mars, les 16 bataillons seront tous dans cette place ..." (Mémoires du Prince Eugène, t. 8, page 347 ; Correspondance générale de Napoléon, t.13, lettre 32762).
Trois Bataillons du 61e, les 2e, 4e et ler, réorganisés successivement avec les ressources du Dépôt et de nouvelles levées, servent à former, les 23 février, 4 mars et 15 avril, par leur groupement avec les Bataillons correspondants du 111e, autant de Régiments provisoires portant les numéros 36, 36 bis et 36 ter. De ces Régiments, que l'on destine à la garde de l'Elbe, le premier est placé à Magdebourg ; les deux autres sont à Wesel.
Le Duc de Padoue arrive à Erfurt le 23 février 1813. Aussitôt arrivé, il se met à l'œuvre pour organiser les seconds Bataillons des 3e, 33e, 61e, 111e de Ligne. Il les dirige sur Leipzig et sur Wittenberg. Il opère de la même manière pour les Bataillons des Régiments illyriens, croates, suisses, portugais et Joseph Napoléon, qui sont non-seulement complétement formés, mais pourvus d'effets de linge et chaussure, d'habillements, de munitions de guerre. Le Duc a soin de les faire partir au fur et à mesure de leur organisation définitive et d'en composer des colonnes de marche, se rendant à leur corps respectif (Du Casse A. : "Le Général Arrighi de Casanova, Duc de Padoue", 1866, t. 1, p. 278).
Le 27 février 1813, l'Empereur écrit, depuis Paris, à Eugène, Vice-Roi d'Italie, commandant en chef de la Grande Armée : "Mon fils, le 2e bataillon du 17e de ligne, celui du 21e et celui du 25e doivent être arrivés à Cassel le 25 février ; celui du 56e a dû arriver le 20. Ils peuvent, s'ils ne l'ont déjà fait, se mettre en marche sans délai pour se rendre à Wittenberg.
Les 30e et 33e doivent être à Erfurt le 19 février, le 57e le 28 février, le 61e le 23, le 85e le 24, le 18e le 28, le 111e le 28. Ces sept bataillons d'Erfurt, avec les quatre premiers de Cassel, font onze bataillons qui peuvent être bientôt réunis sur l'Elbe ...
Ainsi, lorsque vous recevrez cette lettre, les 28 bataillons hormis cinq, auront dépassé Erfurt et seront dirigés sur Wittenberg ou Spandau, c'est-à- dire suivant l'emplacement de leurs corps respectifs. Prescrivez des mesures pour qu'ils partent réunis suivant les circonstances.
Le prince d'Eckmühl pourrait les réunir à Dessau ou à Wittenberg.
Ces jeunes conscrits doivent être spécialement placés dans les forteresses" (Correspondance générale de Napoléon, t.13, lettre 32901).
Le même 27 février 1813, l'Empereur écrit également au Général Lauriston, commandant le Corps d'Observation de l'Elbe : "Vingt-huit deuxièmes bataillons du 1er et 2e corps de la Grande Armée se réunissent à Erfurt et Cassel, savoir :
... à Erfurt le 30e, 33e le 19 février ; 57e le 28, 61e le 23, 85e le 24, 18e le 28, 111e le 22 ; 26e de ligne le 1er mars, 24e le 2, 4e de ligne le 6, 12e le 8, 48e le 10, 7e de ligne le 9, le 37e le 11, le 72e le 8, le 108e le 11, le 2e le 10, le 33e le 12, le 13e le 17, le 19e le 16, le 46e le 15, le 15e le 15, le 93e le 13 ...
Les 6 bataillons d'Erfurt doivent se rendre à Dessau ou Wittenberg. Mettez-vous en correspondance avec le général commandant à Erfurt et avec le prince d'Eckmühl qui a été chargé par le vice-roi de réunir ces bataillons afin que, d'après les ordres du vice-roi, ils soient dirigés sur Berlin, Spandau et Stettin ..." (Correspondance générale de Napoléon, t.13, lettre 32905).
Le 5 mars 1813, l'Empereur écrit, depuis Paris, à Eugène, Vice-Roi d’Italie, commandant en chef la Grande Armée : Mon fils, les deuxièmes bataillons du 17e de ligne, du 21e et du 25e doivent être arrivés à Cassel le 25 février ; celui du 56e a dû arriver le 20 ; ils peuvent, s'ils ne l'ont déjà fait., se mettre en marche sans délai pour se rendre à Wittenberg.
Les 30e et 33e doivent être à Erfurt, le 19 février ; le 57e, le 28 ; le 61e, le 25 ; le 85e, le 24 ; le 18e, le 28 ; le 111e, le 22. Ces 7 bataillons d'Erfurt avec les 4 premiers de Cassel font 11 bataillons qui peuvent être presque déjà réunis sur l'Elbe. Le 11e léger a dû arriver le 17 février à Cassel ; il doit être maintenant à Spandau.
Le 26e léger doit arriver à Erfurt, le 1er mars ; le 24e léger le 2 ; le 4e de ligne, le 6 ; le 12e de ligne, le 8 ; le 48e de ligne, le 10 ; le 7e léger, le 9 ; le 37e de ligne, le 11 ; le 72e de ligne, le 8 ; le 108e de ligne, le 9 ; le 2e de ligne, le 10 ; le 33e·de ligne, le 12. Quant au 13e léger, il ne pourra arriver à Erfurt que le 17 mars ; le 19e, le 16 ; le 46e, le 15 ; le 15e, le·15 ; le 93e, le 13.
Ainsi, lorsque vous recevrez cette lettre, les 28 bataillons, hormis 5, auront dépassé Erfurt et seront dirigés sur Willenberg ou Spandau, c'est-à-dire suivant l'emplacement de leurs corps respectifs.
Prescrivez les mesures pour qu'ils partent réunis suivant les circonstances. Le prince d'Eckmühl pourrait les réunir à Wittenberg ou à Dessau. Ces jeunes conscrits doivent être spécialement placés dans les forteresses" (Mémoires du Prince Eugène, t. 8, page 394 ; Correspondance générale de Napoléon, t.13, lettre 33016).
Le 6 mars 1813, l'Empereur écrit, depuis Paris, au Général Clarke, Ministre de la Guerre : "Monsieur le duc de Feltre, je vous renvoie la dépêche du duc de Padoue. Faites-lui connaître que les 16 bataillons du 1er corps se réunissent à Wittenberg, pour garder cette ville sous les ordres d'un général de division et de 2 généraux de brigade, et que les 12 bataillons du 2e corps se réunissent à Dessau pour y garder le pont, également sous les ordres d'un général de division et de 2 généraux de brigade, qu'il vous fasse connaître ce qui a été exécuté de ces différentes dispositions.
Les 16 seconds bataillons du 1er corps formeront 8 régiments provisoires de la manière suivante :
... 35e régiment provisoire : 25e de ligne, 2e bataillon, 57e de ligne, idem.
36e régiment provisoire : 61e de ligne, idem, 111e de ligne, idem ...
Vous donnerez ordre aux 8 majors de ces seize régiments de se rendre en poste à Erfurt et de là à Wittenberg.
Donnez ordre aux seize colonels de se rendre à leurs dépôts. Vous disposerez des majors en second pour les faire majors comme je l'ai ordonné précédemment ..." (Correspondance générale de Napoléon, t.13, lettre 33041).
Le 9 mars 1813, le Maréchal Davout écrit, depuis Leipzig, au Vice-Roi d’Italie : "… Vous avez, Monseigneur, organisé une division que vous estimez à 10,000 hommes, que doit commander le général Gérard. Je propose à Votre Altesse Impériale de faire porter tout de suite cette division à Dresde et environs, et d'y diriger en même temps les 7es bataillons du 1er corps qui sont en ce moment à Leipzig, savoir les 30e, 33e, 61e, 85e, 111e, 57e et 21e.
Ces 7 bataillons sont forts en tout d'environ 5,000 hommes, chacun étant de plus de 700. On réunirait par ce moyen aux environs de Dresde un corps de 20,000 hommes, y compris celui du général Reynier, et non compris les 2 ou 3,000 Bavarois et la garnison de Torgau ...
En demandant à Votre Altesse Impériale de diriger sur Dresde les 7es bataillons du 1er corps, je sais qu'il ne serait pas prudent de mettre en première ligne des troupes aussi neuves, mais cela n'en fait pas moins nombre pour l'ennemi, à qui cette marche d'ailleurs fera supposer que tout ce qui appartient au 1er corps est destiné à marcher sur ce point.
Si l'ennemi se portait avec des forces majeures sur Dresde, ce qui ne pourrait avoir lieu que dans la supposition où les Prussiens se réuniraient aux Russes, après avoir profité de toutes les positions pour disputer le passage, je prendrai toutes les mesures nécessaires pour faire sauter le pont ..." (Mazade C. (de) : « Correspondance du Maréchal Davout, prince d'Eckmühl : ses commandements, son ministère, 1801-1815 », t. 3, p. 526, lettre 1216).
Le 11 mars 1813, le Maréchal Davout écrit, depuis Leipzig, à l’Empereur : "Sire, le Vice-Roi m'a remis la lettre que Votre Majesté m'a fait l'honneur de m'écrire le 2 mars. Elle prévoyait l'évacuation de Berlin, mais il m'a paru que l'on pouvait et que l'on devait garder la ligne de l'Elbe, que déjà l'on commençait à quitter. J'ai donc cru devoir faire au Vice-Roi les observations dont je joins ici copie. Son Altesse Impériale les a prises en considération et m'a donné l'ordre de me rendre à Dresde, en mettant à ma disposition le corps du général Reynier, les Bavarois et la 31e division commandée par le général Gérard, ce qui fait en tout une vingtaine de mille hommes …
Dans les 20,000 hommes je comprends les bataillons du 1er corps, des 30e, 33e, 57e, 61e, 85e et 111e régiments qui ont été organisés à Erfurt, qui se trouvent à Leipzig et qui sont dirigés sur Dresde. Les 10 autres bataillons du 1er corps, ainsi que ceux du 2e dont il y en avait 5 ici, vont être dirigés sur Magdebourg …" (Mazade C. (de) : « Correspondance du Maréchal Davout, prince d'Eckmühl : ses commandements, son ministère, 1801-1815 », t. 3, p. 532, lettre 1219).
Le 12 mars 1813, l'Empereur écrit, depuis Trianon, au Maréchal Kellermann, commandant le Corps d'Observation du Rhin : "Mon cousin, j'ai ordonné que les 4es bataillons des 28 régiments qui forment le 1er et le 2e corps de la Grande Armée se rendissent à Wesel afin d'avoir des forces dans la 25e division militaire. Vous avez dans la 26e division militaire le 30e, le 33e, le 61e, le 85e et le 111e. Vous avez dans la 5e division où vous commandez je crois, le 18e, le 57e et le 7e léger. Vous avez dans la 25e division où vous commandez également le 21e de ligne, le 56e et le 11e léger. Vous avez donc dans l’étendue de votre commandement 11 régiments. Donnez ordre que ces 11 4es bataillons bien complets en officiers et sous-officiers partent de leur dépôt pour se rendre à Wesel complétés à 840 hommes, habillés et bien armés ; ceux qui sont dans la 5e et dans la 26e division militaire s'embarqueront sur le Rhin afin d'arriver le plus promptement possible.
Le général Loison aura soin de les former en régiments provisoires 2 à 2. Il devra prendre garde à ne pas confondre les régiments du 1er corps avec ceux du 2e. Par exemple le 56e et le 11e léger sont du 2e corps. Il peut en faire un régiment provisoire. Les autres étant du 1er corps, il peut les réunir 2 à 2 à mesure de leur arrivée. Passez vous-même la revue des deux qui sont à Mayence. Envoyez par des estafettes extraordinaires des ordres pour le complètement de ces 4es bataillons et leur départ. Si on ne pouvait les compléter à 840 hommes, on ne ferait partir d'abord que 4 compagnies complétées à 560 et les deux dernières compagnies partiraient aussitôt qu'on aurait pu les compléter.
Il serait nécessaire qu'on me présentât des nominations pour toutes les places vacantes. Aussitôt que ces régiments seront formés à Wesel, le général Loison dirigera ceux du 1er corps sur Osnabrück et Brême et ceux du 2e sur Minden et Munster. En attendant que les deux généraux de division et les quatre généraux de brigade soient arrivés pour commander ces deux divisions, dont une qui sera formée des 16 4es bataillons du 1er corps et une autre que les 12 4es bataillons du 2e corps composeront, vu que je fais donner par le ministre de la Guerre dans toute la division l'ordre que je vous adresse ici directement afin de gagner du temps sur les bureaux, en attendant dis-je que ces généraux soient arrivés, le général Loison attachera deux généraux de brigade ou officiers supérieurs à l'une ou l'autre de ces divisions pour les commander. Les régiments provisoires doivent être commandés par les majors. Mon intention est que tous les majors de ces 28 régiments soient employés savoir : 14 à commander les 14 régiments provisoires formés des seconds bataillons qui ont été organisés à Leipzig et 14 à commander les nouveaux régiments provisoires qui se forment à Wesel ; les colonels devant rester à leur dépôt, de s'y reposer et de réorganiser leur régiment" (Correspondance générale de Napoléon, t.13, lettre 33174).
- Ouverture des hostilités.
Pendant que l'armée française se reconstitue, ses ennemis ne restent pas inactifs. L'effervescence des Allemands devient surtout considérable. Le 15 février, les deux Compagnies du Commandant Labroue sont bloquées. Peu de temps après, Hambourg est évacué à la suite d'une insurrection. Le bas Elbe est envahi par les Suédois de Bernadotte (le Maréchal Bernadotte a été nommé Prince royal de Suède en 1811). La Prusse accède à la coalition.
- Reprise de Hambourg.
Le 36e provisoire (bis) comprenant le 4e Bataillon du 61e, fait partie de la 2e Division du 1er Corps, commandée par le Général Dumonceau. Vers le 1er avril, cette Division quitte Wesel pour se porter sur Brême par Osnabrück.
Le 25, l'armée française prend l'offensive. Tandis que Napoléon, par les batailles de Lutzen (2 mai 1813) et de Bautzen (20-21 mai 1813), refoule jusqu'à l'Oder les Prussiens de Blücher et les Russes de Wittgenstein, les Maréchaux Ney et Davout se rendent maîtres de la rive gauche de l'Elbe par les combats de Weissenfels (29 avril 1813) et de Doemitz.
Le 8 mai 1813 à 11 heures du matin, le Maréchal Davout écrit, depuis Bremen, au Général Vandamme : "J'ai reçu vos quatre lettres du 7 à différentes heures. C'est le manque de fonds qui a arrêté le reste de l'organisation du 17e. Je viens d'en faire donner sous ma propre caution. J'espère que sous une huitaine de jours tout sera prêt ...
Le général Dumonceau ne nous a pas encore donné des nouvelles du général Sébastiani. Est-il à Salzwedel ? Occupe-t-il Hitzacker ? Le général Dumonceau a-t-il envoyé des ordres au bataillon qui, de Niembourg, a été dirigé sur Soltau, pour y être à la disposition du général Sébastiani ?
2 compagnies du 21e sont parties ce matin pour le rejoindre ; 2 du 61e partiront demain ; 2 autres du 17e après-demain ; et 2 du 30e ou 15e après-demain. Toutes ces compagnies seront pourvues d'effet de campement ..." (Mazade C. (de) : « Correspondance du Maréchal Davout, prince d'Eckmühl : ses commandements, son ministère, 1801-1815 », t. 4, p. 80, lettre 1301).
Le 9 mai 1813 à 10 heures du matin, le Maréchal Davout écrit, depuis Bremen, au Général Vandamme : "… Le 61e arrivera demain. J'ai vu un officier qui m'a assuré que ce bataillon ne savait même pas charger les armes. Il sera exempt d'exercices pour pousser son instruction avec rapidité. On le fera tirer à la cible, aussitôt que les soldats auront appris à charger leurs armes. J'enverrai au fort de Rothembourg quelques munitions de réserve d'artillerie et d'infanterie pour remplacer celles que vous seriez dans le cas de consommer ..." (Mazade C. (de) : « Correspondance du Maréchal Davout, prince d'Eckmühl : ses commandements, son ministère, 1801-1815 », t. 4, p. 86, lettre 1305).
Une garnison du 1er Corps est replacée dans Hambourg.
- Armistice de Pleiswitz.
Sur les instances du Ministre autrichien de Metternich, Napoléon signe, le 4 juin, l'armistice de Pleiswitz. Il en profite pour faire rentrer les Régiments dans leur composition normale. Le 61e se reconstitue à Bergedorf et Bleckède.
Le 7 juin 1813, l'Empereur écrit, depuis Bunzlau, au Prince de Neuchâtel et de Wagram, Major général de la Grande Armée, à Dresde : "Donnez ordre que de Wittenberg la 1re division se dirige sur Magdebourg où elle sera jointe par les quatre bataillons qui lui appartiennent : par ce moyen, le 1er corps, sous les ordres du prince d'Eckmühl, aura trois divisions, c'est-à-dire 16 régiments, ayant chacun ses 1er, 2e et 4e bataillons.
Vous lui ferez connaître qu'il ne doit pas perdre un moment pour supprimer les bataillons provisoires et réunir ensemble les 1er, 2e et 4e bataillons. Il fera revenir les colonels, les aigles et la musique des régiments. Alors le 1er corps sera composé ainsi qu'il suit ...
3e division du 1er corps formant la 3e division de l'armée
3 bataillons du 15e d'infanterie légère, 3 61e de ligne, 3 48e de ligne, 3 108e de ligne, 3 111e de ligne. 15 bataillons ...
Faites connaître au prince d'Eckmühl que lorsque je connaîtrai la situation de son corps, je me déciderai ou à lui former une 4e division avec ces bataillons ou à les incorporer dans ses 3 premières divisions afin que leurs bataillons soient bien complets ; faites-lui connaître que chaque division doit être de 3 brigades et avoir deux batteries à pied par division, deux batteries à cheval pour le corps et 2 batteries de 12 pour la réserve du corps ...
Vous ferez connaître au prince d'Eckmühl que les trois divisions qui composent le 1er corps, formant 48 bataillons avec 76 pièces de canon, doivent être prêts au 1er juillet à entrer en campagne, laissant la division de Hambourg pour la garde de Hambourg ..." (Correspondance générale de Napoléon, t.13, lettre 34510).
Le 18 juin 1813, l'Empereur écrit, depuis Dresde, au Maréchal Berthier, Major-général de la Grande Armée : "Mon cousin, donnez ordre que la compagnie du 59e faisant partie du 2e bataillon de garnison à Magdebourg, se rende au 3e corps pour être incorporée dans son bataillon. Ses officiers et sous-officiers retourneront au dépôt. Donnez ordre que la compagnie du 24e de ligne faisant partie du même bataillon soit incorporée dans le bataillon du 12e de ligne qui est à Magdebourg ou à Wittenberg. Celle du 81e le sera dans le 17e, celle du 9e dans le 30e, celle du 35e dans le 33e, celle du 15e dans le 57e et celle du 106e dans le 61e. Cette incorporation aura lieu à Magdebourg ou à Wittenberg ou chacun de ces régiments a un bataillon. Les cadres, officiers, sous-officiers et tambours retourneront en Italie. Donnez avis de cette mesure au ministre de la Guerre"(Correspondance générale de Napoléon, t.13, lettre 34803).
Le même 18 juin 1813, l'Empereur écrit encore, depuis Dresde, au Prince de Neuchâtel et de Wagram, Major général de la Grande Armée, à Dresde : "Mon Cousin ... Les 2es bataillons des 15e léger, 48e, 61e, 108e et 111e de ligne, partiront vingt-quatre heures après la réception du présent ordre, soit de Wittenberg, soit de Magdeburg ; ils formeront une seule brigade et se rendront à Hambourg. Il y aura donc à Hambourg :
1° La 50e division ou division de Hambourg, qui est aujourd'hui de 5,000 hommes ;
2° La 3e division, savoir : 15e d'infanterie légère, quatre bataillons ; 48e, 61e, 108e, 111e d'infanterie de ligne, seize bataillons ; total, vingt bataillons ;
3° La division bis ...
Le prince d'Eckmühl formera la 3e division, qui se trouvera ainsi à trois brigades. En conséquence, il aura sous ses ordres, à Hambourg, la division de Hambourg, qui, après l'incorporation des bataillons de marche, doit être, comme je l'ai dit plus haut, de 5,000 hommes ; la 3e division, c'est-à-dire vingt bataillons ou 12,000 hommes ; la 3e division bis, dix bataillons ou 6,000 hommes ; total, 23,000 hommes ...
Donnez des ordres pour que le prince d'Eckmühl réunisse à Hambourg et Harburg toute la division de Hambourg ; qu'il réunisse sa 3e division de vingt bataillons en avant de Hambourg ; qu'il réunisse la 3e division bis à Luneburg, en laissant deux bataillons sur la côte ; qu'il borde toute la rive gauche de l'Elbe. Mon intention est qu'avec ce corps d'armée et les Danois il puisse prendre l'offensive dans le Mecklenburg, aussitôt que l'armistice viendrait à être rompu ...
Comme la 3e division est actuellement de vingt bataillons, il est maître d'y mettre le général Loison et de mettre le général Thiebault à la 3e bis. Je le laisse maître également de scinder la 3e division, de manière à avoir trois divisions de dix bataillons chacune, mais ce ne serait que pour le service et non pour l'organisation : ou bien il peut mettre quatre bataillons de la 3e division avec la 3e bis, de manière que la 3e division se trouve être de seize bataillons et la 3e bis de quatorze ..." (Correspondance de Napoléon, t. 25, 20145 ; Correspondance générale de Napoléon, t.13, lettre 34816).
Le 19 juin 1813, l'Empereur écrit, depuis Dresde, au Maréchal Kellermann, commandant de la cavalerie du 3e Corps : "Mon cousin, l'état-major vous fera connaître mes nouvelles dispositions relativement au 1er corps d'armée, mais comme il importe que vous les connaissiez sans perdre de temps, je vous en écris directement. J'ai divisé le 1er corps en deux parties ; la première comprend la 1re division, composée des 1er, 2e et 4e bataillons des 7e léger, 12e, 17e, 21e et 30e de ligne : et la 2e division composée des 1er, 2e et 4e bataillons des 13e léger ; 25e, 33e, 57e et 85e de ligne. Ces deux divisions se réunissent à Magdebourg sous les ordres du général Vandamme. La 3e division, composée des 1er, 2e et 4e bataillons des 15e léger ; 48e, 61e, 108e et 111e se réunit à Hambourg sous les ordres du prince d'Eckmühl, ainsi que la 3e Division bis, composée des 15 troisièmes bataillons des 15 régiments ci-dessus ...
Dirigez en conséquence, la marche des troupes qui doivent rejoindre ces divisions. Les 10 troisièmes bataillons des régiments de la 1re et 2e division faisant partie de la 3e division bis ne tarderont pas à arriver. Dirigez toujours sur Brême tout ce qui appartient à ces bataillons ...
J'ai ordonné que les aigles, la musique, les colonels et les majors des régiments des 1re, 2e et 3e divisions se rendent à leurs corps. Dirigez-les tous sur Magdebourg ou sur Hambourg, selon les dispositions ci-dessus. Ayez soin pour éviter des marches inutiles qu'on les prévienne à leur passage à Mayence ou à Wesel. Il est probable que les colonels et majors voyageront en poste ...
Ouvrez aux dépôts des 28 régiments des 1er et 2e corps pour savoir si leurs colonels, leurs musiques et leurs aigles sont partis ..." (Correspondance générale de Napoléon, t.13, lettre 34865).
Le 25 juin 1813, l'Empereur écrit, depuis Dresde, au Général Clarke, Ministre de la Guerre : "Monsieur le duc de Feltre, je vous ai déjà écrit, et je vous l'écris de nouveau à cause de son importance, qu'il est indispensable que les colonels, les majors, la musique et les aigles des régiments qui forment la 3e division du 1er corps, se rendent sans délai à Hambourg. Cette division se compose comme vous savez des 15e léger, 48e, 61e, 108e et 111e de ligne.
Les 3es bataillons de ces régiments qui font partie de la 3e division bis, vont rejoindre cette division, ce qui la portera à 20 bataillons, et à 4 bataillons par régiment. Ces 5 régiments formeront 3 brigades. Il faudra donc qu' il y ait 5 colonels et 5 majors présents ..." (Correspondance générale de Napoléon, t.13, lettre 35006).
Le 27 juin 1813, le Maréchal Davout écrit, depuis Hambourg, au Général Vandamme : "Je vous adresse un ordre du major général. Je vous préviens que j'ai donné tous ceux nécessaires pour que les intentions de l'Empereur soient remplies.
Le 1er juillet, les 10 bataillons de la 2e division arrivent à Lunebourg avec leurs deux batteries d'artillerie.
Le 1er juillet, 9 bataillons seulement, au lieu de 10, de la 1re division arrivent également à Lunebourg, avec deux batteries d'artillerie à pied ...
Il manquera également à Lunebourg un bataillon du 7e régiment d'infanterie légère. Ce bataillon fournissait des postes sur la rive gauche de l'Elbe, depuis Schackenbourg jusqu'à Hope. Un bataillon du 61e est en marche pour relever ces postes aussitôt qu'ils le seront ...
Le bataillon du 61e, parti de Magdebourg, et qui devait passer à Lunebourg, ainsi que les cinq autres, pour venir ici, est celui qui va relever les postes du bataillon du 7e d'infanterie légère. Les ordres lui ont été donnés" (Mazade C. (de) : « Correspondance du Maréchal Davout, prince d'Eckmühl : ses commandements, son ministère, 1801-1815 », t. 4, p. 197, lettre 1409).
Le Colonel Bouge, fait prisonnier, a pour successeur le colonel Pailhès, qui lui-même est appelé à d'autres fonctions et remplacé, le 28 juin, par le Colonel Ricard (Ricard (Jacques), né A Château-Arnoux (Basses-Alpes), en 1769, entré au service comme Lieutenant au 1er Bataillon des Alpes en 1791, Capitaine en 1796, Chef de Bataillon en 1808, Major en 1811, Colonel du 61e le 28 juin 1813, passe au 62e le ler juin 1815, est placé en demi-solde en 1816 et retraité en 1821. Il témoigna d'une éclatante bravoure à la bataille de Wagram).
Le Régiment est tout d'abord embrigadé avec le 111e.
L'effectif du 61e est au 1er juillet de 61 Officiers et de 2159 bommes. Les Commandants Duhoux, Peltret et Andrieux sont â la tête des Bataillons. Le 3e Bataillon, dont la réorganisation a subi du retard faute d'éléments, ne peut tout d'abord mettre en ligne que sa Compagnie de Grenadiers et deux Compagnies de Fusiliers, qui arrivent à l'armée vers la fin du mois, sous la conduite du Commandant Saurie.
Le 16 juillet 1813, le Maréchal Davout écrit, depuis Hambourg, au Prince de Neuchâtel, Major général de la Grande Armée : "… Je commence mon mouvement pour réunir la 40e division à Dahlembourg. Deux bataillons du 30e y viennent de Werben, et deux bataillons du 61e y vont de Bergedorf. J'y dirige également les 3es bataillons de ces régiments qui me sont annoncés d'Osnabrück.
J'ai fait partir avec ces 1ers bataillons une batterie de 8 pièces ..." (Mazade C. (de) : « Correspondance du Maréchal Davout, prince d'Eckmühl : ses commandements, son ministère, 1801-1815 », t. 4, p. 228, lettre 1442).
Le 31 juillet 1813, le Maréchal Davout écrit, depuis Hambourg, au Prince de Neuchâtel, Major général de la Grande Armée : "Monseigneur, j'ai l'honneur d'informer Votre Altesse qu'il m'a été fait rapport par un des commandants du 61e régiment que dans la journée du 26, à six heures du soir, les chasseurs prussiens ont tiré deux coups de carabine sur une ordonnance de lanciers entre Neu-Darchow et Bleckède ..." (Mazade C. (de) : « Correspondance du Maréchal Davout, prince d'Eckmühl : ses commandements, son ministère, 1801-1815 », t. 4, p. 244, lettre 1454).
Au commencement du mois d'août, on réunit le 61e au 30e pour former la 1re Brigade (Général Gengoult), de la 40e Division (Général Thiébault et plus tard Vichery), du 13e Corps (Maréchal Davout).
Le 11 août 1813, le Maréchal Davout écrit, depuis Hambourg, à l’Empereur : "Je reçois la lettre que Votre Majesté m'a fait l'honneur de m'écrire le 8 Par mes précédentes et les comptes que j'ai rendus au major général, elle aura vu que je m'occupais d'exécuter ses intentions, et que tout est en mouvement pour attirer l'attention de l'ennemi sur les troupes dont Votre Majesté m'a confié le commandement.
La 3e division forte de 8,000 hommes environ, composée des 15e léger, 48e et 108e de ligne à 4 bataillons chacun, et un bataillon du 44e de ligne, l'autre bataillon de ce régiment n'étant point annoncé, total 13 bataillons, sera demain 12 en entier à Bergedorf et environs, avec une batterie d'artillerie à pied, une batterie d'artillerie à cheval et une batterie de réserve, total 22 pièces.
Le même jour, les 30e et 61e de ligne de la 40e division qui sont maintenant près de Lunebourg seront à Winsen, près de passer l'Elbe à Hope, avec une batterie d'artillerie à pied ...
Je vais faire évacuer par le 15e tous les postes retranchés qui étaient entre Hitzacker et Werben ; je ne conserverai que ceux qui sont entre Hitzacker et Hope. Ainsi les 30e et 61e, suivant les circonstances, passeront l'Elbe à Hope, ou suivront mon mouvement par la rive gauche ; mais probablement je les ferai passer à Hope, car il est vraisemblable que me portant en avant, l'ennemi en se retirant aura détruit tous les moyens de passage ...
La lettre de Votre Majesté me fait bien connaître ses intentions ; je ferai de mon mieux pour justifier sa confiance. Tous les ordres pour arrêter les convois avaient déjà été donnés ; je les réitère. Mon quartier général est depuis longtemps à une lieue de Hambourg ; je serai le 13 avec la 3e division.
J'adresse par ce courrier au major général le rapport d'un intendant du prince de la Moskowa, qui était resté en arrière, malade, pendant la retraite de Moscou, et qui vient d'arriver par le Mecklembourg. Il était parti de Stralsund le 8 août, et a passé par Wismar, Rostock et Boitzenbourg. Il n'a pu donner aucun renseignement sur le mouvement des troupes. Il a vu le général Moreau chez le prince de Suède" (Mazade C. (de) : « Correspondance du Maréchal Davout, prince d'Eckmühl : ses commandements, son ministère, 1801-1815 », t. 4, p. 261, lettre 1467).
L'armistice de Pleiswitz est dénoncé le 17 août. L'Autriche se joint à la coalition et lui fournit un appoint de 300.000 hommes.
Pour avoir des renseignements sur l'ennemi, des reconnaissances sont envoyées par Davout vers Moellen, Lauenburg et Buchen. Elles ont à livrer des combats qui se terminent à leur avantage.
Le 21, le 13e Corps se porte sur Vittenburg. La 40e Division, attaquée près de Marson, repousse de nombreuses charges de cavalerie et campe à la nuit près de Goldenbau.
Le 22, l'ennemi passe l'Elbe près de Doemitz. Les postes de Dannenberg et de Quickborn, constitués par 200 hommes du 61e, sont écrasés par le nombre et faits prisonniers.
Le 23, le Corps d'armée se rend à Schwerin et prend position depuis cette ville jusqu'à Wismar. Son but est de faire une diversion utile au Général Oudinot, que l'Empereur a dirigé contre la capitale de la Prusse.
Le 3l, Davout est avisé à la fois de la défaite de Gross-beeren, subie par le Général Oudinot, et de la marche sur Brandebourg d'un Corps de 30.000 hommes conduit par le Général Winzingerode.
Au commencement de septembre, les trois dernières Compagnies du 3e Bataillon rejoignent les premières. Le 13e Corps se compose des 3e, 40e et 50e Divisions et d'une Division danoise. La 40e Division (ancienne 3e du 1er Corps), comprend les 33e Léqer, 30e, 61e et 111e de Ligne.
- Reprise des hostilités.
Malgré la victoire de Dresde remportée par l'Empereur, sur les Autrichiens, le commandant du 13e Corps rétrograde derrière la Stecknitz, avec son centre à Ratzeburg. Le 61e est détaché à Lauenburg, Hope et Duckooschlusen.
Les défaites successives de Macdonald sur la Katzbach (26 août), de Vandamme à Kulm (30 août), de Ney à Dennevitz (6 septembre), obligent Napoléon à reculer dans la plaine de Leipzig.
Le 23 septembre 1813, le Maréchal Davout écrit, depuis Ratzebourg, au Général Lemarois : "Je reçois votre lettre du 19, à huit heures du soir, ou vous me dites que ma dernière était du 9. Je vous ai écrit les 4, 8, 9, 13 et 14. Vous pourrez juger de la quantité de lettres qui auront été interceptées. De mon côté, les lettres que j’ai reçues de vous sont des 1er, 2, 4, 6, 7, 10, 11 et 14 septembre. Par la mienne du 14, je vous faisais connaitre que l'officier de dragons qui était porteur de celle par laquelle vous m'envoyez le billet chiffré de l'Empereur a été pris à Soltau : c’est l’adjudant-major du 61e, qui a passé quelques heures après lui, qui m'en a fait le rapport.
La dernière lettre que j'ai reçue de l'Empereur était du 16 août ; ainsi, si, indépendamment du billet chiffré, l’Empereur m'a écrit depuis, tout a été intercepté …" (Mazade C. (de) : « Correspondance du Maréchal Davout, prince d'Eckmühl : ses commandements, son ministère, 1801-1815 », t. 4, p. 279, lettre 1479).
Du 16 au 18 octobre, se livre à Leipzig la sanglante bataille des nations. Napoléon reprend ensuite le chemin du Rhin et Davout, séparé du reste de l'armée, n'ayant pour se conduire que des instructions générales, entreprend la défense de la région du bas Elbe et de la place de Hambourg.
Pendant tout le mois d'octobre, le 13e Corps conserve ses positions. Les 30.000 hommes dont il se compose ont en face d'eux une armée russe aux ordres du Général Walmoden, une Légion russo-allemande, le Corps prussien de Lutzow et quelques Régiments Je Hussards à la solde de l'Angleterre, en tout 40.000 hommes de bonnes troupes.
Vers la fin d'octobre, le Maréchal Davout se rapproche de Hambourg. Le mois suivant se passe en escarmouches. Le Général Walmoden, d'ailleurs destiné à être remplacé à la tête de l'armée de siège, attend les renforts que conduisent le Prince royal de Suède et le Général Benningsen.
Dans le Mémoire sur le siège et la défense de Hambourg (décembre 1813-Mai 1814), on peut lire : "… Nous restâmes dans cette position de la Stecknitz dont il a été parlé plus haut, tout le mois de novembre. Le général Walmoden n'osait rien entreprendre avant l'arrivée du prince royal de Suède et du corps du général Bennigsen. Il avait une division devant Haarbourg, 2,000 hommes à Winsen, et sur l'Elbe en face de Zollenspicker, et le reste de son corps sur la ligne ; on avait tous les jours de nouvelles escarmouches.
Le maréchal profita de cet intervalle de repos que l'ennemi nous laissait pour envoyer à Hambourg une partie de la 3e division et pour y faire arriver une grande quantité de palissades formées en radeaux et envoyées par l'Elbe. Ces radeaux étaient conduits et défendus par des petites garnisons du 61e régiment qui s'y étaient fait des épaulements en bois ...
Le maréchal ne s'occupa plus que du corps d'armée qui, tous les jours, pouvait devenir plus précieux si Napoléon reprenait ses avantages après Leipzig, ainsi qu'il l'avait fait après la campagne de Moscou, et il entra le 3 décembre dans ses lignes de Hambourg.
Voici quelle était à cette époque la situation du 13e corps :
Le maréchal prince d'Eckmühl, général eu chef ; aide de camp, colonel de Castres ; chefs d'escadrons, Hervo, Fayet, Beaumont, Laloy, d'Houdetot.
Le général César de La Ville, chef d'état-major. Le général comte Hogendorp, gouverneur de Hambourg. Le général de division Thiebault, chargé en chef des approvisionnements. Le général Jouffroy, commandant l'artillerie. Colonel Deponthon, commandant le génie.
3e division. Général de division, Loison ; chef d'état-major, colonel Lecouturier. 1re brigade, général Romme (15e, 44e de ligne) ; 2e brigade, général Leclerc (48e de ligne, 108e). Artillerie, chef de bataillon Mathis. Effectif 9,842 hommes, 8 bouches à feu, 230 chevaux.
40e division. Général de division, Vichery ; chef d'état-major, colonel Bellangé. 1re brigade, général Gengoult (30e, 61e de ligne) 2e brigade, général Delcambre (111e). Artillerie, chef de bataillon Grosjean. Effectif 10,000 hommes, 8 bouches à feu, 172 chevaux.
50e division. Général de division, Pecheux ; chef d'état-major, colonel Allouir. 1re brigade, général Avril (33e, 29e de ligne) ; 2e brigade, général Osten (3e, 105e de ligne). Effectif : 9,680 hommes, 8 bouches à feu, 168 chevaux.
Cavalerie. Général de division, Wattier de Saint-Alphonse ; chef d'état-major, colonel Caillemer. Généraux de brigade Dubois, Guiton, Lallemand. 3 régiments provisoires de cuirassiers, 1 régiment de marche dit de Hambourg, 28e de chasseurs, détachements de toutes armes. Effectif : 5,800 hommes, 3,800 chevaux.
Marine. Contre-amiral Lhermitte. Équipage de la flottille, colonel Lefranc, 1,200 hommes ; 1 bataillon d'ouvriers, 400 hommes.
Douaniers enrégimentés M. Pyonnier, directeur commandant, 600 hommes. Gendarmerie, colonel Chariot, 230 hommes. Équipages militaires, 600 hommes. Vétérans, 600 hommes. Artillerie 6 compagnies du 8e régiment d'artillerie, 3 de divers régiments, 3,630 hommes, 2,220 chevaux.
Génie 316 hommes, 50 chevaux, etc.
Effectif total de l 'armée 42,000 hommes, dont plus de 8,000 aux hôpitaux et 400 prisonniers ; 7,500 chevaux ; 76 bouches à feu attelées de 6 et de 12 ; 350 sur les remparts ; 270,000 kilog. de poudre ; 2 millions de cartouches confectionnées ; des fusées à la Congrève et les artifices, et les projectiles nécessaires à un aussi grand système de défense.
Un grand nombre de détachements appartenant aux régiments qui composaient le corps d'armée avaient rejoint à Hambourg pendant notre campagne en Mecklembourg, ce qui explique comment il était plus fort en rentrant dans ses lignes que lorsqu'il les avait quittées à la reprise des hostilités.
La 3e et la 40e division entrèrent dans Hambourg et dans les lignes avancées de Saint-Georges, occupant les villages de Wandsbeck et Hamm, en avant de Saint-Georges. Les postes du Pont-Vert et d'Ausschlag dans l'inondation, les digues de la Bille et enfin les maisons sur la grande digue de l'Elbe, où s'appuyait la droite de toutes ces positions retranchées ; la gauche était à l'Alster ..." (Mazade C. (de) : « Correspondance du Maréchal Davout, prince d'Eckmühl : ses commandements, son ministère, 1801-1815 », t. 4, p. 288 - Dans l'ouvrage de Blocqueville A. (de) : « Le Maréchal Davout, prince d'Eckmühl, raconté par les siens et par lui-même », 1879-1880, t. 4, p. 4, on lit : "... La 40e division, commandée par le lieutenant général Vichery, se composait du 30e de ligne (colonel Ramaud), du 61e (colonel Ricard) et du 11e (colonel Holtz). Les deux généraux de brigade étaient les généraux Gengoult et Delcambre. Le chef de bataillon Grosjean commandait l'artillerie. Le colonel Bellangé était chef d'état-major. Cette division présentait un effectif de 10,000 hommes, 8 bouches à feu, 172 chevaux ...").
Au commencement de décembre, le froid devient très vif. La Stecknitz, couverte de glace, peut être franchie sur tous les points. Walmoden a été rejoint par 20.000 hommes. Davout ne voit aucun profit A continuer plus longtemps la résistance en rase campagne. Il s'enferme dans ses lignes de Hambourg et la 40e Division est établie dans les villages de Wandsbeck, d'Eppendorf et de Hamm.
- Défense de Stettin.
Les deux Compagnies du 61e, bloquées dans Stettin et le fort de Damm, contribuent à la défense de ces deux places. Elles participent à de nombreux combats et capitulent, le 5 décembre, après avoir subi neuf mois de blocus et un bombardement.
/ Le Dépôt et le 6e Bataillon, 1813-1814
- Mouvements du Dépôt
Le 5 février 1813, depuis Paris, au Général Clarke, Duc de Feltre, Ministre de la guerre, à Paris : "Monsieur le Duc de Feltre, je n'approuve pas la formation des cinquante demi-brigades provisoires, formant cent cinquante bataillons, pour la garde de l'intérieur ; voici de quelle manière ce travail doit être fait ...
FRONTIÈRES DU RHIN ET DE L'OCÉAN.
La défense de la France, depuis les 31e et 17e divisions militaires jusqu’à Besançon et jusqu’à Bordeaux, aura lieu de deux manières : par la formation de bataillons de garnison, composés de compagnies tirées des 5e bataillons et qui tiendront garnison dans nos places fortes, et par la formation de demi-brigades provisoires.
Les demi-brigades seront d’abord au nombre de vingt-quatre pour cette partie de la frontière qui s’étend depuis la 31e division jusqu’à la 11e.
Chaque demi-brigade sera composée de trois bataillons entiers, sans qu’il puisse y entrer, sous quelque prétexte que ce soit, une fraction de 5e bataillon. Ces vingt-quatre demi-brigades seront formées ainsi qu’il suit :
... la 9e demi-brigade, des 6es bataillons des 85e, 61e et 101e ...
Ces vingt-quatre demi-brigades formeront six divisions ; chaque division, quatre demi-brigades ou douze bataillons, savoir :
... La 2e division, à Wesel, composée des 3e, 6e, 7e et 9e demi-brigades ..." (Correspondance de Napoléon, t. 24, 19538 ; Correspondance générale de Napoléon, t.13, lettre 32615).
Dans le courant de novembre 1813, le Dépôt du 61e a été transféré de Worms à Sarrelouis.
Le 15 novembre 1813, l'Empereur écrit, depuis Saint-Cloud, au Duc de Feltre : "... il faut mettre le dépôt du 11e léger à Grave ; ... celui du 61e, à Sarrelouis ..." (Chuquet A. : « Ordres et apostilles de Napoléon, 1799-1815 », Paris, 1912, t.4, lettre 6174 ; Correspondance générale de Napoléon, t.14, lettre 37048). Le Dépôt du 30e est donc transféré de Mayence à Luxembourg dans le courant du mois.
Le Dépôt recule ensuite devant l'invasion et se rend à Beauvais.
Le 21 janvier 1814, l'Empereur, depuis Paris, décrète : "I. Les régiments des dépôts ci-après désignés et ceux de leurs cadres qui n'ont pas de conscrits se rendront, savoir :
... Ceux de la 3e division : 100e et 103e de ligne, 24e et 26e léger, 30e, 33e, 59e, 69e, 61e, 76e, 111e de ligne, 9e léger et 96e de ligne à Beauvais ...
II. Le ministre de la guerre désignera un officier général ou supérieur ou un commissaire des guerres de ceux employés dans le département pour être spécialement chargé de ces dépôts qui seront placés dans les villes ci- dessus désignées ou aux environs ..." (Chuquet A. : « Inédits napoléoniens », Paris, 1913, t.2, lettre 2736).
Le Major en second Rudloff en a le commandement.
Le 19 février 1814, l'Empereur écrit, depuis le Château de Surville, au Général Clarke, Duc de Feltre, Ministre de la Guerre, à Paris : "Monsieur le Duc de Feltre, vous m'écrivez que vous ne pouvez pas former la 2e brigade de la réserve de Paris. Je ne partage pas votre opinion à cet égard, puisque je vois que le 32e a, à son dépôt, 700 hommes ; le 58e, 700 ; le 61e, 300 ; le 88e, 500 ; le 155e, 1,100 ; le 153e, 1,200 ; le 2e léger, 600 ; le 4e, 400 ; le 12e, 600 ; le 15e, 300, etc. Or tous ces régiments n'ont pas de bataillons complets à fournir, et n'ont que cinq bataillons. Vous pouvez donc prendre là-dessus de quoi compléter, à 400 hommes, huit ou dix bataillons. En agissant ainsi, je pense que, demain 20, cette 2e brigade peut être formée et se porter à Charenton. Ayez soin qu'elle ait sa batterie.
Je manque de canonniers ; il serait nécessaire de m en envoyer deux compagnies complètes" (Correspondance de Napoléon, t. 27, 21308 ; Correspondance générale de Napoléon, t.15, lettre 38224).
Le 21 février 1814, l'Empereur écrit, depuis Nogent-sur-Seine, au Général Hulin, commandant de la 1ère Division militaire : "Monsieur le comte Hulin, je reçois votre état de situation du 20. Je vois une grande quantité d'hommes aux dépôts des 5es bataillons des régiments qui n'ont pas de cadres à fournir : le 27e, par exemple, a son 5e bataillon à Compiègne, 182 hommes ; le 32e, 660 hommes ; le 58e, 688 ; le 61e, 300 (à Beauvais) ; le 76e à Beauvais, 194 hommes ; le 88°, à Paris, 500 hommes ; ainsi de suite. Je vois que le 37e léger a 900 hommes à son 5e bataillon à Beauvais, et son cadre du 3e à Paris, 35 hommes. Mettez plus d'activité dans les mouvements de ces cadres. Faites venir à Paris ce qui est aux 5e bataillons, et complétez les cadres des 3e et 4e bataillons ..." (Correspondance générale de Napoléon, t.15, lettre 38281).
- Mouvements du 6e Bataillon
Le 17 novembre 1813, l'Empereur écrit, depuis Saint-Cloud, au Général Clarke, Duc de Feltre, Ministre de la Guerre, à Paris : "Monsieur le Duc de Feltre, il sera formé un corps qui prendra le titre de 1er corps bis et 13e bis de la Grande Armée, lequel se réunira à Anvers, à Gand et à Utrecht. Il sera composé de deux bataillons du 7e léger, du 13e léger, du 12e de ligne, du 17e, du 25e, du 33e, du 85e ; d'un du 57e, d'un bataillon du 36e, du 51e et du 55e, qui sont reformés à leurs dépôts, et du 6e bataillon du 15e léger, du 21e de ligne, du 30e, du 48e, du 108e, du 111e et du 61e ; total, 25 bataillons ; ce qui au complet ferait 25,000 hommes.
Une partie de ces 25,000 hommes existe par la conscription qui se lève actuellement ; mais un tiers ou un quart peuvent manquer, et vous y suppléerez en les portant sur les conscriptions que vous destinez au dépôt de Nancy.
Ces 25,000 hommes formeront trois divisions. Les 6es bataillons des 15e léger, 30e de ligne, 48e, 108e, 111e et 61e seront réunis dans la même division, ces bataillons appartenant aux régiments qui ont fourni à la composition du 13e corps.
Aussitôt que chacun de ces régiments pourra compléter un bataillon, il le fera partir pour Utrecht. Par ce moyen, ce corps pourra être à peu près formé par la conscription qui se lève aujourd'hui. Il peut donc être réalisé dans le courant de décembre.
Informez-vous près de l'administration de la guerre si l'habillement est prêt. Pourvoyez à l'habillement, et bientôt on pourra ressentir l'effet de cette nouvelle formation à Utrecht. Occupez-vous spécialement de compléter les cadres en officiers et sous-officiers. Vous comprendrez facilement pourquoi j'ai mis séparément ces bataillons, puisqu'ils ne doivent rien fournir, ni au 11e, ni au 5e, ni au 3e, ni au 2e corps de la Grande Armée" (Correspondance de Napoléon, t. 26, 20904 ; Correspondance générale de Napoléon, t.14, lettre 37089 - Note : Cette organisation fut modifiée par un décret du 24 novembre 1813).
Le 18 décembre 1813, l'Empereur écrit, depuis Paris, au Général Clarke, Ministre de la Guerre : "Monsieur le duc de Feltre ... Le 6e bataillon du 111e fera partie du 2e corps, ainsi que le 6e bataillon du 61e et le 6e du 30e.
Ces 3 bataillons ne feront plus partie du 13e corps ...
Ces dispositions porteront le 1er corps à 52 bataillons, et 2e à 43 bataillons.
Il est indispensable que vous expédiiez dans la journée, par estafettes extraordinaires, ces nouveaux ordres aux généraux commandant les divisions militaires, afin que les 16 régiments qui devaient envoyer des détachements pour reformer le 14e corps à Strasbourg ne les fassent pas partir. Ceux qui seraient partis seront incorporés, comme je l'ai précédemment ordonné, dans le 2e corps à Strasbourg, et les cadres retourneront à leurs bataillons ...
Il n'était encore parti que 7 détachements formant 1800 hommes des bataillons qui devaient former le 7e corps à Strasbourg ; ils arrivent en ce moment à Strasbourg. Ces 1800 hommes seront incorporés, comme je l'ai ordonné dans le 2e corps. Les cadres retourneront à leurs dépôts ...
Je me dépêche de vous envoyer ces décisions parce que l'expédition des ordres qu'elles exigent est urgente.
ANNEXE
... ÉTAT C
Formation du 2e corps
1re division
3 bataillons du 24e léger ; 3 bataillons du 19e de ligne ; 3 bataillons du 37e de ligne ; 3 bataillons du 56e de ligne ; 1 bataillon du 111e de ligne ; 1 bataillon du 61e de ligne ..." (Correspondance générale de Napoléon, t.14, lettre 37606).
"ORDRES CONCERNANT LA COMPOSITION DES CORPS D’ARMÉE.
Paris, 21 décembre 1813.
Le général Maison est nommé commandant du 1er corps d’armée à Anvers ; le major général lui donnera l’ordre de partir demain pour se rendre dans cette place ; le général Roguet et le général Lefebvre-Desnoëttes seront sous ses ordres.
Le major général donnera l’ordre au général Grouchy de partir de suite pour se rendre à Strasbourg, où il prendra le commandement en chef de la cavalerie de l’armée.
Il ordonnera au duc de Bellune d’organiser le 2è corps d’armée en trois divisions de la manière suivante :
1re division : 24è léger, trois bataillons ; 19è de ligne, trois ; 37è, trois ; 56è, trois ; 61è, un ; 111è, un ; total, quatorze bataillons ;
Le général Dufour commandera cette division ...
Chaque division aura deux batteries d’artillerie à pied ; total, six batteries, quarante-huit pièces. Ce corps d’armée aura en outre deux batteries d’artillerie de réserve, seize pièces, et deux batteries d’artillerie à cheval" (Correspondance de Napoléon, t. 26, 21024).
Le même 21 décembre 1813, l'Empereur écrit, depuis Paris, au Général Clarke, Duc de Feltre, Ministre de la Guerre, à Paris : "Il résulte du travail que vous m'avez remis le 19 décembre, sur la formation de la Grande Armée, qu'il manquerait 11,100 hommes pour compléter tout ce que j'ai demandé, savoir : 300 au 61e ...
Il faudra se procurer ces 11,100 hommes sur l'appel des 300,00 hommes à faire dans les départements du Mont-Tonnerre et de la Sarre et dans les départements de l'Ouest où cet appel n'a pas encore eu lieu.
Faites-moi connaître les levées que l'on pourrait faire dans ces départements sur les 300,000 hommes. Il faudra employer les premiers hommes qu'on lèvera à combler ce déficit" (Correspondance de Napoléon, t. 26, 21025 ; Correspondance générale de Napoléon, t.14, lettre 37624).
Le 6e Bataillon du Régiment, créé péniblement vers la fin de décembre, reste à Sarrelouis et contribue à la défense de cette place.
Le 17 janvier 1814, le Capitaine Carey, de ce Bataillon, est blessé mortellement dans une sortie.
/ Défense de Hambourg, 1814
Pendant tout le mois de décembre 1813 et les premiers jours de janvier suivant, il ne se livre autour de Hambourg que des engagements d'avant-postes. Le 61e y participe fréquemment et se fait remarquer chaque fois par sa discipline et sa valeur. Le Lieutenant Dessirier est blessé, le 4 janvier, dans une de ces rencontres.
- Combat d'Eppendorf.
Le 13 au matin, par une température de 16 degrés au-dessous de zéro, l'ennemi attaque très vivement le village d'Eppendorf. Le Commandant Peltret, qui en a la garde, se défend courageusement. Les Russes se retirent du combat après avoir perdu une quarantaine d'hommes. Le 61e compte 2 morts et 10 blessés.
Dans le Mémoire sur le siège et la défense de Hambourg (décembre 1813-Mai 1814), on peut lire : "… Le froid avait augmenté jusqu'à 16 degrés, et le nombre des malades devenait considérable. Le 13 janvier au matin, l'ennemi nous attaqua très-vivement à Eppendorf, Emsbuttel ; de notre côté, nous fîmes avancer quelques troupes en avant de Sternschanz vers Winterhude et Uhlenorst. Le terrain et surtout le village d'Eppendorf furent très-disputés, mais finirent par rester en notre pouvoir. L'ennemi laissa 40 morts sur le champ de bataille ; nous eûmes de notre côté 3 hommes tués et une vingtaine de blessés. Le général Delcambre se louait beaucoup des bataillons du 105e régiment qu'il avait sous ses ordres, et surtout du chef de bataillon Préville et du chef de bataillon Peltret du 61e ..." (Mazade C. (de) : « Correspondance du Maréchal Davout, prince d'Eckmühl : ses commandements, son ministère, 1801-1815 », t. 4, p. 288).
Le 14, le poste d'Eppendorf est néanmoins évacué. Les glaces qui couvrent l'Alster en rendent l'accès trop facile. Il en est de même, bientôt après, du poste de Wandsbeck.
- Combat du 28 janvier.
Le 26 janvier toutes les forces russes se mettent en mouvement contre les fronts de Hamm et d'Altona. Elles sont battues et ont à supporter de nombreuses pertes. Le 61e n'a que des blessés.
- Combat du 9 février.
Au commencement de février, un Corps russe commandé par le Général Tolstoï, quitte le blocus de Magdebourg, où deux Compagnies du 61e ont vaillamment combattu, et rejoint l'armée de siège, dont le Général Benningsen a pris le commandement.
Le 9, à 4 heures du matin, les troupes françaises sont attaquées dans l'ile de Wilhemsbourg. Le Général Emme, à la tête d'une colonne russe, s'empare de l'ile de Moorwerder et s'avance jusqu'au vieux château de Wilhemsbourg. Il est repoussé par le 61e.
Un échec subi par le 29e amène l'enmemi jusqu'au moulin de Reygersteig. Le Colonel Ricard, pour ne pas être tourné, se replie alors sur la digue de l'Elbe, d'où il gagne la tête de pont qui commande l'île de Wilhemsbourg. L'ennemi le poursuit et le déloge; mais la route et la tête de pont sont tellement encombrées de morts et de blessés, que les Russes ne peuvent mettre leurs canons en batterie, ni se servir de ceux qu'ils ont pris.
Le 61e s'est arrêté sur le pont. Le Maréchal Davout se place au milieu de lui et l'encourage. Les soldats se battent désespérément. Des renforts leur sont envoyés et une action commune des 15e Léger, 61e et 105e rétablit le combat à l'avantage des Français.
Vers 3 heures du soir, les Russes se retirent. Leurs pertes sont de 800 hommes tués et d'un nombre considérable de blessés. Le 13e Corps, de son côté, compte 1.200 hommes mis hors de combat. Le Sous-lieutenant Arnoux, du 61e, est au nombre des morts; les Sous-lieutenants Leroy et Tireloy sont blessés.
Dans le Mémoire sur le siège et la défense de Hambourg (décembre 1813-Mai 1814), on peut lire : "… A quatre heures du matin, le 9 février 1814, l'ennemi attaqua en même temps sur tous les points. Le maréchal était debout. Une vive fusillade se faisait entendre de tous côtés. L'officier de garde à l'observatoire de la tour avait prévenu des mouvements qui se faisaient sur toute la ligne ennemie, par les fusées et le changement des feux de bivouac ou leur extinction. Quelques hommes égarés et faits prisonniers par nos postes avancés pendant la nuit, avaient été conduits au quartier général. D'après leurs rapports et les noms des régiments auxquels ils appartenaient, le maréchal n'eut plus un moment d'incertitude sur le véritable point de l'attaque ; il donna ses ordres pour le pont d'Altona, celui de Saint-Georges et Hamm, et pour l'intérieur de la ville ; il fit partir la compagnie d'élite du 15e léger pour la tête de pont dans l'Ile de Wilhelmsbourg, et s'y rendit en toute hâte. Voici où en étaient les affaires à son arrivée. Le général Markof avait surpris les postes de l'ile de Neuhof ; le colonel du 29e régiment, Pierre, avait marché à lui et avait été tué ; sa troupe, privée de son chef, s'était retirée en grand désordre, et l'ennemi était maitre du moulin de Reygersteig sur notre droite. Le lieutenant général Emme s'était emparé de l'île de Moorwerder, avait chassé nos troupes de leurs retranchements, et s'était avancé vers le vieux château de l'ile de Wilhelmsbourg.
Le général français Osten avait réuni de son mieux nos soldats épars, les avait placés sur les grandes digues d'hiver, et avait contenu le mouvement de l'ennemi par le feu de deux pièces établies en avant de la maison rouge où était établi son quartier général. Le lieutenant général Vichery, à qui le maréchal avait confié depuis peu le commandement supérieur dans ces iles, était accouru aux premiers coups de fusil, avait remis l'ordre dans les troupes, leur avait inspiré son ardeur et avait changé la défense en attaque. Il avait fait porter une colonne sur la maison rouge et la grande ferme dont l'ennemi s'était emparé ; la colonne russe, surprise de tant d'audace, avait cédé sur tous les points et éprouvé une grande perte. Le chef de bataillon Dehüs, du 30e, avait enlevé la grande ferme, et le colonel Ricard, du 61e, avait tout renversé devant lui ; l'ennemi alors avait fait agir ses réserves pour se maintenir. Le général Emme, désespéré d'avoir trouvé une résistance aussi opiniâtre et d'être réduit à se défendre, pensait déjà à la retraite, quand il aperçut la colonne du général Markof, s'avançant du moulin de Reygersteig, sur la digue de notre droite, vers la tête du pont ; il vit en même temps s'avancer une de ses colonnes, qui avait réussi à nous tourner par notre gauche. Le feu d'artillerie et de mousqueterie redoubla alors de part et d'autre. La blessure du colonel Ramand, du 30e, et la mort du chef de bataillon du 44e, mirent le désordre dans ces troupes, qui se retirèrent sur la tête de pont.
Ce point s'était trouvé alors tellement encombré de blessés, de chevaux morts et de caissons d'artillerie, que le général de division Vichery s'était trouvé dans l'impossibilité de faire déboucher deux bataillons du 105e, qui formaient sa réserve, pour reprendre la digue ; l'ennemi s'y était établi et avait mis ses troupes en bataille, ses pièces en batterie sur la grande chaussée ; on se battait très-vivement, on perdait beaucoup de monde, le général Osten venait d'être blessé. Le défaut de chefs, qui presque tous avaient été mis hors de combat, empêchait de contenir les soldats qui se retiraient dessus et dessous le pont, emportant leurs camarades. Par un bonheur inouï, l'ennemi ne pensa pas, dans cette confusion, à établir ses pièces sur la grande chaussée et à enfiler le pont ; un seul coup de canon que le hasard y avait dirigé, nous avait emporté 1 files.
Le maréchal était déjà arrivé ; il avait établi sa petite réserve de 60 hommes d'élite du 15e léger au blockhaus, vers le milieu de cette partie du pont, avait établi quelques hommes à droite et à gauche sur la petite digue d'été, et avait renforcé la batterie de Klugenfeld sur sa gauche. Le feu soutenu de cette batterie contenait les troupes ennemies qui voulaient tourner la digue d'été sur ce point ; il avait envoyé en toute hâte chercher des renforts à Hambourg et à Saint-Georges. Le lieutenant général Vichery se maintenait avec une poignée de monde et la plus rare intrépidité à la tête de pont, et bientôt accablé par le nombre, il se retira par le pont sur la compagnie du 15e, et plaça derrière la petite digue d'été les débris du bataillon du 105e, dont les deux commandants Coste et de Rivière venaient d'être mis hors de combat. Le capitaine d'artillerie Genta, qui commandait la batterie de la tête de pont, était resté seul, avait mis lui-même le feu à ses pièces, avait fait beaucoup de mal à l'ennemi et fut percé à coups de baïonnette.
L'ennemi, maitre de la tête de pont, la trouva tellement remplie de morts, de mourants, hommes et chevaux, et de voitures d'ambulance et de vivres, qu'il ne put y amener ses pièces, ni même tourner les nôtres contre nous ; il manqua alors d'un de ces éclairs d'inspiration et d'audace, si fréquents dans l'histoire militaire française de ces vingt dernières années. S'il marchait en avant, notre communication était détruite ; le sort de la place, le salut de l'armée, l'honneur des armes, tout était là ; les renforts ne pouvaient nous arriver que dans une heure, et les soldats admiraient le calme et l'intrépidité du chef dans une telle circonstance. Le maréchal s'avança vers l'ennemi sur le pont, pour le reconnaitre et rassurer sa petite troupe ; il y resta quelque temps exposé à une vive fusillade, et ne se retira vers la compagnie du 15e qu'après la blessure du chef d'état-major de l'armée, le général César de Laville, qui l'accompagnait. Cette blessure ne fut heureusement pas dangereuse ; cet officier général fut conservé à l'armée, qui, ainsi que son chef, appréciait ses belles qualités, sa brillante bravoure et son beau caractère.
Le général du génie Deponthon, le général d'artillerie Jouffroy, et l'ingénieur en chef Jousselin, s'étaient rendus auprès du maréchal. On se battait avec acharnement depuis quatre heures du matin ; enfin les renforts arrivèrent, et l'on entendit se rapprocher de nous le canon du général Pecheux. Ce général, après avoir repoussé les attaques du général Ahrenschield jusqu'à trois heures après midi, sur tout le front de sa ligne, s'était mis à la tête de sa réserve, avait débouché par la partie du pont qui allait à Haarbourg, par la grande chaussée, et inquiétait l'ennemi sur ses derrières.
D'un autre côté, le lieutenant général Tolstoy, qui commandait la 2e colonne russe, avait attaqué le général Leclerc au pont Rouge et à Tiffentag. Nos troupes s'étaient retirées dans la grande maison barricadée ; le chef de bataillon Rosier avait accueilli l'ennemi à bout portant et lui avait tué beaucoup de monde. Le désordre s'était mis dans ses troupes, et il avait été impossible au général russe de les rallier ; la batterie de Tiffentag, par un feu bien nourri, avait contribué à lui faire abandonner son projet de traverser l'Elbe sur la glace pour se réunir aux deux autres colonnes dans l'Ile de Wilhelmsbourg. On ne se battait plus que faiblement sur ce point, ce qui avait permis au général Leclerc d'envoyer les renforts demandés.
Le maréchal fit alors ses dispositions pour reprendre la tête du pont et la grande digue d'hiver, dont l'ennemi était en possession depuis son arrivée. Il organisa trois colonnes ; la première, commandée par le général Delcambre, déboucha par la digue d'été, et, traversant tous les obstacles, arriva à la grande digue, en chassa l'ennemi et le mena battant jusqu'au moulin Reygersteig. La deuxième colonne, formée des compagnies d'élite du 105e commandées par les capitaines Christian et Ménissier, fut dirigée par Klugenfeld, sur la gauche de la grande digue ; elle chargea à la baïonnette, tua beaucoup de monde, fit une vingtaine de prisonniers et s'établit à l'embranchement où les deux digues viennent se rejoindre. Dans le même moment, une petite colonne filait sous le pont avec le général Vichery et la compagnie du 15e léger. L'ennemi abandonna la tête de pont sans pouvoir amener nos pièces. Le maréchal fit alors établir six pièces de campagne en dehors de la tête de pont et fit battre les masses russes qui cherchaient à dégager leurs troupes qui étaient aux prises avec le général Delcambre au moulin de Reygersteig. La colonne du général Pecheux avait forcé l'ennemi à abandonner la chaussée et avait rétabli la communication. Elle le poursuivait l'épée dans les reins sur la digue gauche et le village de Wilbelmsbourg ; nos troupes ayant fait leur jonction sur la chaussée se portèrent au pas de charge sur l'ennemi qui se retirait vers l'ile de Walterhof. Il éprouva dans sa retraite un feu très-vif qui lui tua beaucoup de monde, repassa dans l'île de Neuhof, et de là, derrière Altona, en traversant le Grand-Elbe sur la glace. Il essuya le feu des fortes pièces du réduit de l'Elbe.
Les habitants d'Altona admiraient l'intrépidité de quelques hommes sortis de la petite redoute de Schrewenhof, qui accompagnaient ces masses à coups de fusil. Cette affaire fort vive dura presque toute la journée, et l'on se battit avec le plus grand acharnement contre des forces trois fois supérieures, car la force dont nous pouvions disposer sans trop dégarnir les autres points ne montait pas à 8,000 hommes, et l'ennemi en avait mis en mouvement plus de 25,000. Nous avons perdu près de 1,200 hommes tués ou blessés, et quelques prisonniers, faits dans la surprise de Neuhof, le matin avant le jour ; deux généraux, dont l'un, le général Osten, mourut quelques jours après ; presque tous les colonels et commandants de bataillons avaient été mis hors de combat. Le capitaine Gayard, aide de camp du général Delcambre, y fut mortellement blessé. L'ennemi laissa sur le champ de bataille près de 800 morts et emporta ses blessés sur des traineaux. Si le lieutenant général Tolstoy avait pu exécuter ses ordres, et si le chef de l'armée russe s'était trouvé, ainsi que le chef de l'armée française, au moment décisif, lorsque la tête de pont nous fat enlevé, toute communication entre Hambourg et Haarbourg eût probablement été coupée, et les projets d'assassinat des Français par les habitants, ainsi que cela était annoncé par les proclamations ennemies, eussent pu recevoir leur exécution ..." (Mazade C. (de) : « Correspondance du Maréchal Davout, prince d'Eckmühl : ses commandements, son ministère, 1801-1815 », t. 4, p. 288; Blocqueville A. (de) : « Le Maréchal Davout, prince d'Eckmühl, raconté par les siens et par lui-même », 1879-1880, t. 4, p. 4).
Combat du 17 février.
L'attaque du 9 a eu surtout pour effet de montrer aux ennemis que le point faible de la ligne de défense est l'île de Wilhemsbourg. Le 17 février, une nouvelle attaque a lieu de ce côté. Mais pour laisser le Maréchal Davout dans l'incertitude, des démonstrations sont faites sur tous les points.
Deux fortes colonnes pénètrent dans l'île par Neuhof et Oschenwerder. Les postes français se replient. Les efforts des Russes sont encore dirigés contre la digue de l'Elbe et la tête de pont, que défendent deux Bataillons des 48e et 61e. Le combat sur ce point devient très vif. Les ennemis mettent leurs réserves en action et font usage de tous leurs moyens sans parvenir à triompher de la résistance qu'ils éprouvent. Le Général Vichery dirige alors contre eux trois Bataillons du 61e, qui les chargent à la baïonnette et les refoulent jusque dans la plaine.
Les Russes, déconcertés, ne restent plus en position à cheval sur la chaussée, que pour masquer une entreprise contre le pont de Haarbourg. Toute la garnison de Hambourg ayant eu le temps de prendre les armes, le 61e, remplacé dans la tête de pont, se reporte en avant avec le plus grand courage. Vers midi, après une lutte acharnée, les Russes se retirent vers Oschenwerder en abandonnant 300 morts sur le champ de bataille. Les pertes des Français sont un peu moindres.
Au 61e, l'Adjudant-major Vallet, les Capitaines Soyez et Ricaut, le Sous-lieutenant Berthet sont tués ou meurent de leurs blessures. Le Colonel Ricard, le Major en premier Vassimon, les Capitaines Béraud, Morgand, Prudhomme, Abeille (Louis), Abeille (François) et Chausseprat, le Lieutenant Lambert, les Sous-lieutenants Fressart, Léonard, Taillandier et Monneret sont blessés. Les Sergents Baudru, Denis et Tremet se font remarquer par leur bravoure.
Dans le Mémoire sur le siège et la défense de Hambourg (décembre 1813-Mai 1814), on peut lire : "… Le 17 février au matin, le général en chef Beningsen mit toutes ses troupes en mouvement. On était aux prises en même temps dans l'immense développement de tous nos ouvrages. Le général Ahrenschield attaquait Haarbourg les généraux Tschüiplitz et Tschepelow attaquaient le front d'Altona depuis l'Alster jusqu'à l'Elbe. Le lieutenant général Doctorof faisait avancer deux colonnes aux ordres des généraux Tolstoy et Emme, sur la Bille et l'Ochsenwerder, tandis que le général en chef, de sa personne, marchait avec le corps du général Markof, par derrière Altona, vis-à-vis du moulin de Reygersteig. On fut quelque temps dans l'incertitude sur le point de la véritable attaque de l'ennemi ; cependant l'attention du maréchal se porta sur l'ile de Wilhelmsbourg. Les observations de l'officier qui était à la tour nous faisaient connaître que deux fortes colonnes pénétraient dans cette ile, l'une par Neuhof et l'autre par Ochsenwerder ; nos postes s'étaient repliés ainsi qu'ils en avaient l'ordre, sans rien compromettre. Le général Romme avait arrêté, par ses bonnes dispositions, le premier choc de l'ennemi, qui cherchait à s'emparer de la digue d'hiver, vers la tête de pont. Cette position, défendue par ce général et deux bataillons des 61e et 48e, était devenue inexpugnable ; l'ennemi avait renoncé après plusieurs attaques à s'en emparer et manœuvrait sur notre gauche.
Le général Vichery avait établi ses troupes en arrière de la grande digue et à la tête de pont ; la fusillade s'était engagée sur toute cette ligne, et le feu de l'artillerie était très-vif. Le maréchal avait fait battre la générale dans Hambourg ; la cavalerie à pied, la gendarmerie, la garde nationale avaient pris leurs postes sur les remparts ; les canonniers étaient à leurs pièces ; huit bataillons avaient été envoyés au général Vichery avec ordre d'en laisser deux en réserve, à l'embarcadère et au Grass Brock. Vingt bataillons restèrent en réserve sur les places publiques pour les porter où besoin serait. Quatre bataillons furent placés près des portes de Steinthor et Deiehthor pour renforcer le général Leclerc s'il était trop vivement attaqué ; il faut observer que nos bataillons étaient tellement affaiblis par les maladies qu'ils ne présentaient pas 200 baïonnettes chacun. Le maréchal se rendit à la tête de pont où l'on se battait avec une grande chaleur. L'ennemi mit ses réserves en action et fit usage de tous ses moyens pour arriver à notre tête de pont par notre gauche. Ses efforts n'obtinrent aucun résultat. Le général Vichery dirigea de ce côté trois bataillons du 61e. Le colonel Ricard fondit sur l'ennemi qui se retira, laissant le champ de bataille couvert de ses morts. Deux compagnies du 111e placées dans une maison à la gauche de la tête de pont, s'y défendirent contre les masses russes, et, les prenant en flanc et à portée de pistolet, contribuèrent à déjouer cette attaque de gauche. Pendant ce temps, un bataillon du 111e défendait la batterie de Hof ; un bataillon du 15e léger, la digue du pont Bleu, et un bataillon du 48e, la batterie de Tiffentag. Le major Goutefrey dirigeait ces trois bataillons, qui par leur constance empêchaient l'ennemi non-seulement de rien entreprendre sur leur point, mais aussi d'aller prendre part à l'attaque de Wilhelmsbourg.
L'ennemi avait pris position dans la plaine, à cheval sur la grande chaussée ; il ne paraissait plus vouloir prendre l'offensive, mais seulement chercher à se maintenir. Des forces considérables qui nous observaient de l'Ile de Neuhof semblaient destinées à se porter sur la tête de pont, si nous marchions en avant sur la chaussée ou dans la plaine. On resta donc en position derrière la grande digue, attendant que l'ennemi décidât son mouvement. Les réserves étaient arrivées et placées derrière la digue d'été sur le pont et à Klugenfeld. Pendant ce temps, l'ennemi, perdant tout espoir de réussir dans son entreprise de notre côté, cherchait à masquer son attaque sur la partie du pont de bois qui aboutit à Haarbourg ; il s'y était porté en force, avait forcé à la retraite une compagnie qui gardait la tête de pont de ce côté, avait sapé quelques pilotis et mis le feu, en sorte qu'il parvint à détruire une vingtaine de toises de cette partie de pont. A peine vit-on la fumée s'élancer vers Haarbourg et démasquer ainsi la manœuvre de l'ennemi, que le maréchal, prévoyant ce qui était arrivé, ordonna l'attaque ; on marche à lui avec une grande résolution. Le général Pecheux, de son côté, s'était porté à la défense du pont avec sa réserve, composée du 105e, commandé par le major Aurange, et des marins ; l'ennemi, pris entre deux feux, opéra sa retraite sur Altona et Ochsenwerder vers midi ; il fut vivement poursuivi, laissant sur le champ de bataille plus de 300 morts. Notre perte fut à peu près la même, entre tués et blessés ..." (Mazade C. (de) : « Correspondance du Maréchal Davout, prince d'Eckmühl : ses commandements, son ministère, 1801-1815 », t. 4, p. 288).
- Combats des 24 et 27 février.
Le 24 février, à 3 heures du matin, le Général Benningsen dirige trois colonnes sur le moulin de Reygersteig. Un Bataillon du 30e, qui s'y trouve, fait bonne contenance et conserve sa position. L'arrivée d'un Bataillon du 61e provoque la retraite des Russes.
Pendant toute la journée du 27, les mouvements que fait l'ennemi laissent prévoir une attaque prochaine. La garnison de Hambourg se tient sous les armes. Dans la soirée, les Russes se portent en grand nombre dans l'ile de Wilhemsbourg. Les postes du 61e reculent en combattant et mettent le feu à de gros bâtiments chargés de bombes dont l'explosion jette la panique parmi les assaillants et fait échouer leur entreprise.
- Dernières opérations.
Les glaces de l'Elbe en facilitent la traversée. De continuels engagements ont encore lieu aux avant-postes. Le 19, vers dix heures du matin, le Sous-lieutenant Taillandier, 2 Sergents, 4 Caporaux et 20 hommes du 61e sont surpris, en avant de la Damthor, par un piquet d'infanterie russe dont un brouillard épais a favorisé l'embuscade. La petite troupe française se défend courageusement. Elle est chargée par un fort parti de cavalerie et ne met bas les armes qu'après avoir perdu une quinzaine d'hommes. Le Sous-lieutenant Taillandier est au nombre des blessés.
Le dégel du fleuve commence le 23. Le Maréchal Davout, n'ayant plus à redouter d'être surpris, en profite pour élargir le cercle de l'investissement. Le 61e, sous les ordres du Général Vichery, participe aux combats des 29, 30 et 31 mars, par lesquels les Russes sont délogés des villages de Heimfeld, Eisendorf, Sinsdorf, Langenbeck, Ruhnberg, Merkenfeld et Over.
"Nous étions au 1er avril ... Les soldats s'étaient aguerris comme les plus vieilles troupes; la discipline la plus parfaite existait à tel point que, pendant tout le blocus, pas un officier ou un soldat n'avait été puni pour une faute grave" (César de la Ville, Mémoire sur le siège et la défense de Hambourg).
La situation relativement brillante du 13e Corps en impose aux alliés. lls renoncent désormais à toute action décisive et se bornent à répandre des écrits annonçant la chute prochaine de l'Empire.
- Evacuation de Hambourg.
Le 18 avril, le Général Benningsen reçoit la nouvelle de l'abdication de Napoléon 1er. Il en fait part au Maréchal Davout, qui n'en persiste pas moins dans sa défense. Le 28, à l'arrivée d'un courrier non suspect, les hostilités cessent de part et d'autre. Le Général d'artillerie Fouché se présente à Hambourg, le 5 mai, avec des instructions concernant l'évacuation de la ville. Le 11, le Lieutenant-général Gérard remplace le Maréchal Davout. Trois colonnes sont organisées pour le retour en France des troupes du 13e Corps. Le 61e, qui fait partie de la première colonne, quitte Hambourg le 28 mai et, par Nienbourg, Herford, Munster, Dusseldorf, Aix-la-Chapelle, Maestricbt, Louvain, Malines, Dendermonde et Ath, se rend à Valenciennes où il arrive le 29 juin. L'effectif du 61e est encore de 1500 hommes. Les divers combats qu'il a dû livrer lui ont coûté 5 Officiers et 72 hommes. Le Régiment a été de service au Sternschantz du 19 au 23 mars et du 4 au 8 avril ; dans l'ile de Wilhemsbourg, les 10, 13, 15, 24, 26, 29 et 31 mars. Les détails manquent pour les autres mois. Le 61e avait un Dépôt de convalescents, Beckerstrasse, n' 83. "Il serait à désirer, dit un rapport d'inspection, que les malades de tous les régiments fussent soignés comme ceux du 61e".
/ Période de Paix, restauration des Bourbons.
Le Comte de Provence, frère de Louis XVI, est proclamé Roi, le 6 avri1 1814, sous le nom de Louis XVIII. Une ordonnance du 12 mai suivant modifie considérablement l'armée impériale. Le nombre des Régiments de ligne est ramené de 156 à 90. Chaque Régiment ne comporte que trois Bataillons. Le drapeau tricolore est remplacé par un drapeau blanc.
- Réorganisation du 61e.
Le 61e est réorganisé à Caen, où se rendent les divers éléments qui doivent concourir à le former. Il perd son numéro et devient 57e de Ligne. Son effectif, très réduit par de nombreuses libérations, se renforce des 3e et 5e Bataillons du 139e de Ligne et du 3e Bataillon du 12e de Voltigeurs (le 3e Bataillon du 12e de Voltigeurs (Jeune Garde) avait été organisé avec les Voltigeurs du 61e). Le Colonel Bouge, rentré de captivité, est replacé le 14 octobre à la tête du Régiment (Bouge (Charles), Baron de l'Empire, né en 1763, Capitaine au 2e Bataillon du Var en 1791, Chef de Bataillon en 1801, Colonel du 61e le 5 mars 1807, partit en demi-solde le 1er novembre 1815. Il fut rappelé à l'activité en 1816 et prit sa retraite en 1825).
/ Retour de Napoléon
Napoléon quitte secrètement l'ile d'Elbe dont on lui a donné la souveraineté dérisoire, et débarque au golfe Juan, le 1er mars 1815. Le gouvernement de Louis XVIII s'écroule; l'Empire est rétabli.
L'Europe était alors remaniée, au Congrès de Vienne, par les plénipotentiaires des divers Etats. Le 7 mars, à la nouvelle du retour de l'Empereur, des estafettes sont envoyées dans toutes les directions pour faire rebrousser chemin aux armées de la coalition. "La guerre, suivant l'expression d'un témoin, est déclarée en moins d'une heure".
Dès son arrivée à Paris, le 20 mars, Napoléon se prépare à combattre.
Fin mars 1815, un "Projet de répartition des militaires l'appelés aux drapeaux en sept dépôts généraux où ils seraient armés, habillés et instruits. Fin mars 1815" indique que le 57e de Ligne (ex 61e) est à Caen; il fait partie de la 14e Division militaire; il doit être fourni par le Département de l'orne, et son Dépôt doit être établi à Paris (Chuquet A. : « Inédits napoléoniens », Paris, 1913, t.2, lettre 2972).
Le 8 avril 1815, l'Empereur écrit, depuis Paris, au Maréchal Davout, Ministre de la Guerre : "Mon cousin, je vous envoie le tableau que j'ai rédigé pour la répartition des militaires rappelés. Vous y verrez que j'appelle dans la 1re division tous les hommes de 31 départements. Il y a aujourd'hui à Paris 8 régiments. Je fais venir 4 dépôts de la 8e et 4 de la seconde et de la 5e.
Il y aura donc 16 dépôts à Paris, auxquels 31 départements fourniront, ce qui fera près de 2 départements par dépôt ; mais la Jeune Garde ayant 12 régiments à compléter, tous ces hommes seront nécessaires. Pour tout le reste, j'envoie les hommes en droite ligne à un dépôt voisin. J'ai même pour principe de faire passer les hommes d'un département, dans un autre de la même division. Vous pourrez placer dans des villes voisines de Paris, les 8 dépôts qui doivent arriver. Il faut que ces régiments, avec leur dépôt, fassent partir les 3e, 4e, et 5e bataillons. On peut donc avoir de quoi compléter ici 2 bataillons par régiment ou 32 bataillons, ce qui fera une réserve.
Je fais venir ici tous les hommes de la Provence. Quelque inconvénient qu'il puisse y avoir, je pense que ce déplacement est nécessaire. Si nous venons à nous apercevoir qu'un département ne puisse pas fournir à 2 ou 3 régiments, comme il est porté au tableau, nous verrons à faire venir à Paris un de ces régiments.
II faut mettre un inspecteur à la tête des 16 dépôts de Paris. Donnez à chacun de ces régiments ce qui est nécessaire pour habiller 1 000 hommes et en outre, faire un marché pour avoir à Paris un magasin de 20 000 habillements complets ...
Annexe
Répartition des militaires rappelées aux drapeaux
Dépôt garnison.
1er dépôt général à Versailles ...
14e division militaire :
Orne : 57e de ligne à Caen ..." (Correspondance générale de Napoléon, t.15, lettre 39235).
Les deux premiers Bataillons du 57e se rendent d'abord à Saint-Ouen, puis à Avesnes. Ils comptent à la 1re Brigade de la 5e Division (Général Bachelu) d'un Corps d'observation qui ne tarde pas à devenir le 2e Corps de l'Armée du Nord (Général Reille).
Le 20 avril, le numéro 61, qu'il a si glorieusement illustré est rendu au 57e. Le Dépôt du Corps est transféré A Cherbourg.
Le 24 avril 1815, l'Empereur écrit, depuis Paris, au Maréchal Davout, Ministre de la Guerre : "... Réitérez également les ordres au 5e léger, au 88e, au 10e, au 44e, qui doivent former la 20e division, pour qu'ils accélèrent leur mouvement sur Paris. Faites-moi connaître quand la 21e division, c'est-à-dire le 8e léger, le 15e de ligne, le 26e, le 61e seront arrivés sur la Loire ; quand la 6e division de réserve sera complétée ..." (Correspondance de Napoléon, t. 27, 21841 ; Correspondance générale de Napoléon, t.15, lettre 39402).
Le 16 mai 1815, l’Empereur écrit, depuis Paris, au Maréchal Davout, Ministre de la Guerre : "Mon cousin, je reçois votre rapport du 14 mai ...
Quant aux dépôts d’infanterie, voici mes observations :
5e division : le 3e de ligne qui peut faire partir de La Fère 200 hommes pour compléter les bataillons de guerre, les fera partir sans délai.
le 61e qui est à Caen, idem.
le 72e à Rouen, idem.
le 108e à Abbeville, idem.
Donnez ordre que le dépôt du 108e vienne à Rouen et par ce moyen la 5e division aura ses dépôts à La Fère, Caen et Rouen ..." (Correspondance de Napoléon, t. 27, 21909 ; Correspondance générale de Napoléon, t.15, lettre 39639).
Le 29 mai 1815, l’Empereur écrit, depuis Paris, au Maréchal Davout, Ministre de la Guerre : "Mon cousin, donnez ordre au dépôt du 61e, qui est à Caen, de faire partir 300 hommes pour se rendre aux deux bataillons de guerre et les compléter à 600. Vous ferez passer ces 300 hommes par Paris ..." (Correspondance générale de Napoléon, t.15, lettre 39849).
Le ler juin, une députation du Régiment assiste à Paris, au Champ de Mai, à la promulgation l'Acte additionnel aux Constitutions de l'Empire. Elle reçoit un nouveau drapeau des mains de l'Empereur.
/ Campagne de Belgique, 1815
Tandis que l'Autriche et la Russie rassemblent leurs forces, Napoléon prend l'offensive, en Belgique, contre les armées de l'Angleterre et de la Prusse.
Le 13 juin, le 2e Corps se met en mouvement. Le camp du 61e est établi le même jour A Solre sur Sambre et le lendemain près de Lair-Funster. La trahison d'un Général français renseigne les Prussiens sur la marche de leurs adversaires (le Général de Bourmont, qui avait accepté de servir contre la coalition, déserta et joignit à la honte de son départ, celle plus grande encore d'apporter aux ennemis le plan de campagne de l'Empereur).
Les premiers coups de feu de la campagne sont tirés par le 2e Corps contre les Prussiens du Corps de Ziethen.
"D'après l'ordre de l'armée, écrit le général Reille, je suis parti de Lair-Funster le 15, A 8 heures du matin. En avant de Thuin j'ai rencontré une avant-garde ennemie de cavalerie et d'infanterie et, dans ce village, environ 800 hommes. Après quelques coups de canon et une fusillade assez vive, nous les avons chassés de cette position, qui est d'un accès très difficile. L'ennemi a laissé des morts, des blessés et quelques prisonniers, parmi lesquels deux officiers ...
Nous avons encore rencontré l'ennemi dans le bois de Montigny-les-Tilleuls. Une fusillade très vive a été engagée. Nous l'avons chassé du village ... J'ai fait déboucher les généraux Piré et Ambert, avec le 1er de chasseurs qui l'a chargé. Une centaine ont été sabrés er plus de 200 prisonniers.
Après avoir passé le pont de Marchienne, j'ai dirigé la cavalerie en laissant à gauche le bois de Monceaux et je l'ai traversé avec la colonne d'infanterie. Arrivé près de Jumet, le général Bachelu est tombé sur la colonne ennemie qui avait forcé les chasseurs à la retraite ; lui a tué des hommes et fait quelques prisonniers.
Le 2e corps s'est ensuite porté en avant et a pris position, les 5e et 9e divisions, ainsi que la cavalerie, à droite et à gauche de Gosselies ..." (Rapport daté de Gosselies, le 15 à 9 heures du soir (Arch. hist.). Le 2e Corps comprenait les 5e, 6e, 7e et 9e Divisions d'infanterie, la 1re Division de cavalerie légère et une batterie de réserve. La 7e Division fut détachée le 15 au soir du côté de Fleurus et resta indépendante. L'effectif du 2e Corps ne dépassait pas 20.000 hommes).
- Combat des Quatre-Bras.
Dans la nuit du 15 au 16, la Division Bachelu et la cavalerie du 2e Corps s'acheminent vers les Quatre-Bras, où le Général Wellington, qui commande l'armée anglaise, a réuni une dizaine de mille hommes. La matinée se passe à des reconnaissances. Le 2e Corps fait partie de l'aile gauche, dont le Maréchal Ney a reçu le commandement. A 11 heures, un Aide de camp de l'Empereur apporte l'ordre d'enlever les Quatre-Bras et de marcher sur Bruxelles. Ney perd un temps précieux. Enfin, vers 2 heures, les Tirailleurs de la Division Bachelu ouvrent le feu contre ceux du Général Perponcher postés en avant de Lairable et du bois de Bossu. La 5e Division,formée en colonne par Brigades, suit la grande route. Une Division ennemie a pris position sur le plateau de la Thite et fait occuper, en avant d'elle, la ferme de Piraumont. Le Général Bachelu se porte contre ce dernier point et s'en empare après un court combat. Mais pour atteindre le plateau, la 5e Division est obligée de franchir deux ravins bordés de haies vives. Un certain désordre se produit. Les Anglais font avancer leur première ligne, dont l'attaque a pour elle l'avantage de la cohésion. Le 61e, et avec lui tous les Régiments de la Division Bachelu, font des prodiges de valeur mais sont obligés de reculer. Il s'établit alors autour de la ferme de Piraumont, plusieurs fois reprise et reperdue, un combat acharné qui dure jusqu'à 5 heures. Une charge du 2e Lanciers finit par arrêter l'ennemi.
La marche en avant, malgré quelques avantages remportés par les 6e et 9e Divisions, n'en constitue pas moins une lourde tâche pour le Maréchal Ney, qui ne dispose plus d'un seul Bataillon de réserve et a devant lui 25.000 hommes. Du champ de bataille de Ligny, où il combat depuis le matin contre l'armée prussienne, Napoléon le presse vivement de s'emparer des Quatre-Bras. Le Maréchal Ney lance alors le Général Kellermann et 700 Cuirassiers contre les lignes anglaises. Quelqués cavaliers parviennent jusqu'aux Quatre-Bras et surprennent Wellington lui-même, qui n'a que le temps de s'enfuir de toute la vitesse de son cheval; mais ils sont ramenés sur l'infanterie.
La Division Bachelu, tout entière en ligne, arrive jusqu'à la chaussée de Namur; à gauche, la 6e Division prend pied dans le bois de Bossu ; au centre, 1a 9e Division dépasse la ferme de Gimioncourt ; l'enlèvement des Quatre-Bras est redevenu possible. Le Maréchal Ney est sur le point de l'ordonner, lorsque surviennent deux Divisions anglaises, dont celle des Gardes. Trente-cinq mille combattants sont aux prises contre douze ou treize mille Français. En vain Ney se multiplie et redevient le héros d'Elchingen et de la Moskowa; la supériorité du nombre l'emporte. Les trois Divisions reculent jusqu'à Frasnes où elles dressent leurs bivouacs sur les emplacements du matin.
La journée des Quatre-Bras coûte aux alliés près de 6.000 hommes ; les Français, pour leur part, en perdent 4.000. Le 61e compte environ 250 hommes mis hors de combat. Le Commandant Duhoux, le Capitaine Morgand et le Lieutenant Riot sont tués. Le Commandant Peltret, les Capitaines Dubois, Beaurepaire et Destor, l'Adjudant-major Legrand, les Lieutenants Fourteau, Chave, Jehan et Mouchon, les Sous-lieutenants Morel et Leroy sont blessés.
Après la perte de la bataille de Ligny, les alliés se retirent, le 17 au matin, sur la position du Mont-Saint-Jean. L'armée française les poursuit et le 2e Corps, placé à l'arrière-garde, s'arrête près de Genappe. La chaleur a été suffocante et la marche s'est effectuée avec de la boue jusqu'à mi-jambe. Vers 9 heures du soir, la pluie commence à tomber d'une façon torrentielle. Les hommes, déjà très fatigués, ne prennent aucun repos.
- Bataille de Waterloo.
Le 18, à 5 heures du matin, le soleil perce les nuages. Napoléon dicte son ordre de bataille et forme onze colonnes, dont quatre doivent agir en première ligne, quatre en seconde et trois en réserve. La Division Bachelu est en première ligne.
A 10 heures et demie, toutes les troupes sont en position. La ligne ennemie, forte de 80.000 hommes, s'étend depuis le hameau de Smohain jusqu'à Hougoumont et Braine-l'Alleud, par Papelotte et la Haie-Sainte. Wellington a profité du répit qui lui a été laissé pour faire distribuer des vivres à ses soldats. L'armée française, dont les convois sont restés à Charleroi, n'a reçu aucune nourriture. La pluie, qui a détrempé le sol, retarde l'attaque. A 11 heures, pas un coup de feu n'a été tiré. Vers midi, Wellington fait envoyer quelques boulets sur le 2e Corps placé en face du château de Hougoumont, entre la route de Nivelles et la ferme de la Belle- Alliance. L'action ne tarde pas à devenir générale. Tous les efforts de la 5e Division se portent contre le château qui est enlevé et reperdu plusieurs fois.
"Le combat de ce côté, dit un témoin oculaire, se transforme jusqu'au soir en une canonnade et une fusillade, espèce de sanglant jeu de barre, qui n'offre d'autres résultats que de prouver le courage personnel des champions des deux camps".
Le Général Reille, ne pouvant se maintenir à Hougoumont, y fait mettre le feu. L'opiniâtreté du 2e Corps force les Anglais à rester sur la défensive. Le 6le, engagé dès la première heure, lutte avec un acharnement obstiné.
Mais la partie la plus importante du drame de Waterloo, celle qui décide du sort de la France et de l'Empereur, se déroule vers la droite, entre Smohain et Planchenois. On sait ce qu'il advint lorsque Bulow d'abord, Blücher ensuite, conduisirent à Wellington près de 60.000 hommes de renfort, et comment une victoire assurée se transforma en un désastre, malgré tout l'héroïsme de la cavalerie et le sacrifice absolu de la Garde impériale.
Lorsque la bataille se termine, près de 20.000 hommes ont été atteints de part et d'autre. Le 61e, dont l'effectif au 15 juin était de 41 Officiers et 817 hommes, n'a plus sous les armes, le lendemain de Waterloo, que 9 Officiers et 202 hommes. Le Capitaine Vasseur, le Lieutenant Léger, le Sous-lieutenant Taillandier, le Sergent-major Dumas, les Sergents Aubert et Mathieu, les Caporaux Charmel, Gaté, Griset et Piquereau sont tués. Les Capitaines Maserpoix, Sureau, Chausseprat, Destor et Jugenelle, l'Adjudant-major Fourgeau, le Chirurgien Levert, les Lieutenants Chave, Segond et Tondut, les Sous-lieutenants Mathieu, Cambassèdes et Pollet sont blessés.
- Défense de Paris.
Les débris de l'armée sont ramenés sous les murs de Paris, où le 2e Corps arrive le 29 juin, par Villers-Cotterets et Dammartin. Déjà, l'Empire a fait place à un gouvernement provisoire dominé par un personnage dont le zèle ne s'emploie qu'à préparer le retour de Louis XVIII.
Le Maréchal Davout, Ministre de la guerre, s'apprête néanmoins à défendre Paris. Devançant les Anglais de deux jours de marche, Blücher passe la Seine près de Saint-Germain et entre à Versailles avec 45.000 hommes.
Le 2 juillet, ce Général se met en mouvement pour s'emparer des ponts de Sèvres et de Saint-Cloud. La 5e Division, qui a la garde de ce dernier point, lutte contre l'ennemi pendant deux heures. Une suspension d'armes arrête le combat.
/ Fin du Régiment
Le 5, l'armée française est exilée derrière la Loire. Le 61e, qui ne demandait encore qu'à se sacrifier pour défendre l'intégrité du sol national, se rend à Selles-sur-Cher, où il est licencié, le 10 septembre, en exécution d'une Ordonnance prise le 23 mars, par Louis XVIII, pour empêcher la reconstitution des forces impériales.
Une Ordonnance du 16 juillet ayant créé 86 Légions départementales, les Dépôts du 61e et du 5e Léger servent à former la 48e Légion, dite de la Manche.
Il ne reste plus désormais, du 61e des grandes guerres, du Régiment d'Héliopolis, d'Austerlitz, d'Auerstaedt, d'Eylau, de Wagram et de la Moskowa, que le souvenir de sa gloire et l'exemple de ses vertus.
/ Uniformes
Le 13 septembre 1798, Bonaparte fixe la couleur des poufs des différents corps d'infanterie : pour la 61e de Ligne, noir et blanc (La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 3. p. 34).
Le 16 septembre 1798 (30 fructidor), Bonaparte prescrit à Berthier : "Les trompettes des troupes à cheval et les tambours des demi-brigades seront habillés avec des dolmans bleu de ciel. L'agent en chef de l'habillement en fera la fourniture sur les 400 dolmans qu'il a en magasin.
Il y aura, sur les nouveaux casques adoptés pour l'infanterie, deux grenades pour distinguer les grenadiers" (La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 3. p. 34).
L'ordre du jour du 28 Thermidor (15 août 1799 - voir plus haut dans l'historique) prescrit encore les détails suivants, arrêtés par l'Ordonnateur en chef Daure : "Habillement des troupes pour l'an VIII.
L'habit veste pour l’infanterie sera en drap doublé en toile de coton bleue.
Le gilet de basin croisé, le pantalon en toile forte écrue pour l'infanterie de ligne, et gros bleu pour l'infanterie légère, l’artillerie et le génie ...
Il sera accordé à chaque soldat une paire de souliers tous les trois mois.
Il sera accordé une casquette à chaque homme d'infanterie.
Il ne sera fourni des magasins de la République que le drap, les corps se pourvoiront des autres objets" (La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 5, p. 565).
L'ordre du jour du 9 Vendémiaire an 8 (1er octobre 1799) fixe les couleurs que doivent désormais porter les Demi-brigades de l'Armée d'Orient (La Jonquière C. de : « L’expédition d’Egypte, 1798-1801 », t. 5, p. 562):
Habit | Retroussis et parements | Passepoil | Collet | Passepoil | |
61e de Ligne | Cramoisi | vert clair | blanc | bleu | blanc |
/ Drapeaux
La 61e, nous l'avons vu, s'est rendue en Italie en 1797. Elle est donc concernée par l'attribution de nouveaux drapeaux décidée par Bonaparte (voir l'étude du 4e de Ligne). Une lettre de Berthier adressée sur ordre du Général en chef Bonaparte, depuis Milan au citoyen Boudet, et datée du 22 Floréal an V (11 mai 1797) indique que 8 Demi-brigades doivent se voir attribuer de nouveaux drapeaux; parmi elles figure la 61e. Berthier indique également que sur ces drapeaux, il faudra écrire "PASSAGE DU TAGLIAMENTO"; "... Le citoyen Boudet est tenu d'apporter tous les drapeaux le 1er prairial à l'état-major général, casa Serbelloni, pour y être reçus par un commissaire des guerres, qui en dressera l'acte afin que le payement en soit fait", précise la lettre (Correspondance de Napoléon, t. 3, lettre 1789).