La Garde d'Honneur de Maestricht en 1810

 

Avertissement et remerciements : Cet article nous a été adressé par notre ami et collègue du Bivouac, Didier Davin, que nous remercions tout particulièrement pour sa disponibilité et son érudition.

 

I/ Historique

Maestricht ou Maastricht, aujourd'hui ville hollandaise, était liée au territoire belge jusqu'en 1839. Sous l'Empire, elle faisait partie du département de la Meuse Inférieure. C'est un département bilingue : malgré les efforts de l'administration française, la majorité des couches populaires parle et ne comprend que le Flamand. Le préfet en 1810 est Jean Baptiste Roggieri, un gênois, qui s'occupe bien de son département.

La ville avait eu l'occasion en Juillet 1803 de recevoir le Premier Consul et Joséphine. Elle avait organisée pour son escorte une Garde d'Honneur qui s'était dissoute pendant l'année 1804. Le 27 Avril 1810, l'Empereur quitte Compiègne pour un voyage dans les départements de Belgique et de Hollande. Des préparatifs sont faits depuis le début du mois dans toute la région ...

Dès le 9, dans l'incertitude du passage de l'Empereur, le maire, Chrétien Coenegracht, écrit au préfet : "J ai convoqué ce jour les personnes qui ont souscrit pour faire partie de la Garde d'Honneur afin de procéder à son organisation ... Ayant consulté individuellement une partie des membres de l'ancienne garde à pied et à cheval pour savoir s'ils seraient d'avis de se réorganiser, ils m'ont répondu négativement, alléguant que la majeure partie de leurs camarades se trouvent absents ou morts, et qu'ils sont donc en trop petit nombre pour former une garde. Je n'ai donc d'autres moyens que d'en organiser une nouvelle. La liste des individus qui la composent vous a été adressée. J'ai l'honneur ...
Coenegracht
".

La liste des heureux élus est la suivante :


Garde à pied :
De Valensard de Billehé, commandant ; Charles Lustin, capitaine ; Emmanuel Coenegracht, lieutenant ; Cesar Cornu, sous lieutenant ; Catoire, sous lieutenant ; Bewelmans, sergent major ; et 42 gardes à pied

Garde à cheval : Jacques Colpin, commandant ; Pierre De Coopman, capitaine ; De Moffarts, lieutenant ; Leopold de Valensard, sous lieutenant ; Nypels et Stoppendaels, maréchaux des logis ; Stengnarts et Ubaghs, brigadiers.

L'organisation ainsi que la tenue seront approuvés à posteriori par le Ministre de l'Intérieur en Octobre 1810, confirmé par une remise à niveau du règlement en Décembre. L'article 3 du règlement de la nouvelle garde stipule que les membres composant la Garde d'Honneur actuelle prêteront entre les mains du maire serment de fidélité à S.M. l'Empereur. Les articles 4 à 29 donnent les obligations des gardes tant pendant le séjour éventuel de l'Empereur qu'après son départ où en fait on prévoit sa dissolution puisque l'article 23 précise : "la Garde d'Honneur n'existe que pour le service de l'Empereur lors de son passage ou séjour dans le département".

En fait, durant ce voyage de 1810, Napoléon ne passa pas par Maestricht et le plus près qu'il en approcha fut Bruxelles ou Bois le Duc soit de 70 à 100 kms ! Donc nos braves gardes se firent faire un bel uniforme qui ne servit pas à grand chose ... Ils survécurent jusqu'en 1811 où à la fin de l'année l'Empereur revint dans la région, mais ne passa pas de nouveau dans leur bonne ville. Puis ils disparurent ...

 

II/ Tenues des Gardes d'Honneur de Maestricht

 

Garde d'Honneur de Maestricht
Garde à cheval et à pied. Noter le dessin de cette garde qui diffère de la représentation classique de Fort et Boisselier si l'on suit le règlement de formation

Décrites par l'article 30 du règlement constitutif de la Garde.

a/ GARDE A PIED

Grande tenue sous les armes

Habit de chasseurs à pied "à la Bavaroise" en drap blanc avec parements, collet et revers en drap rose. Le drap blanc avec passepoil rose (donc aux poches et retroussis NDLR), le drap rose avec passepoil blanc. Les boutons bombés en argent et les franges (des épaulettes) en poil de chèvre rose légèrement recouverts par une loque de franges argent. Gilet et pantalon de drap blanc uni. Bottes à la hussarde, bordure et glands argent. Cravate noire recouvrant une blanche dont on aperçoit la ligne supérieure. Gants jaunes Chapeau retapé "à la Française" avec des torsades et des floches argent et un plumet blanc. Petit sabre de chasseur dit "briquet" avec poignée noire et tout le reste en acier. Petite giberne noire avec une plaque figurant une Aigle et une bordure en argent. Le sabre et la giberne soutenus par un baudrier noir bordé avec un galon argent. Carabine ou fusil court.

Tenue de visite pour bals et assemblées

Même tenue excepté qu'au lieu du pantalon et bottes on aura la culotte courte avec de petites boucles argent, les bas de soie et les souliers avec des boucles argent faites sur le même modèle que les officiers de la Ligne. Que le plumet sera ôté du chapeau et qu'au lieu de porter le sabre et la bandoulière on aura l'épée à la Française avec le petit ceinturon en peau noire luisante.

Les officiers

Le commandant portera les épaulettes de colonel, le capitaine celle de capitaine, le lieutenant celles de lieutenant, les sous lieutenants celles de ce grade, le sergent major deux galons en chevrons brisés au dessus des parements, le sergent un seul de ces mêmes galons, les caporaux deux galons de soie rose. Les officiers porteront toujours l'épée au lieu du sabre en grande tenue. En grande tenue sous les armes avec le baudrier désigné et en tenue de visite avec le petit ceinturon. Ils seront aussi distingués sous les armes par le hausse col doré garni d'une Aigle en argent.

Il faut noter que l'iconographie "classique" Fort, Boisselier, Charles Brun, qui se sont inspirés les uns des autres, montre une tenue de la garde à pied à la coupe de l'infanterie légère française... ce qui ne semble pas être le cas et doit plutôt être rapprochée des tenues des gardes d'Honneur d'origine hollandaise.

 

b/ GARDE A CHEVAL

Grande tenue

Garde d'Honneur de Maestricht
Version de la coupe de l'habit de la Garde à pied de Maestricht d'après  Charles Brun et Boisselier. On remarque la coupe de l'infanterie légère française pour les revers, la présence de deux contre épaulettes argentées et le collet et les parements qui sont blancs passepoilés de rose. Ce qui diffère du règlement prévu pour l'uniforme.

Habit de chasseur à cheval de drap vert dragon avec collet revers et parements jonquille. Tout le drap vert avec pasepoil jonquille, tout le drap jonquille avec passepoil vert. Boutons bombés argent. Pantalon et veste de casimir blanc tout uni. La veste portant un seul rang de boutons. Bottes noires de chasseurs avec galon et glands argent. Eperons fixés aux bottes par des vis en acier. Cravate noire portée au dessus d'une cravate blanche. Chapeau noir retapé à la Française, orné d'un galon de soie noire représentant des Aigles impériales, garni de floches et de torsades en forme de ganse pour retenir la cocarde, le tout en argent. et surmonté d'un haut plumet blanc en plumes d'autruches. Sur l'épaule droite une aiguillette attachée à une contre épaulette, sur l'épaule gauche une contre épaulette pareille, le tout en argent. Gants jaunes en peau de daim à la crispin. Giberne d'officier en maroquin rouge garnie en argent et portant un N surmonté de la couronne impériale. Sabre de chasseurs à cheval, poignée en bois d'ébène, garde et pommeau en acier. Fourreau d'une seule pièce en fer poli. Dragonne ronde en argent et boucles. Ceinturon en maroquin vert, anneaux argent.

Chevaux et harnachement

Chevaux de la taille de ceux des chasseurs, queue coupée, selle demi royale avec poitrail et croupière. Etriers platinés sur le modèle à déterminer par le conseil d' administration. Surfaix de laine jonquille. Schabraque verte bordée d'une frange jonquille. Bride et bridon tenant ensemble en cuir noir, mors à branches droites unies et rondes en argent ainsi que les boucles et gourmettes. Licol en cuir noir doublé en jonquille. Pistolets dans les fontes du modèle à déterminer. Manteau en drap vert à manches et à grand collet.